Les fleurs sauvages du Caucase (Tolstoï, Hadji Mourad)
6 Novembre 2017 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles
Léon Tolstoï
(Толстой Лев Николаевич) (1828 – 1910)
HADJI MOURAD (Хаджи-Мурат)
Écrit entre 1896 et 1904 ; publié en 1912 (posthume)
Traduction de J. Wladimir Bienstock, Paris, Nelson, 1912.
LA BIBLIOTHÈQUE RUSSE ET SLAVE — LITTÉRATURE RUSSE —
Pour rentrer à la maison, j’avais pris par les champs. On était en plein milieu de l’été. Déjà l’herbe était fauchée et l’on se préparait à couper le seigle. À cette époque de l’année, il y a une merveilleuse variété de fleurs : celles des trèfles, rouges ou blanches, parfumées et duvetées ; les blanches marguerites au cœur jaune vif ; la campanule jaune, à l’odeur agréable et épicée ; les pois, violets et blancs, avec leur senteur de miel et leur haute tige grimpante ; les scabieuses jaunes, rouges, roses ; le plantain lilas, au duvet légèrement rosé, au subtil et agréable parfum ; les bleuets, bleu vif au soleil lorsqu’ils viennent d’éclore, bleu rougeâtre le soir quand ils sont à leur déclin ; et les fleurs fragiles, éphémères, à l’odeur d’amande, de la cuscute. J’avais cueilli un gros bouquet de ces différentes fleurs et rentrais chez moi, quand je remarquai dans le fossé une magnifique bardane violette, en pleine floraison, une de ces bardanes qu’on appelle chez nous « tatare », que le faucheur coupe avec soin, et qu’on rejette du foin, si par hasard elle s’y trouve, pour ne pas se piquer les mains. Il me vint l’idée d’arracher cette bardane et de la mettre au milieu de mon bouquet. Je descendis dans le fossé et, après avoir chassé un bourdon velu qui s’était accroché au milieu d’une fleur et s’y était endormi doucement, mollement, je me mis à arracher la plante. Mais c’était très difficile. Non seulement la tige piquait de tous côtés, même à travers le mouchoir dont j’avais entouré ma main, mais elle était si résistante que je luttai contre elle presque cinq minutes, la déchirant fibre par fibre. Quand enfin je l’eus détachée, la tige était en lambeaux et la fleur ne paraissait déjà plus ni aussi fraîche ni aussi belle. Outre cela, à cause de sa rudesse, de sa raideur, elle n’allait pas du tout avec les fleurs délicates de mon bouquet.
J’eus du regret d’avoir détruit en vain la fleur qui était si belle sur sa tige et la jetai. « Quelle énergie ! Quelle vitalité ! me dis-je, me rappelant les efforts déployés pour l’arracher. Comme elle se défendait, et comme elle a chèrement vendu sa vie ! » Pour rentrer chez moi, je devais traverser un champ de terre grasse fraîchement labourée, après avoir gravi la pente douce de la route poussiéreuse. Le champ était très vaste, de sorte que de chaque côté ainsi que devant, en montant, on ne voyait que la terre noire retournée avec une grande régularité. Le labourage était bon, et sur toute l’étendue du champ on ne voyait pas la moindre plante ni herbe, tout était noir. « Quel destructeur que l’homme ! Combien d’êtres vivants, sans compter les plantes, détruit-il pour assurer son existence ! » pensai-je, en cherchant malgré moi quelque chose de vivant dans ce champ noir et mort. Devant moi, à droite de la route, une touffe quelconque se dressait. Je m’en approchai et reconnus cette même « tatare » que j’avais arrachée en vain et dont j’avais jeté la fleur. La touffe était formée de trois tiges ; l’une d’elles avait été en partie arrachée et ce qui restait ressemblait à un bras coupé ; chacune des deux autres portait une fleur. Ces fleurs, primitivement rouges, étaient maintenant noirâtres. Une des tiges était brisée, et la partie supérieure, portant la fleur maculée, pendait vers le sol. L’autre, bien que couverte de boue noire, tenait encore debout. On voyait qu’elle avait été abattue par une roue, puis s’était redressée. Il semblait qu’on lui avait tranché une partie du corps, qu’on lui avait labouré les entrailles, arraché un bras, un œil et cependant elle restait debout, ne cédant pas à l’homme qui avait détruit autour d’elle toutes les plantes, ses sœurs. « Quelle énergie ! pensai-je. L’homme est vainqueur, il a détruit des millions d’herbes, mais celle-ci n’a pas cédé ! »
Et je me rappelai une vieille histoire du Caucase, dont je fus témoin pour une partie, et que je tiens, pour l’autre, de témoins oculaires ; quant au reste, c’est mon imagination qui l’a créé. Cette histoire telle qu’elle s’est formée par l’union de mes souvenirs et de mon imagination, la voici.
https://bibliotheque-russe-et-slave.com/Livres/Tolstoi%20-%20Hadji%20Mourad.pdf
et sur le même blog:
http://pocombelles.over-blog.com/2015/12/chants-cosaques.html
La veille du centième anniversaire de la Révolution russe, le corps de Lénine, exposé dans mausolée éponyme sur la place Rouge, a une nouvelle fois suscité la polémique.
«C’est bien sûr au président russe Vladimir Poutine de décider de l’enterrement de Vladimir Lénine, mais personnellement je suis persuadé qu’il faut arrêter de mater le cadavre de Lénine», a déclaré le 2 novembre avec sa spontanéité qui lui est propre le président de la république tchétchène Ramzan Kadyrov sur sa chaîne Telegram. Pour lui, mettre en terre le chef de la révolution russe serait «raisonnable et humain».
«Il n’est pas bien qu’au cœur de la Russie, sur la place Rouge, il y ait un cercueil avec un homme mort», a estimé Ramzan Kadyrov. Il a cependant souligné qu'une telle politique ne devait pas être sélective et qu'il faudrait aussi enterrer la tête de Hadji Murad, bras droit de l’imam Chamil qui s'était battu contre l’empire russe pendant les guerres du Caucase, au XIX siècle. Le crâne de Hadji Murad se trouve actuellement au musée d’anthropologie et d’ethnographie de Saint-Pétersbourg.
«Je suis sûre que l’enterrement aura lieu»
Si la commission qui étudie la problématique de l'enterrement de la tête de Hadji Murad existe depuis 2015 – sans avoir, pour l'heure pris de décision –, le problème de Lénine a surgit au lendemain de l'effondrement de l’Union soviétique, dont il était le fondateur.
Source: https://francais.rt.com/international/45246-ramzan-kadyrov-faveur-funerailles-lenine
A propos du Musée Tolstoï à Starogladovskaya, dans la région de Shelkovskyen (Tchétchénie), créé grâce à M. Ramzan Kadyrov:
http://www.nytimes.com/2009/12/29/arts/29iht-tolstoy.html
Le Musée Tolstoï dépend du Musée national de la République de Tchéchénie:
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