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Le Fil d'Ariane d'un voyageur naturaliste

Encore quelques scolies de Nicolas Gomez Davila

26 Octobre 2013 , Rédigé par Béthune

2002. Le cynisme n'est pas une marque de subtilité, mais d'impuissance.

2017.L'équivoque de la Révolution française n'est pas l'exception à la règle.

Les révolutionnaires sont seulement les troupes légères qui dégagent le terrain, la bourgeoisie est l'infanterie de ligne qui l'occupe.

On appelle bourgeoisie toute classe révolutionnaire possédante.

1883. Devant les esprits vraiment grands nous ne nous sentons jamais humiliés, mais mystérieusement en accord.

1878. L'homme croit que quelque chose  peut durer, parce que, enfant, il voit tout durer.

1862. Un pays industrialisé est un pays où les rivières ne noient pas, mais empoisonnent, celui qui s'y baigne.

1827. Dans quelque société qu'il naisse, l'écrivain est toujours un étranger.

La propriété des instruments de production est la seule garantie de la liberté. Disons, même si c’est excessif : qui n’a pas de terre, n’a pas de liberté (traduction: Philippe Billé)

(107) Prêche-t-on les vérités dans lesquelles on croit, ou les vérités dans lesquelles on croit que l’on doit croire ?

(221) Le premier pas de la sagesse consiste à admettre, avec bonne humeur, que nos idées peuvent très bien n’intéresser personne.

(230) En ce siècle de foules transhumantes qui profanent tout lieu illustre, le seul hommage qu’un pèlerin respectueux puisse rendre à un sanctuaire vénérable est de ne pas le visiter.

(237) Dénigrer le progrès est trop facile. J’aspire à la chaire d’arriération méthodique.

(258) La résistance est inutile quand tout se conjure dans le monde pour détruire ce que nous admirons.

 Il nous reste toujours, cependant, une âme intègre pour contempler, pour juger, et pour mépriser.

(352) Une société aristocratique est celle où le désir de la perfection personnelle est l’âme des institutions sociales.

(408) Le journalisme consiste à écrire exclusivement pour les autres.

(432) La civilisation moderne : cette invention d’ingénieur blanc pour roi nègre.

(444) La messe peut être célébrée dans des palais, ou des chaumières, mais pas dans des quartiers résidentiels.

(p 65) La propriété des instruments de production est la seule garantie de la liberté. Disons, même si c’est excessif : qui n’a pas de terre, n’a pas de liberté.

(p 101) L’adolescence obtient sans avoir désiré, la jeunesse désire et obtient, la vieillesse commence par désirer sans obtenir et finit par désirer désirer.

(p 169-170) Ceux qui croient trouver des arguments contre le catholicisme, et contre la religion en général, dans tous ces récits de vies de saints, évidemment malades et proches de certaines formes lugubres de démence, méconnaissent que rien ne justifie mieux la religion que ce singulier pouvoir de faire fructifier ces existences misérables, au lieu de les livrer à la triste stérilité d’un traitement scientifique dans une clinique aseptisée.

(p 172) Percevoir, contempler et connaître sont les degrés du plaisir.

(p 185-186) La campagne française comble de joie l’économiste impénitent. Richesse de la terre, incomparable fécondité du sol, et surtout admirable et minutieuse culture du terrain, qui ne laisse pas se perdre le plus petit recoin.

Ce spectacle m’accable. Malgré la beauté et la diversité dont la nature a doté ces paysages, l’homme a su leur imposer une monotonie énervante.

Les rectangles implacables des différentes cultures se succèdent docilement et s’étendent jusqu’à l’horizon. Les arbres alignés se cachent les uns derrière les autres, à égale distance, et font défiler leurs rangs au passage de l’automobile, avec un geste précis et mécanique de gymnaste. Si, tout à coup, nous trouvons un petit bois, il n’est pas difficile de deviner quel rôle pratique remplit cet apparent morceau de liberté oublié sur un sol soumis. Et les vignobles, les vignobles aux mystiques sarments, qui ont fini par envahir le paysage de leur sévérité industrielle.

Bientôt nous éprouvons le désir d’une pièce de terre stérile et libre, d’une terre préservée du labeur humain.

Cette campagne française fait pitié. Terre soumise et servile.

Nature que l’homme a asservie. Sol dompté, incapable de se révolter, plus semblable à une usine alimentaire qu’à la campagne rustique et sacrée que l’homme habitait jadis.

La richesse de la Pomone mythique se transforme en un immense entrepôt de grains et de légumes. La campagne de France n’est pas un jardin, c’est un potager.

Devant ce gigantesque déploiement d’aliments, je ne rêve que de landes stériles, de pitons glacés, de la tiède forêt de mes rivières andines.

Je ne sais d’où me vient cette répulsion. Sobriété innée, goût d’une certaine austérité janséniste, ou modération inévitable d’un ressortissant de pays pauvre? Ah! vieux terrains marécageux de Port-Royal, friches de Castille, ah! mes âpres collines.

Ce que la campagne française met en évidence, c’est la victoire définitive du paysan.

La tâche entreprise le 4 août 1789 et qu’illuminent de leurs feux symboliques les archives féodales incendiées, est enfin accomplie.

Terre entièrement cultivée, dans ses vallées et sur ses coteaux, sur les rives de ses fleuves, dans les étroits jardins de ses maisons comme dans ses vastes plaines, terre sur laquelle veille un immense amour paysan pour le sol qui le nourrit et le fait vivre. Ces lourdes moissons, ces feuillages lustrés, ces pampres qui préparent les grossesses de l’automne, sont l’effort implacable de millions de vies avides et laborieuses. Des vies qui, du matin au soir, travaillent sans relâche le sol qui enfin leur appartient et que plus rien ne protège de leur convoitise séculaire.

Un immense peuple d’insectes s’est répandu sur le sol de la France. Sa sueur le féconde et l’enrichit.

Ces champs exhalent comme la vapeur de la sueur paysanne.

Sur ces terres lumineuses, sur ces horizons doux et purs, sur la lente et molle courbe de ses collines, sur ce paysage d’intelligence et de grâce, de discrétion et de lucidité, règne une démocratie paysanne.

(209) L’écrivain réactionnaire doit se résigner à une célébrité discrète, puisqu’il ne peut plaire aux imbéciles.

(115) Le barbare ne fait que détruire ; le touriste profane.

(99) Dépeupler et reboiser – première mesure civilisatrice.

(72) Depuis l’invention de la radio, même l’analphabétisme ne protège plus le peuple contre l’invasion des idéaux bourgeois.

(71) Il y a de fausses théologies, mais il n’y a pas de fausses religions.

     La piété païenne d’un Xénophon, par exemple, brûle un encens acceptable au vrai Dieu.

(50) La révolution est une possibilité historique permanente.

     La révolution n’a pas de causes, mais des occasions dont elle profite.

(46) Ce que l’on a appelé droite, en ce siècle, n’a été qu’un cynisme opposé à l’hypocrisie de la gauche.

(183) La magnificence de la cathédrale gothique cherche à honorer Dieu, la pompe du baroque jésuitique à attirer le public.

(103) Le catholicisme, même pour le non-catholique, est plus qu’une secte chrétienne.

     Le catholicisme est la civilisation du christianisme.

(31) Ce que dit le réactionnaire n’intéresse jamais personne.

     Ni quand il le dit, car cela semble absurde ; ni au bout de quelques années, car cela semble évident.

(25) Dans les époques aristocratiques, ce qui a de la valeur n’a pas de prix ; dans les époques démocratiques, ce qui n’a pas de prix n’a pas de valeur.

(12) Mourir en exil est la garantie que l’on n’a pas été tout à fait médiocre.

 

(19) La lecture est une drogue inégalable car elle nous permet d’échapper, plus qu’à la médiocrité de nos vies, à la médiocrité de nos âmes.

 

Nicolás Gómez Dávila, Extraits de Notas (1954) et de Escolios I (1977) et des tomes 2  et 1 de Nuevos Escolios (1986). Traduction : Philippe Billé.

Source : http://davila.canalblog.com/

 

 

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