Esclavagisme : Comment la République française a agi pour maintenir les droits des anciens maîtres esclavagistes (Gilles Devers)
10 Mai 2015 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles
Le gouvernement provisoire n'a pas été imprévoyant. Il s'est rendu compte de tout, il a agi avec un louable empressement, mais sans légèreté, et c'est pour sauver les maîtres qu'il a émancipé les esclaves.
Victor Schoelcher
"Voici, en six chapitres, l’histoire de l’abolition de l’esclavage en France, histoire qui est celle d’une truanderie d’Etat.
Pour sauver ses gigantesques projets de colonisation en Afrique et en Inde - voir Jules Ferry et ses discours sur l'inégalité des races - et pour éviter des révoltes pouvant conduire à l’indépendance, la République a aboli l’esclavage en 1848/1849, par le plus pervers des choix : elle a indemnisé les maîtres esclavagistes, privés de leurs biens qu’étaient les esclaves, en confortant leur pouvoir économique avec un plan d’indemnisation sur 20 ans et consacrant leur possession des terres qu’ils avaient acquises par l'épuration ethnique des indiens Kalinas, les habitants historiques des Antilles. Pendant ce temps, les nouveaux libres, accédant enfin au statut d’être humain, se trouvaient dépouillés de toute indemnisation et de toute ressource. Le jour de leur accès à la citoyenneté républicaine, ils étaient condamnés au plus précaire des salariats.
Les gentils abolitionnistes avaient réussi : le maintien de l’ordre établi, la défense des biens usurpés par les esclavagistes criminels,... et une bonne image de braves humanistes !... Une authentique crapulerie républicaine, et une impunité protégée par l’Etat au fil du temps : à ce jour, les descendants des maîtres esclavagistes restent possesseurs des grands domaines aux Antilles, et les descendants d’esclaves doivent payer pour cultiver les terres sur lesquelles travaillaient déjà leurs aïeuls esclaves, il y a 400 ans… L’organisation par loi de l’impunité, et les miasmes des beaux discours…
Le problème est qu’avec le mécanisme de la Question prioritaire de constitutionnalité (QPC), il devient possible de faire tomber les textes de 1848 et 1849. Et là, le château des mensonges et de la crapulerie va s'écrouler. A prévoir des remises en état et une addition salée.
Chapitre 1 – Un peu d’histoire ancienne
Chapitre 2 – Le cadre juridique de l’esclavage en Guadeloupe
Chapitre 3 – La première abolition, en 1794
Chapitre 4 – Le rétablissement de l’esclavage 1802
Chapitre 5 – L’abolition 1848/1849
Chapitre 6 – Un état du droit universel
Chapitre 7 – La politique de déni de l’Etat français
Chapitre 8 – La responsabilité de l’Etat français"
I – L’esclavage, absent de la tradition française
L’esclavage, la forme la plus sommaire et la plus brutale de l’exploitation de l’homme par l’homme, présente dans le monde dès l’antiquité, ne relève d’aucune tradition juridique française. Les racines historiques de la France se sont construites contre l’esclavage, qui est devenu marginal à partir des V°-VI° siècles, lors de l’écroulement de l’empire romain.
Au Moyen-Age, est apparu le servage qui, aussi redoutable soit-il, était juridiquement distinct de l’esclavage dès lors qu’il était prévu par un statut, que la personnalité juridique du serf était reconnue, de même qu’un minium de droits liés à son travail.
A l’inverse du serf, l’esclave est en droit une chose. Le droit romain n’avait certes jamais retiré la part humaine, car vivante, de l’esclave, mais l’esclave était juridiquement un bien, comme le résume Jean Gaudemet : « L’esclave est un être humain. Le droit ne peut l’ignorer, alors même qu’il lui refuse l’octroi de prérogatives juridiques. Être humain, l’esclave est doué d’une vie affective. Il a une activité économique, des possibilités de travail, manuel ou intellectuel, que son maître sait utiliser et que le droit doit prendre en compte » (J. Gaudemet, « Membrum, persona, status », Studia et Documenta Historiae et Iuris, 1995, n° LXI, p. 2, G. Bigot, « Esclavage », Dictionnaire de culture juridique, dir. D. Alland et S. Rialas, PUF, 2003).
II – La réapparition de l’esclavage en lien avec la colonisation des Caraïbes, au XVI°
L’esclavage moderne, celui qui était lié à la colonisation pour l’exploitation des terres conquises, essentiellement dans les Caraïbes, a réellement pris un nouvel essor en Occident, au XV° avec le Portugal, suivi de l’Espagne, l’Angleterre – puis la Grande-Bretagne, les Provinces-Unies, puis la Hollande. Le consensus était général, l’Eglise donnant son accord par une bulle du Pape Nicolas V, le 8 janvier 1454.
Les abus étaient terrifiants, amenant le Pape Paul III, dès le 2 juin 1537, par sa lettre Veritas ipsa, a posé l’interdit de l’esclavage. Une consigne bien mal appliquée, mais qui établit nettement la conscience du fait illicite :
« Nous décidons et déclarons, par les présentes lettres, en vertu de Notre Autorité apostolique, que lesdits Indiens et tous les autres peuples qui parviendraient dans l'avenir à la connaissance des chrétiens, même s'ils vivent hors de la foi ou sont originaires d'autres contrées, peuvent librement et licitement user, posséder et jouir de la liberté et de la propriété de leurs biens, et ne doivent pas être réduits en esclavage. Toute mesure prise en contradiction avec ces principes est abrogée et invalidée ».
La région des Caraïbes s’est trouvée au premier plan de cette traite négrière transatlantique (L. Peytraud, L’esclavage aux Antilles avant 1789, 1897).
III – La présence ancestrale des Kalinas dans les îles Caraïbes
La zone caraïbe connaissait une civilisation très ancienne, celle des Amérindiens (Arawaks ou Taïnos et Caraïbes ou Kalinago), de plusieurs millénaires avant JC. Cette population, stable depuis les V° et VI° siècles, menait une vie régie par la coutume et la propriété collective.
Lorsqu’en 1492, Christophe Colomb a abordé les îles, il les a fait connaitre comme « des découvertes », destinées à être conquises, ouvrant la voie au processus de destruction des civilisations existantes. Dès son second voyage en 1493, il a entrepris la colonisation de l’île dénommée Hispanola, qui est actuellement le territoire de la République d’Haïti et de Saint-Domingue."
(...)
Gilles Devers
Suite de l'article sur Alterinfo.net: http://www.alterinfo.net/Esclavagisme-Comment-la-Republique-francaise-a-agi-pour-maintenir-les-droits-des-anciens-maitres-esclavagistes_a113461.html
Indiens Mapuches exhibés au Jardin d'Acclimatation de Paris, photo de Pierre Petit, 1883. Source: http://colocolo.canalblog.com/archives/2013/06/12/27394300.html
Sur le même sujet:
Zoos humains et exhibitions coloniales - 150 ans d'inventions de l'Autre, par Pascal BLANCHARD, Nicolas BANCEL, Gilles BOËTSCH, Éric DEROO, Sandrine LEMAIRE. Editions La Découverte, 2011:
Ces zoos humains de la République coloniale : http://www.monde-diplomatique.fr/2000/08/BANCEL/1944
Sculptures sous-marines par Jason deCaires Taylor
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