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Le Fil d'Ariane d'un voyageur naturaliste

André Bouny/Réseau Voltaire: L'Agent Orange continue à tuer au Viêt Nam

24 Juin 2010 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles

La guerre du Viêt Nam continue
L’Agent orange tue encore


par Silvia Cattori  (Réseau Voltaire)

 

Au cours des guerres au Viêt Nam et en Irak, les Etats-Unis ont privé les mouvements de résistance de cachettes naturelles en détruisant les jungles et les palmeraies. Ils ont également utilisé cette technique en Amérique latine pour détruire les cultures dans les zones où les habitants soutiennent des guérillas. Pour conduire cette guerre chimique et environnementale, ils ont utilisé des défoliants industriels, principalement l’Agent Orange, fabriqué par Monsanto.
Ce produit toxique continue à tuer au Viêt Nam, où il était utilisé il y a plus de quarante ans, en Irak où il était pulvérisé il y a six ans, et en Colombie où un ses dérivés sont toujours utilisé. André Bouny a consacré sa vie à étudier cette forme de guerre au Viêt Nam et ses conséquences actuelles. Il vient d’y consacrer un ouvrage détaillé et répond aux questions de Silvia Cattori.

 

Extraits:

 

"André Bouny : La situation actuelle au Viêt Nam est tout simplement catastrophique. Il y a quelques jours seulement, la Vice-présidente de l’Assemblée nationale du Viêt Nam annonça que 4 millions de personnes étaient actuellement contaminées.

Cela peut paraître énorme, pourtant ces chiffres sont, en pourcentage, bien en deçà à ceux des vétérans sud-coréens qui ont porté l’affaire en justice, par exemple… Or ils n’ont pourtant pas été exposés d’une façon comparable à celle de la population vietnamienne qui s’y trouve encore ! Anciens combattants et civils confondus sont atteints de maladies incurables et de cancers, dans un pays où l’accès aux soins est difficile, quand il y en a.

Puis il y a les nouveau-nés, ceux qui viennent au monde avec des déformations monstrueuses, des absences partielles ou totales de membres, et/ou des déficiences mentales. Il en est de même au Laos et au Cambodge, pays qui manquent cruellement de moyens pour faire un état des lieux épidémiologique, à l’instar du Viêt Nam. Aux USA, au Canada, en Australie, en Nouvelle-Zélande, en Corée du Sud, comme autour des bases militaires américaines au Philippines où était stocké le poison, vétérans et civils qui furent exposés à l’Agent Orange développent les mêmes maux.

Sur l’environnement, la forêt tropicale disparue ne se régénère pas, et on ne sait pas redémarrer la forêt tropicale quand les sols érodés ont perdu leurs nutriments, générés par la forêt elle-même, lui permettant de croître et d’exister : c’est une situation inextricable et désespérante. Au Viêt Nam, des zones entières sont proscrites aux cultures ou interdites d’accès : ce sont les hots spots. Ces points chauds sont souvent d’anciennes bases militaires états-uniennes étalées sur des surfaces considérables - de véritables villes - où on stockait l’Agent Orange avant de le transvaser dans les avions ou des engins terrestres, et qui étaient largement défoliées alentours pour des raisons évidentes de sécurité, tout comme leurs environs.

En ce qui concerne les USA, le Canada, la Corée du Sud, l’Australie et la Nouvelle-Zélande, le problème touche plus particulièrement les vétérans et, à des degrés divers, les lieux où ont été expérimentés les agents chimiques - ou parfois fabriqués, comme en Nouvelle Zélande - lors d’essais pour leur mise au point. Le combat des vétérans de ces pays, malades et ayant aussi une descendance pareillement atteinte est davantage connu car, comparativement au Viêt Nam, ces pays bénéficient de structures de soins. Mais tout de même, le combat de ces vétérans de pays dits développés fut long et féroce avant d’obtenir la reconnaissance de liens de cause à effet entre l’Agent Orange et leurs afflictions. Et ces combats continuent de nos jours. Pour la plupart des vétérans, la reconnaissance et les dédommagements se font toujours attendre."

 

"André Bouny : Dans la littérature générée par la guerre du Viêt Nam, il arrive que cette arme chimique soit brièvement mentionnée, faisant rarement l’objet d’une page entière. Aux États-Unis existent des publications consacrées à l’Agent Orange, essentiellement en référence aux vétérans nationaux. En 2005, l’Association d’Amitié Franco-Vietnamienne publia en langue française une petite anthologie de 13 auteurs spécialisés. Côté cinéma, s’il existe bien quelques documentaires - souvent d’initiative personnelle - aucun long métrage n’a encore été consacré à ce thème. Le film le plus long sur le sujet -programmé sur une chaîne de télévision française - dure 75 minutes et est consacré aux procédures vietnamiennes en terre états-unienne.

Il y a certainement des raisons objectives, mais aussi irrationnelles, à cela : absence de budget pour une œuvre qui ne projetterait pas l’image d’une Amérique bienfaisante, autocensure visant à préserver un honneur blessé, ou à ne pas affoler ou révolter l’opinion publique devant des images insoutenables d’enfants-monstres. Le crime de l’Agent Orange peut resurgir à l’occasion de l’urgente préoccupation à préserver l’environnement qui n’échappe pas à un effet de mode. D’autre part, l’utilisation des congénères chimiques de l’Agent Orange dans les pesticides utilisés par l’agriculture industrielle mobilise les gens autour d’une alimentation qui fait peur souvent à juste titre, liant ainsi les pesticides aux ressources alimentaires actuelles ; à l’opposé, l’Agent Orange fut utilisé au Viêt Nam, au Laos, et au Cambodge, pour détruire les ressources vivrières d’hier. Refermé, ce cercle relie de façon indissociable Le Monde selon Monsanto, de Marie-Monique Robin ; Solutions locales pour un désordre global, de Coline Serreau ; et Agent Orange – Apocalypse Viêt Nam : un signe des temps."

 

"D’autre part, la façon dont je parle de la guerre du Viêt Nam dans cet ouvrage n’est pas celle contée par les manuels d’histoire occidentaux : la perspective est celle des Vietnamiens. En effet, de nombreux éléments trop peu connus, oubliés par amnésie sélective, voire inconnus, jalonnent la toile de fond. Je veux parler de la fausse attaque subie par les navires US dans le golfe du Tonkin qui permit de déclencher la guerre contre le Viêt Nam du Nord communiste et de tromper le Congrès états-unien, ou de la trame des guerres secrètes menées au Laos et au Cambodge dans la plus parfaite illégalité nationale et internationale, ou encore de l’inimaginable tonnage de bombes déversées lors de cette deuxième guerre d’Indochine, du nombre impensable de morts et de blessés, ou de l’embargo qui accrut les dommages de cette longue guerre d’Indépendance sur la population civile, la première victime d’un des derniers conflits postcoloniaux… Ce sont quelques exemples."

 

http://www.voltairenet.org/article165995.html

 

Reportage vidéo sur internet:

 

Agent Orange - Vietnam
http://www.youtube.com/watch?v=GJxb7CY13uc

 

Hadès, la mécanique orange (documentaire 2012):

http://www.youtube.com/watch?v=2MLbuGE9BJ4

 

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