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Le Fil d'Ariane d'un voyageur naturaliste

Virus et radioactivité: prenons le temps de comparer ! par Philippe Looze (Fukushima-Blog, 7 avril 2020)

9 Avril 2020 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles

Virus et radioactivité: prenons le temps de comparer ! par Philippe Looze (Fukushima-Blog, 7 avril 2020)

En mars 2011, des milliers de Japonais se sont retrouvés confinés dans un rayon entre 20 et 30 km autour de la centrale nucléaire accidentée de Fukushima Daiichi. Aujourd’hui, en tant que confinés, on peut se rendre compte de ce qu’ont vécu ces gens pris au piège de l’évènement que personne n’avait prévu. Et, puisqu’aujourd’hui on a le temps et l’expérience, profitons-en pour réfléchir à ce que signifie être confiné en cas de catastrophe nucléaire.

Il y a des parallèles intéressants entre ces deux maux invisibles et insidieux, les virus et les radionucléides qui se répandent dans l’environnement. Des analogies, des différences et des interactions.

Demi-vie (1)

La "demi-vie" du virus du Covid 19 est de quelques jours au plus, comparé à ce qu’on trouve à Tchernobyl et Fukushima, le Césium 137 a une demi-vie de l’ordre de 30 ans, le Plutonium de l’ordre de 24 000 ans, et il faut encore beaucoup plus longtemps pour en être totalement débarrassé. Certains déchets radioactifs durent des centaines de milliers d’années.
En cas de pollution radioactive, se laver les mains sera utile mais ne suffira pas, surtout si l’air est pollué par l’iode radioactif, entre autres poisons ! Et la contamination se fera aussi par ingestion.

La détection de la radioactivité, du moins quand la contamination est forte, est facile à détecter avec des instruments bien au point et souvent portatifs, alors qu’à chaque nouvelle mutation d’un virus, il nous faut refaire les tests et les vaccins, ce dont nous rendons compte en ce moment. C’est bien le seul point ou la gestion de l’épidémie marque un petit point sur l’atome…

Prévention

Il n'y a pas de vaccin contre la radioactivité, ni les hommes, ni les autres êtres vivants ne développent d’immunité pour se protéger ni de ces rayons, ni de ces particules radioactives ! Les pilules d'iodes ingérées plusieurs heures avant le passage du nuage radioactif peuvent limiter les dégâts dus à l'iode dans les premiers jours, mais il faudrait que tout le monde les ait reçues avant la catastrophe, et il y a bien d'autres dangers que l'iode 131 !
 

Confinés ou évacués ? 

En cas de catastrophe nucléaire, certains seront évacués d’urgence, d'autres seront confinés « temporairement » dans de mauvaises conditions, puisque toute l’alimentation dans une zone étendue sera contaminée et que les transports seront limités. Il faut savoir que le traité Euratom a prévu de relever « temporairement » les normes des doses « acceptables » dans la nourriture et l’eau à des niveaux qu’on peut qualifier de criminel, souvent plus élevé que ceux des deux autres catastrophes les plus connues (voir encart ci-dessous). Perdre son logement et absorber du poison sans pouvoir se protéger réellement pour une durée inconnue, ce n’est pas comparable à ce que nous vivons actuellement dans une pandémie.

 

L’après

A Fukushima les évacués ne peuvent (et beaucoup ne veulent) toujours pas rentrer chez eux après 9 ans. Le but du gouvernement japonais, en organisant les Jeux Olympiques, était d’effacer la tache sur l’honneur du Japon créée par l’accident de Fukushima, de forcer les évacués à rentrer chez eux dans des zones encore dangereuses, là où les normes admises (20 mSv/an) correspondent à celles des travailleurs des centrales nucléaires, à proposer de la nourriture soi-disant propre provenant de la région de Fukushima pour faire croire que tout cela c’est terminé, et relancer le commerce. Les faibles doses de radioactivité n’entrainent pas un risque nul, mais un risque plus faible (2). C’est un peu comme la cigarette, si vous fumez une cigarette tous les deux jours, le risque est plus faible que si vous fumiez un paquet par jour. Mais il est quand-même plus élevé que si vous ne fumez pas du tout.Autour de Tchernobyl les problèmes de santé continuent aussi plus de trente ans après.
L’échelle de temps entre les deux catastrophes n’est pas comparable, même si nous devons nous attendre à des vagues en retour du virus dans les années à venir.

Quand la catastrophe est là, c’est déjà trop tard. Il faut se mobiliser avant ; il faut se mobiliser pour faire évoluer les normes de sûreté nucléaire, les normes de radioprotection. Mais pour l’instant, il faut souligner qu’a contrario, la France a retenu des normes moins protectrices : c’est une référence de 20 millisieverts qui a été retenue et non pas 1 millisievert pour la gestion post accidentelle. C’est-à-dire que, sur un territoire donné, on laissera vivre des gens avec des doses vingt fois plus fortes que ce qu’on acceptait jusqu’ici. Et récemment l’Europe a validé des normes sur la contamination des aliments en cas d’accident nucléaire qui sont extrêmement élevées du point de vue de la CRIIRAD.

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