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Rouge et Blanc, ou le Fil d'Ariane d'un voyageur naturaliste

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Le Persan, langue diplomatique reliant deux grands pays: l'Iran et la France (IRNA)

22 Décembre 2020 , Rédigé par Le Rouge et le Blanc Publié dans #Art, #France, #Iran, #Lettres, #Philosophie, #Poésie, #Religion, #Histoire

"La gloire de l'Iran a toujours été sa culture."

Richard Nelson Frye, Greater Iran, xi.

Le Simorgh. Détail de la mosaïque de la madrasa Nadir Divanbeg au Liab-i-Khaouz, à Boukhara.

Le Simorgh. Détail de la mosaïque de la madrasa Nadir Divanbeg au Liab-i-Khaouz, à Boukhara.

Le Persan, langue diplomatique reliant deux grands pays: l'Iran et la France (IRNA)

Selon le rapport du mardi 22 décembre de l'IRNA, le Centre Franco-Iranien en partenariat avec le Centre Universitaire d’Etudes et de Recherches Iraniennes d’Alsace et l'Institut Culturel Negarestan-e Andicheh vient d'organiser le webinaire international "La langue persane, instrument du dialogue interculturel" en présence des experts iraniens et français et un nombre de passionnés des deux langues et des deux cultures.

Lors de son discours inaugural, Seyyed Alireza Khalili, président du Centre franco-iranien, tout en remerciant les participants et les conférenciers, a brossé un bref tableau sur les activités du centre et ses activités passées.

Le programme se poursuit avec une introduction à la langue de Ferdowsi (grand poète classique et épique iranien), ce grand patrimoine littéraire et culturel iranien.

Intervenant, Seyyed Vahid Yaghoubi, chercheur dans le domaine de la culture et de la littérature françaises et secrétaire scientifique de la réunion s’attarde à cette occasion sur l'importance de la langue et de la littérature persanes en tant que l’un des outils du dialogue interculturel.

Le persan en tant que langue diplomatique joue un rôle de premier plan dans les relations Irano-françaises

Le professeur Francis Richard, iranologue, éminent spécialiste des manuscrits français et ancien directeur du département d'art islamique du musée du Louvre à Paris, en réponse à une question sur les caractéristiques de la langue persane et la connaissance de la France avec cette langue se focalise sur l’histoire et les antécédents du persan en France.

Pour Francis Richard qui a été conservateur, de 1974 à 2003, au département des Manuscrits de la Bibliothèque nationale de France, le persan en tant que langue diplomatique joue également un rôle de premier plan dans les relations entre les deux pays.

Présent au rendez-vous, l'éminent professeur Bayk Baghban, professeur émérite à l'Université de Strasbourg en France et directeur du Centre universitaire alsacien d'études et de recherches iraniennes toujours en France, a souligné l'importance de découvrir les réalités de l’Iran avant de s’attarder sur la place de l’Iran et ses échanges avec l’Europe sur divers plans culturel, artistique, littéraire, religieux, scientifique et … et cela dans diverses époques et périodes.

Autre invité de marque, Farideh Alavi, Professeur de langue et de la littérature françaises à l'Université de Téhéran, a pris la parole en s’intéressant à l'importance de la traduction dans le domaine du dialogue interculturel. Elle évoque les poèmes d’un autre géant de la poésie persane, le sage Saadi*, maître de la poésie et de la prose moralisante qui plaident dans ses vers pour la compassion et la solidarité.

Autre invité d’honneur, Mohammad Ziar, poète, traducteur, professeur de la langue et de la littérature françaises et chef de la Faculté des langues étrangères de l'Université Azad de Téhéran, se penche dans son discours sur l'importance toujours de la traduction et en particulier des œuvres du grand poète classique iranien Hafez.

La réunion en ligne se termine avec une séance de questions-réponses.

Le Centre Franco-Iranien est une association créée en France en août 2016, ayant pour objectif d’approfondir et développer les relations franco-iraniennes dans l’ensemble des domaines (institutionnel, économique et commercial, culturel et artistique, sportif, universitaire, …) et d’œuvrer pour le renforcement des liens d’amitié entre les deux peuples iranien et français.

Le Centre Franco-Iranien a déjà organisé plusieurs webinaires axés sur la langue et la culture persanes mais aussi le cinéma iranien.

Source: https://fr.irna.ir/news/84158347/Le-Persan-la-langue-diplomatique-reliant-l-Iran-et-la-France

* Ndlr: https://fr.wikipedia.org/wiki/Saadi

 

Le Centre Franco-Iranien: https://www.france-iran.org/new-index

Pour en savoir plus sur la Perse et l'Iran, écoutez le professeur de philosophie Pierre Dortiguier:

1: De la Perse à l'Iran

https://www.youtube.com/watch?v=DJnbc7CcDtM

2: L'Iran- 1e partie

https://www.youtube.com/watch?v=RUJTEuWYtwE

3: L'Iran, suite et fin

https://www.youtube.com/watch?v=CzoZfE0g1mQ

http://pocombelles.over-blog.com/2020/03/pierre-dortiguier-le-modele-iranien.html

etc.

"C'EST la science qui augmente le mérite de l'homme, et non le faste, les honneurs, les biens, les richesses. Il faut se consumer à sa poursuite comme la bougie, car sans la science on ne peut connaître Dieu. S'appliquer à acquérir de l'instruction, c'est être prédestiné au bonheur. Le sage ambitionne la science dont le bazar est toujours fréquenté. Le devoir de t'instruire est pour toi un précepte obligatoire que Dieu t'a imposé, quand même, pour l'exécuter, il faudrait parcourir le monde. La science t'est nécessaire, tant pour le spirituel, que pour le temporel. Par elle, tout ce qui te concerne sera dans le plus heureux arrangement. Si tu te laisses diriger par l'intelligence, ne t'appliques qu'à étudier. C'est une négligence impardonnable que de ne rien savoir. Va, et tiens-toi fortement attaché au pan du manteau de la science ; tu seras conduit au palais de la stabilité."

Saadi (Muslih-ud-Din Mushrif ibn Abdullah): Pend-Nameh ou le Livre des Conseils, chapitre VII: De l'excellence de la science.)

 

"PUISQUE Dieu a comblé tous les désirs que tu as formés, pourquoi ton unique but n'est-il pas de rendre la justice ? Elle est l'ornement de la royauté ; pourquoi par elle ne pas fixer les incertitudes de ton cœur ? Ah ! si elle s'unit à toi pour gouverner ton empire, elle donnera à ton trône une stabilité que les efforts réunis de tes ennemis ne pourront détruire. Nouchirva exerça la justice ; aujourd'hui encore les peuples répètent son nom avec enthousiasme. Rends le monde heureux par les bienfaits de l'équité ; répands toutes tes faveurs sur les gens qui pratiquent cette vertu. La tranquillité d'un royaume est le résultat de la justice; c'est elle qui comble les vœux des sujets. Il n'y a pas de meilleur architecte au monde que la justice, car rien n'est au-dessus d'elle. Que peut-il t'arriver de plus heureux que d'avoir le nom de roi juste? Si tu veux la décoration du bonheur, ferme la porte de la tyrannie sur les habitants du monde. Ne refuse point tes bonnes grâces à tes sujets ; remplis les vœux de ceux qui veulent la justice."

Saadi (Muslih-ud-Din Mushrif ibn Abdullah): Pend-Nameh ou le Livre des Conseils, chapitre IX: de la justice

 

"LA tyrannie dévaste le monde, comme le vent destructeur de l'automne ravage un jardin délicieux. N'opprime jamais tes sujets, si tu veux que le soleil de ton empire ne décline point. Celui qui allume dans le monde le feu de l'oppression, arrachera aux hommes des plaintes et des gémissements. Ne tyrannise point le pauvre, car l'enfer sera, sans doute, la demeure des tyrans.

Si l'opprimé élève un soupir de son cœur, l'ardeur de ce soupir brûlant enflammera l'eau et la terre. Ne fais point d'injustice à l'infortuné privé de toute ressource, et pense enfin au réduit étroit du sépulcre. N'outrage point l'opprimé et ne méprise pas la vapeur des soupirs qui s'élèvent vers le ciel. Ne sois ni méchant ni sévère, de peur que la punition de Dieu ne vienne fondre sur toi à l'improviste.

Saadi (Muslih-ud-Din Mushrif ibn Abdullah): Pend-Nameh ou le Livre des Conseils, chapitre X: Censure de la tyrannie)."

 

"SI tu te diriges d'après la droiture, les hommes seront tes amis. Le sage ne détourne point la tête de la pratique de cette vertu qui donne à la réputation je ne sais quoi de sublime. Si ton naturel est la droiture, puissent mille éloges être consacrés à ton heureux penchant ! Si tu aides la barque de ton esprit du souffle de la droiture, semblable au zéphyr du matin, tu atteindras le rivage loin des ténèbres de l'ignorance. Garde-toi de ne rien faire que selon la droiture ; car la main droite a la prééminence sur la gauche. Rien au monde n'est meilleur que la droiture ; il n'y a pas d'épines à son rosier. Comment celui qui n'agit pas conformément aux règles qu'elle prescrit sera-t-il acquitté au jour du jugement? Rien de plus préjudiciable que de manquer de droiture; c'est par-là que la réputation la mieux établie perd tout son prix."

Saadi (Muslih-ud-Din Mushrif ibn Abdullah): Pend-Nameh ou le Livre des Conseils, chapitre XVII: De la droiture).

 

Source: http://remacle.org/bloodwolf/arabe/sadi/conseils.htm

http://remacle.org/bloodwolf/arabe/sadi/table.htm

 

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La famille Lefèvre, de Versailles, a un incroyable talent !

21 Décembre 2020 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles Publié dans #Art, #France, #Musique, #religion

Le choeur de la famille Lefèvre, sur Youtube:

https://www.youtube.com/channel/UCfOrkvKdFsskfbfHFL4Df_w

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Le 18 juillet 1994 (journal de bord de Pierre-Olivier Combelles)

9 Décembre 2020 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles Publié dans #France, #Lettres, #Nature, #Poésie

18 juillet 1994.

 

 

Orages. Averses violentes toute l’après-midi. Jupiter toujours bombardé par les fragments de la comète Shoemaker-Levy. Exode au Rwanda. Victoire du Brésil contre l’Italie dans la coupe mondiale de football à Los Angeles. Tour de France. le président Mitterrand annonce qu’il ne se présentera pas aux prochaines élections en 1995.

 

Toujours les martinets dans le ciel: eux seront encore là l’année prochaine et dans cent ans encore. Dans mille ans, dix mille ans, il y aura encore des orages, des averses, les plantes et la terre se gorgeront d’eau et on n’entendra plus parler ni du Tour de France ni du football ni du Rwanda.

 

Instant précieux, magique, du cri du martinet dans le ciel de Paris.

 

Le bleu des lobélies le long des chemins de la forêt de Rambouillet, le rose vif des bruyères cendrées au soleil, le rose plus secret, rêveur, oriental, des Petites centaurées, le cri de la buse variable qui décrit des cercles devant la cohorte des nuages.

 

 

Journal de bord de Pierre-Olivier Combelles.

 

 

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Nicomède, de Corneille

6 Décembre 2020 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles Publié dans #France, #Lettres

Portrait gravé de Pierre Corneille (XVIIe s.). BNF.

Portrait gravé de Pierre Corneille (XVIIe s.). BNF.

Jean Dutourd. Préface au Théâtre de Pierre Corneille. Tome III. Éditions Gallimard- Le Livre de Poche (1966). Bibliothèque et photos de P.O. Combelles.

Jean Dutourd. Préface au Théâtre de Pierre Corneille. Tome III. Éditions Gallimard- Le Livre de Poche (1966). Bibliothèque et photos de P.O. Combelles.

Nicomède, de Corneille
Nicomède, de Corneille
Nicomède, de Corneille
Nicomède, de Corneille
Corneille: Nicomède, acte II, scène III. Théâtre de Pierre Corneille. Tome III. Éditions Gallimard- Le Livre de Poche (1966). Bibliothèque et photos de P.O. Combelles.

Corneille: Nicomède, acte II, scène III. Théâtre de Pierre Corneille. Tome III. Éditions Gallimard- Le Livre de Poche (1966). Bibliothèque et photos de P.O. Combelles.

"Le problème du héros est au centre de l'oeuvre de Corneille. Du Cid à Suréna, l'objet essentiel de son théâtre n'est-il pas de mettre à nu, à travers des personnages ou des situations historiques ou inspirées par l'histoire, les problèmes souvent difficiles des rapports du héros et du pouvoir, du peuple et des rois. Le héros cornélien étant l'expression magnifiée de ce peuple." (Pierre Barrat, metteur en scène de Nicomède):

Pierre Barrat, metteur en scène de Nicomède de Corneille à la Maison de la Culture de Caen (1964). Entretien avec Pierre Gavarry:

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1320161g/f1

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Pierre Corneille par Jean Dutourd (et Pierre Barrat, à propos de Nicomède)

6 Décembre 2020 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles Publié dans #France, #Lettres

Portrait gravé de Pierre Corneille (XVIIe s.). BNF.

Portrait gravé de Pierre Corneille (XVIIe s.). BNF.

"Corneille est un soldat, un maréchal des lettres couvert de blessures. Racine un politicien, un ministre couvert d'honneurs. C'est évidemment le vieux soldat, le Sertorius de la poésie, qui enflamme l'imagination des âmes vraiment sensibles."

Jean Dutourd.

Pierre Corneille par Jean Dutourd (et Pierre Barrat, à propos de Nicomède)
Pierre Corneille par Jean Dutourd (et Pierre Barrat, à propos de Nicomède)
Pierre Corneille par Jean Dutourd (et Pierre Barrat, à propos de Nicomède)
Pierre Corneille par Jean Dutourd (et Pierre Barrat, à propos de Nicomède)
Pierre Corneille par Jean Dutourd (et Pierre Barrat, à propos de Nicomède)

Jean Dutourd. Préface au Théâtre de Pierre Corneille. Tome III. Éditions Gallimard- Le Livre de Poche (1966). Bibliothèque et photos de P.O. Combelles.

"Le problème du héros est au centre de l'oeuvre de Corneille. Du Cid à Suréna, l'objet essentiel de son théâtre n'est-il pas de mettre à nu, à travers des personnages ou des situations historiques ou inspirées par l'histoire, les problèmes souvent difficiles des rapports du héros et du pouvoir, du peuple et des rois. Le héros cornélien étant l'expression magnifiée de ce peuple." (Pierre Barrat, metteur en scène de Nicomède):

Pierre Barrat, metteur en scène de Nicomède de Corneille à la Maison de la Culture de Caen (1964). Entretien avec Pierre Gavarry:

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1320161g/f1

Armes de Corneille (1637): "D'azur à la fasce d'or, chargée de trois têtes de lion de gueules, accompagnée de trois étoiles d'argent, posées deux en chef et une en pointe."

Armes de Corneille (1637): "D'azur à la fasce d'or, chargée de trois têtes de lion de gueules, accompagnée de trois étoiles d'argent, posées deux en chef et une en pointe."

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Ernst Jünger: Heidegger

4 Décembre 2020 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles Publié dans #Lettres, #France, #Europe

Martin Heidegger

Martin Heidegger

Témoignage de Ernst Jünger sur Heidegger

Pendant la seconde guerre mondiale, alors qu'il occupait un poste militaire à Paris, Ernst Jünger a rencontré de jeunes français qui se penchaient sur Heidegger. «J'y ai vu, dit-il, un bon signe de la force d'attraction d'un penseur. En dépit des granves bouleversements et conflits qui nous divisaient, subsistaient quand même des ponts spirituels, qui tenaient bon.»

Jünger devait prolonger sa réflexion sur la force d'attraction de Heidegger dans le cadre du texte qu'il écrivit à l'occasion du 80e anniversaire du philosophe.


«Comment se fait-il que le magnétisme de ce penseur puisse triompher d'aussi fortes résistances ? Au cours de ces rencontres, j'ai pris conscience que ce n'est pas la langue seulement qui pouvait avoir produit un tel effet. Peut-être vaudrait-il d'ailleurs mieux parler d'influence que d'effet - parler du passage à un niveau supérieur, fort mais anonyme. Ainsi, dans les écluses, les bateaux s'élèvent insensiblement selon l'étiage. On entre dans le champ de force d'un esprit et l'on s'en trouve modifié. Ici, il fallait présupposer encore autre chose que la persuasion au moyen des vocables, des idées, voire peut-être de l'originalité de la pensée même. Des éléments informulés devaient, en outre, entrer en jeu, une force d'attraction sous-jacente aux mots et aux pen­sées.
Cette supposition se trouva confirmée dès ma première rencontre personnelle avec le philo­sophe, là-haut dans la Forêt-Noire, à Todtnauberg. Dès l'abord, il y eut là quelque chose - non seulement de plus fort que le mot et la pensée, mais plus fort que la personne même. Simple comme un paysan, mais un paysan de conte qui peut à son gré se métamorphoser en e gardien du trésor, dans la profonde forêt de sapins », il avait aussi quelque chose d'un trappeur.
C'était celui qui sait, celui que le savoir ne se borne pas à enrichir, mais égaye comme Nietzsche l'exigeait de la science. Il était, dans sa richesse, inattaquable - voire insaisissable, et l'eût été même si les huissiers étaient venus saisir ses vête­ments - un regard madré, en coulisse, le révélait. Il aurait plu à un Aristophane.
Il ne m'a été donné de ressentir une impres­sion de force aussi directe qu'une seule fois en­core, bien que j'aie rencontré de nombreux con­temporains qui portaient, à bon droit ou non, un nom illustre. Dans ce second cas, je pense à Picasso. En ce qui concerne sa création aussi, je suis moins connaisseur qu'amateur. Dans les deux cas, j'ai senti la force spirituelle indéterminée qui produit l'objet particulier, que ce soit dans les pensées, les actes ou les images - bref, l'oeuvre.
Un mot simple comme l' être » (le Sein) a des profondeurs plus grandes qu'on ne saurait l'expri­mer, ni même le penser. Par un mot comme e sésame », l'un entend une poignée de graines oléagineuses, alors que l'autre, en le prononçant, ouvre d'un coup la porte d'une caverne aux tré­sors. Celui-là possède la clef. Il a dérobé au pivert le secret de faire s'ouvrir la balsamine.
La patrie de Martin Heidegger est l'Allemagne avec sa langue. Le pays familier de Heidegger est la forêt. Il y est chez lui, là où on n'est jamais passé et sur les chemins sylvestres. L'arbre est son frère.
Lorsque Heidegger approfondit le langage, se plonge clans l'enchevêtrement de ses racines, il fait plus que ce qui, selon l'expression de Nietzsche, est « exigé de nous autres philologues u.
L'exégèse de Heidegger est plus que philologique, plus qu'étymologique. Il saisit le mot là où, encore frais, celui-ci somnole dans le silence, en pleine force germinative, et il le sort de l'humus sylvestre.
Non pas que, dans le vocable, Heidegger découvre le sens nouveau et inconnu. Bien plutôt, à la manière d'un mineur, il projette sur lui une intention nouvelle. Le mot, tout proche de l'informulé, devient ductile, il commence à répondre, du fond de la matière silencieuse. Et pas seulement le mot, les pensées, les idées, les images aussi. La surprise sur le plan philologique n'est qu'une de nos nombreuses surprises. Elle confirme qu'il a saisi le mot au bon endroit, qu'il a eu la main heureuse.»

Ernst Jünger, Rivarol et autres essais, Grasset, Paris 1974 p.129-131

Source: http://penser.over-blog.org/article-23568695.html

Ernst Jünger (à gauche) et Carl Schmitt (droite) en barque sur le lac devant le château de Rambouillet (1941).

Ernst Jünger (à gauche) et Carl Schmitt (droite) en barque sur le lac devant le château de Rambouillet (1941).

SUR LE BLOG "LE ROUGE ET LE BLANC":

Entre forêts et sentiers, quelques pensées d'Ernst Jünger:

http://pocombelles.over-blog.com/2018/05/entre-forets-et-sentiers-quelques-pensees-d-ernst-junger.html

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Rivarol par Ernst Jünger: "Sans la bonté, l'élitisme ne vaut rien"

4 Décembre 2020 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles Publié dans #Lettres, #France, #Europe

Antoine de Rivarol (26 juin 1753, Bagnols-sur-Cèze - 11 avril 1801, Berlin)

Antoine de Rivarol (26 juin 1753, Bagnols-sur-Cèze - 11 avril 1801, Berlin)

Ernst Jünger (à gauche) et Carl Schmitt (droite) en barque sur le lac devant le château de Rambouillet (France), 1941.

Ernst Jünger (à gauche) et Carl Schmitt (droite) en barque sur le lac devant le château de Rambouillet (France), 1941.

Rivarol par Ernst Jünger: "Sans la bonté, l'élitisme ne vaut rien"

1989 (Cotta´s Bibliothek der Moderne), gebunden
127 Seiten, 
ISBN: 978-3-608-95695-5

 

 

 

Jedenfalls hat Rivarol nicht, wie so mancher andere, auf Kosten seines Namens gelebt, sondern er hat seinen Namen zu Ehren gebracht. Das ist weit seltener.

 

(En tout cas, Rivarol n'a pas vécu aux dépens de son nom, comme beaucoup d'autres, mais il a porté son nom pour l'honorer. C'est beaucoup plus rare.)

 

Ernst Jünger: Rivarol et autres essais.

 

 

2

Antoine Comte de Rivarol, wie er sich nannte, wurde am 26. Juni 1753 zu Bagnols im Languedoc als ältestes Kind von sechzehn Geschwistern geboren; die Familie lebte in beschränkten Verhältnissen. Der Vater, Jean-Baptiste Rivarol, übte verschiedene Berufe aus, darunter den eines Schulmeisters, eines Steuereinnehmers und eines Gastwirtes.

Schon Sainte-Beuve bezeichnete die Ursprunge Rivarols als »inextricable« und meinte damit wohl vor allem den Anspruch auf den Adels- und Grafentitel, der durch das Taufregister nicht gerechtfertigt wird. Es mag sein, daß Rivarol sich diese Qualitäten auf die gleiche Weise zuschrieb wie der Chevalier de Seingalt, der, als er nach der Berechtigung gefragt wurde, sich darauf berief, daß er Herr über die vierundzwanzig Buchstaben des Alphabetes sei. Es mag aber auch sein, daß die Familie, wie Rivarol behauptet, ihre Herkunft dem ausgewanderten Zweige eines alten Genueser Geschlechtes verdankt. Jedenfalls hat Rivarol nicht, wie so mancher andere, auf Kosten seines Namens gelebt, sondern er hat seinen Namen zu Ehren gebracht. Das ist weit seltener. Gegen Ende des 18. Jahrhunderts, in dem der Adel eine so große Rolle spielte, war man solchen Korrekturen der Visitenkarte gegenüber liberaler als bald danach und als selbst heute noch. Das gab der Gesellschaft jene Flüssigkeit und leichte Eleganz, die seitdem nie wieder erreicht werden sollten und die man einerseits als eines der Vorzeichen ihres Unterganges, andererseits als eine Lockerung der ständischen Fesseln betrachten kann, die nicht nur den persönlichen Umgang vergeistigte, sondern aus der auch die Kunst bedeutenden Nutzen zog.

In dieser Gesellschaft gab der Ruf eines feinen Kopfes oder einer glänzenden Begabung nicht nur unfehlbar Zutritt, sondern auch einen guten Platz in den Salons. Man hat sogar den Eindruck, daß oft der Ruf genügte; und auf solche Beobachtungen mag sich der Ausspruch Rivarols beziehen, daß nichts geleistet zu haben ein gewaltiger Vorteil ist, doch daß man ihn nicht mißbrauchen soll.

Neben Tagesgrößen, Glücksrittern und Abenteurern, die zum Teil glänzend auftraten, begegnete man in dieser vorrevolutionären Gesellschaft auch Trägern von Namen, die noch heute ihren Klang halten. Zu ihnen gehört Rivarol. Innerhalb seiner Zeit gesehen, ist er kein Einzelfall, sondern eine ihrer typischen Erscheinungen.

Nicht minder typisch ist seine Vorgeschichte bis zum ersten Auftreten in Paris, wo er sogleich Beachtung fand. Wie vieler begabter Söhne aus mittellosen Familien nahm sich die Kirche seiner an. Nachdem er verschiedene geistliche Schulen durchlaufen hatte, überall als glänzender Schüler angesehen, beende te er unter der Protektion des Bischofs von Uzès seine Studien im Priesterseminar Sainte-Garde zu Avignon, das er als Abbé verließ. Er bewegte sich damit, wie gesagt, auf einer der üblichen Laufbahnen: auf der des mittellosen Schülers, der früh durch seine Begabung hervorleuchtet. Das ist ein Schlag, aus dem der Klerus sich zu relautieren sucht, selbst wenn er in Kauf nehmen muß, daß mancher seiner Stipendiaten, wie es auch Rivarol tat und wohl tun mußte, in das Weltleben überspringt. Auf gleiche Weise debutierte, um ein Beispiel zu nennen, Chamfort, der häufig mit Rivarol genannt und auch verglichen wird. Stendhal hat daraus ein romantisches Muster gebildet; seine Helden leiden und reifen in der Askese und den Intrigen der geistlichen Vorschule, ehe sie sich dem Heere, der Politik oder der Literatur zuwenden. Die strenge Zucht, verbunden mit Elementarkraft, bringt explosive Wirkungen hervor.

Von Rivarol kann man wenigstens nicht sagen, daß er, wie so mancher andere, die Förderung mit Undank vergolten hat, weshalb man auch Zynismen in dieser Hinsicht, wie man sie bei Chamfort findet, bei ihm vergeblich suchen wird. Hinter seinen Gedanken, wie frei und leicht sie auch geführt werden, verbirgt sich eine solide Ausbildung, sowohl was die Sprache, als auch, was allgemeine Kenntnisse betrifft. Ihr verdankt er seine Vertrautheit mit der antiken Literatur, Geschichte und Mythologie, seine grammatikalischen und etymologischen Neigungen, seine Vorliebe für Geister wie Dante, Pascal und Augustin.

 

Extrait

Rivarol

 

(Antoine Comte de Rivarol, comme il s'appelait lui-même, est né le 26 juin 1753 à Bagnols dans le Languedoc comme l'aîné de seize frères et soeurs ; la famille vivait dans des circonstances limitées. Son père, Jean-Baptiste Rivarol, était instituteur, collecteur d'impôts et aubergiste.

Sainte-Beuve décrivait déjà les origines de Rivarol comme "inextricables" et signifiait probablement avant tout la revendication du titre de noblesse et de comte, qui n'est pas justifiée par le registre des baptêmes. Il se peut que Rivarol se soit attribué ces qualités de la même manière que le Chevalier de Seingalt qui, lorsqu'on lui demandait de se justifier, prétendait être maître des vingt-quatre lettres de l'alphabet. Mais il se peut aussi que la famille doive son origine, comme le prétend Rivarol, à la branche émigrée d'une vieille famille génoise. En tout cas, Rivarol n'a pas vécu aux dépens de son nom, comme beaucoup d'autres, mais il a apporté son nom pour l'honorer. C'est beaucoup plus rare. Vers la fin du XVIIIe siècle, lorsque la noblesse jouait un rôle si important, les corrections apportées à la carte de visite étaient plus libérales que peu de temps après et encore aujourd'hui. Cela a donné à la société cette fluidité et cette élégance légère qui n'ont plus jamais été atteintes depuis lors et qui peuvent être considérées d'une part comme l'un des signes de sa disparition, et d'autre part comme un relâchement des chaînes des domaines, qui non seulement spiritualisait les relations personnelles, mais dont l'art tirait également un bénéfice important.

Dans cette société, la réputation d'une bonne tête ou d'un talent brillant donnait non seulement un accès infaillible mais aussi une bonne place dans les salons. On a même l'impression que la réputation était souvent suffisante ; et à de telles observations, le mot de Rivarol peut faire référence, que "le fait de n'avoir rien accompli est un grand avantage, mais qu'il ne faut pas en abuser."

Dans cette société pré-révolutionnaire, outre les grands de l'époque, les chevaliers de la fortune et les aventuriers, dont certains ont fait de brillantes apparitions, nous avons également rencontré des porteurs de noms qui sonnent encore vrai aujourd'hui. L'un d'eux est Rivarol. Vu dans son temps, ce n'est pas un cas isolé, mais une de ses manifestations typiques.

Son histoire n'est pas moins typique jusqu'à sa première apparition à Paris, où il a immédiatement attiré l'attention. Comme beaucoup de fils doués issus de familles démunies, l'Eglise s'est occupée de lui. Après avoir passé par diverses écoles religieuses, partout considérées comme de brillants élèves, il termine ses études au séminaire de Sainte-Garde en Avignon sous la protection de l'évêque d'Uzès, qu'il quitte comme abbé. Il s'oriente ainsi, comme je l'ai dit, vers l'une des carrières habituelles : celle de l'élève sans le sou qui brille tôt par son talent. C'est un coup dont le clergé tente de se défaire, même s'il doit accepter que certains de ses boursiers, comme Rivarol l'a fait et a probablement dû le faire, passent à la vie mondiale. De la même manière, pour donner un exemple, Chamfort a fait ses débuts, qu'on a souvent nommé et comparé à Rivarol. Stendhal en a fait un modèle romantique ; ses héros souffrent et mûrissent dans l'ascèse et les intrigues de l'Alma Mater avant de se tourner vers l'armée, la politique ou la littérature. Une discipline rigoureuse, combinée à une force élémentaire, produit des effets explosifs.

Rivarol, du moins, comme beaucoup d'autres, n'a pas été récompensé par l'ingratitude de ses encouragements, c'est pourquoi on cherchera en vain le cynisme à cet égard, tel qu'on le trouve à Chamfort. Derrière ses pensées, même si elles sont menées librement et facilement, il y a une solide formation, tant en langue qu'en connaissances générales. C'est à elle qu'il doit sa familiarité avec la littérature ancienne, l'histoire et la mythologie, ses penchants grammaticaux et étymologiques, son goût pour les esprits comme Dante, Pascal et Augustin.)

 

Source: https://www.klett-cotta.de/buch/Juenger/Rivarol/4429#buch_leseprobe

Rivarol par Ernst Jünger: "Sans la bonté, l'élitisme ne vaut rien"
Rivarol par Ernst Jünger: "Sans la bonté, l'élitisme ne vaut rien"
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Du château des Allymes à la victoire de Tannenberg. Service, bravoure et honneur. Itinéraire de la famille franco-allemande von François

4 Décembre 2020 , Rédigé par D'argent à la fasce de gueules Publié dans #Histoire, #Guerre, #France, #Europe, #Russie

Le château des Allymes, dominant Ambérieu-en-Bugey, vu depuis le mont Luisandre. En face, au centre de la vue, la tour du château de Saint-Denis-en-Bugey. Source: Wikipedia https://fr.wikipedia.org/wiki/Château_des_Allymes#/media/Fichier:Château_des_Allymes1.JPG

Le château des Allymes, dominant Ambérieu-en-Bugey, vu depuis le mont Luisandre. En face, au centre de la vue, la tour du château de Saint-Denis-en-Bugey. Source: Wikipedia https://fr.wikipedia.org/wiki/Château_des_Allymes#/media/Fichier:Château_des_Allymes1.JPG

Le château des Allymes vu depuis le Mont Luisandre. Photo: Thierry de Villepin. Source: Wikipedia https://fr.wikipedia.org/wiki/Château_des_Allymes#/media/Fichier:01_-_Ambérieu_en_Bugey_Château_des_Allymes.jpg

Le château des Allymes vu depuis le Mont Luisandre. Photo: Thierry de Villepin. Source: Wikipedia https://fr.wikipedia.org/wiki/Château_des_Allymes#/media/Fichier:01_-_Ambérieu_en_Bugey_Château_des_Allymes.jpg

Le général allemand Hermann Karl Bruno von François, (31 janvier 1856, Luxembourg - 15 mai 1933, Berlin-Lichterfelde)

Le général allemand Hermann Karl Bruno von François, (31 janvier 1856, Luxembourg - 15 mai 1933, Berlin-Lichterfelde)

Hermann Karl Bruno von François, né le  à Luxembourg et mort le  à Berlin-Lichterfelde, est un général allemand. Il participe à la Première Guerre mondiale où il joue un rôle crucial lors des premiers engagements sur le front de l'Est, notamment au cours de la bataille de Tannenberg. Il commande par la suite le 41e corps d'armée et prend part à la bataille de Verdun.

Hermann von François est né le  à Luxembourg. Il est issu d'une famille de vieille noblesse française huguenote. Elle est mentionnée dès le début du xive siècle comme une famille de soldats réputés pour leur bravoure. Cette famille provient du Bugey dans l'Ain ; en épithète la famille portait le nom de leur château ancestral d'Alimes  (Ndlr Allymes aujourd'hui) donc « François de Alimes ». Les membres de cette famille jouent un rôle important dans la vie militaire du duché de Savoie et ont partagé les victoires et les défaites de leur suzerain. Une partie de la famille est retrouvée ensuite en Normandie. Son nom est modifié en « de Billy », « de la Motte », « de Saint-Nicolas » et « du Pommier ». En 1685, la révocation de l'édit de Nantes provoque l'émigration de la branche de la famille dirigée par Étienne von François en Saxe.

Parmi les ancêtres d'Hermann von François se trouvent presque exclusivement des officiers. Son grand-père, Charles von François sert comme général pour la Prusse puis la Russie dans les combats contre Napoléon Bonaparte. Son père, Bruno von François, est un général prussien et commande la 27e brigade d'infanterie prussienne. Il est tué au combat lors de la bataille de Spicheren le , quelques jours avant la bataille de Sedan. Le frère cadet d'Hermann von François, Hugo von François est un officier d'état-major allemand qui est tué lors des combats contre les Héréros dans le Sud-Ouest africain. Son frère aîné Curt von François a un rôle crucial dans l'acquisition et la collecte cartographique de la colonie allemande du Sud-Ouest africain.

Source: https://fr.wikipedia.org/wiki/Hermann_von_François

General von François (with his back to the camera) greets General Nikolai Klujev, commander of the Russian XIII Corps, who has been taken prisoner by von Francois' troops, following the Battle of Tannenberg

General von François (with his back to the camera) greets General Nikolai Klujev, commander of the Russian XIII Corps, who has been taken prisoner by von Francois' troops, following the Battle of Tannenberg

Curt Von Francois (1852-1931) en uniforme colonial.

Curt Von Francois (1852-1931) en uniforme colonial.

Curt (Karl Bruno) von François ( - ) était un géographe, un cartographe et un officier de l'armée coloniale impériale du Reich allemand qui s'illustra principalement dans le Sud-Ouest africain où il eut la charge de fonder au nom du Kaiser la villede Windhoek le  et le port de Swakopmund le .

https://fr.wikipedia.org/wiki/Curt_von_François

Wappen des Bruno von François an seinem Grab im Deutsch-Französischen Garten in Saarbrücken. https://www.wikidata.org/wiki/Q993986#/media/File:DFG_Wappen_Bruno_von_Francois.jpg

Wappen des Bruno von François an seinem Grab im Deutsch-Französischen Garten in Saarbrücken. https://www.wikidata.org/wiki/Q993986#/media/File:DFG_Wappen_Bruno_von_Francois.jpg

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Le procès de Jeanne d'Arc par Robert Brasillach. Préface de François Bluche

29 Novembre 2020 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles Publié dans #France, #Histoire, #Religion

Armes de la famille d'Arc octroyées par Charles VII, les plus belles de France:  "D'azur à deux fleurs de lys d'or et une épée d'argent à la garde dorée, la pointe en haut,  férue en une couronne d'or."

Armes de la famille d'Arc octroyées par Charles VII, les plus belles de France: "D'azur à deux fleurs de lys d'or et une épée d'argent à la garde dorée, la pointe en haut, férue en une couronne d'or."

Le procès de Jeanne d'Arc

 

texte établi et préfacé

par Robert Brasillach

 

présentation de François Bluche

 

Classiques

collection dirigée par Benoît Mancheron

 

Éditions de Paris

 

 

 

présentation

DE L'EDITION NOUVELLE

 

 

 

Sacrate juge la Cité, Jeanne signe le jugement,

Et à la Cour siègent ce soir la Reine et Charlotte Corday.

 

R. B.

 

 

 

Infiniment souhaitable et dès longtemps souhaitée, cette réédition du Procès de Jeanne d'Arc par Robert Brasillach (1941) aurait pu ou dû être présentée par Régine Pernoud, l'historienne de Jeanne, ou par mon ami Francis Rapp, membre de l'Institut - le XVe siècle n'a plus de secret pour lui -, ou par la famille de Brasillach.

Jean-Luc de Carbuccia aime les paradoxes, qui m'a confié la tâche de cette présentation. Certes, je révère la Pucelle d'Orléans et j'admire les Poèmes de Fresnes, mais cette sensibilité n'a rien d'original et elle ne saurait faire de moi un médiéviste érudit. De fait, notre éditeur a ses raisons, qui vous seront dites au terme de cet avant-propos.

 

" Le Procès de condamnation de Jeanne d'Arc, écrivit Pierre Champion, son savant éditeur, est ajuste titre un des documents les plus célèbres de notre Histoire ; il nous fait connaître une cause qui a gravement scandalisé la conscience humaine, en même temps qu'il nous révèle les traits les plus véridiques et les plus touchants de la vie de l'héroïque Jeanne d'Arc, orgueil et miroir d'un peuple. " II n'est, hélas, vraiment connu du grand public que par quelques " mots historiques " de l'accusée (" La pitié qui était au royaume de France " ; " II avait été à la peine, c'était bien raison qu'il fut à l'honneur " ; " Savez-vous si vous êtes en la grâce de Dieu ? - Si je n 'y suis, Dieu m'y mette ; et si j'y suis, Dieu m'y tienne "). Peu d'entre nous ont lu les mille pages grand in-octavo de l'édition Champion ; encore moins les deux mille pages du Procès en nullité (1455-1456), ce complément indispensable.

Robert Brasillach, publiant sous une forme accessible le Procès de condamnation(1) de 1431, les Éditions de Paris le rééditant aujourd'hui, n'ont nullement cherché à faire œuvre d'érudition, mais à arracher la mémoire de Jeanne à " la poudre du greffe " (Sainte-Beuve), après Quicherat et Champion, pour que nous puissions - jeunes ou vieux - communiquer avec l'héroïne de la France, saisir son message de gloire et de sacrifice, nous imprégner de son mystère.

" On ne pense pas à tout. En voulant perdre Jeanne, écrit Pierre Champion, publier à travers le monde les erreurs de sa doctrine et ses mensonges, les juges de Rouen ont bien travaillé à sauver sa mémoire... C'est grâce à eux que nous sommes devenus juges à notre tour. " Le jugement des juges... L'évêque Cauchon, ses assesseurs de Rouen, ses sbires et leurs complices, sont ainsi tombés dans le piège de leur malhonnêteté, car les procès-verbaux de ces tristes audiences de 1431 n'avaient eu pour dessein que de réduire, écraser la Pucelle ; à qui l'on ne pardonnait ni la libération d'Orléans, ni le sacre de Charles VII à Reims ; à qui l'on ne pardonnait ni sa fraîcheur, ni sa simplicité, ni sa vertu, ni sa droiture, ni la transparence de sa foi. Péguy a très bien défini les actes du procès de Rouen : " C'est comme si nous avions l'évangile de Jésus-Christ par le greffier de Caïphe et par le notarius, par l'homme qui prenait des notes aux audiences de Ponce Pilate. "

Or, au lieu de réduire la jeune accusée, ce fâcheux tribunal d'Église (Dieu ayant toujours su d'un mal tirer un bien), a contribué à montrer au monde la sainteté de la prétendue sorcière, " hérétique obstinée et rechue " ; et sans doute a-t-il contribué à façonner cette sainteté même.

Jeanne domine ses juges à tous égards. À leur orgueil satisfait, elle oppose sa simplicité évangélique ; à leur pédanterie de clercs, ses proverbes rustiques ; à leur théologie formaliste, le cristal de sa foi mystique et naturelle ; à leurs détours hypocrites, la rectitude spontanée de son dessein ; à leur trahison politique, la fidélité de son

 

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(1) Éditions Gallimard.

 

 

loyalisme ; à leurs questions perfides, la netteté innocente de toutes ses réponses.

Ce dernier point est loin d'être secondaire. La distinction du fond et de la forme n'est que mauvaise excuse des cuistres. Le triste style des accusateurs de Rouen trahit la noirceur de leur être. Le verbe simple et sublime de la sainte traduit la pureté de son âme elle-même. Et ce verbe, lumineux et transparent, suffit à transformer, transfigurer le texte du Procès de condamnation. D'un grimoire pédant, hypocrite et nauséabond, Jeanne a fait " l'un des plus beaux livres français " (M. Barrés). Dans l'esprit de saint Louis, avec le style du sire de Joinville et la douceur de Charles d'Orléans, la Pucelle - si grande dans la piété, si noble à travers son épopée fulgurante, si humble en sa dignité, si aisée en toute compagnie (avec saint Michel, avec Baudricourt, avec le " gentil Dauphin ", avec saintes Catherine et Marguerite, avec La Hire et Gille de Rais, et même avec Cauchon, redoutable évêque de Beauvais) - Jeanne d'Arc, non contente d'avoir redressé un royaume en détresse, restauré le Roi, découragé l'envahisseur et conquis des provinces, se présente à nous comme un grand écrivain de " France la doulce ".

Mais, emporté par mon admiration, j'ai peut-être trop montré la sainte, trop négligé la fille du peuple, la paysanne, l'héroïne et la patriote. Barrés jugeait qu'il fallait aller à Domremy et " ne pas laisser Jeanne dans l'église ". D'ailleurs il est indispensable de noter que la Pucelle éblouissait à la fois un Barrés, agnostique de droite et un Péguy, croyant de gauche.

Les catholiques en Jeanne vénèrent la sainte (par eux canonisée bien des années ou bien des siècles avant 1920), dite parfois " la plus grande sainte de France et du monde " (Péguy). N'aurait-elle pas, tout comme François d'Assise, " réalisé la plus fidèle et la plus prochaine imitation de Jésus-Christ"? Les protestants cultivés trouvent luthérien le constant recours de la Pucelle à l'Église invisible, et calvinienne sa devise : Dieu, premier servi. Pour les royalistes, Jeanne affirme la légitimité du Prince, sacré à Reims, et magnifie la fidélité féodale. Chateaubriand admire son esprit chevaleresque ; Michelet, son bon sens ; Jaurès, son patriotisme. Les jacobins de 93 saluaient en elle " la Bergère " ; Anatole France voulut bien lui laisser " une note pathétique d'humanité ". La venue de Jeanne d'Arc représente, aux yeux du fougueux Léon Bloy, " le plus haut miracle depuis l'Incarnation ". En même temps, " pour les rationalistes, elle est le triomphe de l'inspiration individuelle ".

Ces exemples divers le montrent : " Jeanne d'Arc n'appartient à aucun parti ; elle les domine tous, et c'est là son véritable miracle " (Barrés). Ce n'est point un hasard si, le 24 juin 1920 - trente-neuf jours après la canonisation -, la chambre des députés adopte sans débat le projet de loi barrésien demandant l'institution en mai d'une fête nationale de Jeanne d'Arc. Depuis 1871, ou environ, la Pucelle était le symbole du courage (" Cette petite fille a sa place entre Du Guesclin et Bayard", écrivait encore Barrés), le courage de la France (" Elle multiplie des actes admirables de défis au destin "). Jeanne incarnait le patriotisme - un patriotisme populaire en ses origines et plusieurs de ses formes ; un patriotisme éclairé, au point d'orienter la stratégie et de commander à la politique.

Pour Maurice Barrés " elle symbolise la France même ". Selon Pierre Chaunu, elle partage avec Louis Pasteur la première place du mythe français ; elle siège au sommet du panthéon des " saints laïcs " de la troisième République.

Il n'est, dès lors, pas étonnant d'observer que, dans la France déchirée au temps de la Seconde Guerre mondiale, Jeanne a pu être objet de ferveur en l'un et l'autre camp. Et ce fait nous ramène à l'énigme du choix du présentateur.

Notre éditeur, sachant que - péché de jeunesse - j'avais fait partie des F.T.P., m'a fait avouer que, en 1943, si j'avais reçu l'ordre de tuer Robert Brasillach, j'aurais probablement obéi. " Or, dit-il, autant que lui vous admiriez Jeanne d'Arc. C.Q.F.D. "

Dieu merci, je n'ai pas tué de poète. Je révère la Pucelle et j'admire les Poèmes de Fresnes. Je suis du camp d'André Chénier, de la Reine et de Charlotte Corday.

 

François BLUCHE

 

Source et texte complet:

http://www.clerus.org/clerus/dati/2001-10/23-13/JeanneArc.html

Le procès de Jeanne d'Arc par Robert Brasillach. Préface de François Bluche
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