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Rouge et Blanc, ou le Fil d'Ariane d'un voyageur naturaliste

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Râmakrishna: Le vol de grues dans le nuage d'orage

24 Juin 2021 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles Publié dans #Inde, #Nature, #Poésie, #Religion, #Râmakrishna

Râmakrishna: Le vol de grues dans le nuage d'orage
Romain Rolland: Vie de Ramakrishna (Stock,  Paris, 1930).

Romain Rolland: Vie de Ramakrishna (Stock, Paris, 1930).

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Jean Rostand: La civilisation

20 Juin 2021 , Rédigé par Le Rouge et le Blanc Publié dans #France, #Nature, #Philosophie, #Jean Rostand

"Outre que la civilisation ne constitue point par elle-même un facteur de progrès biologique, elle peut, indirectement, devenir un facteur de régression. Nous avons dit maintes fois que les éléments héréditaires, ou gènes, des individus humains sont de qualité fort inégale, pour les caractères intellectuels comme pour les caractères physiques. Partant, le niveau moyen de l’espèce, à tout moment, dépend de la proportion existant entre les bons et les mauvais gènes. D’une part, le nombre des mauvais gènes tend à s’accroître sans cesse par le seul effet de la mutation, qui se fait beaucoup plus souvent vers le pire que vers le meilleur ; d’autre part la sélection naturelle tend à éliminer les mauvais gènes, lesquels, d’ordinaire, réduisent plus ou moins la capacité reproductrice des individus qui les portent, soit en restreignant leur fécondité, soit en diminuant leur vigueur globale ou leur faculté d’adaptation. Au début de l’histoire humaine, dans les conditions de la vie sauvage, la sélection naturelle jouait avec assez peu de rigueur pour que, malgré l’abondance des mutations délétères, l’espèce maintint son niveau, ou même peut-être marquât quelque amélioration génétique. Les individus chétifs, mal venus, n’arrivaient pas à l’âge reproducteur, et leurs mauvais gènes s’éteignaient avec eux. Henri Vallois a constaté que, parmi les squelettes préhistoriques, on n’en trouve presque pas de vieillards. Si les conditions de l’existence étaient jadis trop rudes pour la vieillesse, à plus forte raison l’étaient-elles sans doute pour la débilité. Le débile, comme le vieillard, est un produit de la civilisation.

De surcroît, la sélection s’exerçait non seulement à l’intérieur de chaque groupe humain, mais aussi de groupe à groupe ; et, dans ce cas, elle favorisait souvent le progrès des caractères intellectuels et sociaux : les tribus courageuses, animées de sentiments collectifs, commandées par des chefs héroïques et astucieux, l’emportaient sur les autres.

La situation changea du tout au tout à mesure que se formèrent les vastes collectivités organisées qui caractérisent la civilisation moderne.

D’abord, la sélection de groupe à groupe se fit inopérante, les guerres entre nations n’ayant d’autre résultat que d’évincer, de part et d’autre, les plus braves et les plus robustes*. Et, surtout, la médecine, la chirurgie, l’hygiène, l’assistance, le développement des idées philanthropiques devaient concourir à gêner toujours davantage la fonction épuratrice de la sélection naturelle.

Nos sociétés actuelles donnent la possibilité de survivre et de reproduire à des milliers d’êtres qui eussent été autrefois implacablement éliminés dès le jeune âge. La diminution de la mortalité infantile, les vaccinations généralisées entraînent un affaiblissement de la résistance moyenne de l’espèce. Grâce à l’obstétrique, des femmes deviennent mères en dépit d’un bassin trop étroit, et, grâce au lait stérilisé, nourrices, en dépit de glandes mammaires insuffisantes. Il n’y a plus de sanction naturelle pour les petites tares physiologiques, comme la mauvaise denture ou la myopie.

Il n’est pas jusqu’à la sélection sexuelle, fondée sur le choix réciproque des procréateurs, qui n’ait perdu de son efficace dans nos sociétés inégalitaires. Les avantages sociaux ou financiers priment les naturels, et la situation ou les « espérances » font plus pour unir les humains que la beauté des corps ou que la finesse des esprits.

En bref, défaut général de sélection, et même, en certain cas, contre-sélection ou sélection à rebours : voilà le lot de nos sociétés actuelles. Aucun frein n’y contrariant la multiplication des mauvais gènes qui se produisent constamment par mutation, il s’ensuit un avilissement progressif de l’espèce.

Cet avilissement doit dater de loin ; il ne fera que s’accentuer toujours davantage". (…)

 

Jean Rostand, L’Homme (Gallimard, 1940/1961)

 

*NDLR: En 1914-18, ce sont les plus braves qui sont allés combattre au front et qui sont morts, en masse. Les lâches, les malins qui faisaient des affaires sont restés à l'arrière, en sécurité. Ce sont eux qui se sont reproduits, répandant leur vilenie à travers leur descendance et dans les institutions. Comme Jean Rostand en explique très bien les raisons, nous sommes aujourd'hui dans une inversion totale de la sélection naturelle puisque le pouvoir n'appartient plus aux meilleurs, comme dans la nature et comme dans l'Âge d'Or, mais aux pires. On le constate bien aujourd'hui dans cette nouvelle guerre mondiale CONTRE L'HUMANITĖ qu'est la psycho-pandémie du COVID-19, lancée par la part la plus vile, la plus corrompue et la plus malfaisante de l'espèce humaine.

Une troupe de bandits menace un village de paysans. Incapables de se défendre, les paysans font appel aux samouraï. Ils leur inspirent la pitié, mais en les trompant sur l'état de leurs réserves. Les samouraï sauvent le village et meurent presque tous au combat, répandant leur sang comme le cerisier répand ses fleurs à terre, dans le vent. Les paysans oublient les samouraï et font la fête.

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"Bill Gates continue le travail de Monsanto", dit Vandana Shiva à France 24

29 Mai 2021 , Rédigé par Le Rouge et le Blanc Publié dans #Agriculture, #Inde, #Nature, #Sciences, #Bill Gates, #Forêt

OGM: Semences de destruction: l'arme de la faim

Par Luc Reynaert

F. W. Engdahl examine ici un deuxième instrument (après le pétrole) extrêmement important de la tentative de contrôler le monde: l'alimentation. Il cadre cette tentative dans un plus grand projet concocté par une oligarchie mondiale: contrôler la démographie mondiale et même implémenter des politiques franchement eugéniques.

L'élite mondiale avait créé une industrie agroalimentaire transnationale afin d'ouvrir de nouveaux marchés pour les produits énergétiques (engrais pétrochimiques). A son tour, cette agro-industrie a mis au point une arme plus efficace pour contrôler l'alimentation dans le monde: des organismes génétiquement modifiés (OGM), créant ainsi avec leurs brevets un oligopole mondial constitué de 4 sociétés.

L'évaluation des risques

Les données sur le risque des OGM restent la plupart du temps cachées derrière le voile de «renseignements commerciaux confidentiels». Cependant, certaines expériences sur des rats ont montré que les OGM pourraient être responsables d'une taille inférieure du foie, du caeur, et aussi du cerveau. Un autre risque est la réduction de la diversité génétique végétale (monocultures). Un mensonge flagrant a été leur affirmation que l'utilisation d'OGM conduirait à une moindre utilisation d'herbicides ; alors qu'en fait, plus d'herbicides sont nécessaires pour combattre des mauvaises herbes plus résistantes aux herbicides utilisés.

 Esclaves des semences

Certains agriculteurs sont devenus totalement dépendants de l'oligopole. Chaque année, ils doivent payer une redevance pour l'utilisation des OGM, car il est interdit de réutiliser les semences de l'année précédente. Comme il est devenu extrêmement difficile, même avec une armée importante d'inspecteurs, de contrôler cette `réutilisation', des technologies plus efficaces ont été développés: des plantes `Terminateur', qui `se suicident' après une saison de récolte ou du `maïs contraceptif' basé sur des gènes d'anticorps féminins.

Actuellement, des recherches ont ete entamées pour breveter des semences de porcs et de taureaux.

 Objectif

Un des objectifs de l'élite mondiale est la réduction drastique de la population mondiale (l'auteur utilise le terme de `génocide') par le contrôle du processus reproductif humain. Les OGM font partie de cette stratégie. Comme un membre de l'armée a déclaré: à base d'OGM, les armes biologiques sont `des armes de destruction massive' pas chères et efficaces.

F. William Engdahl a écrit un livre qui donne froid dans le dos: une lecture incontournable pour tous ceux qui s'intéressent à l'avenir de l'humanité.

https://pocombelles.over-blog.com/article-ogm-semences-de-destruction-l-arme-de-la-faim-107653698.html

"Bill Gates continue le travail de Monsanto", dit Vandana Shiva à France 24

Editeur: Jean-Cyrille Godefroy (2008).

4e de couverture:

Ce livre montre comment une puissante élite américaine est en passe de contrôler les bases même de la survie de l'humanité : le pain quotidien." Contrôlez l'alimentation, et vous contrôlerez les peuples " déclarait Kissinger au milieu des années soixante-dix. C'est ce qui est en train d'être accompli. Au-delà des controverses scientifiques sur les bienfaits ou les dangers des OGM, William Engdahl retrace la saga du projet malthusien défendu par de puissants intérêts privés qui, dès les années trente, visaient au contrôle des populations, et qui se trouvent à l'origine de la diffusion et de la prolifération des OGM. A coups de pressions politiques, de fraudes et de mensonges, ces intérêts sont maintenant à une ou deux décennies d'atteindre une complète hégémonie sur les capacités nourricières de la planète. " Semences de destruction " mène le lecteur au cœur du pouvoir américain, dans les laboratoires où sont expérimentées les semences génétiquement modifiées et brevetées, derrière les portes soigneusement verrouillées des conseils d'administration de Monsanto et d'autres multinationales qui contrôlent le monde à l'égal des compagnies pétrolières. La crise alimentaire qui ravage le tiers-monde sera-t-elle pour ces géants aux ambitions sans limite l'occasion d'imposer partout les semences OGM brevetées? Si ce livre se lit comme un roman noir, c'est qu'il en est un.

https://www.payot.ch/Detail/ogm__semences_de_destruction-f_william_engdahl-9782865532049?cId=0

"Bill Gates continue le travail de Monsanto", dit Vandana Shiva à France 24

"This skillfully researched book focuses on how a small socio-political American elite seeks to establish its control over the very basis of human survival, the provision of our daily bread. Control the food and you control the people. This is no ordinary book about the perils of GMO. Engdahl takes the reader inside the corridors of power, into the backrooms of the science labs, behind closed doors in the corporate boardrooms. The author reveals a World of profit-driven political intrigue, government corruption and coercion, where genetic manipulation and the patenting of life forms are used to gain worldwide control over food production. The book is an eye-opener, a must-read for all those committed to the causes of social justice and World peace."

https://www.amazon.com/Seeds-Destruction-Hidden-Genetic-Manipulation/dp/0973714727

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Vardan Baghdasaryan : L'espace et l'homme (Club d'Izborsk, 11 avril 2021)

12 Avril 2021 , Rédigé par Le Rouge et le Blanc Publié dans #Club d'Izborsk (Russie), #Nature, #Philosophie, #Société, #Sciences, #Russie

Vardan Baghdasaryan : L'espace et l'homme  (Club d'Izborsk, 11 avril 2021)

Vardan Baghdasaryan : L'espace et l'homme

 

11 avril 2021

 

https://izborsk-club.ru/20925

 

 

La dévalorisation de l'exploration spatiale en tant que défi

 

Aujourd'hui, l'exploration spatiale a perdu cette sémantique héroïque, cette accumulation de rêves qu'elle avait à l'époque soviétique. Les programmes spatiaux sont désormais perçus comme quelque chose d'utilitaire et de banal, comme un projet commercial. Il existe des rapports sur la corruption dans l'industrie spatiale. Il y a une commercialisation active de l'espace. Les personnes fortunées paient pour le tourisme spatial : les frais de voyage sont de 20 à 35 millions de dollars. Tous les voyages commerciaux de tourisme spatial ont été effectués exclusivement par des vaisseaux spatiaux habités russes, et Roskosmos est la seule organisation à fournir de tels services. L'expansion capitaliste se déplace au-delà de la Terre. Et comment ne pas rappeler ici les paroles euphémiques d'Hugo Chavez, de moins en moins prises pour une blague : "Il ne semblerait pas étrange que la civilisation ait existé sur Mars, mais apparemment elle a atteint le stade du capitalisme, l'impérialisme est apparu et a achevé cette planète".

 

La perspective du transfert du capitalisme dans l'espace, qui ne peut manquer de se produire avec la poursuite de l'exploration de l'espace extra-atmosphérique, comporte des menaces véritablement colossales. L'absence de restrictions sociales permettra aux entreprises d'agir de manière prédatrice maximale sur les objets spatiaux maîtrisés, comme cela s'est toujours produit lors des premières phases de colonisation, pour forcer le développement des ressources afin de devancer les concurrents. En même temps, avec l'apparition de bases dans l'espace, la valeur de la Terre aux yeux des bénéficiaires diminuera et, à l'avenir, la logique capitaliste incitera à la "débarrasser de son lest".

 

On peut objecter qu'il existe une orientation du droit international de l'espace. Mais, tout d'abord, le droit ne peut être fonctionnel que s'il est soutenu par un contrôle approprié, ce qui est difficile dans le cas de l'exploration spatiale. Deuxièmement, en imposant une interdiction de la prolifération nucléaire et de la propriété étatique, elle ignore de fait la question de la propriété des entreprises et des particuliers ainsi que la capacité d'exploiter les matières premières. Dans sa forme actuelle, le droit international de l'espace donne le feu vert à l'expansion capitaliste dans l'espace.

 

C'est ainsi qu'en 2016 est proclamée la création du premier État spatial Asgardia, dirigé par un monarque constitutionnel - l'entrepreneur russo-azerbaïdjanais Igor Raufovich Ashurbeyli. Un gouvernement composé de 12 ministères, un parlement et une cour suprême ont été formés. Malgré la nature apparemment fausse du projet, plus d'un million de personnes ont déjà reçu la citoyenneté asgardienne. Qu'est-ce que c'est ? Rien de plus qu'un amusement d'homme riche ou le début d'une véritable course capitaliste à l'espace ?

 

L'exploration spatiale n'est en réalité pas seulement un sujet technique, mais aussi un sujet humanitaire. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, il est imbriqué dans des questions spirituelles et anthropologiques. L'examen historique et de la genèse du problème "Homme et Cosmos" permet de révéler la stabilité des nouvelles idées de construction de l'homme dans celui-ci.

 

Cosmos contre Chaos. Cosmogenèse et anthropogenèse dans les traditions religieuses-mythologiques

 

Le cosmos, selon l'étymologie du concept introduit, croit-on, par Pythagore, est une harmonie qui présuppose des dimensions spirituelle, rationnelle et esthétique. Le cosmos s'oppose catégoriquement au chaos associé à la spiritualité (voire à l'infernalité), à l'irrationalité et à la laideur. Les Hellènes se considéraient comme les détenteurs des idées du cosmos, estimant que les barbares étaient les interprètes de l'ontologie du chaos. Dans la théorie de la cosmogonie, le cosmos est né du chaos, étant sa négation. Ce n'est pas une émanation - un déversement de l'un par l'autre - mais précisément une négation qui a produit le conflit naturel et culturel mondial qui s'en est suivi. La Titanomachie et la Gigantomachie représentaient le déroulement de l'intrigue de la lutte du cosmos, personnifié par les dieux de l'Olympe, avec les personnifications archaïques de la disharmonie et des éléments - titans, géants, Typhon. Et il est important que dans cette lutte les Olympiens ne pouvaient gagner qu'à condition d'attirer un être humain (dans la description de la gigantomachie - Héraclès) à leur côté. L'homme apporte ainsi sa contribution fondamentale au déroulement global de la cosmogonie, prenant le parti du cosmos contre le chaos.

 

La doctrine de la corrélation entre le macrocosme et le microcosme a été présentée sous différentes expressions catégorielles dans les traditions philosophiques des anciennes civilisations du monde. Dans la tradition védique, cela s'exprimait, par exemple, par les concepts de brahman (macrocosme) et d'atman (microcosme). Selon cet enseignement, l'être humain est un modèle du cosmos en miniature. Mais son image face à l'injustice de la vie a été endommagée et l'harmonie cosmique a été perturbée. L'homme, en suivant la voie du développement spirituel, s'harmonise lui-même, et cette découverte de l'harmonie interne est le triomphe final du cosmos sur le chaos.

 

Seule une personne ayant atteint le niveau de perfection approprié peut également pénétrer dans les sphères du cosmos. Il ne s'agit pas d'un homme ordinaire imparfait, mais d'un homme transformé. La perspective de maîtriser le cosmos, d'atteindre le ciel, était donc associée à une transformation spirituelle. Lorsque des êtres humains imparfaits ont essayé d'atteindre le ciel, cela a été suivi d'un désastre (comme ce fut le cas avec la tour de Babel).

 

Comment le ciel correspond-il au cosmos ? Dans la perception moderne, le cosmos s'oppose au ciel, tout comme l'image scientifique du monde s'oppose à l'image mythologique du monde. Mais dans la philosophie de la tradition, le cosmos et le ciel agissaient comme des composantes d'une seule et même cosmogenèse. À la suite du premier acte de la cosmogenèse, le cosmos a été séparé du chaos, le monde de l'être a été séparé du monde du néant. Le Chaos était associé au monde souterrain, la sphère de l'infernal. Dans la mythologie scandinave, c'est la demeure des démons, Utgard. Un autre brasier dans le temps historique a apporté la chaotisation, la laideur et la mort au monde de l'être. Selon la mythologie hindoue, ce moment surviendra dans l'ère du Kali Yuga.

 

Le deuxième acte de la cosmogenèse est la division, au sein du cosmos lui-même, en ciel et terre. Le ciel, en règle générale, était corrélé au masculin et au spirituel, la terre au féminin et au matériel. Le lien de la terre avec le monde souterrain a donné naissance à des monstres chthoniens. De la connexion avec le ciel est né un homme reliant l'esprit (aspect céleste) et la chair (aspect terrestre). Le ciel était divisé en sphères, le plus souvent sept ou neuf (neuf sphères ont été mentionnées, par exemple, par les théologiens juifs). L'ascension d'une personne sur le chemin de la perfection spirituelle correspondait à chacune de ces sphères et constituait une sorte d'échelle vers l'Absolu. Une image populaire de cette ascension était présentée dans la littérature apocryphe sous la forme de l'échelle de Jacob. Il s'agissait précisément de l'échelle menant au ciel, chaque échelon impliquant de surmonter l'une ou l'autre tentation du péché.

 

Les anciens Sumériens montaient au ciel sur le dos d'un aigle géant, le maître du monde - le mythique roi Etana - qui y extrayait la "plante de la naissance". Selon la reconstitution du grand orientaliste soviétique Vsevolod Avdiev, Etana n'a jamais atteint le ciel et l'échec de son entreprise était de montrer les limites du pouvoir humain. Le roi mythique perse Kei-Kavus, dont le vol spatial est décrit dans l'Avesta et le Shahnama, qui n'était pas étranger au vice, n'a pas non plus réussi à atteindre le ciel.

 

Dans la mythologie samoyède, le chaman Urer pouvait monter sur la Lune grâce à sept jours de kamlanie ininterrompue. Entrant en transe, il pouvait, après avoir modifié sa conscience, changer son essence, ce qui lui permettait d'atteindre l'ascension cosmique. Le mythologème du "chaman lunaire" est également enregistré chez d'autres peuples du nord de l'Eurasie, ce qui indique l'universalité du motif du lien entre le voyage spatial et la sortie de la conscience humaine vers un niveau supérieur.

 

Après la mort, les anciens héros - fils de dieux et de mortels - Héraclès, Énée, Romulus, sont montés au ciel. Sur le plan anthropologique, les héros étaient une synthèse de deux natures - divine et humaine. À la mort, leur nature humaine a péri, mais leur nature divine a été préservée grâce à l'intervention d'une puissance supérieure, ce qui a rendu l'ascension possible.

 

La légende rapporte comment Alexandre de Macédoine est monté au ciel sur le trône. Outre son aspiration à maximiser l'oikumene hellénique, cette légende reflète également la notion des qualités particulières du surhomme.

 

Selon la tradition juive, le patriarche Enoch et le prophète Elijah ont été emmenés au ciel. Avant la venue du Messie (dans le christianisme - avant la seconde venue du Christ), ils reviendront du ciel sur la terre afin de lui rendre témoignage. De toute évidence, toutes les indications d'ascension dans les religions abrahamiques impliquent un esprit élevé spécial des ascendants. Selon le troisième livre apocryphe d'Hénoch, le patriarche, en montant au ciel, est devenu un ange. Pendant son séjour au ciel, Hénoch, selon les textes apocryphes, a reçu, entre autres, des informations sur le mouvement des corps célestes.

 

Les premiers apocryphes chrétiens sur l'ascension d'Isaïe parlent de sept cieux que le Messie traverserait lors de sa descente sur terre. Il contient également des représentations sur les différentes vitesses du passage du temps. Il semble au prophète qu'il n'a passé que deux heures au ciel, alors qu'en réalité 32 ans se sont écoulés.

 

Un certain nombre de personnages bibliques ont reçu la révélation directement au ciel. Dans le Talmud, ils sont rejoints par les quatre sages qui sont entrés dans l'Eden dans un sens physique, et non dans un sens allégorique. Mahomet, sur l'animal mythique Burak, a d'abord effectué un vol de nuit vers Jérusalem et de là, il est monté au ciel, le mirage. Au ciel, il s'est fait ouvrir la poitrine et laver le cœur, ce qui symbolise la nouvelle naissance. La tradition islamique souligne l'existence de sept cieux, dont le premier est interprété par les interprètes modernes du Coran comme l'enveloppe atmosphérique de la Terre, et les six autres comme les différentes dimensions de l'espace, de l'orbite lunaire à l'infini cosmique.

 

Inversions cosmologiques et anthropologiques de la Renaissance

 

Le fait qu'il y ait eu, à la Renaissance, une transition du modèle théocentrique au modèle anthropocentrique de vision du monde a été largement débattu en son temps. En fait, la fixation de cette transition est correcte, mais dans le déroulement du processus, elle nécessite une clarification. Au départ, la transition s'est faite du modèle théocentrique au modèle cosmocentrique. Dans diverses associations se réclamant de l'ésotérisme, l'intérêt pour la philosophie antique et sa doctrine fondamentale du cosmos est restauré. Les penseurs de la Renaissance s'intéressent de plus en plus non pas à Dieu lui-même, mais à la cosmogonie qu'il a créée conformément à son plan.

 

De là est née une étape vers la restauration, par une réinterprétation de l'héritage de l'Antiquité, de la doctrine du microcosme de l'homme. L'un des principaux ésotéristes de son temps - le moine alchimiste Basile Valentin - écrit les traités "Sur le macrocosme" et "Sur le microcosme". Le thème de la désintégration du corps cosmique primordial d'Adam Kadmon est soulevé par un appel à la kabbalistique. La restauration des particules désintégrées et submergées de la lumière adamique était considérée comme une grande mission historique. Seul un nouvel homme harmonieux pourrait restaurer le cosmos. L'alchimie a travaillé à sa création en premier lieu (et à l'obtention d'or en second lieu). La transformation de la Renaissance s'est ainsi exprimée à travers la chaîne suivante : théocentrisme - cosmocentrisme - anthropocentrisme.

 

L'ère des grandes découvertes géographiques, qui a débuté au 15e siècle, a ouvert la voie à l'expansion des frontières du monde. Le nouvel homme s'est empressé de découvrir de nouvelles terres. Mais en plus d'étendre les frontières du monde horizontalement, il y a naturellement une demande pour les étendre verticalement. Elle a trouvé une expression directe dans la popularité inattendue, au XVIIe siècle, du thème du vol de l'homme vers la lune.

 

L'histoire du voyage vers la lune est présente dans le poème chevaleresque du XVIe siècle "Roland le Furieux" de Ludovico Ariosto, basé sur les cycles arthurien et carolingien. Là, accompagné de l'apôtre Jean l'Évangéliste, le chevalier Astolphe part sur un hippogriffe (mi-cône, mi-griffon) de la montagne du paradis terrestre à la recherche de l'esprit perdu du fou Roland. Sur la lune se trouve la vallée de tout ce que les humains ont perdu. Parmi ces pertes, outre l'esprit de Roland, le chevalier voit se perdre la beauté féminine, la grâce royale, le don de Constantin (et ce après le dévoilement de Lorenzo Valla).

 

L'homme dans un modèle de mondes multiples

 

Un facteur supplémentaire motivant l'appel au thème du cosmos était le débat sur la possibilité de mondes multiples. Elle s'est d'abord développée chez les philosophes arabes, d'où elle a été transférée dans le discours européen. Déjà au début du XIIIe siècle, Fakhruddin al-Razi soutenait que l'affirmation de l'unicité du monde revenait à déprécier la puissance d'Allah.

 

À l'époque de la Réforme, le thème des mondes multiples avait apparemment fait son chemin dans la pensée européenne. On le voit notamment dans la critique de Martin Luther à l'égard du concept de multiplicité de Philippe Melanchthon, associé de Martin Luther : "Il est impossible d'imaginer qu'il y a plusieurs mondes, car il est impossible d'imaginer que le Christ est mort et ressuscité plusieurs fois, et il n'est pas non plus possible de considérer que dans un autre monde, sans la connaissance du Fils de Dieu, les gens obtiendront la vie éternelle."

 

Les idées du pluralisme cosmique ont été persécutées pendant assez longtemps, comme en témoigne, entre autres, la résonnante brûlure par sentence de l'Inquisition en 1600 de Giordano Bruno. Le fait que Bruno était - comme l'a soutenu Frances Yates, éminente chercheuse sur la culture de la Renaissance - un adepte de l'hermétisme indique l'importance du lien entre cette nouvelle cosmologie et l'anthropologie. Les partisans de l'idée de mondes multiples ne remettaient pas seulement en cause le géocentrisme et l'héliocentrisme, mais s'attendaient également à rencontrer des êtres vivants habitant le cosmos. L'attitude rébarbative de l'église a fait naître le soupçon qu'elle cachait au troupeau la réalité de la vie surnaturelle.

 

L'un des grands encyclopédistes du XVIIe siècle, directeur d'Oxford et de Cambridge College, époux de la jeune sœur d'Oliver Cromwell, John Wilkins, dans son livre de 1638, The Opening of the World on the Moon, or Discourse Concerning the Possibility of an Inhabited World on Other Planets, et dans des ouvrages ultérieurs, a affirmé que le monde lunaire était habité par des Sélénites. Le scientifique était obsédé par l'idée de construire un vaisseau spatial spécial qui pourrait atteindre la lune. Il a cité les écrits secrets des moines bénédictins, qui prétendaient contenir le secret du voyage lunaire. Wilkins croyait sincèrement qu'il était possible d'organiser un échange commercial entre les Anglais et les Sélénites. Cependant, l'idée même d'êtres lunaires aurait été empruntée par lui aux réimpressions d'auteurs antiques, notamment Plutarque, au XVIIe siècle.

 

Pratiquement en même temps que le travail de Wilkins, le livre Man on the Moon de Francis Godwin, un évêque de l'église anglicane, a été publié, ce qui témoigne en soi de l'excitation entourant le sujet des voyages spatiaux. Les habitants de la lune sont présentés par Godwin comme des personnes morales et des chrétiens de foi. La lune est dépeinte comme une version particulière d'un paradis cosmique, qui n'est toutefois pas identique au paradis divin.

 

Il est donc possible d'enregistrer qu'au début de l'ère moderne, le voyage dans l'espace prend l'aspect social de la recherche d'une civilisation plus avancée, surtout en termes moraux. Entrer en contact avec cette civilisation impliquait un approfondissement et une amélioration à un niveau correspondant au niveau cosmique de l'homme. L'image des menaces cosmiques et du mal cosmique apparaîtra bien plus tard. L'utopie spatiale avait sa place parmi les autres utopies sociales de son temps.

 

Le genre du voyage dans l'espace est devenu si populaire que des satires basées sur des aventures spatiales sont apparues. Parmi ces œuvres satiriques, citons notamment la dilogie "L'autre lumière" du dramaturge français Cyrano de Bergerac, dont la première partie s'intitulait "Les États et empires de la lune" et la seconde "Les États et empires du soleil". L'auteur s'est clairement moqué des idées de voyage dans l'espace qui circulaient, en indiquant, entre autres, les moyens d'y parvenir, tels que l'utilisation d'une cervelle de taureau, d'un pot de rosée, d'un aimant, de la volonté ou de monter un diable. Les critiques trouvent cependant dans la diologie de Bergerac des preuves de ses appels à l'alchimie, à la théosophie et au gnosticisme médiéval. Si ces appels n'étaient que des satires, cela signifiait que l'association de l'idée de voyage dans l'espace avec la transformation de la conscience humaine était largement répandue.

 

L'idée d'une pluralité de mondes était déjà légale au XVIIIe siècle et constituait la base de la vision scientifique naturelle de l'univers. Les philosophes se sont penchés sur la question de savoir comment Dieu gouvernait cette multiplicité cosmique. L'idée qu'il est le centre du cosmos autour duquel tournent les différentes sphères s'est formée. Il s'agissait déjà d'une vision différente de celle d'avant, lorsque Dieu était sorti du cosmos. La cosmologie hiérarchique avait été remplacée par une cosmologie du centrique, puis par une cosmologie de l'infini. Dans le premier modèle, Dieu était au sommet de la hiérarchie, dans le deuxième - au centre du système, dans le troisième - il est devenu une construction facultative, et son existence pouvait être niée.

 

Si aux auteurs du XVIIe siècle des bienfaits des habitants des mondes cosmiques témoignaient des terriens voyageant dans l'espace, au XVIIIe siècle déjà des créatures de l'espace pouvaient donner des estimations à la vie terrestre. C'est notamment le cas des êtres de Saturne et de Sirius sur Terre dans les "Micromégas" de Voltaire. Il en découle la conclusion du sous-développement de la civilisation terrestre et, par conséquent, de la possibilité et de la nécessité d'un changement sur la voie du progrès.

 

Espace et capitalisme

 

Dès le début, le capitalisme a tenté de faire passer le thème de l'espace dans la circulation commerciale. En 1835, aux États-Unis, dans le journal New York Sun, six articles annoncent la découverte de l'existence de populations d'êtres vivants sur la Lune à l'aide d'un télescope à réflecteur. Cette publication a fait sensation dans le monde entier et est entrée dans l'histoire du journalisme comme le "grand canular de la lune" ou le "canard lunaire". Le canular, que l'on croit avoir été écrit par le journaliste Richard Adams Locke, a généré des revenus considérables. Son succès a donné lieu à des tentatives similaires. Le célèbre écrivain américain Edgar Poe, lui-même pas étranger aux canulars, qui a écrit l'histoire L'aventure extraordinaire d'un Hans Pfaal avec le sujet du voyage sur la lune, a accusé les auteurs de la publication dans le Sun de plagiat.

 

Locke et Poe représentaient déjà les créatures spatiales - contrairement à la tradition antérieure - comme moins évoluées que les terriens. Les Locke sont des micromensuels - ressemblant à des orangs-outans avec des ailes semblables à celles des chauves-souris. À l'époque, les mictions étaient divisées en races, dont le degré de développement était corrélé à la clarté de leur peau (plus la peau est claire, plus le type racial est parfait). En fait, les notions typiques des racistes du XIXe siècle ont été transférées dans l'espace, ce qui a suggéré de nouvelles perspectives pour de nouvelles colonisations. Si, dans l'ancienne tradition, seul un homme aux qualités spirituelles particulières pouvait accéder au paradis, dans le cas d'Edgar Allan Poe, c'est le criminel qui a tué trois personnes et a tenté de s'échapper qui y parvient. Il offre son retour sur Terre sans être persécuté pour des meurtres en échange d'informations sur la Lune.

 

Au même moment, cependant, une tendance romantique dans l'interprétation des voyages spatiaux se développait. Le thème des vols vers la lune, tel qu'il est connu, a été présenté dans une série de romans d'aventure de Jules Verne. Sur cette base, on parlera plus tard de la brillante clairvoyance du romancier en ce qui concerne les voyages dans l'espace au XXe siècle. Jules Verne a en fait établi la tradition de l'héroïsme spatial. Pour aller dans l'espace, conformément à celui-ci, seules des personnes d'un grand courage pourraient le faire. C'est ainsi que, lorsque le vol spatial deviendra une réalité, les astronautes resteront longtemps présents. L'héroïsation a été alimentée émotionnellement par les précédents de décès d'astronautes.

 

Mais progressivement, le thème des cosmonautes héroïques quitte la conscience collective. Les réactions à la catastrophe de Challenger en 1986 et à celle de la navette spatiale Columbia en 2003 ont été, malgré la nature similaire de la tragédie, même en termes de nombre de victimes, d'une ampleur différente. Selon les études, la catastrophe de Challenger a eu une résonance dans la société américaine comparable à deux événements seulement : la mort de Franklin Roosevelt et l'assassinat de Kennedy. La réaction à la mort de la Colombie a été beaucoup plus faible dans le monde, et aux États-Unis même. Alors qu'en Union soviétique, les noms des cosmonautes étaient connus de tous les écoliers, dans la Russie post-soviétique, ils sont pratiquement inconnus de tous.

 

Dans le roman The First Men on the Moon (Les premiers hommes sur la lune), écrit en 1901 par Herbert Wells, le thème de la course au sélénite est à nouveau évoqué. Les Sélénites dans la version de Wells sont moins évolués que les humains. Mais lorsque leur souverain, le Grand Lunarius, apprend les ordres et les guerres de la Terre (notamment les guerres anglo-boers), il décide de couper le contact avec les Terriens, qui représentent une menace potentielle pour sa civilisation.

 

L'alternative du cosmisme russe

 

La réponse à la tendance à adapter l'espace à l'avancée du capitalisme était le cosmisme russe. Dans son essence, il représentait l'idée d'une spiritualisation de l'espace, réalisée par la transformation de l'homme et sa maîtrise de l'espace dans un état nouveau et transformé. La base philosophique du cosmisme russe était déjà résumée dans le discours des sophiologues. Les sophologues associaient la perfection spirituelle de l'homme à l'unicité cosmique.

 

Contrairement aux sophologues, les cosmistes posaient des questions pratiques : sur l'exploration du cosmos, le changement de la nature humaine, l'atteinte de l'immortalité et même, comme Nikolaï Fedorov, sur la résurrection des morts. Les images religieuses de l'immaculée conception ou de la résurrection étaient considérées par eux comme des tâches concrètes de développement nécessitant une mobilisation générale. Les cosmistes partent de l'idée que l'exploration spatiale humaine est nécessaire en raison de l'épuisement des ressources de la Terre, de la croissance démographique et des menaces écologiques. Mais cela nécessite une organisation appropriée des efforts conjoints de l'humanité. Une telle logique de raisonnement conduit inévitablement les cosmonautes dans les rangs des partisans du projet soviétique. En effet, à cette époque, beaucoup voyaient dans le communisme une doctrine et une pratique visant à créer un nouvel être humain, qui deviendrait un dieu, soumettant l'univers à sa volonté et à sa raison, et atteignant l'immortalité.

 

Cependant, les idées du cosmisme pourraient également résonner dans le cadre d'une refonte néo-religieuse de l'existence. On peut, par exemple, se référer à l'enseignement du théologien catholique Teilhard de Chardin.

 

Cosmos et eugénisme

 

Le développement des sciences naturelles au début du vingtième siècle a conduit à la question de la possibilité d'un changement volontaire de la nature humaine. On pensait que la transformation des êtres humains était technologiquement possible. L'orientation de l'eugénisme est née, qui va de pair avec l'ingénierie sociale. L'eugénisme s'est avéré être lié aux projets spatiaux. L'idée que le dépassement par l'homme de l'oikoumène de la Terre implique une transformation de l'homme (dans la tradition religieuse, une transformation) a pris de l'ampleur. Le discours eugénique a couvert la quasi-totalité du monde occidental dans les années 1920 et 1930, et seul l'effondrement du fascisme lui a ajouté des connotations négatives supplémentaires.

 

La synthèse des idées eugéniques et de la cosmonautique a également eu lieu dans les enseignements de K.E. Tsiolkovsky. Dans ses idées, la maîtrise de l'espace était fermement liée au changement de la nature humaine. Et si Tsiolkovsky est considéré comme le fondateur de la cosmonautique moderne, il faut reconnaître que la problématique anthropologique y a eu une importance fondamentale initiale.

 

Tsiolkovsky a parlé de la nécessité de surmonter l'approche subjective et corporelle de l'homme. Ce n'est pas le "moi" égoïste mais les atomes-esprits, qui existaient avant l'être subjectif de l'homme et existeront dans la perspective post-mortem, se dispersant dans le cosmos, qui constituent la véritable personnalité. L'important est l'harmonisation de ces atomes-esprits, qui conduit au développement du cosmos et de l'homme. L'existence humaine doit donc être harmonisée avec l'existence cosmique.

 

Tsiolkovsky pense qu'à l'avenir, les humains perdront complètement leur physique. Il deviendra autotrophe et se nourrira d'énergie rayonnante. La transfiguration humaine sera fondamentalement possible, en cohérence avec l'environnement de l'existence. La reproduction naturelle, que Tsiolkovsky considérait comme honteuse pour l'humanité, sera remplacée par une sélection artificielle ciblée et la parthénogenèse. "Plus l'homme progresse, déclarait l'un des précurseurs de la création de l'astronautique, plus le naturel est remplacé par l'artificiel. Tous ces changements conduiront finalement à l'obtention de l'immortalité. Le résultat du développement sera un état dans lequel la raison remplira l'univers, le cosmos entier apparaîtra comme un seul être intelligent.

 

Grande course à l'espace

 

La supériorité de l'URSS dans l'exploration spatiale n'était pas seulement déterminée par son avance dans la course technologique. Outre la victoire technologique, la percée réalisée a été une victoire du système et une victoire de l'esprit. La transformation spirituelle pour atteindre les étoiles, dont il a été question plus haut, a en fait eu lieu dans l'histoire du XXe siècle. L'homme soviétique, qui a passé le creuset des épreuves, est devenu, en termes historiques, un homme nouveau. Sur le plan anthropologique, elle combinait un haut niveau de développement intellectuel, assuré par le meilleur système pédagogique du monde, avec un centrage spirituel obtenu grâce à la répudiation par la culture soviétique de la moralité bourgeoise (y compris petite-bourgeoise - consumériste). Les drames sanglants de la guerre civile et de la grande guerre patriotique étaient une sorte de rituel d'initiation d'un homme nouveau. Exactement douze ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale (la période de douze ans est sacrée et symbolique), l'URSS lance le premier satellite artificiel du monde dans l'espace.

 

Les Américains - les adversaires dans la course à l'espace - ne pensaient pas non plus uniquement en termes de technologie. Pour eux, la lutte pour l'espace était une modification du rêve américain. Le premier atterrissage sur la Lune en 1969 a été pour eux un stimulant émotionnel et psychologique au même titre que les victoires de 1957 et 1961 pour l'URSS. En fait, c'est après que les rôles dans la course idéologique se sont inversés et que l'Union soviétique a commencé à perdre peu à peu du terrain dans la bataille pour les cœurs et les esprits. La proclamation de l'Initiative de défense stratégique, également connue sous le nom de programme "Guerre des étoiles", par Ronald Reagan en 1983 constituait déjà en réalité une pression psychologique sur l'ennemi pour le pousser à se rendre.

 

De manière caractéristique, du côté américain, l'exploration spatiale a été présentée dans les premières décennies en corrélation avec des thèmes religieux, comme le mouvement de l'homme vers Dieu. La religiosité des astronautes américains a été soulignée. Des rumeurs ont circulé sur certains précédents mystiques survenus lors de sorties spatiales humaines. En URSS, sous N.S. Khrouchtchev, au contraire, le thème de l'espace était mis en avant dans le cadre de la propagande antireligieuse. C'est à Nikita Sergueïevitch lui-même que l'on doit cette phrase : "Gagarine a volé dans l'espace sans voir Dieu. Selon l'un des récits, transmis par ouï-dire, lorsque Yuri Alekseyevich, à qui l'on demandait s'il avait vu Dieu dans l'espace, a donné une réponse négative, l'une des vieilles dames a fait le commentaire suivant : "Comment pouvez-vous le voir dans l'espace, si vous ne l'avez pas vu sur Terre". Il est possible que le thème religieux ait été délibérément donné en relation avec l'espace dans la propagande américaine pour s'opposer à la cosmonautique soviétique anti-religieuse. Cependant, cette anti-religiosité était aussi apparemment une exagération.

 

Projections idéologiques du futur dans la science-fiction

 

Au vingtième siècle, à l'ère des idéologies, le thème de l'espace dans le discours humanitaire était associé à la question du modèle de l'ordre social du futur. La science-fiction est devenue le ristalicenter de ce type de discussion idéologique. En URSS, la science-fiction est devenue presque l'axe principal du thème de l'avenir communiste. Dans le discours officiel, le communisme était déclaré mais peu exploré. Quelle sorte d'être humain serait sous le communisme, quelle sorte de personne deviendrait-il ou elle ? Il n'existait ni la volonté d'aborder ces questions, ni une méthodologie pour de tels développements. En ce sens, la science-fiction était beaucoup plus libre, tandis que la méthode artistique supprimait (bien que pas entièrement) le poids de la responsabilité idéologique.

 

La variante classique de la présentation de la société communiste au moyen de la science-fiction est le roman "La nébuleuse d'Andromède" d'Ivan Efremov en 1957. Selon la chronologie du roman, l'époque du communisme est décrite comme l'époque du Grand Ring. Le Grand Anneau réunit toutes les civilisations hautement développées de l'univers en un seul système d'information.

Dans le roman de 1970 "L'heure du taureau", Efremov oppose au contraire l'humanisme communiste terrestre à l'état totalitaire de la planète Tormans. La société de la planète Tormance est hiérarchisée, délimitée par la longévité sociale. Au sommet se trouvent les dirigeants de l'État - des serpents - et à la tête de l'État lui-même se trouve le Conseil des Quatre, qui combine la terreur et les méthodes d'influence psychique dans sa gestion. La base de la politique culturelle de la planète Tormans est une stupéfaction systématique de la population. Les chercheurs pensent qu'Efremov, en plus d'une critique générale des idées d'un État totalitaire, a critiqué dans "Bull Hour" la Chine maoïste.

 

La question de l'homme dans la perspective d'une nouvelle percée cosmique

 

Comment agir pour atteindre un objectif, si vos capacités semblent insuffisantes pour y parvenir ? Il existe deux formules possibles. La première recette consiste à attirer des ressources supplémentaires (attirer de l'argent supplémentaire, faire travailler les autres pour vous). Cette recette est bonne tant que les occasions de le faire existent et que le but à atteindre est en corrélation avec le paradigme dans lequel les ressources sont attirées. Mais elle échoue à la fois lorsque les ressources sont rares et lorsque l'objectif implique un changement de paradigme. Il existe une deuxième prescription pour ce cas - le changement de conscience. Le sujet qui atteint le but, en changeant sa conscience, devient différent, et étant devenu différent, il est capable de quelque chose dont il n'était pas capable auparavant. En fait, c'est une recette pour la transformation. C'est ce dont il est question dans la perspective du passage de l'homme de la vie terrestre à la vie cosmique. Une nouvelle percée cosmique doit être associée à une transformation spirituelle, car sinon la tentative de transition correspondante s'avérera être la fin de l'histoire humaine.

 

 

Vardan Baghdasaryan

 

Vardan Bagdasaryan (né en 1971) est un historien et politologue russe, docteur en sciences historiques, doyen du département d'histoire, de sciences politiques et de droit de l'université d'État de Moscou (MSU), professeur du département de politique d'État de la MSU Lomonosov, président de la branche régionale de la société russe "Znanie" de la région de Moscou, chef de l'école scientifique "Bases de valeur des processus sociaux" (axiologie). Membre régulier du Club d’Izborsk

 

Traduit du russe par Le Rouge et le Blanc.

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René Primevère Lesson: les oiseaux de paradis des forêts de Nouvelle-Guinée

9 Avril 2021 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles Publié dans #Nature, #Sciences, #Voyage, #France

René Primevère Lesson: les oiseaux de paradis des forêts de Nouvelle-Guinée

« Dès les premiers jours de notre arrivée à la Nouvelle-Guinée, cette terre de promission des naturalistes, nous aperçûmes les paradisiers-émeraudes volants dans ces vieilles forêts, filles du temps, dont la sombre profondeur est peut-être plus magique et le plus pompeux spectacle qui puisse frapper les regards d’un Européen. Ces volatiles frappaient l’air avec grâce et par ondulations : les plumes de leurs flancs formaient un panache gracieux et aérien qui, sans hyperbole, ne ressemblait pas mal à un brillant météore, filant dans l’air dans une étoile. »

René Primevère Lesson, Histoire naturelle des oiseaux de Paradis et des Épimaques. Paris, Arthus-Bertrand, 1835.

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k99290b/f1.item

La corvette La Coquille, à bord laquelle Lesson fit le tour du monde de 1822 à 1825. Dessin par Antoine Roux.

La corvette La Coquille, à bord laquelle Lesson fit le tour du monde de 1822 à 1825. Dessin par Antoine Roux.

René Primevère Lesson (1794-1849). Portrait par Louis Charles Arsenne.

René Primevère Lesson (1794-1849). Portrait par Louis Charles Arsenne.

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Alain de Benoist: Les animaux n'ont pas de droits, mais nous avons des devoirs envers eux

9 Avril 2021 , Rédigé par Le Rouge et le Blanc Publié dans #Alain de Benoist, #Nature, #Philosophie

"Il n'y a que ce qui est semblable qui peut être égal".

Aristote, Politique.

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On ne doit pas chasser le gibier qu'un tigre poursuit déjà

25 Mars 2021 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles Publié dans #Environnement, #Nature, #Russie, #Tigre

"Le tigre est un gentilhomme au cœur généreux dont le courage est illimité; et lorsque sa race sera éteinte, car elle le sera certainement si l'opinion publique  ne s'émeut pas en sa faveur, l'Inde aura perdu le plus noble spécimen de sa faune."

Jim Corbett, A l'affût des tigres mangeurs d'hommes (Man-Eaters of Kumaon).

"Dans la cordillère du Sikhote-Alin (Extrême-Orient russe), les tigres, "qui ont le goût de la beauté", selon les termes d'une spécialiste russe, se postent sur les promontoires rocheux en surplomb de la mer du Japon, et restent ainsi des heures, à contempler l'immensité du Pacifique..."

http://europe-tigre.over-blog.com/2021/02/echos-et-resonances.html

“The fact is that the average man’s love of liberty is nine-tenths imaginary, exactly like his love of sense, justice and truth. He is not actually happy when free; he is uncomfortable, a bit alarmed, and intolerably lonely. Liberty is not a thing for the great masses of men. It is the exclusive possession of a small and disreputable minority, like knowledge, courage and honor. It takes a special sort of man to understand and enjoy liberty — and he is usually an outlaw in democratic societies.”
H.L. Mencken

"Dans la taïga, sur les traces du tigre de l'Amour" est un très intéressant documentaire diffusé par Arte et que l'on peut voir sur youtube. On y fait la rencontre d'un homme qui a tué d'un coup de couteau dans l'aorte un tigre qui l'attaquait et qui venait de le mordre deux fois aux jambes. Pourquoi ? alors qu'il chassait les sangliers avec son chien, un tigre s'est approché en serpentant à travers les arbres, se cachant derrière les troncs pour éviter le coup de carabine, et s'est jeté sur lui. Le récit est saisissant. Cet homme est certes courageux, il a eu le réflexe de se défendre et il a eu beaucoup, beaucoup de chance. Mais comprend-il vraiment pourquoi ceci lui est-il arrivé ?

Son histoire ressemble étrangement à celle de Dersou, dans le fameux récit de Vladimir Arseniev "La taïga de l'Oussouri - mes expéditions avec le chasseur gold Dersou", lorsqu'il tue un tigre qui chassait avant lui le même gibier (chapitre 15, "Bramements de cerfs", à la fin, pp. 152-153 de l'édition de Payot de 1939). Quand Dersou réalise ce qu'il a fait, c'est trop tard, le tigre est mort. C'est un tournant dans la vie de Dersou. Il a enfreint une loi sacrée de la taïga. Désormais, le malheur le guette.

Certainement, il y a une très grande différence entre ce Russe et Dersou. Dersou était un chasseur gold, un indigène, issu par ses lointains ancêtres de la même taïga que le tigre; un homme prudent, pacifique, religieux.

C'est l'abîme entre le Blanc et le Rouge, entre le colon et l'indigène, entre le gentilhomme et l'homme vil et entre le poète et celui qui ne l'est pas.

Pierre-Olivier Combelles

 

Sur Vladimir Arseniev et Dersou Ouzala, sur ce même blog:

https://pocombelles.over-blog.com/page-der-4356554.html

https://pocombelles.over-blog.com/2020/06/sergei-krivchenko-vladimir-kladiyevich-arseniev-et-son-heritage-artistique.html

Sur les livres, un couteau sibérien à longue lame. Est-ce celui qui a tué le tigre ? parmi les livres, y-a-t-il celui d'Arseniev ? on ne le mentionne pas dans le film.

Sur les livres, un couteau sibérien à longue lame. Est-ce celui qui a tué le tigre ? parmi les livres, y-a-t-il celui d'Arseniev ? on ne le mentionne pas dans le film.

Vladimir Arseniev et Dersou Ouzala. Photographie extraite du livre d'Arseniev: "La taïga de l'Oussouri" (Payot, édition de 1938).

Vladimir Arseniev et Dersou Ouzala. Photographie extraite du livre d'Arseniev: "La taïga de l'Oussouri" (Payot, édition de 1938).

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Joyeux Printemps ! joyeux Norouz !

20 Mars 2021 , Rédigé par Le Rouge et le Blanc Publié dans #Asie, #France, #Iran, #Nature, #Religion

Jonquilles sauvages. Forêt de Rambouillet (Yvelines, France). Photo: Pierre-Olivier Combelles.

Jonquilles sauvages. Forêt de Rambouillet (Yvelines, France). Photo: Pierre-Olivier Combelles.

Le temps a laissié son manteau 
De vent, de froidure et de pluye, 
Et s'est vestu de brouderie, 
De soleil luyant, cler et beau.

Il n'y a beste, ne oyseau, 
Qu'en son jargon ne chante ou crie 
Le temps a laissié son manteau 
De vent, de froidure et de pluye.

Riviere, fontaine et ruisseau 
Portent, en livree jolie, 
Gouttes d'argent, d'orfaverie ; 
Chascun s'abille de nouveau 
Le temps a laissié son manteau.

 

Charles d'Orléans (1394-1465)

 

Joyeux Norouz à nos amis Iraniens qui fêtent aujourd'hui leur entrée dans une nouvelle année et un nouveau siècle: 1400. Souhaitons-leur qu'ils soient pour eux synonymes  de bonheur et de succès.

 

Joyeux Printemps ! joyeux Norouz !
Joyeux Printemps ! joyeux Norouz !

"La symbolique des fleurs n’est pas de notre race, mais ne blasphémons pas à propos d’elle. Si, au moment où les plantes fleurissent, il t’arrive de faire une promenade en brousse, examine les abeilles. Tu sauras que chaque fleur est un sentier mystique. Avant de fabriquer du miel dont Dieu lui-même a dit qu’il était un remède, l’abeille se pose sur chaque fleur qui a sa tête au soleil pour lui demander sa contribution. Et comme Dieu l’a dit à la fin du 76e verset de la sourate XVI : « Il y a en cela un signe pour ceux qui réfléchissent." [24]

24Hampâté Bâ, Amadou, Vie et enseignement de Tierno Bokar, Le sage du Bandiagara, Seuil, Points Sagesses, 2004.

http://www.teheran.ir/spip.php?article994#gsc.tab=0

Sur Tierno Bokar: un entretien télévisé avec son neveu Hampaté Bâ (archives INA):

https://www.youtube.com/watch?v=UN_XuQexK64

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Omixochitl

5 Février 2021 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles Publié dans #Amérique du sud, #Art, #Nature

Omixochitl

Cette plante aux fleurs blanches, un peu charnues, un peu épaisses, d'un blanc mat un peu cassé comme la farine, au parfum capiteux, envoûtant, qu'elles libèrent le soir après le coucher du soleil, c'est la tubéreuse (Polianthes tuberosa), que Louis XIV aimait particulièrement et dont on faisait des bouquets à la Cour de Versailles.

La tubéreuse n'est pas originaire d'Europe, mais du Mexique, d'où elle a été rapportée par les Conquistadores. Son vrai nom, c'est omixochitl, la "fleur-os", en nahuatl, la langue des Aztèques (omitl: os, xochitl: fleur).

Cette Agavacée semble être originaire du désert du Sonora, où on ne la trouve plus à l'état sauvage. Amoureux des fleurs et de la musique, beautés éphémères de la vie fugitive, les princes Aztèques en ornaient leurs jardins et paraît-il, mélangeaient ses fleurs au chocolat (chocolatl) pour le parfumer.

Voici pourquoi aujourd'hui un bouquet d'omixochitl orne mon vase en bambou d'ikebana et parfume mes journées.

P.-O.C.

Sur le même sujet et sur le même blog:

https://pocombelles.over-blog.com/2019/02/homenaje-a-xochipilli-de-la-primavera-en-los-andes-del-peru.html

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