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Le Fil d'Ariane d'un voyageur naturaliste

Pour Henry de Lesquen, Président de Radio-Courtoisie, les Amérindiens n'existent pas

26 Novembre 2013 , Rédigé par Béthune

Moins le Blanc est intelligent, plus le Noir lui paraît bête.

André Gide, cité par Francis Hallé (La Condition tropicale, Actes Sud, 2010, p. 354)

 

Le mardi 26 novembre 2013, entre 8H et 9H du matin, dans son Libre Journal consacré au cosmopolitisme, Henry de Lesquen, Président de Radio-Courtoisie, évoque les Etats-Unis d'Amérique et leur actuel président métis, Barack Obama. Il déplore que l'image des Etats-Unis soit devenue celle d'un pays de Noirs (ou d'immigrés du Sud) et de gens colorés aux dépens de la véritable Amérique blanche. Il se réfère en passant à Samuel Huntington, qu'il qualifie de "vrai patriote"...

A ma stupéfaction, Henry de Lesquen ne dit pas un mot des Amérindiens, ces centaines de peuples aborigènes, aux admirables cultures, qui étaient là bien avant l'arrivée des Blancs et dont la démographie, depuis le génocide de la Conquête, est redevenue bien supérieure à celle des Blancs (voir notamment Jean Raspail: Les Peaux Rouges d'aujourd'hui, 1975) !

Est-ce par mépris ou par ignorance, ou les deux ?

Lui qui accuse la politique d'immigration massive en France, songe-t-il un instant que les Français de souche d'aujourd'hui sont les Aborigènes d'Amérique d'autrefois, à la notable différence que les immigrés africains, asiatiques ou autres qui sont les hôtes du territoire français ne sont pas venus les armes à la main, dans le but de spolier et d'exterminer les Français comme ont fait les Blancs en Amérique du nord ou en Tasmanie, mais qu'ils ont été chassés de leurs patries par le colonialisme moderne pour être exploités par les mêmes, sur le sol de nos patries, comme main d'oeuvre à bon marché?

Déjà, dans une émission précédente, le 29 juin, "Faut-il avoir peur de la Chine", Henry de Lesquen, qui aime bien humilier les autres, et qui devrait plutôt s'appeler Henry de Mesquin, déclarait que Marco Polo avait largement surestimé la Chine, et tournait en dérision la Cité Interdite "qui, avec son architecture en bois, ne soutient pas la comparaison avec une ville italienne de troisième ordre." http://pocombelles.over-blog.com/henry-de-mesquen-et-la-chine

Quel aveuglement, quelle suffisance! Ce sont celles de la pire France qui soit: la France chauvine, colonialiste et, ajoutons-le, sioniste.

http://www.egaliteetreconciliation.fr/L-ananas-ou-le-fruit-defendu-d-Henry-de-Lesquen-21534.html

Henry de Lesquen ferait mieux de méditer ces réflexions de Jacques Rousseau, le grand botaniste et anthropologue québécois (1905-1970), directeur du Jardin botanique de Montréal, directeur du Musée de l'Homme à Ottawa et directeur du Centre d'Etudes Nordiques à l'Université Laval, explorateur et spécialiste du Labrador et de l'Ungava:

"Dans des régions inconnues, personne ne peut remplacer le guide indien, même si ce dernier n'a jamais parcouru le territoire, même si au point de départ se posent des problèmes linguistiques." (...) "Advienne une difficulté d'importance, alors que le Blanc se sent vaincu, l'Indien ne se rend pas et lutte contre le destin." (A travers l'Ungava, Mémoires du Jardin botanique de Montréal, 1949).

http://www.provancher.qc.ca/upload/file/ROUSSEAU.pdf

Pour se laver l'esprit de cette lesquinerie, rien de mieux que de lire ou relire le récit du séjour de Darwin à Tahiti (Voyages d'un naturaliste autour du monde*) en 1835, où il fait l'éloge du charme, de l'intelligence, de l'humour et de  la peau brune des Tahitiens et de la beauté de l'île, et où il écrit (chapitre XVIII, 20 octobre 1835) : "Je me sentais de plus en plus convaincu que l'homme, ou tout du moins l'homme sauvage, dont la raison n'était encore qu'en partie développée, doit être l'enfant des tropiques."*

Ou bien le délicieux "Supplément au Voyage de Cook" de Jean Giraudoux qui se moque du puritanisme et du chauvinisme des Anglais (pas de Darwin, bien sûr) débarquant à Tahiti.

Ou encore "La condition tropicale", le magistral ouvrage de Francis Hallé (Actes Sud, 2010) dont on trouvera une longue analyse détaillée sur le site "En suivant l'Equateur": http://pascalemathex.com/articles/la-condition-tropicale-de-francis-halle/.

Ou encore "Avant que nature meure" de Jean Dorst (nouvelle édition par Robert Barbault, Delachaux et Niestlé/Muséum national d'histoire naturelle, 2012) pour comprendre que c'est l'homme blanc qui est, de loin, le principal destructeur de la nature comme des peuples aborigènes.

Ou encore le célèbre "Des Cannibales" de Montaigne (Essais, Livre premier, chap. XXXI).

Ou encore le chanteur Daniel Balavoine interrogé sur le racisme: http://www.youtube.com/watch?v=Dd4qNh4STgU

 

Pierre-Olivier Combelles

Naturaliste, écrivain

Président de l'institut Andin d'Etudes Ethnobiologiques

Ancien membre du Service Etudes du Musée de la Marine et du Laboratoire d'Ethnobiologie-Biogéographie du Muséum national d'Histoire naturelle (Paris)

Ancien Professeur de Lettres classiques au Collège  Youri Gararine de Trappes (78)

Prix Guy de Beauchêne 1992 de la Société des Explorateurs Français.

Médaille de la Ville de Versailles (1994)

 

* Première édition française, Paris, Reinwald, 1875). Edition anglaise: (NARRATIVE OF THE SURVEYING VOYAGES OF HIS MAJESTY'S SHIPS ADVENTURE AND BEAGLE, BETWEEN THE YEARS 1826 AND 1836, DESCRIBING THEIR EXAMINATION OF THE SOUTHERN SHORES OF SOUTH AMERICA, AND THE BEAGLE'S CIRCUMNAVIGATION OF THE GLOBE.) sur le magnifique site consacré à Darwin: http://darwin-online.org.uk/content/frameset?itemID=F1925&viewtype=text&pageseq=1 :

A propos de Darwin, signalons que Radio-Courtoisie a consacré de nombreuses émissions favorables au créationnisme (anti-darwinien), en particulier le créationnisme catholique représenté par le C.E.P. (Centre d'Etudes et de Prospective sur la Science) et dont le Grand Prêtre est M. Dominique Tassot. Le créationnisme est un fondamentalisme (analogue au fondamentalisme protestant-évangélique et au fondamentalisme islamique) qui truque la science, comme l'avait fait Lyssenko, pour servir d'obscurs buts politiques: http://www.france-courtoise.info/theme/creation.php

 

Paul Gauguin, Fatata Te Miti, (1892). National Gallery of Art

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