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Le Fil d'Ariane d'un voyageur naturaliste

Nec pluribus impar

14 Décembre 2019 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles

Frontispice de la Maison royale de Saint-Louis fondée par Louis XIV à Saint-Cyr, près de Versailles, pour l'éducation des jeunes filles de la noblesse pauvre, dont les pères s'étaient sacrifiés au service de l'Etat et à la guerre (devenue la Maison d'Education de la Légion d'honneur fondée par Napoléon sur cet exemple et ces traditions).

Frontispice de la Maison royale de Saint-Louis fondée par Louis XIV à Saint-Cyr, près de Versailles, pour l'éducation des jeunes filles de la noblesse pauvre, dont les pères s'étaient sacrifiés au service de l'Etat et à la guerre (devenue la Maison d'Education de la Légion d'honneur fondée par Napoléon sur cet exemple et ces traditions).

Louis XIV figure le soleil levant dans le Ballet royal de la Nuit (1653)

Louis XIV figure le soleil levant dans le Ballet royal de la Nuit (1653)

« Le carrousel, qui m’a fourni le sujet de ces réflexions, n’avait été projeté d’abord que comme un léger amusement; mais on s’échauffa peu à peu, et il devint un spectacle assez grand et magnifique, soit par le nombre des exercices, soit par la nouveauté des habits ou par la variété des devises.

Ce fut là que je commençai à prendre celle que j’ai toujours gardée depuis, et que vous voyez en tant de lieux. Je crus que, sans s’arrêter à quelque chose de particulier et de moindre, elle devait représenter en quelque sorte les devoirs d’un prince, et m’exciter éternellement moi-même à les remplir. On choisit pour corps le soleil, qui, dans les règles de cet art, est le plus noble de tous, et qui, par la qualité d’unique, par l’éclat qui l’environne, par la lumière qu’il communique aux autres astres qui lui composent comme une espèce de cour, par le partage égal et juste qu’il fait de cette même lumière à tous les divers climats du monde, par le bien qu’il fait en tous lieux, produisant sans cesse de tous côtés la vie, la joie et l’action, par son mouvement sans relâche, où il paraît néanmoins toujours tranquille, par cette course constante et invariable, dont il ne s’écarte et ne se détourne jamais, est assurément la plus vive et la plus belle image d’un grand monarque.

Ceux qui me voyaient gouverner avec assez de facilité et sans être embarrassé de rien, dans ce nombre de soins que la royauté exige, me persuadèrent d’ajouter le globe de la terre, et pour âme nec pluribus impar*: par où ils entendaient ce qui flattait agréablement l’ambition d’un jeune roi, que, suffisant seul à tant de choses, je suffirais sans doute encore à gouverner plusieurs empires, comme le soleil à éclairer d’autres mondes, s’ils étaient également exposés à ses rayons. Je sais qu’on a trouvé quelque obscurité dans ces paroles, et je ne doute pas que ce même corps n’en eût pu fournir de plus heureuses. Il y en a même qui m’ont été présentées depuis; mais celle-là étant déjà employée dans mes bâtiments et en une infinité d’autres choses, je n’ai pas jugé à propos de la changer. »

 

Louis XIV, Mémoires pour l’année 1662. Tallandier, Paris, 1978.

 

 

* « Capable de gouverner plusieurs royaumes. »

Nec pluribus impar
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On meurt seulement quand on nous oublie

12 Décembre 2019 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles

Louis XIV représentant le soleil levant dans le Ballet royal de la Nuit, de Lully (1653)

Louis XIV représentant le soleil levant dans le Ballet royal de la Nuit, de Lully (1653)

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Uluru, par Olivier Delacrétaz (La Nation, Ligue vaudoise)

4 Décembre 2019 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles

Source de l'image: https://fr.wikipedia.org/wiki/Uluru#/media/Fichier:Uluru_Panorama.jpg

Source de l'image: https://fr.wikipedia.org/wiki/Uluru#/media/Fichier:Uluru_Panorama.jpg

par Olivier Delacrétaz
Editorial
La Nation n° 213622 novembre 2019

Il y a quelques jours, Uluru, la montagne sacrée des Anangu, un peuple aborigène du centre de l’Australie, a été interdite d’accès à tous les visiteurs, en particulier aux quatre cent mille touristes annuels qui venaient y faire des selfies et répandre leurs papiers gras. Cette réhabilitation d’un tabou millénaire a commencé en 1979, quand la propriété de la montagne, d’un périmètre d’environ 9 km et d’une altitude de 348 m, a passé de l’Etat australien aux Anangu. Les actes de propriété leur furent remis six ans plus tard. Uluru se nommait officiellement Ayers Rock, du patronyme d’un ministre australien de la fin du XIXe siècle. En 1993, le nom officiel devint Ayers Rock-Uluru. En 2002, ce fut Uluru-Ayers Rock. Aujourd’hui, c’est Uluru. Au cours de cette période de transfert, les infrastructures touristiques, en particulier celles qui avaient été construites au pied de la montagne, ont été éloignées ou fermées.

Jusqu’il y a peu, des panneaux officiels, placés au pied de la montagne, disaient en six langues: Nous, les Anangu, les propriétaires traditionnels, avons cela à vous dire : la montée n’est pas interdite mais nous vous demandons de respecter notre loi et notre culture en ne grimpant pas dessus. Nous sommes responsables de la sécurité de ceux qui visitent notre terre. La montée peut être dangereuse. Trop de gens sont morts en train d’essayer de grimper Uluru. Vu son inefficacité, le panneau est désormais remplacé par une interdiction pure et simple. Et la main courante qui facilitait l’ascension a été détruite.

On éprouve un sentiment de connivence avec ce peuple qui ne voit plus des étrangers profaner ses lieux sacrés et qui, du même coup, redevient plus complètement lui-même. Et curieusement, c’est au moment même où il manifeste explicitement son identité culturelle et religieuse qu’on a l’impression de s’en rapprocher. Peut-être est-ce parce qu’on ne perçoit authentiquement la «ressemblance humaine» qu’après avoir constaté et accepté pleinement l’étrangéité d’un peuple tiers, le secret de ses rites, le caractère quasiment intransmissible de sa religion et sa conception originale de la genèse du monde. A défaut, on en reste à l’universalité abstraite des droits de l’homme, se condamnant du même coup à ne construire des ponts qu’entre soi.

Des autorités politiques ont donc décrété un interdit total sur un territoire touristique et, par conséquent, rémunérateur pour des motifs qui ne sont ni sanitaires, ni militaires, mais religieux. C’est une faille inattendue dans le rationalisme sans profondeur que l’Occident tardif continue d’imposer au monde entier.

L’émission de RTSreligion du 16 juillet dernier commentait brièvement cette interdiction touristique. Sur un ton badin et légèrement supérieur, «Guillaume» informait «Valérie»: … vider les toilettes chimiques de son camping-car sur un territoire sacré aborigène, c’est pas l’idéal, niveau karma, et là, attention ! les Anangu aiment à rappeler que cette montagne est vivante et pas très commode. Elle n’hésite pas à se venger lorsqu’elle se sent profanée. Cette désinvolture n’est pas de très bon goût. Elle manifeste une incapacité de saisir la signification vitale de cet interdit pour les aborigènes et, d’une façon générale, l’importance centrale de la religion pour ceux qui sont encore capables de croire.

On trouvera mieux son miel en suivant les aventures du policier fédéral aborigène Jay Swan, dans Goldstone (2016) et la série Mystery Road (2018). Ces films restituent d’une façon saisissante l’omniprésence du sacré chez les aborigènes, leurs relations inextricables avec leurs ancêtres défunts et les souvenirs obsédants de leur histoire, qui a commencé 40 000 ans avant qu’on ne les «découvre».

La résistance de ce monolithe à l’érosion le rend à peu près aussi inusable que l’éternité. Ses couleurs, changeant au gré de la course du soleil, ses cavités secrètes, les peintures rupestres à ses pieds, le silence du lieu rendu à lui-même, son mystère, rétabli par l’interdit, les cris et bruissements diurnes et nocturnes des mammifères, oiseaux, reptiles, arbres et arbustes, ce lieu sacré tout entier renvoie naturellement à un au-delà de la nature.

Et l’on se prend à penser que la contemplation du sanctuaire d’Uluru, tout païen qu’il soit, dispose mieux à recevoir l’annonce du «dieu inconnu» que le théologisme sec et satisfait de nos émissions radio-télévisées.

 

Reproduit avec l'aimable autorisation de La Nation, Ligue vaudoise.

Source de cet article: https://www.ligue-vaudoise.ch/?nation_id=4316

Sur le même sujet et sur ce même blog, mais dans les Andes du Pérou:

http://pocombelles.over-blog.com/2014/05/le-sarasara-profane-parinacochas-est-livree-au-pillage-et-a-la-destruction.html

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Les Maîtres de l'antiquité étaient libres et voyants... (Lao Tseu, Tao Tö King)

2 Décembre 2019 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles

Cité par Julius Evola, Révolte contre le monde moderne, 1972.

Cité par Julius Evola, Révolte contre le monde moderne, 1972.

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La vertu des princes, par Louis XIV (Mémoires)

30 Novembre 2019 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles

Statue de Louis XIV dans l'Orangerie de Versailles. Photo: Pierre-Olivier Combelles.

Statue de Louis XIV dans l'Orangerie de Versailles. Photo: Pierre-Olivier Combelles.

"Les princes, en qui l'éclat de leur naissance et l'honnêteté de leur éducation ne produit d'ordinaire que des sentiments nobles et généreux, ne peuvent laisser tellement altérer ces bons principes qu'il n'en demeure toujours quelque impression dans leur esprit. Cette idée de vertu, quelque effacée qu'elle puisse être par la corruption du temps, donne pourtant aux plus mauvais une espèce de répugnance pour le vice. Leurs coeurs, formés de bonne heure aux lois de l'honneur, s'en font une si forte habitude qu'ils ont peine de la corrompre entièrement, et le désir de gloire qui les anime les fait passer en beaucoup de choses par-dessus le penchant de leurs intérêts."

Louis XIV, Mémoires (Tallandier, Paris, 1978, pp. 212-213).

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La modestie et l'humilité, par Louis XIV (Mémoires)

30 Novembre 2019 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles

Statue équestre de Louis XIV sous les traits du général romain Marcus Curtius par Le Bernin. Orangerie de Versailles. Photo: Pierre-Olivier Combelles.

Statue équestre de Louis XIV sous les traits du général romain Marcus Curtius par Le Bernin. Orangerie de Versailles. Photo: Pierre-Olivier Combelles.

"S'il y a une fierté légitime dans notre rang, il y a une modestie et une humilité qui ne sont pas moins louables. Ne pensez pas, mon fils, que ces vertus ne soient pas faites pour vous. Au contraire, elles nous appartiennent plus proprement qu'au reste des hommes. Car, après tout, ceux qui n'ont rien d'éminent ni par la fortune, ni par le mérite, quelque petite opinion qu'ils aient d'eux-mêmes, ne peuvent jamais être modestes ni humbles; et ces qualités supposent nécessairement en celui qui les possède et quelque élévation et quelque grandeur, dont ils pourraient tirer vanité... Mais, quand tout ce qui vous environne fera effort pour ne vous remplir que de vous-même, ne vous comparez point, mon fils, à des princes moindres que vous: pensez plutôt à ceux qu'on a le plus sujet d'admirer et d'estimer dans les siècles passés... Descendez avec quelque nécessité à la considération de vos propres faiblesses. Par là, mon fils, et en cela vous serez humble. Mais, quand il s'agira du rang que vous tenez dans le monde, les droits de votre couronne, du Roi enfin et non pas du particulier, prenez hardiment l'élévation de coeur et d'esprit dont vous serez capable. Ne trahissez point la gloire de vos prédécesseurs, ni l'intérêt de vos successeurs à venir, dont vous n'êtes que le dépositaire. Car alors votre humilité deviendrait une bassesse."

Louis XIV, Mémoires (Tallandier, Paris, 1978).

"On meurt seulement quand on nous oublie."

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