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Les merveilles d'une après-midi d'été
Photographies: Pierre-Olivier Combelles.
Appareil: Fujifilm X100T. Objectif équivalent à 35mm. Il faut donc s'approcher très près des plantes et des insectes pour les photographier.
Chasse subtile, comme disait Ernst Jünger...
Cliquez sur les images pour les agrandir et faites-les défiler.
"De merveille en merveille, l'existence s'ouvre."
Lao-Tseu
"Exuberance is Beauty."
William Blake, The Marriage of Heaven and Hell
5H de l'après midi dans la prairie ensoleillée, entre le village et la forêt de Rambouillet.
Dans quelques mois, un lotissement réalisé pour des raisons uniquement spéculatives la remplacera: adieu les herbes, les insectes, les oiseaux, les animaux sauvages, adieu la liberté:
Sur la haie, au bord de la route qui descend vers la prairie et la forêt, les clématites ont fleuri.
Et là, au carrefour, le magnolia est en fleurs. Ses fleurs blanches, énormes, embaument d'un parfum délicat, suave, mystérieux, qui me transporte en Asie et en Amérique.
D'habitude, chaque année, la prairie est broyée (pas fauchée, broyée) mi ou fin juin, en pleine floraison, par le propriétaire et par l'agriculteur imbéciles qui ignorent tout du monde sauvage. Mais cette année, comme le terrain a été vendu à un promoteur, ils se sont évité cette dépense. La végétation pousse follement. Avec les pluies printanières et la chaleur depuis, les tanaisies, les fraisiers sauvages, les armoises, les ombellifères, les centaurées n'ont jamais été si nombreuses et si belles. Et des insectes, il y en a partout: papillons, sauterelles, araignées, coléoptères. Viennent aussi des sangliers, des cerfs, des chevreuils. Justement, quelques instants avant de prendre cette photo, un chevreuil qui reposait sans l'herbe s'est levé devant moi et est parti en bondissant dans la forêt, pelage acajou.Ce bonheur sera de courte durée. dans quelques mois, les bull-dozers viendront tout détruire, à jamais. Un univers entier disparaîtra, car une prairie, c'est un univers..
Splendeur des tanaisies aromatiques (Tanacetum officinalis) qui fleurissent au soleil... Merci, Béatrice, c'est grâce à toi que j'ai connu cette plante sur laquelle tu faisais une thèse de pharmacie, mais c'est moi qui l'avais découverte au fond du parc de Versailles, car tu ne l'avais étudiée que dans les livres.
La Petite-Centaurée commune (Centaurium erythraea) a fleuri un peu partout en ce début du mois de juillet.
Un oiseau, sans doute un pigeon ramier, a transporté la coquille d'un oeuf éclos au milieu de la prairie, loi du nid, pour ne pas attirer l'attention des prédateurs (martre, fouine, écureuil, geais, pies, corneilles).
Le sol est tapissé de fraises des bois, mûres, exquises. Je n'en ai jamais vu autant. Personne ne les a remarquées, sauf moi et quelques animaux sûrement. Il n'y a que les autos, les cars et les cyclistes qui passent sur la route à côté.
Rhagonycha fulva (Cantharidae) faisant l'escalade d'un Cirsium bardé d'énormes épines, 300 fois plus haut que lui. A l'échelle humaine, cela fait 500 m de haut!
Misumena vatia, une araignée-crabe. Celle-ci est une femelle. Elle attend sa proie, pattes ouvertes prêtes à la saisir, sur une Ombellifère qu'elle a tapissée de fils.
La vie d'un papillon est courte... dans la chaleur de cette après-midi d'été, ce Pyronia tithonus gît, mort, sur le bord de la route.
Un peu plus loin, un jeune orvet, mort lui aussi, la queue coupée... sans doute abandonné par un chat ou un oiseau, pie ou corneille...
Un peu plus loin encore, un autre jeune orvet déchiqueté, abandonné par un animal. La mort rôde partout dans cet opulent début d'été.
Un peu plus tard, une clairière ensoleillée dans la forêt, où fleurissent les ronces. Quand je suis arrivé, un Grand Mars changeant, aux reflets bleu-violacé métallique, voletait autour des feuillages des chênes, apparition féérique qui me transportait d'un coup sur le versant amazonien des Andes, lorsqu'un Morpho bleu, grand comme une assiette, apparaissait dans les rais de lumière du sous-bois...
Inondations: Auffargis à la pompe !
L'entrée du château d'Auffargis (Yvelines), route des Vaux de Cernay, lors de l'inondation du 31 mai 2016. Le ru des Vaux de Cernay, derrière, avait débordé. Photo: Pierre-Olivier Combelles
Le même endroit en novembre 2017, après le réaménagement du rond-point par la Mairie. Une magnifique pompe à main trône au milieu. Fonctionnelle ou décorative ? Attendons la suite des événements pour le savoir... Photo: Pierre-Olivier Combelles
La solution était aussi simple que géniale: à la prochaine inondation, les habitants d'Auffargis pomperont, pomperont !
Nul ne sait s'ils vont devoir pomper préventivement, c'est à dire régulièrement, avant qu'une inondation arrive (ce qui serait plus sage) ou lorsque la prochaine inondation sera là ...
Car comme pour les Shadoks, c'est un principe de base qu'"il vaut mieux pomper d'arrache-pied même s'il ne se passe rien plutôt que de risquer qu'il se passe quelque chose de pire en ne pompant pas."
Saluons, une fois de plus, la lumineuse intelligence de la Mairie!
Dialogue de Zygènes
L'araignée-crabe Misumena vatia sur une marguerite (grande pour elle comme un terrain de foot, mais perché à des centaines de mètres et se balançant au vent !!!!). Photo: Pierre-Olivier Combelles
L'Humanité (=espèce humaine) n'est qu'un infime, - mais démesurément dangereux par rapport à sa taille - élément de notre planète et de l'univers, et qui devrait s'entendre bien avec les autres, la Communauté des Êtres.
Ce qui est rassurant, c'est que seulement une insignifiante partie, non seulement de l'Univers, mais même de notre environnement le plus proche, en a entendu parler. Le reste, jamais, comme ces Zygènes (Turquoises de la Globulaire) que j'ai rencontrées au printemps dernier dans la prairie à côté de chez moi.
L'homme est si vaniteux qu'il est totalement obsédé par son importance, même comme destructeur.
Pierre-Olivier Combelles
Nouveau tir d'un missile balistique nord-coréen, un réveil effrayant pour le Japon
https://francais.rt.com/international/43216-nouveau-tir-d-missile-balistique-coree-nord
La sirène des forêts d'Avril
Dans la mer de jacinthes bleues des forêts d'Avril, une sirène basque est venue jouer avec un cachalot qui souffle. Montage de Krispo (http://ikusibatusi.blogspot.fr/) sur une photographie de Pierre-Olivier Combelles
"Sirena silvestre al anochecer". Ce soir, la sirène est revenue pour jouer dans la mer bleue des forêts d'Avril. Montage de Krispo (http://ikusibatusi.blogspot.fr/) sur une photographie de Pierre-Olivier Combelles
"Esta sirena es muy especial y presumida, se sumerge en bosques de flores azules silvestres para tener brillos irisados en su piel."
(Cette sirène est très originale et coquette; elle se baigne dans les forêts de jacinthes bleues sauvages pour avoir des reflets irisés sur sa peau.)
Krispo (Ikusi Batusi)
Souvenir du printemps dernier
Platanthera chlorantha (Orchidaceae), entre St Benoît et la D 906. Photo: Pierre-Olivier Combelles, mai 2016.
Comme Linné l'avait compris et démontré*, la botanique est une science amoureuse. A un certain degré, elle devient poésie.
Pierre-Olivier Combelles
* Carl von Linné: Voyage en Laponie https://www.ladifference.fr/media/feuilleteuse/extrait-978-2-7291-1412-1.pdf
Cet article est une republication. Source: http://pocombelles.over-blog.com/2016/06/les-belles-de-mai-la-platanthere-platanthera-chlorantha-orchidaceae.html
Le Peuple de l'Herbe
A présent laissez-moi, je vais seul.
Je sortirai, car j'ai affaire: un insecte
m'attend pour traiter. Je me fais joie
du gros oeil à facettes: anguleux,
imprévu, comme le fruit du cyprès.
Ou bien j'ai une alliance avec les pierres
veinées-bleu: et vous me laissez également,
assis, dans l'amitié de mes genoux.
Saint-John Perse, Éloges (1908)
Le Peuple de l'Herbe se soucie-t-il des hommes ? Les connaît-il seulement ? Rien n'est moins sûr. Tout nous porte à penser qu'ils n'existent pas pour eux dans l'espace de leur courte vie (courte pour nous, longue pour eux), pas plus que les milliards d'autres espèces animales et végétales qui peuplent la Terre n'existent pour les hommes, surtout pour cette majorité de nos congénères déracinés qui vivent aujourd'hui enfermés dans les mégapoles, les trains, les autos et les avions. Cette pensée nous libère du poids écrasant de notre responsabilité d'êtres prétentieux, insatiables et destructeurs.
Pierre-Olivier Combelles
Photos de l'auteur. Appareil: Fujifilm X100T. Certaines images sont recadrées. Clicquez dessus pour les agrandir.
Sur le même sujet, par le même auteur et sur le même blog:
Misumena vatia, une araignée en kimono dans une orchidée
Orchis bouc (Himantoglossum hircinum, Orchidaceae) sur un talus. Elle doit son nom inattendu, moins à la forme de ses fleurs qu'à son fort parfum rappelant celui de l'animal. Photo: Pierre-Olivier Combelles (Forêt de Rambouillet, juin 2016)
L'araignée-crabe Misumena vatia (Thomisidae) à l'affût sur un labelle d'orchis bouc. Photo: Pierre-Olivier Combelles (Forêt de Rambouillet, juin 2016)
Une petite araignée (Araniella cucurbitina ?) enveloppe sa proie sur un Orchis bouc (Himantoglossum hircinum). Photo: Pierre-Olivier Combelles (Forêt de Rambouillet, juin 2016)
Le Dermestidae Oedemera nobilis sur une marguerite. Photo: Pierre-Olivier Combelles (Forêt de Rambouillet, juin 2016)
Le longicorne Rutpela maculata sur une marguerite. Photo: Pierre-Olivier Combelles (Forêt de Rambouillet, juin 2016)
Libellule (Libellula quadrimaculata ?) sur une marguerite. Photo: Pierre-Olivier Combelles (Forêt de Rambouillet, juin 2016)
Vulcain (Vanessa atalanta) aux ailes usées, posé sur une appétissante (pour lui !) crotte de chien au milieu du chemin entre un champ et la forêt. Photo: Pierre-Olivier Combelles (Forêt de Rambouillet, juin 2016)
Un Flambé (Iphiclides podalirius) vient de naître sur une haie, encore tout engourdi. En Asie, le Papillon est le symbole de l'amour éternel, de la joie et aussi de la transformation, comme celle de l'âme qui quitte le corps après la mort. En grec, le même terme "psyché" désigne à la fois l'âme et le papillon. Photo: Pierre-Olivier Combelles (Forêt de Rambouillet, juin 2016)
XXXVI
Beau papillon près du sol
à l'attentive nature
montrant les enluminures
de son livre se vol.
Un autre se ferme au bord
de la fleur qu'on respire:-
ce n'est pas le moment de lire.
Et tant d'autres encor,
de menus bleus, s'éparpillent,
flottants et voletants,
comme de bleues brindilles
d'une lettre d'amour au vent,
d'une lettre déchirée
qu'on était en train de faire
pendant que la destinataire
hésitait à l'entrée.
Rainer Maria Rilke, Les Quatrains Valaisans
Gallimard, N.R.F., 1926.