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Le Fil d'Ariane

louis xiv

Madame de Sévigné (1671): "Le roi... honora l'assemblée de trois ou quatre courantes"

28 Avril 2025 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles Publié dans #Madame de Sévigné, #France, #Histoire, #Danse, #Louis XIV, #Lettres, #Musique

Louis XIV vers 1670

Louis XIV vers 1670

Marie de Rabutin-Chantal, marquise de Sévigné (5 février 1626 - 17 avril 1696)

Marie de Rabutin-Chantal, marquise de Sévigné (5 février 1626 - 17 avril 1696)

L'hôtel de Soubise (ancien hôtel de Guise) et l'hôtel de Strasbourg (actuel hôtel de Rohan) selon le plan de Turgot vers 1737.

L'hôtel de Soubise (ancien hôtel de Guise) et l'hôtel de Strasbourg (actuel hôtel de Rohan) selon le plan de Turgot vers 1737.

Lettre de Madame de Sévigné à Madame de Grignan, sa fille (Paris, février 1671)

 

Lundi au soir.

Avant que d'aller au faubourg je fais mon paquet, et je l'adresse à M. l'intendant à Lyon. La distinction de vos lettres m'a charmée: hélas! je la méritais bien par la distinction de mon amitié pour vous.

Madame de Fontevrault fut bénite hier; MM. les prélats furent un peu fâchés de n'y avoir que des tabourets.

Voici ce que j'ai su de la fête d'hier: toutes les cours de l'hôtel de Guise étaient éclairées de deux mille lanternes. La reine entra d'abord dans l'appartement de mademoiselle de Guise, fort éclairé, fort paré; toutes les dames se mirent à genoux autour de la reine, sans distinction de tabourets: on soupa dans cet appartement. Il y avait quarante dames à table; le souper fut magnifique; le roi vint, et fort gravement regarda tout sans se mettre à table; on monta plus haut, où tout était préparé pour le bal. Le roi mena la reine, et honora l'assemblée de trois ou quatre courantes, et puis s'en alla au Louvre avec sa compagnie ordinaire. Mademoiselle ne voulut point venir à l'hôtel de Guise. Voilà tout ce que je sais.

Je veux voir le paysan de Sully, qui m'apporta hier votre lettre; je lui donnerai de quoi boire: je le trouve bien heureux de vous avoir vue. Hélas! comme un moment me paraîtrait, et que j'ai de regret à tous ceux que j'ai perdus! Je me fais des dragons aussi bien que les autres. Adieu, ma chère enfant, l'unique passion de mon cœur, le plaisir et la douleur de ma vie. Aimez-moi toujours, c'est la seule chose qui me peut donner de la consolation.

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Nec pluribus impar

14 Décembre 2019 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles Publié dans #France Soir, #Histoire, #Louis XIV, #Maison royale de Saint Louis, #MELH, #Saint-Cyr, #Nec pluribus impar

Frontispice de la Maison royale de Saint-Louis fondée par Louis XIV à Saint-Cyr, près de Versailles, pour l'éducation des jeunes filles de la noblesse pauvre, dont les pères s'étaient sacrifiés au service de l'Etat et à la guerre (devenue la Maison d'Education de la Légion d'honneur fondée par Napoléon sur cet exemple et ces traditions).

Frontispice de la Maison royale de Saint-Louis fondée par Louis XIV à Saint-Cyr, près de Versailles, pour l'éducation des jeunes filles de la noblesse pauvre, dont les pères s'étaient sacrifiés au service de l'Etat et à la guerre (devenue la Maison d'Education de la Légion d'honneur fondée par Napoléon sur cet exemple et ces traditions).

Louis XIV figure le soleil levant dans le Ballet royal de la Nuit (1653)

Louis XIV figure le soleil levant dans le Ballet royal de la Nuit (1653)

« Le carrousel, qui m’a fourni le sujet de ces réflexions, n’avait été projeté d’abord que comme un léger amusement; mais on s’échauffa peu à peu, et il devint un spectacle assez grand et magnifique, soit par le nombre des exercices, soit par la nouveauté des habits ou par la variété des devises.

Ce fut là que je commençai à prendre celle que j’ai toujours gardée depuis, et que vous voyez en tant de lieux. Je crus que, sans s’arrêter à quelque chose de particulier et de moindre, elle devait représenter en quelque sorte les devoirs d’un prince, et m’exciter éternellement moi-même à les remplir. On choisit pour corps le soleil, qui, dans les règles de cet art, est le plus noble de tous, et qui, par la qualité d’unique, par l’éclat qui l’environne, par la lumière qu’il communique aux autres astres qui lui composent comme une espèce de cour, par le partage égal et juste qu’il fait de cette même lumière à tous les divers climats du monde, par le bien qu’il fait en tous lieux, produisant sans cesse de tous côtés la vie, la joie et l’action, par son mouvement sans relâche, où il paraît néanmoins toujours tranquille, par cette course constante et invariable, dont il ne s’écarte et ne se détourne jamais, est assurément la plus vive et la plus belle image d’un grand monarque.

Ceux qui me voyaient gouverner avec assez de facilité et sans être embarrassé de rien, dans ce nombre de soins que la royauté exige, me persuadèrent d’ajouter le globe de la terre, et pour âme nec pluribus impar*: par où ils entendaient ce qui flattait agréablement l’ambition d’un jeune roi, que, suffisant seul à tant de choses, je suffirais sans doute encore à gouverner plusieurs empires, comme le soleil à éclairer d’autres mondes, s’ils étaient également exposés à ses rayons. Je sais qu’on a trouvé quelque obscurité dans ces paroles, et je ne doute pas que ce même corps n’en eût pu fournir de plus heureuses. Il y en a même qui m’ont été présentées depuis; mais celle-là étant déjà employée dans mes bâtiments et en une infinité d’autres choses, je n’ai pas jugé à propos de la changer. »

 

Louis XIV, Mémoires pour l’année 1662. Tallandier, Paris, 1978.

 

 

* « Capable de gouverner plusieurs royaumes. »

Canon de l'époque de Louis XIV. Musée des Invalides (Paris)

Canon de l'époque de Louis XIV. Musée des Invalides (Paris)

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