philosophie
Aristote (Politique): les deux manières d'acquérir des richesses
"Mais, comme nous l’avons dit, l’art d’acquérir la richesse est de deux espèces : l’une est sa forme mercantile, et l’autre une dépendance de l’économie domestique ; cette dernière forme est nécessaire et louable, tandis que l’autre repose sur l’échange et donne prise à de justes critiques (car elle n’a rien de naturel, elle est le résultat d’échanges réciproques) : dans ces conditions, ce qu’on déteste avec le plus de raison, c’est la pratique du prêt à intérêt parce que le gain qu’on en retire provient de la monnaie elle-même et ne répond plus à la fin qui a présidé la création. Car la monnaie a été inventée en vue de l’échange, tandis que l’intérêt multiplie la quantité de monnaie elle-même. C’est même là l’origine du mot intérêt (1) : car les êtres engendrés ressemblent à leurs parents, et l’intérêt est une monnaie née d’une monnaie. Par conséquent, cette dernière façon de gagner de l’argent est de toutes la plus contraire à la nature."
Aristote, Politique, Livre I, 10. Traduction par J. Tricot. Bibliothèque des textes philosophiques. Vrin, Paris, 2005.
(1) τόχος, signifiant à la fois enfant, petit (partus), et revenu de l’argent (foenus, usura).
Deux pensées sur la mort
"Bien que la tombe te semble une prison, c'est la libération de l'âme.
Quelle graine fut semée dans la terre qui n'ait poussé ?
Pourquoi ce doute au sujet de la graine qu'est l'homme.
Djalâl ad-Dîn Rûmî
Mystique et poète persan du XIIe siècle.
"Chez le contemplatif et chez lui seul, l'âme ne meurt pas avec le corps."
Nicolas Gomez Dávila
Moraliste colombien (1913-1994)
Frère arbre
Ernst Jünger (à gauche, en uniforme de l'armée allemande) et Carl Schmitt, en barque, sur le lac, devant le château de Rambouillet, en 1941.
"Bruder Mensch hatun schon oft verlassen, Bruder Baum nie."
("Frère homme nous a souvent abandonné, frère arbre jamais").
Ernst Jünger
Noblesse et service (Bonald)
"Ce sont des hommes de la nation, gentis homines, d'où est venu le nom de gentilshommes, parce qu'ils sont spécialement dévoués à son service; des notables, enfin, notabiles, d'où est venu, par contraction, le nom de notables, c'est-à-dire, des hommes remarquables enttre les autres parce que ceux qui exercent une fonction sont nécessairement distingués de ceux au profit de qui cette fonction s'exerce.
Ainsi, le nobles ou notables sont les serviteurs de l'Etat, et ils ne sont pas autre chose: ils n'exercent pas un droit, ils remplissent un devoir; ils ne jouissent pas d'une prérogative, ils s'acquittent d'un service. Le mot service, employé à désigner les fonctions publiques, a passé de l'Evangile dans toutes les langues des peuples chrétiens, où l'on dit le service, faire son service, servir, pour exprimer que l'on est occupé dans la magistrature ou dans l'armée. Quand Jésus-Christ dit à ses disciples: "Que le plus grand d'entre vous ne soit que le serviteur des autres; - quel est le plus grand de celui qui sert ou de celui qui est servi ?" Il ne fait que révéler le principe de toute société, ou plutôt de toute sociabilité, et nous apprendre que tout dans le gouvernement de l'Etat, pouvoir et ministère, se rapporte à l'utilité des sujets, comme tout dans la famille, se rapporte au soin des enfants: que les grands ne sont réellement que les serviteurs des petits, soit qu'ils les servent en jugeant leurs différends, en réprimant leurs passions, en défendant, les armes à la main, leurs propriétés, ou qu'ils les servent encore en instruisant leur ignorance, en redressant leurs erreurs, en aidant leur faiblesse: le pouvoir le plus éminent de la société chrétienne ne prend d'autre titre que serviteur des serviteurs; et si la vanité s'offense à ces distinctions, la raison ne saurait méconnaître les services."
Louis-Auguste, vicomte de Bonald: Considérations sur la noblesse.
Pierre Dortiguier: le Roi et l'Ancien Régime
Pierre Dortiguier est professeur de Philosophie et politologue.
"Tant qu’une aristocratie pure, c’est-à-dire professant jusqu’à l’exaltation les dogmes nationaux, environne le trône, il est inébranlable, quand même la faiblesse ou l’erreur viendrait à s’y asseoir ; mais si le baronnage apostasie, il n’y a plus de salut pour le trône, quand même il porterait saint Louis ou Charlemagne ; ce qui est plus vrai en France qu’ailleurs. Par sa monstrueuse alliance avec le mauvais principe, pendant le dernier siècle, la noblesse française a tout perdu ; c’est à elle qu’il appartient de tout réparer. Sa destinée est sûre, pourvu qu’elle n’en doute pas, pourvu qu’elle soit bien persuadée de l’alliance naturelle, essentielle, nécessaire, française du sacerdoce et de la noblesse."
Cte Joseph de Maistre, Du pape (1817)
"Quand il vit que le gouvernement de Louis XVIII voulait encore balancer les partis, et se tenir comme indécis entre les catholiques et leurs adversaires, il n'augura pas bien de cette politique; il disait qu'un roi doit suivre la justice, et compter sur la protection du Ciel, sans craindre les conséquences."
Pierre de Clorivière.
"Dans une société en révolution, le défaut, ou, pour parler plus exactement, l'absence de pouvoir légitime, constitue tout homme qui en reconnaît l'autorité Ministre du pouvoir pour combattre l'erreur par ses écrits, et même la tyrannie par ses armes, dès qu'il peut le faire avec probabilité de succès. C'était à tous de conserver la société, c'est à chacun à la rétablir. D'ailleurs, l'homme qui combat pour la vérité est défendu par elle, et il a pour lui ce qu'il y a de plus fort au monde. les partisans des bonnes et vieilles maximes remplissent donc le plus saint des devoirs en restant en insurrection permanente, au moins de pensées et d'actions privées, contre ce que les tyrans et leurs esclaves appellent la loi, et qui n'est autre chose que des opinions absurdes, ou atroces, qu'un petit nombre d'hommes pervers a imposées à un grand nombre d'hommes faibles."
Louis-Gabriel-Ambroise, vicomte de Bonald (1754-1840), Du pouvoir et du devoir dans la société.
"Le principe non pas simplement monarchique, mais dynastique, qui met le plus haut poste de l'État à l'abri des caprices et des ambitions, me paraissait, et me parait toujours, préférable à l'élection généralisée dans laquelle nous vivons depuis Danton et Bonaparte. L'exemple des monarchies du Nord (de l'Europe) m'a confirmé dans ce sentiment. "
Georges Dumézil, Entretiens avec Didier Eribon
Comprendre la psychose planétaire du Coronavirus à travers la critique du libéralisme par Jean-Claude Michéa (2013)
"Le libéralisme privatise les valeurs morales et la philosophie comme il privatise l’eau, l’électricité, l’école."
"La richesse et le pouvoir nous coupent de nos semblables."
"Dès qu’on monte dans la société, l’oxygène moral se raréfie."
Jean-Claude Michéa
Consulter aussi sur ce blog:
http://pocombelles.over-blog.com/2015/10/le-mecanisme-de-la-double-pensee-jean-claude-paye.html
La panique du coronavirus est le produit de l'urbanisation généralisée des sociétés humaines. Une relecture de Lewis Mumford
Toutes mes méthodes, tous mes moyens sont sensés: c'est mon but qui est fou.
Capitaine Achab (Moby Dick, par Herman Melville). Cité par L. Mumford dans "Le Mythe de la machine" (trad. fr. Fayard, 1974).
"La société des grandes métropoles est particulièrement bien outillée pour éliminer les initiatives spontanées et l’indépendance de l’esprit."
"Au dernier stade de son développement, la métropole capitaliste est devenue le ressort essentiel qui assure le fonctionnement de cet absurde système. Elle procure à ses victimes l’illusion de la puissance, de la richesse, du bonheur, l’illusion d’atteindre au plus haut point de la perfection humaine.
En fait, leur vie est sans cesse menacée, leur opulence est éphémère et privée de goût, leurs loisirs sont désespérément monotones, et leur peur justifiée de la violence aveugle et d’une mort brutale pèse sur cette apparence de bonheur. Dans un monde où ils ne peuvent plus reconnaître leur œuvre, ils se sentent de plus en plus étrangers et menacés : un monde qui de plus en plus échappe au contrôle des hommes, et qui, pour l’humanité, a de moins en moins de sens.
Certes, il faut savoir détourner les yeux des sombres aspects de la réalité quotidienne pour prétendre, dans ces conditions, que la civilisation humaine a atteint son plus brillant sommet.
Mais c’est à cette attitude que les citoyens de la métropole s’entraînent chaque jour : ils ne vivent pas dans un univers réel, mais dans un monde de fantasmes, habilement machiné dans tout leur environnement, avec des placards, des images, des effets de lumière et de la pellicule impressionnée ; un monde de murs vitrés, de plexiglass, de cellophane, qui les isole de leur peine et des mortifications de la vie, - monde d’illusionnistes professionnels entourés de leurs dupes crédules. (…)
Les spectateurs ne conversent plus comme des personnes qui se rencontrent au croisement des routes, sur la place publique, autour d’une table. Par l’antenne de la radio et de la télévision, un très petits nombre d’individus interprètent à notre place, avec une adresse toute professionnelle, les mouvements d’opinion et les événements quotidiens. Ainsi les occupations les plus naturelles, les actes les plus spontanées sont l’objet d’une surveillance professionnelle et soumis à un contrôle centralisé. Des moyens de diffusion, aussi puissants que variés, donnent aux plus éphémères et aux plus médiocres ouvrages un éclat et une résonance qui dépassent de loin leurs mérites.
Lewis Mumford, La Cité à travers l'histoire.
Collection Esprit, Editions du Seuil (Paris)
Nouvelle édition (et traduction française): Agone (2011)
« Dans le système capitaliste, la permanence n’a pas droit de cité, ou plutôt les seuls éléments stables qui s’y retrouvent de façon constante sont l’avarice, la cupidité et l’orgueilleuse volonté de puissance ».
« L’histoire de Rome indique avec un relief particulier ce qui, dans le domaine politique aussi bien que dans celui de l’urbanisme, doit être à tout prix évité. Nous voyons là de nombreux signaux d’alarme, indiquant le départ de pistes dangereuses. Lorsque, dans les centres surpeuplés, les conditions d’habitat se détériorent tandis que le prix des loyers monte en flèche, lorsque le souci d’exploiter de lointains territoires l’emporte sur la recherche de l’harmonie interne, nous songeons inévitablement à ces précédents romains. »
Ainsi retrouvons-nous aujourd’hui les arènes, les immeubles de rapport, les grands spectacles avec nos matchs de football, nos concours de beauté, le strip-tease rendu omniprésent par la publicité, les stimulations constantes du sexe, de la boisson, de la violence, dans un climat digne en tout point de la Rome antique. Et nous voyons également se multiplier les salles de bain et les piscines, et des autoroutes non moins coûteuses que les anciennes routes pavées, cependant qu’attirent les regards des milliers d’objets éphémères et brillants, merveilles d’une technique collective, mis à la portée de toutes les convoitises. Ce sont les symptômes de la décadence : le renforcement d’un pouvoir amoral, l’amoindrissement de la vie. »
Lewis Mumford, La Cité à travers l’histoire (The City in history, 1961). Editions Agone, 2011.
« Les sectateurs du mythe de la grande métropole, qui ne veulent voir dans ses proliférations cancéreuses que les poussées d’une croissance normale, continueront d’appliquer automatiquement leurs cataplasmes, leurs onguents, leurs slogans incantatoires et leurs spécialités de charlatans, jusqu’à ce qu’il soit trop tard pour sauver la civilisation de la mort et se sauver eux-mêmes. Une grande partie de l’œuvre de reconstruction urbaine des cent dernières années, y compris, certes, la plus récente-démolition de quartiers insalubres, rénovation d’édifices publics, extensions suburbaines, maisons modèles-, n’a fait que perpétuer dans les structures d’une perpétuelle nouveauté la même concentration sans but défini et le même désordre fondamental auquel il était indispensable de porter remède. »
Lewis Mumford, Le déclin des villes. France-Empire, 1970.
"Grâce à cette nouvelle "mégatechnologie", la minorité dominante créera une structure uniforme, supraplanétaire, embrassant tout, et destinée au travail automatique. Au lieu de fonctionner activement comme une personnalité autonome, l'homme deviendra un animal passif, sans but, conditionné par la machine, et dont les fonctions propres, suivant l'actuelle interprétation du rôle de l'homme par les techniciens, seront soit insérées dans la machine, soit strictement limitées et contrôlées au profit d'organisations dépersonnalisées, collectives." ((Mumford, Le mythe de la machine, trad. 1973, p. 2)
Et ici le résumé de l'ouvrage célèbre (et toujours épuisé en français depuis l'édition de Fayard en 1974): Le mythe de la machine: http://elkorg-projects.blogspot.fr/2009/12/lewis-mumford-myth-of-machine-note-de.html
Les faubourgs (asentamientos) s'étendent à perte de vue dans le désert autour de Lima, la capitale du Pérou (10 millions d'habitants, le tiers du pays.). Les habitants sont venus des Andes, où le soleil brille toujours, où l'air est pur et où ils vivaient du travail des champs. Ph/ P.O. Combelles, 2012: http://pocombelles.over-blog.com/article-le-perou-pays-emergent-qui-pratique-l-inclusion-sociale-111485954.html
Republication de l'article de mon blog:
"UN HOMME RUSSE NE PEUT PAS SE SENTIR HEUREUX SI UNE INJUSTICE SE PRODUIT QUELQUE PART" (Charles de Gaulle). Entretien de Elena Jomullo (Елена Хомулло) avec le général Leonid Grigorievich Ivashov (Леонид Ивашов)
pravoslavie.ru
19.11.2015
Le général Leonid Grigorievich Ivashov - personnalité militaire et publique russe, président de l'Académie des problèmes géopolitiques, professeur du département de journalisme international de l'Institut d'État des relations internationales de Moscou, membre de l'Union des écrivains russes - au cours de la conversation nous a littéralement révélé le monde entier : l'état actuel de la planète est devenu évident.
L'entretien avec lui a révélé les problèmes cachés de la civilisation, le conflit entre le phénomène mondial et les pays individuels, auquel l'équilibre actuel des pouvoirs sur la scène mondiale pourrait éventuellement conduire.
Elena Jomullo (Елена Хомулло): Leonid Grigorievich, vous êtes le président de l'Académie des problèmes géopolitiques, vous êtes engagé dans l'étude des conflits depuis de nombreuses années. Quel est l'équilibre géopolitique des pouvoirs dans le monde aujourd'hui ?
- La situation mondiale actuelle est évaluée comme un conflit complexe permanent entre les idéologies, les civilisations, les sens de la vie, entre le passé et l'avenir. Lorsque l'humanité avait un objectif et une vision clairs de l'avenir, il n'y avait pas de conflit avec le passé - c'était la base de l'aspiration à l'avenir. Et lorsqu'un tel objectif n'existait pas - presque tous les peuples vivent maintenant dans un état de dépression, d'incertitude quant à l'avenir, de non-sens de leur vie - la plupart des pays retournent au passé, y compris la Russie, à cet ordre soviétique, au nom de Staline.
Dans le processus géopolitique mondial, les civilisations ethno-culturelles (en tant que formes supérieures d'association sociale des peuples) occupent les premières places. Les États ont déjà été vaincus par la communauté oligarchique transcontinentale mondiale. Comme la réponse à cette oligarchie gouverne aujourd'hui le monde (elle ordonne des révolutions, des guerres, spécifie une mauvaise voie de développement, impose des normes de consommation, antihumaines : mariages homosexuels, etc.), la société vit à son tour selon les lois de la nature et de l'espace, et par conséquent les civilisations mondiales viennent sur les principales positions.
Le principal conflit aujourd'hui oppose les civilisations de type oriental, dont l'Amérique latine, et l'Occident, où le ballon est dirigé par le grand capital financier. L'axe de confrontation entre l'Occident et l'Orient est en train de se rétablir - les civilisations, les États et les peuples s'opposent aux communautés transnationales. Cet état est dangereux, il conduit au déclenchement d'une guerre mondiale. La tâche de la civilisation russe, qui réunit pratiquement 200 ethnies, est de réguler les relations entre les autres, même les anticivilisations, comme l'Occident.
Chaque civilisation mondiale, comme le monde végétal, le monde animal, a sa propre fonction. Ils sont créés et construits principalement parce qu'ils ont besoin d'un équilibre, d'un équilibre des forces - tant dans la nature que dans la société.
- Selon vous, quels sont les vecteurs du développement humain aujourd'hui ?
- Il existe aujourd'hui trois vecteurs de développement. La première est une tentative de l'élite anglo-saxonne de construire un ordre mondial unipolaire, la seconde est une oligarchie créant son monde monopolaire sous le pouvoir de l'argent, en utilisant la puissance militaire, économique anglo-saxonne, mais il y a aussi un troisième vecteur - le monde multipolaire. Son expression vivante est un groupe de pays BRICS. Seulement cinq pays qui sont des pays matriciels - la base des civilisations futures : Le Brésil - Amérique latine, l'Afrique du Sud - Afrique, la Chine et l'Inde, respectivement, l'Asie et la Russie agissent toujours en tant qu'État, mais on assiste progressivement à une restauration de sa structure civilisationnelle en tant que civilisation russe et du destin commun de tous les peuples qui faisaient partie de l'Empire russe, et ensuite de l'URSS. Le processus qui a commencé comme une union économique eurasienne va se transformer en une union de peuples.
- Jusqu'à quel point le monde est-il entré dans un état de conflit, de délabrement spirituel et moral ? Comment voyez-vous la sortie de cette situation ?
- L'ordre mondial occidental, dominé par un capital immoral, est dans une impasse et il n'y a plus de développement. Entre autres choses, il y a un conflit entre l'homme et la nature. Nous sommes appelés sur cette terre en tant qu'êtres intelligents afin de maintenir l'harmonie, d'équilibrer les relations même dans le domaine de la flore et de la faune, de maintenir l'équilibre entre l'Ouest et l'Est. Le monde doit être multipolaire. Cette idée a été confirmée par le philosophe russe Konstantin Nikolaevich Leontiev, qui a dit que chaque nation porte sa propre culture, ce qui explique pourquoi notre monde multicolore et complexe est si beau et si stable.
Après l'effondrement de l'URSS, ils ont tenté de créer un ordre mondial unipolaire. Les Américains ont essayé de prendre la tête de l'arène mondiale, mais ont été paresseux pour élaborer la théorie scientifique. Tout d'abord, ils misaient sur la supériorité militaire sur tous les autres (leur budget militaire dépassait de loin les budgets des autres pays), voulaient faire servir tout le monde et augmenter les profits de leur entreprise, ensuite - sur la puissance économique et enfin - sur l'impudence politique. Tout cela est simplement primitif, de sorte qu'aucune théorie d'existence dans un monde unipolaire n'a été envisagée pour les autres nations.
Aujourd'hui, la situation change, la voie de sortie est devenue claire. Il est apparu une "matriochka géopolitique" - l'Union eurasienne - le centre de l'Eurasie, l'organisation de Shanghai - c'est déjà une construction civilisationnelle du continent eurasien - et le groupe BRICS - une coalition qui est une alternative à l'Occident. Il y aura des relations complètement différentes dans cet ordre mondial. Leurs communautés scientifiques, intellectuelles et spirituelles doivent créer un système de valeurs interétatiques, des relations intercivilisationnelles de type "non occidental", un système de sécurité, leur propre monnaie, un modèle d'économie qui ne vole pas la nature.
Ce n'est pas un hasard si une réunion d'écologistes s'est tenue en avril 2015 - le processus de compréhension de la nature non-usage des relations avec la nature est en cours. Non seulement les dirigeants des pays de l'OCS et du BRICS se sont réunis à Ufa en juillet de cette année, mais le secrétaire du Conseil de sécurité russe, Nikolai Platonovich Patrushev, a rencontré ses collègues, et a ainsi parlé du futur modèle de sécurité. Sergey Naryshkin a réuni les présidents des parlements de ces pays - les bases d'un système plus juste que la soi-disant "démocratie" occidentale sont déjà en cours de construction. Les dirigeants syndicaux ont également discuté de leurs problèmes sociaux, ce qui est important. Comme on peut le voir, le nouveau monde se construit progressivement.
Quant à la Russie elle-même, ses actions en Syrie, elle a atteint sa géopolitique traditionnelle, dont l'essence a été le mieux exprimée par le général Charles de Gaulle : "Un homme russe ne peut pas se sentir heureux si une injustice se produit quelque part". Et c'est notre tâche, notre direction - construire un nouveau monde juste. De plus, en Syrie, nous sauvons la civilisation islamique et aidons l'Europe à survivre.
- Aujourd'hui, la Russie entre sur la scène mondiale. A votre avis, en quelle qualité notre pays est-il représenté, quel rôle joue-t-il et que peut-il offrir au monde ?
- La Russie s'est volontairement retirée de l'arène mondiale lors de la proclamation de M. Eltsine en 1992 : "Notre objectif est de nous intégrer dans la communauté civilisée occidentale". Il ne comprenait rien à l'ordre mondial, ne lisait pas les classiques : Nikolaï Danilevsky, Oswald Spengler. Samuel Phillips Huntington, dans son ouvrage "Clash of Civilizations" de 1993, a montré que les civilisations peuvent être similaires à certains égards, mais qu'il est impossible de les intégrer les unes aux autres - l'identité de valeur des personnes est perdue. Nous voyons que les Américains et les Britanniques ont fait des Européens des gens différents, les ont mis aux normes de la civilisation marine, ont imposé une matrice de leurs valeurs : bénéfice, expansion, violence - et ont forcé les Européens, qui avaient péché à l'époque de l'Empire romain, à travailler dans la même direction. A noter : dès que notre pays a agi en leader de la résistance politique à l'Occident, a commencé à ne désobéir ni au capital occidental ni à l'impudence politique américaine (lorsque des sanctions nous ont été imposées, et que nous avons accepté ce combat), au défilé sur la Place Rouge se trouvaient des représentants de pays qui représentent 38% de la population de la Terre, et en 2010 - seulement 7% - sont américains, britanniques, français et polonais. La question est la suivante : quel système de valeurs spirituelles et morales remplira l'espace du monde futur ?
- Oui, j'allais justement vous poser cette question. Dans l'un de vos discours, vous avez dit qu'il y a aujourd'hui des leaders clairs : économiques - la Chine, politiques - la Russie, et qui pensez-vous est spirituel ?
- Lorsque nous parlons du nouveau monde - et non des civilisations occidentales - il devrait certainement y avoir un leader politique, économique et moral. Un leader économique évident, comme je l'ai dit, est la Chine. Quelle que soit la manière dont nous traitons notre PIB, la corruption, etc., la Russie a commencé à agir en tant que leader politique. Je me souviens de l'ouvrage du philosophe allemand Walter Schubart "L'Europe et l'âme de l'Est", où il écrit que cela plaise ou non à quelqu'un, mais l'avenir du siècle est pour les Slaves, l'âme de l'Est est la Russie. Selon lui, l'Occident a beaucoup donné à l'humanité, mais l'a privée de son âme, et sans l'âme, elle ne fonctionnera pas. Nous ne pourrons pas rendre l'âme à l'Occident, mais ces valeurs eurasiennes, qui sont la somme de tous nos peuples, sont universelles et acceptables à la fois pour les Indiens et les Chinois, et pour les Européens (s'ils veulent les accepter, bien sûr). Il est peu probable que nous soyons un jour un leader économique, mais un leadership spirituel et politique est indispensable.
- Il y a une guerre de l'information féroce, qui s'intensifie de jour en jour ; il y a une déchéance spirituelle, à la suite de laquelle les âmes humaines meurent - elles s'écartent des commandements de Dieu, mais personne ne compte ces victimes. Pensez-vous qu'il y a beaucoup de personnes spirituellement vivantes parmi nous ?
- Permettez-moi de le dire ainsi : de plus en plus de choses se développent de jour en jour. Néanmoins, il convient de noter la compétence avec laquelle les structures transcontinentales ont travaillé à l'anéantissement de nos âmes et de ce qu'elles ont anéanti. Il y a eu un déni de l'histoire, de la justesse de nos choix historiques ; les âmes ont été corrompues, avant tout, par la dimension matérielle et financière. Dans les années 1990, nous avons surtout réussi à nous inculquer que l'essentiel était que la Mercedes était plus cool que notre voisin, que la maison était plus grande, que les chaînes autour de notre cou étaient plus grandes, etc. Les premiers à s'y précipiter étaient des gens dont l'esprit n'était pas tout à fait sain, généralement sans aspiration à quelque chose de beau, de haut et de spirituel. Si une personne ne peut pas écrire un livre, faire une découverte scientifique, faire un dessin, et que vous voulez avoir l'air "cool", alors dans ce cas l'argent remplace le reste. Malheureusement, une partie importante des jeunes a succombé à cette astuce : à leurs yeux, avoir lieu ne signifie pas avoir une vie spirituelle.
Mais, néanmoins, même dans une université comme MGIMO (et je travaille avec des étudiants depuis de nombreuses années), je constate que le nombre de jeunes qui voient leur vie différemment augmente de jour en jour. Si l'on compare l'époque des années 1990 à celle d'aujourd'hui, il devient évident que, dans ces années-là, on ne pouvait même pas parler de l'entrée de la Crimée en Syrie (de telles choses ont été supprimées par les médias libéraux, la soi-disant intelligentsia libérale). Aujourd'hui, le cri "nous voulons aller en URSS - pour nourrir à nouveau le monde entier" est unique, et la société est sobre. Nous nous occuperons de l'ISIS du Moyen-Orient, mais il reste à lutter contre l'"ISIS intérieur", qui n'est pas moins dangereux. Ce sont d'abord des personnes vivant en Russie et y voyant non pas la Mère Patrie, mais le territoire qui peut être enlevé, volé, bombardé, etc. C'est l'ennemi de la plus dangereuse IGIL du Moyen-Orient.
- Et comment le combattre ?
- Des méthodes complexes. Vous voyez, vous ne pouvez que travailler contre le système, mais c'est le système le plus puissant qui dispose de beaucoup d'argent. Mais la culture est d'abord faite par des artistes, des écrivains, des poètes, quelqu'un de scientifique travaille de manière agile. Je suis convaincu que les gens ordinaires, les ascètes vont tirer la Russie. Et comment se battre ? Nous préparons les cours, nous enseignons, nous travaillons individuellement avec chaque étudiant, et non sur un caillou et un patron. On peut dire la même chose des scientifiques, des designers et des travailleurs culturels. Et l'essentiel est de changer constamment le contexte de l'information dans les médias et les réseaux sociaux.
- Que pensez-vous de la vie américaine ? Qu'y respire-t-on, y a-t-il une idéologie ? Et s'il y en a, quelle idéologie ?
- En tant qu'État fort, l'Amérique a créé une grande entreprise financière, industrielle, puis pétrolière. L'Union soviétique a joué un rôle énorme pour que les citoyens américains, au sens matériel du terme, ne vivent pas plus mal que notre agriculteur, notre professeur, notre scientifique collectif. Le projet géopolitique soviétique était attrayant. Après la Seconde Guerre mondiale, tout le monde a compris qui a vaincu Hitler, il y avait un grand respect pour l'éducation gratuite, la médecine, etc. Les Américains se sont sentis le concurrent le plus puissant et ont donc décidé pendant longtemps comment traiter avec les Noirs, qui étaient détenus par des esclaves même après la Seconde Guerre mondiale, comment être avec une telle condition de marché "survivre comme on veut". Il y a eu de nombreuses décisions, dont une politique de crédit - voler d'autres nations avec le dollar. Le coût d'un billet d'un dollar est de 15 à 17 cents, et tout le reste n'est même pas caché, mais constitue un profit évident. De ce fait, ils ont commencé à élever le niveau moyen de leurs citoyens pour devenir plus intéressants, pour s'opposer à l'idée du socialisme.
Les Américains ne pouvaient pas rivaliser honnêtement dans les domaines de la science, de l'éducation et de la médecine et ont mis en avant (puis ils ont commencé à imposer) des dimensions et une idéologie purement matérielles : "nous, les Américains, sommes les principaux dans le monde, il est donc important d'être américain. Je ne voudrais pas prononcer les mots que Mikhail Zadornov applique habituellement à cette nation. Ce ne sont pas les gens les plus instruits de la planète, c'est le moins qu'on puisse dire. J'ai enseigné à Harvard et je sais qu'il vaut mieux ne pas demander à un étudiant américain. Les représentants des pays asiatiques et même des pays africains sont beaucoup plus alphabétisés. Lorsque j'ai posé des questions sur les étudiants, Zbigniew Brzezinski a répondu avec colère qu'il n'avait vu aucun des étudiants les plus désapprouvés. La guerre en Irak dure depuis cinq ans et ils ne peuvent même pas trouver ce pays sur la carte, même l'Europe et l'Australie sont confuses.
Les autorités le font consciemment : "Prenez un coca, un hamburger pour que votre famille ne meure pas de faim - et cela suffit", si bien que la grande majorité des citoyens vivent aujourd'hui. Les élites de leurs États me jettent à la rue. Non pas la première, mais la troisième, la sixième personne, les journalistes d'État ne savent pas qui a combattu avec qui pendant la Seconde Guerre mondiale, peuvent facilement déclarer : "Nous, l'OTAN, vous avons vaincu. Par leur logique, la Russie a combattu avec l'OTAN. Les Américains n'ont donc absolument rien à envier.
Laissez-moi vous raconter un petit épisode. Lors de ma visite en Amérique, ils ont enregistré une rencontre avec un agriculteur - j'ai dû passer environ 24 heures avec lui. Ce fermier, en fait, a combattu au Vietnam. Selon lui, l'URSS existe toujours. À la fin de la conversation, j'ai été de nouveau surpris : j'ai parlé de mon ami, avec qui je me suis battu, en mentionnant qu'il était russe. Avec un sourire, il m'a donné une carte de visite (à son avis - mon compatriote), qui porte l'adresse : Melbourne, Australie. C'est ainsi qu'ils le voient.
Et vous vous posez involontairement une question : qu'arrivera-t-il à cette société si elle cesse de vivre aux dépens de la colonisation des autres par la méthode du dollar, la force militaire ? Patrick Joseph Buchanan, qui a travaillé comme conseiller auprès de trois présidents américains, écrit que d'ici 2015, l'Amérique se décomposera en trois États - afro-américain, latino-américain et purement anglo-saxon. Mais ne leur souhaitons rien, laissons-les vivre comme ils le savent.
- Est-il vrai qu'en Occident, les autres pays ne nous aiment pas ?
- Quand on nous dit que nous ne sommes pas aimés dans le monde, on nous induit en erreur. Ce n'est pas comme ça, croyez-moi, j'ai voyagé dans 69 pays. Le père de l'actuel président de la Syrie, Hafez Assad, a dit très sagement que le monde honnête tout entier regrette l'effondrement de l'URSS, en particulier les Arabes, et parmi eux les Syriens sont les plus nombreux. Ils sont désolés parce que le monde n'est plus équilibré, la sécurité n'est plus basée sur un équilibre des pouvoirs.
Ce n'est pas vrai qu'ils nous détestent. Et si nous sommes traités de cette façon, alors il n'y a que de l'argent pour les personnes qui viennent à l'étranger, mais pas de culture, pas d'éducation. C'est ainsi qu'ils brisent l'ordre, les traditions. À cause de ces personnes, une opinion erronée commence à se former. Quant aux Américains, ils ne nous connaissent tout simplement pas. Ils croient tout ce qu'ils diffusent à la télévision. Quant aux Européens, ils sont dépendants des banques occidentales et n'ont malheureusement aucun but. Un des classiques modernes disait qu'ils ont la volonté de pouvoir, mais pas de vivre. Les mariages homosexuels, ils commencent à épouser des animaux - de quoi cela peut-il parler ? Ce n'est plus une civilisation, et Dieu me pardonne d'avoir tort. Politiquement et culturellement, ils n'ont jamais été unis, ils ont essayé à travers l'Union européenne de créer quelque chose de proche de la civilisation. Nous pouvons dire aujourd'hui : ils ont échoué. Des centaines de milliers de réfugiés s'y sont précipités et demain, l'Europe va exploser. Et dans quelques années, nous entendrons "Salam Aleikum" au lieu de "Guten Tag" à la télévision européenne. Il n'y a pas lieu d'avoir peur. Nous avons vécu avec l'Islam à l'intérieur du pays, en construisant ensemble un espace spirituel. Les Napoléons et Hitler ne sont pas venus du monde islamique, mais d'Europe.
- Qui, comme on dit, est notre ami et qui est l'ennemi ?
- La question d'un allié géopolitique et d'un adversaire géopolitique doit être légèrement élargie. Même pour mes étudiants, je pose une question lorsque je lis "Géopolitique de l'Amérique" : que faire des Américains ? Si l'Amérique ne change pas, le monde ne sera pas équilibré. Il existe des civilisations avec leurs fonctions, et les anticivilisations comme les particules et les antiparticules, les herbivores, les beaux animaux et les prédateurs sont sur un pied d'égalité avec elles. La vie de consommateur individuel semble ne servir à rien, mais au nom du profit, ils ont créé un miracle tel qu'un téléphone portable. Il s'avère que pour l'Occident, en termes de culture et de civilisation, nous sommes des ennemis : ils ont tourné à l'Est, et nous allons sauver.
En 1904, John Bartysh, s'exprimant au Congrès, a déclaré que si l'Amérique avait un ennemi, c'était la Russie. Alfred Mehan - Amiral, auteur de la stratégie Anaconda - était toujours à la recherche d'une tactique pour étrangler le continent. Lorsqu'on a calculé que la Russie est le centre de l'Eurasie, sans lequel on ne peut rêver de domination mondiale, notre pays est devenu un rival soumis à un contrôle et à une destruction accrue. Mehan cherchait la formule pour étrangler la Russie. La stratégie d'Anacond a la phrase suivante : il est nécessaire d'occuper la bande située entre 30 et 40 degrés de latitude nord afin d'expulser le peuple russe de ces positions vers le nord, où, par la loi de la nature, il se dégrade et finit par mourir. Ce sont les souhaits. Et notre tâche fatidique est d'arrêter tous ceux qui tentent de venir sur notre terre.
- L'orthodoxie, selon vous, est une référence qui nous aidera à survivre spirituellement ?
- L'orthodoxie est une valeur merveilleuse. Nous devons comprendre l'essence de l'homme, que sur la planète Terre il n'est pas accidentel, et qu'il a été envoyé avec certaines tâches, parce que rien, même dans le monde animal et végétal, n'apparaît tout simplement pas. Toute essence naît parce qu'elle est utile pour maintenir l'harmonie. L'homme aussi. Ça ne vient pas d'un singe - c'est juste stupide. Il est doté d'un sens de l'amour, de la compréhension de la beauté, a été amené avec un certain nombre de fonctions, dont l'une est la conservation de la nature. Il est important de comprendre ce qui est primaire : la matière ou la conscience. La réponse est différente : énergie primaire de l'esprit, énergie de la matière, énergie de la pensée, etc. Il est nécessaire de combiner la connaissance scientifique et le spirituel en un seul système. C'est à ce moment-là que nous comprendrons beaucoup plus que nous ne le faisons actuellement.
- Quels devraient être, selon vous, les médias orthodoxes ? Quelles réponses donner, comment réagir aux événements modernes ?
- Tout d'abord, les orthodoxes doivent comprendre qu'ils sont appelés au bien et à la justice et qu'ils sont dotés de valeurs qui les aident à résister à l'injustice, à la ressentir, et qu'en leur essence, chacun d'entre nous est un guerrier. Même dans l'histoire, cela s'est manifesté. Sous l'Union de Florence en 1439, nous n'avons pas accepté le rôle des papes, nous avons commencé à défendre la vérité chrétienne. Puis Moscou - Troisième Rome : il y a la première doctrine géopolitique : garder l'orthodoxie, protéger les nations pour équilibrer le monde catholique qui, hélas, professe d'autres valeurs. Comme vous le comprenez, le Sauveur ne s'est pas accidentellement sacrifié - nous devons protéger cette vérité.
Nous montrons au monde que des peuples de différentes nationalités et religions peuvent vivre dans le cadre d'un destin historique commun
Les médias orthodoxes doivent donc être fermes sur la vérité. Et il faut aussi comprendre que l'orthodoxie en Russie a joué un rôle unificateur des autres religions et confessions. Dans une histoire, vous ne trouverez aucun autre pays où une religion domine et où l'autre est invitée comme État : en 1788, la Grande Catherine l'a fait exactement. Nous montrons au monde que des peuples de différentes nationalités et religions peuvent vivre dans le cadre d'un destin historique commun, partager entre eux, s'enrichir mutuellement de connaissances, de traditions culturelles et de modes de vie.
Pour parler franchement, la conversation s'est avérée si instructive et intéressante que j'ai voulu poser une autre série de questions, et Leonid Grigorievich a gentiment accepté la proposition de devenir un invité régulier de notre portail.
Entretien d'Elena Jomullo (Елена Хомулло) avec le général Leonid Grigorievich Ivashov
19 novembre 2015.
Traduit du russe par Le Rouge et le Blanc.