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Rouge et Blanc, ou le Fil d'Ariane d'un voyageur naturaliste

30 avril 1803 : Napoléon Bonaparte vendait la Louisiane aux États-Unis

30 Avril 2023 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles Publié dans #Louisiane, #France, #Histoire, #USA

Montjoie Saint Denis !

Montjoie Saint Denis !

30 avril 1803 : Napoléon Bonaparte vendait la Louisiane aux États-Unis
30 avril 1803 : Napoléon Bonaparte vendait la Louisiane aux États-Unis

30 avril 1803 : Napoléon Bonaparte vend la Louisiane aux États-Unis pour environ 80 millions de francs (argent qui lui permettra de financer ses guerres en Europe...).
Cet ensemble de terres représente pratiquement un quart de la superficie totale actuelle des États-Unis.

Source de ce judicieux rappel: 496-1789 sur Twitter, avec nos remerciements

https://twitter.com/SD_0101/status/1652668606033846275?t=Y0DZG4kdkR3RBM6TTdDYlg&s=03

 

"A la claire fontaine" était l'hymne de la Nouvelle France et il le restera toujours dans notre coeur.

À la claire fontaine
M'en allant promener
J'ai trouvé l'eau si belle
Que je m'y suis baignée

Il y longtemps que je t'aime, jamais je ne t'oublierai

Sous les feuilles d'un chêne
Je me suis fait sécher
Sur la plus haute branche
Le rossignol chantait

Il y longtemps que je t'aime, jamais je ne t'oublierai

Chante, Rossignol chante
Toi qui as le cœur gai
Tu as le cœur à rire
Moi je l'ai à pleurer

Il y longtemps que je t'aime, jamais je ne t'oublierai

J'ai perdu mon ami
Sans l'avoir mérité
Pour un bouquet de roses
Que je lui refusais

Il y longtemps que je t'aime, jamais je ne t'oublierai

Je voudrais que la rose
Fut encore un rosier
Et que mon doux ami
Fut encore à m'aimer

Il y longtemps que je t'aime, jamais je ne t'oublierai

 

-----

 

À la claire fontaine, m'en allant promener,
J'ai trouvé l'eau si belle que je m'y suis baignée.

Il y a longtemps que je t'aime, jamais je ne t'oublierai.

Sous les feuilles d'un chêne je me suis fait sécher,
Sur la plus haute branche, un rossignol chantait

Il y a longtemps que je t'aime, jamais je ne t'oublierai.

« Chante, rossignol, chante, toi qui as le cœur gai,
Tu as le cœur à rire, moi je l'ai à pleurer. »…

Il y a longtemps que je t'aime, jamais je ne t'oublierai.

« C'est pour mon ami Pierre qui ne veut plus m'aimer,
Pour un bouton de rose que je lui refusai. »

Il y a longtemps que je t'aime, jamais je ne t'oublierai.

« Je voudrais que la rose fût encore au rosier
Et que mon ami Pierre fût encore à m'aimer. »

Il y a longtemps que je t'aime, jamais je ne t'oublierai.

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Aucun endroit sur Terre n'est à l'abri de la contamination, selon une étude menée dans les fosses marines entre le Pérou et le Chili

30 Avril 2023 , Rédigé par Rouge et Blanc Publié dans #Environnement, #Mer, #Pérou, #Pollution

Capture d'écran de Google Earth

Capture d'écran de Google Earth

Aucun endroit sur Terre n'est à l'abri de la contamination, selon une étude menée dans les fosses marines entre le Pérou et le Chili

Des polluants interdits depuis longtemps se retrouvent même dans les endroits les plus reculés de la planète. La fosse Pérou-Chili, située à 8 000 mètres de profondeur dans l'océan Pacifique, en est un exemple : on y trouve des traces de polluants interdits depuis plusieurs décennies.
Une équipe de chercheurs a prélevé des sédiments dans cinq zones de la fosse Pérou-Chili, également connue sous le nom de fosse d'Atacama, et a découvert la présence de biphényles polychlorés (PCB) dans chacune d'entre elles. Les PCB sont un groupe de composés chimiques organiques qui peuvent avoir un certain nombre d'effets néfastes et il n'existe aucune source naturelle connue de PCB dans l'environnement.
Ces polluants, produits en grandes quantités depuis les années 1930, ont été interdits au milieu des années 1970, lorsqu'il est apparu clairement qu'ils nuisaient à la vie marine.

On sait que la substance ne se dissout pas bien dans l'eau et qu'elle préfère se fixer sur les tissus riches en graisses et sur d'autres fragments d'organismes vivants ou morts, tels que le plancton ou même les mammifères ou les poissons. Environ 60 % des PCB libérés au cours du 20e siècle sont stockés dans les sédiments océaniques profonds.
Une fosse profonde comme celle d'Atacama agit comme un entonnoir qui recueille les morceaux de plantes et d'animaux morts (ce que les scientifiques appellent le "carbone organique") qui tombent dans l'eau. Il y a beaucoup de vie dans la fosse, et les microbes dégradent ensuite le carbone organique dans la boue du plancher océanique. Or, le carbone organique se décompose beaucoup plus rapidement que les PCB, d'où l'accumulation de cet élément toxique au fond de l'eau.

Selon l'étude, le cas d'Atacama est très particulier, car les concentrations de PCB sont les plus élevées dans les sédiments de surface, ce qui contraste avec ce que l'on trouve normalement dans les lacs et les mers.
En règle générale, les concentrations les plus élevées se trouvent dans les couches inférieures des sédiments qui se sont déposés entre les années 1970 et 1990, suivies d'une diminution des concentrations vers la surface, ce qui reflète l'interdiction et la réduction des émissions de PCB, expliquent les experts.
Les chercheurs reconnaissent qu'ils ne comprennent pas encore tout à fait pourquoi les choses sont différentes dans l'Atacama. Il est possible que les sédiments n'aient pas été examinés d'assez près pour détecter de petites variations de PCB ou simplement que les concentrations n'aient pas encore atteint leur maximum dans la fosse profonde, supposent les scientifiques.

L'étude, qui a été publiée dans Nature Communications https://www.nature.com/articles/s41467-023-37718-z *, montre également que dans les sédiments océaniques, le stockage des contaminants peut être utilisé comme un "rétroviseur" du passé, car il permet de déterminer quand une couche de sédiments s'est accumulée et, en analysant les contaminants dans différentes couches, il est possible d'obtenir des informations sur leurs concentrations au fil du temps.

Traduit de l'espagnol par Rouge et Blanc avec DeepL

Source: https://sputniknews.lat/20230430/ningun-lugar-en-la-tierra-esta-libre-de-contaminacion-revela-un-estudio-en-la-fosa-de-peru-chile-1138847821.html

* Abstract

Burial of persistent organic pollutants (POPs) such as polychlorinated biphenyls (PCBs) in deep-sea sediments contributes to 60% of their historical emissions. Yet, empirical data on their occurrence in the deep-ocean is scarce. Estimates of the deep-ocean POP sink are therefore uncertain. Hadal trenches, representing the deepest part of the ocean, are hotspots for organic carbon burial and decomposition. POPs favorably partition to organic carbon, making trenches likely significant sinks for contaminants. Here we show that PCBs occur in both hadal (7720–8085 m) and non-hadal (2560–4050 m) sediment in the Atacama Trench. PCB concentrations normalized to sediment dry weight were similar across sites while those normalized to sediment organic carbon increased exponentially as the inert organic carbon fraction of the sediment increased in degraded hadal sediments. We suggest that the unique deposition dynamics and elevated turnover of organic carbon in hadal trenches increase POP concentrations in the deepest places on Earth.

https://www.nature.com/articles/s41467-023-37718-z

 
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Quand un homme intelligent, sensé et honnête parle du "climat": Christian Gerondeau

29 Avril 2023 , Rédigé par Rouge et Blanc Publié dans #Christian Gerondeau, #Environnement, #Histoire, #Opération Réchauffement climatique

Christian Gerondeau

Christian Gerondeau

Rencontre avec un homme intelligent, sensé, clair, honnête et instruit, bien formé (Polytechnique ancienne école), ancien haut fonctionnaire français: Christian Gerondeau, auteur notamment des ouvrages Le climat par les chiffres  et Les Douze mensonges du GIEC - La religion écologiste 2 ((L'Artilleur)).

Visionnez ici son entretien avec Xavier Azalbert de France-Soir:

https://www.francesoir.fr/videos-l-entretien-essentiel/christian-gerondeau-le-giec-est-aux-mains-de-gens-qui-ne-sont-pas-des

et ici et en bas avec François-Xavier, le sympathique animateur de Draw my Economy

https://www.youtube.com/watch?v=yIZ8VrCjRoU

Dans un article récent, Paul Craig Roberts a dit: "Seuls les Français protestent". Il faut bien dire que lorsqu'il s'agit de critiquer intelligemment, de manière forte, claire et précise les dogmes et les abus, voire la tyrannie de l'idéologie mondialiste, les Français se distinguent et sont au premier rang. Raison pour laquelle, sans doute, ils sont les plus réprimés, avec une violence et même un sadisme qui laissent le monde entier stupéfait.

Quand Christian Gerondeau évoque l'origine de la politique du Climat, dont il n'avait jamais été question auparavant, en rappelant l'intervention catastrophiste de Maurice Strong, du Club de Rome et l'un des responsables des Nations Unies, au Sommet de la Terre* à Rio en 1992, on se demande quel était déjà le niveau intellectuel, moral (et de corruption) des chefs d'État et des innombrables "représentants" politiques et scientifiques des 178 pays qui y participaient, en mission et tous frais payés, dans ce lieu hautement exotique et de surcroît du 3 au 14 juin, juste avant l'été pour l'Occident, ce qui leur permettait de prendre ensuite de vraies vacances bien méritées ?

Je pense que cela expliquerait ce qui s'est passé avec le Covid trente ans plus tard, où l'immense partie de la "communauté" scientifique s'est pliée et a dû se plier au récit officiel avec la classe politique et les journalistes des médias prostitués (presstitutes), tout cela pour conserver ses emplois, ses salaires et ses avantages. Trente ans plus tard, après une nouvelle dégradation du niveau intellectuel, moral et spirituel général en Occident. Tout ce qui diminue l'homme fait avancer la tyrannie.

Pierre-Olivier Combelles

* Conférence des Nations Unies sur l'Environnement et le Développement.

 

Quand un homme intelligent, sensé et honnête parle du "climat": Christian Gerondeau
Le huitième livre que Christian Gérondeau consacre au réchauffement climatique est probablement le meilleur, encore plus clair, percutant et convaincant que les précédents. Car ses arguments contre les mensonges du GIEC sont incontestables :
  1. Norendra  Modi, Premier Ministre indien, a constaté que  « plus de 500 millions d’Indiens n’ont pas accès à des sources d’énergie propre pour faire la cuisine et des centaines de milliers de femmes et d’enfants en meurent chaque année ». Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, quatre millions de personnes meurent chaque année dans le monde du fait des émanations des foyers intérieurs où, en l’absence d’électricité, leur cuisine est faite. C’est la première cause de mortalité mondiale.
  2.  L’espérance de vie humaine est d’autant plus élevée que la consommation d’énergie est plus grande, comme en attestent les statistiques par pays. Accroître le recours aux énergies fossiles, c’est sauver des vies. Aussi le 13 novembre 2021, dernier jour de la « COP 26 » de Glasgow, l’inde, suivie par la Chine, a-t-elle refusé de signer le communiqué final qui exigeait de « cesser d’avoir recours au charbon ». Le charbon est en effet pour ces deux pays la première source d’électricité et la moins chère. Ils ne peuvent s’en passer pour sortir de la pauvreté. Ils multiplient donc les centrales électriques au charbon.
  3. L’énergie, en particulier l’électricité, est indispensable au développement économique. Les pays en développement, déjà à l’origine des deux tiers des émissions mondiales de CO2, continueront à accroître leurs émissions. La baisse éventuelle des émissions européennes, actuellement inférieures à 10 % des émissions totales, ne pourra pas compenser la hausse de celles des pays en développement. Les émissions humaines continueront de s’accroître. La « neutralité carbone » de la planète, c’est-à-dire l’arrêt des émissions humaines, est une utopie. D’ailleurs pour l’Agence Internationale de l’Energie, qui cumule les prévisions de tous les pays, les émissions vont croître de 15 % d’ici 2030.
  4. Les énergies fossiles représentent 80 % des sources d’énergie de la planète (88% pour la Chine). Les barrages et le nucléaire les complètent. Les énergies éolienne et solaire, dites renouvelables, n’en représentent que 2 %. Pour la production d’électricité leur intermittence oblige de les doubler par des centrales à gaz ou à charbon devant être rapidement mises en production quand le vent ou le soleil disparaissent. Quelle que soit la croissance de ces énergies, elles resteront à moins de 10 % des ressources énergétiques mondiales.  L’Agence Internationale de l’Energie prévoit 75 % d’énergies fossiles en 2040. Et pourtant le GIEC affirme que « près de 80% de l’énergie mondiale pourraient être procurés en 2050 par les énergies renouvelables ». C’est un mensonge.
  5. En 1972 le Club de Rome prévoyait l’épuisement des gisements de pétrole en 2000. En réalité, les réserves prouvées sont actuellement de 50 ans d’une production qui a doublé. Outre les réserves prouvées, on peut compter sur l’amélioration des techniques d’extraction et le développement du pétrole et du gaz de schiste. Mais le gouvernement français a interdit qu’on connaisse les ressources potentielles de la France dans ce domaine ! Les réserves de charbon sont supérieures à 130 ans de production. La crainte de l’épuisement rapide des sources d’énergie n’est pas justifiée.
  6. La hausse du niveau des mers (3mm par an, soit 30 cm par siècle) ne fait pas reculer les côtes rocheuses. Le recul de certaines côtes non rocheuses serait peut-être de 20 mètres en un siècle. Cependant le delta du Gange s’étend chaque année. La crainte de millions de « réfugiés climatiques » n’est pas justifiée. 
  7. Au rythme actuel de la hausse de la température de l’atmosphère (0,6 °C par siècle), la température de l’atmosphère sera en 2050 de 1,3 °C supérieure à celle de 1850, soit en-dessous de la limite basse de 1,5 °C visée par l’accord de Paris. Il n’y a pas d’« urgence climatique ».
  8.  Le taux de croissance actuel de la température est nettement inférieur à celui des périodes de la dernière déglaciation où il croissait le plus.
  9. Les émissions humaines de CO2 (1% chaque année du stock de CO2 que contient l’atmosphère) sont en grande partie absorbées par les océans et la végétation. Il n’en reste dans l’atmosphère qu’une faible partie.
  10. Les subventions aux transports ferrés, aux transports publics et aux énergies renouvelables sont la cause de 40 % de la dette française, de l’augmentation de 60 % du tarif de l’électricité pour les ménages et de son futur doublement. La lutte contre le réchauffement a de graves conséquences économiques pour notre pays comme pour ceux qui le suivent.
  11. La taxe carbone destinée à réduire les émissions de CO2 est sans justification.
  12. Affirmer que 97 % des scientifiques du climat approuvent les thèses du GIEC est un mensonge éhonté. En effet l’étude utilisée pour soutenir cette affirmation indique qu’au contraire la plupart des scientifiques n’ont pas d’opinion sur la cause du réchauffement et 3% seulement pensent qu’elle est entièrement humaine.

Source: https://fr.irefeurope.org/publications/chroniques-de-livres/article/les-12-mensonges-du-giec-de-christian-gerondeau/

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Shamil Sultanov: entretien avec Business-gazeta.ru (10 janvier 2021)

29 Avril 2023 , Rédigé par Sudarshan Publié dans #Asie, #Islam, #Economie, #Politique, #Russie, #Monde, #Shamil Sultanov, #Club d'Izborsk (Russie), #Opération Coronavirus, #Environnement, #Philosophie, #Turquie, #Chine, #USA

Shamil Sultanov (1953-2022)

Shamil Sultanov (1953-2022)

Shamil Sultanov : "Poutine doit comprendre qu'il n'y aura pas de pitié. Nous devons nous préparer au combat".

10 janvier 2021.

Le célèbre philosophe explique comment le coronavirus a empêché une guerre majeure et pourquoi les Américains ne parient pas sur Navalny mais sur Koudrine.
"La destruction de Trump, l'objectif principal pour 2020, est faite. Et ensuite, le principal objectif de l'État profond américain sera la destruction de Poutine et du régime de Poutine", a déclaré Shamil Sultanov, directeur du groupe de réflexion Russie-Monde islamique. Dans une interview accordée à Business Online, M. Sultanov explique pourquoi les gens acceptent d'être "apprivoisés" à l'ère du coronavirus, si la Russie peut être considérée comme un pays féodal et comment Erdogan a été le premier dirigeant mondial à comprendre que des temps nouveaux s’annonçaient.

Shamil Zagitovich, dans vos discours, vous caractérisez l'année écoulée comme le début d'une "ère de grande incertitude". En effet, l'année 2020 ressemble à ces rares dates dans l'histoire de l'humanité, à partir desquelles, dans les temps anciens, les gens commençaient le compte à rebours vers une nouvelle ère. Mais de quelle ère s'agit-il ? L'humanité est aujourd'hui comme un hérisson dans le brouillard : tout est bancal et brumeux, l'avenir est à peine visible, mais il y a beaucoup d'inquiétude dans ce brouillard…

De nombreux indicateurs suggèrent que nous sommes effectivement entrés dans une nouvelle ère d'incertitude globale, ou si vous préférez, d'incertitude stratégique et même civilisationnelle. De quels indicateurs s'agit-il ? Regardons : par exemple, pour la première fois en 70-80 ans, la dette extérieure des États-Unis a dépassé le PIB américain (selon des données de l'automne dernier, la dette fédérale américaine s'élevait à 21 000 milliards de dollars et continuait à croître régulièrement en raison de la situation de pandémie - ndlr). Cela ne s'est jamais produit auparavant, pas même pendant la Grande Dépression. Autre exemple : la civilisation humaine est en train de changer les règles du jeu sous nos yeux, rejetant l'ancien ordre établi par les Américains après l'effondrement de l'Union soviétique. Et maintenant, ces vieilles règles du jeu, adoptées par les apologistes de la "marche triomphale du capitalisme", ne fonctionnent plus non plus ! Et l'administration de Donald Trump l'a vraiment prouvé - parfois de manière amusante, si l'on prend la tentative de relation entre Trump et Kim Jong-un, et parfois de manière dramatique, comme entre les États-Unis et la Russie ou l'Amérique et la Chine. Mais ce ne sont pas seulement les stratégies politiques qui échouent ; les mécanismes économiques construits au cours des 30 à 40 dernières années, pendant la période la plus intense de la mondialisation, sont en train d'échouer. Les anciennes chaînes économiques s'effilochent comme des fils et, dans le même temps, on assiste à une réévaluation de l'efficacité économique : que signifiera l'efficacité proverbiale de demain ?
Ou pour se tourner vers la sphère idéologique : il y a trois ans, en décembre 2017, le Club de Rome publiait son rapport clé intitulé " Allez ! Capitalisme, myopie, population et destruction de la planète". L'idée principale de ce rapport était précisément que l'ancien monde se terminait et qu'une nouvelle période de l'histoire commençait (les idéologues du Club de Rome partaient du principe que la civilisation humaine s'était auparavant formée dans un "monde vide", avec des territoires inexplorés, des terres non découvertes et des ressources non exploitées. Or, selon les enseignements de l'écologiste et économiste américain Herman Daly, l'humanité est entrée dans une ère de "paix totale", où presque tout a été exploré et maîtrisé, l'écosystème est plein à craquer, mais dans ce monde, les gens vivent avec de vieilles habitudes qui pourraient provoquer un désastre inévitable - ndlr). Et alors ? Trois ans seulement se sont écoulés depuis que le Club de Rome a mis en garde contre la possibilité de l'avènement d'une nouvelle ère, et aujourd'hui, en regardant autour de nous, nous voyons de plus en plus de signes de ce "renouveau". En Occident, on parle de plus en plus de "croissance économique zéro". Mais honnêtement, je n'arrive pas à comprendre ce qu'est la "croissance économique zéro" dans le cadre du capitalisme. C'est en principe impossible ! Quelles sont alors les incitations à développer les sphères de la production et du commerce ? Si la croissance elle-même et, avec elle, les profits sont réduits à zéro ? D'une part. Ensuite, quoi qu'on en dise, la population mondiale ne cesse de croître, ce qui signifie qu'avec une "croissance économique zéro", nous serons très vite confrontés (et nous le sommes déjà) à une forte augmentation de la pauvreté et de l'indigence. La population mondiale dépasse aujourd'hui les 7 milliards et 700 millions d'habitants et la barre des 8 milliards n'est pas loin. À cet égard, certains affirment que la destruction actuelle de la biocénose, dont la pandémie actuelle de coronavirus (en tant que réponse de la biosphère à la "paix totale") fera probablement partie, est directement causée par l'activité humaine. En clair, l'homme est devenu une sorte de cancer de l'organisme vivant de la Terre. Ou, pour le dire plus simplement, non pas l'homme lui-même, mais la civilisation actuelle, qui détruit la composante biologique de la planète, et avec elle les autres composantes les plus importantes - l'hydrosphère et l'atmosphère. La phase de civilisation, dont le slogan principal est devenu la production et la consommation de masse, a notamment pour conséquence que, depuis 2011, les océans du monde ne sont plus en mesure de recycler les déchets humains qui y sont déposés. Ainsi, les océans ont cessé de se nettoyer, et ce depuis près de 10 ans !

Qu'est-ce que la pollution des océans ?

Il existe une liste de substances qui se retrouvent chaque année dans les océans en raison des activités humaines, qu'elles soient apportées par les rivières, qu'elles proviennent de l'atmosphère polluée ou qu'elles soient produites par toutes sortes de "décharges", de sites d'enfouissement et autres. La façon dont ces déchets se dissolvent ou non, ou coulent au fond en formant de tristes cimetières de déchets, tout cela a été suivi par des experts au cours des 30 dernières années. Par exemple, alors qu'auparavant les plastiques étaient au moins partiellement recyclés, on trouve aujourd'hui des îles entières de plastique en pleine mer, dans les eaux intérieures. La Chine, les Philippines, l'Indonésie, la Thaïlande et le Viêt Nam sont les principaux pays où l'on jette de manière incontrôlée des bouteilles, des récipients, des emballages, etc. Les conséquences sont évidentes. Le plastique est comprimé en de gigantesques îles de déchets de - parfois ! - de milliers de kilomètres carrés, ne se déplacent nulle part et pourrissent au soleil et dans l'eau. La "Grande plaque de déchets du Pacifique", par exemple, pèse plus de 3,5 millions de tonnes et couvre une superficie de plus d'un million de kilomètres carrés. Il existe au total cinq "plaques de déchets" de ce type, celle du Pacifique étant la plus grande. La chose la plus importante, la plus paradoxale et peut-être la plus tragique qui accompagne notre transition vers une nouvelle civilisation est que le développement technologique se poursuit malgré tout. Nous entrons de force dans la sixième phase technologique.

Mais cette étape nous sauvera-t-elle de la négligence des quatrième et cinquième étapes technologiques ? Le gaspillage est en effet une conséquence de ces périodes.

Je n'exclus pas que la sixième ère technologique soit encore plus effrayante. Il s'agit d'une sorte de percée vers des technologies entièrement nouvelles - nanotechnologies, biotechnologies, technologies génétiques, etc. Mais en même temps, en créant une production entièrement robotisée et en formant des matériaux dont la durabilité et la qualité sont absolument incomparables avec ce qui était produit il y a 20-30 ans, les nouvelles technologies projettent une masse énorme et croissante de contradictions et de problèmes - dans la sphère sociale, la culture, l'idéologie, et ainsi de suite.
L'exemple le plus clair à mes yeux est celui des États-Unis, qui sont le pays le plus performant sur la voie du sixième paradigme technologique. Selon certaines estimations, 16 à 18 % de la production américaine actuelle est déjà liée d'une manière ou d'une autre au sixième paradigme. Mais dans ce contexte, nous pouvons constater qu'un grand nombre de nouveaux problèmes systémiques insolubles sont apparus et s'aggravent rapidement en Amérique, ce qui, en 2020, rapprochera le pays de la guerre civile. Il s'est passé quelque chose de similaire aux États-Unis en 2000, lorsque George W. Bush a remporté les élections et qu'une grande partie des Américains lui ont refusé la reconnaissance. Et cela a duré 9 à 10 mois : le pays était en fait divisé en deux parties. Cette répétition suggère que même l'élite supérieure, le malheureux État profond américain, n'arrive pas à trouver les moyens de prévenir une rechute. Elle n'arrive pas à trouver un concept, un modèle et une technologie appropriés. C'est pourquoi nous avons vu plus d'une fois, non seulement aux États-Unis, mais aussi en France et en Allemagne, différentes foules de personnes - souvent diplômées, pas des prolétaires ordinaires - descendre dans la rue, prêtes à s'entre-déchirer. On a vu un correspondant d'une chaîne américaine demander à un certain passant : "Que se passe-t-il si les grands électeurs ne reconnaissent pas Donald Trump comme président des États-Unis ?" Et l'homme de répondre calmement, comme s'il s'agissait d'une évidence : "Mais nous avons des fusils ! ».

Et pourtant, ce n'est ni Trump, ni Biden, ni même l'empoisonné Navalny, qui est devenu actif fin décembre, mais Sa Majesté le coronavirus. Ce n'est pas pour rien qu'il a été "couronné" avant d'être présenté au monde - il est une sorte de virus dans le halo de la couronne. Et du haut de son trône, d'où il règne sur le monde, COVID-19 n'est pas encore descendu, il reste le "personnage" le plus médiatique.

Pour moi, le coronavirus est avant tout une composante de la nouvelle gouvernance mondiale et totale de l'humanité qui est en train de se mettre en place sous nos yeux. Je vous donne un exemple : en 2008-2009, lors de l'analyse de la sortie de la récession économique de l'époque, on prévoyait qu'en 2013-2014, il y aurait une nouvelle poussée de la crise. Mais les années 2019-2020 seront le point culminant de la crise, qui peut conduire à de puissants affrontements sociaux, à une déstabilisation imprévisible de diverses nations, etc. dans le monde. Pour éviter cette déstabilisation sociale mondiale, la descente dans la rue de dizaines de millions de personnes, il a fallu les "assigner à résidence", les obliger à ne pas quitter le seuil de leur maison. Le coronavirus était-il à la hauteur ? Absolument.
Et maintenant, un autre point important. Je suis certain que si le monde n'avait pas connu de pandémie de coronavirus, Donald Trump aurait gagné l'élection présidentielle. Car quelles que soient les saloperies déversées sur lui, le 45e président des États-Unis était plutôt actif et aurait traversé le creuset de la campagne électorale. Et avec le coronavirus et les anti-records que le système de santé américain était en train d'établir, ses adversaires s'attendaient à ce que Trump se fasse cracher dessus de la tête aux pieds à la fin du mois d'octobre et qu'il soit contraint de s'en aller comme un chien pleurnichard, en pleurant et en s'excusant auprès du grand peuple américain. Mais la situation est tout autre : le dirigeant américain a tenu bon jusqu'au bout et a même promis de revenir à la Maison Blanche en 2024. Son comportement - en violation de toutes les règles du jeu politique américain - nous rappelle une fois de plus que Trump est une figure farouchement non systémique, qu'il n'appartient pas au plus haut establishment des États-Unis et qu'il n'y a jamais été invité. En outre, il a fait l'expérience directe de la collision avec la machine de pouvoir américaine - n'oubliez pas qu'il a fait faillite à cinq reprises. On ne peut pas parler de lui comme d'un homme d'affaires prospère et d'un génie commercial exceptionnel. Il est tombé à plusieurs reprises, mais a été relancé par la suite grâce à l'argent de sa famille. Donald Trump a acquis sa popularité pré-présidentielle principalement grâce à son implication dans le show-business, et non dans l'industrie de la construction. En ce sens, il représentait le pire scénario pour l'État profond américain : un populiste hypocrite qui lance des défis sans consulter personne, qui fait appel à la foule et à ses bas instincts, qui critique le gouvernement fédéral, etc. En ce sens, Trump a eu des partisans après 2016 - nous les voyons en Espagne, en Italie, en Grèce et en Allemagne également. Une vague populiste a déferlé sur le monde dit civilisé.
Mais ce populisme, contrairement au populisme des années 1920 par exemple, n'a pas encore de base théorique. Alors que le socialisme prenait de l'ampleur en tant que mouvement institutionnel il y a 100 ans, le fascisme est apparu et le mouvement nazi est né. Un grand nombre de sociétés mystiques ont vu le jour dans le monde entier. Aujourd'hui, rien de tout cela n'existe encore - la théorie, précisément en tant que réflexion anticipatrice, ne joue aucun rôle. D'autre part, en ce qui concerne l'État profond, il y a des populistes qui sont prêts à tout détruire pour simplement satisfaire leur propre ego - une forme spécifique de masturbation politique. Bien sûr, pour cette raison, 2020 était censé être un slogan tacite de destruction de Trump - en tant que populiste majeur et flagrant. Eh bien, Trump a été éliminé, et le coronavirus a joué son rôle.
Un troisième exemple. Quel est le principal problème auquel est confrontée la communauté mondiale depuis 2004-2005 jusqu'à aujourd'hui ? Ce sont les frictions croissantes entre les États-Unis et la Chine et, plus largement, entre l'Occident et la RPC. Permettez-moi d'établir un parallèle : les événements des 10 à 12 prochaines années ressembleront dans une certaine mesure à ceux des années 1900 à 1912. Et surtout sur le plan géopolitique. Rappelez-vous : à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, deux centres de pouvoir mondiaux avaient émergé dans le monde (ils étaient entièrement européens à l'époque) : L'empire traditionnel britannique, d'une part, et l'empire allemand, agressif et effronté, d'autre part. Et aujourd'hui ? Il y a l'Amérique et la Chine. Autour d'eux, des coalitions se forment. Comme il y a plus de 100 ans, l'Empire russe ou l'ancien Empire austro-hongrois des Habsbourg ont été contraints de conclure des alliances - l'Entente ou la Triple Alliance, respectivement. Cela a conduit à la Première Guerre mondiale. Puis les deux coalitions se sont affaiblies et une troisième force est apparue : l'Amérique. Qui peut aujourd'hui prétendre être cette troisième force ?
C'est le coronavirus, qui vient d'affaiblir la possibilité d'une guerre hybride totale. Bien que les Chinois n'aient pas été très pacifiques ces derniers temps, menaçant les Américains, criant qu'ils sont prêts à envoyer leurs navires à Taïwan, et en décembre, ils ont organisé des exercices dans le détroit au large de l'île, de sorte que la marine et l'armée de l'air taïwanaises ont été mises en état d'alerte maximale. Mais tout cela n'était qu'un jeu, et la réalité est qu'une guerre mondiale entre la Chine et les États-Unis est désormais impossible. Il convient de noter qu'une nouvelle guerre mondiale ne peut avoir lieu qu'entre la RPC et les États-Unis, ou plutôt entre leurs deux coalitions mondiales. En outre, la coalition américaine potentielle compte jusqu'à 80-90 pays, tandis que la coalition chinoise en compte environ 50-60.

Il est évident que si nous prenons la coalition chinoise, la Russie est l'un des principaux pays.

Oui, l'un des premiers, même si la Fédération de Russie a beaucoup de mal à soutenir la Chine. En effet, une partie importante de l'élite russe est opposée à une telle orientation vers Pékin. L'année dernière, avant même la pandémie, j'ai eu l'occasion de discuter, par exemple, avec certains membres de l'élite de Saint-Pétersbourg - j'ai rarement vu quelqu'un adopter une position anti-chinoise aussi tranchée. Et ces personnes - bien sûr, dans les limites du politiquement correct - ont confronté leurs points de vue à la position de Poutine.
Dans l'ensemble, la composition des alliés de la Chine semble jusqu'à présent beaucoup plus faible que celle des Américains. Les Chinois sont bien conscients qu'ils ne sont pas encore prêts pour une grande guerre "chaude". Le XIXe congrès du PCC (Parti communiste chinois), comme nous le savons, a admis qu'un équilibre avec les États-Unis ne pourrait être atteint qu'en 2035. Mais nous savons que le problème de la guerre peut surgir spontanément, en dépit du bon sens, comme en 1914, alors que personne ne semblait vouloir la guerre. Ne serait-ce que parce que tous les rois et tsars d'Europe étaient liés les uns aux autres. La guerre s'est déclenchée d'elle-même. Et je vois l'effet positif du coronavirus dans la réduction de la menace d'une telle guerre spontanée.

Mais le COVID-19 est-il lui-même spontané ? Est-il le résultat d'une dégradation naturelle de la biocénose ou s'agit-il d'une arme biologique calculée lancée dans le monde ?

Je pars du principe que la pandémie actuelle a tout pour elle : la spontanéité, la prévoyance et la conspiration. Si nous avions une biosphère parfaite, avec ou sans armes biologiques, la pandémie se serait limitée à un foyer localisé. Et le coronavirus ne serait pas allé plus loin que Wuhan, peut-être n'aurait-il pas touché l'homme du tout, coincé dans le règne animal. Mais si la biosphère elle-même est déjà malade, la fuite américano-chinoise d'armes biologiques (rappelons que les spécialistes chinois ont largement coopéré avec les Américains à Wuhan) a dû être désastreuse. Il est fort possible que cette fuite ait été considérée comme faisant partie d'une vaste expérience. Nous ne saurons comment cela s'est passé que dans 20 ans au mieux, voire jamais. Pour l'instant, nous pouvons affirmer que les bonnes conditions (une biocénose malade) ont été créées pour que le COVID-19 se propage et qu'il est probable que la fuite ait été orchestrée avec de grands objectifs. Contenir la Chine, faire tomber Trump, établir un nouveau cycle de coopération mondiale entre les États-Unis et l'Europe, et coincer la Russie. Dans ce contexte, l'idée d'un nouveau modèle de gouvernance est dans la tête de quelqu'un. Et ce n'est même pas une question médicale - après tout, nous ne savons pas vraiment combien de personnes sont mortes du coronavirus et combien sont mortes de maladies connexes. J'ai lu que, disons, jusqu'à 17 millions de personnes meurent chaque année de toutes les formes de pneumonie. En 2020, moins de 2 millions de personnes sont mortes du COVID-19 dans le monde. Lorsque l'OMS parle de 17 millions de décès dus à la pneumonie, tout semble clair. En revanche, rien n'est clair et tout dépend des critères et des paramètres qui guident les systèmes de santé nationaux. Qui figure sur la liste des personnes tuées par le coronavirus ? Ce n'est même pas le virus qui affecte une très grande partie de la population, mais la peur qu'il suscite. Oui, l'année écoulée pourrait bien être appelée "l'année de la terreur". Toutes sortes de peurs ont précédé le coronavirus comme la cavalerie de l’apocalypse.

Et qui est concerné par ces peurs en premier lieu ? Quelle est la caractéristique sociobiologique de la peur dans le monde moderne ?

En règle générale, il s'agit d'une peur de masse qui touche de vastes segments  de la population. Et le caractère de masse lui-même est dû à quoi ? Je dirais que la civilisation actuelle, qui se dirige inévitablement vers sa fin, a créé une énorme strate d'"imitateurs". Il s'agit de personnes qui imitent totalement les stéréotypes, qui sont prêtes à être formées elles-mêmes. Ils sont formés par l'influence complexe des médias de masse, de la télévision, d'Internet, par l'éducation, la publicité, les rumeurs, l'appartenance à un certain clan, etc. On dit à l'homme moderne : "Tu dois suivre le style". Et cette année, la mode est à untel ou untel. Mais pourquoi ? Pourquoi un homme qui réussit devrait-il nécessairement porter telle marque de montre et pas une autre ? Pourquoi porterait-il un costume bleu et non le classique noir ? Après tout, personne ne se pose sérieusement ces questions. Cela signifie qu'il existe un puissant mécanisme d'imitation - et un mécanisme incontestable. Si l'on dit à une femme : "Suivez un certain style", toute femme normale devrait répondre : "Je suis une femme unique. Si je suis un style impersonnel, je me perdrai. Je dois trouver mon propre style". Mais peu de gens disent cela ! Et la proportion de personnes prêtes à imiter automatiquement et à accepter silencieusement les modèles de la société moderne atteint 70 à 80 % ! C'est le moins que l'on puisse dire ! Une masse critique a été atteinte. Grâce à la programmation neurolinguistique et aux techniques directes et indirectes de guerre psychologique, quelqu'un est en mesure d'influencer de grandes masses humaines. Il ne s'agit pas de personnes agissant rationnellement, mais de personnes prêtes à être formées. Ils sont formés - par rapport au style, à l'alimentation, aux valeurs de la vie, à la politique, aux autres personnes, aux groupes, aux sociétés, etc. Mais de la même manière, ils peuvent aussi être formés par rapport à la maladie. Comme l'a souligné l'un de nos universitaires, même avant l'apparition du coronavirus, les gens mouraient de diverses maladies infectieuses. Cela se passait en Russie et en Union soviétique, mais personne ne le soulignait. C'était peut-être une mauvaise chose, mais d'un autre côté, c'était une bonne chose, parce qu'il n'y avait pas d'agitation. Soudain, le monde entier a été saisi par une sorte d'hypocondrie généralisée. En l'espace de quelques mois, les gens ont accepté l'idée que certains groupes de pouvoir avaient le droit de les enfermer chez eux. Aujourd'hui sous la bannière du coronavirus, demain sous la bannière d'une autre « couronne".
Je tiens à souligner que ce n'est pas sans raison que la figure centrale de la culture de la civilisation moderne est l'acteur. Non pas un penseur, non pas un écrivain ou un scientifique capable d'une réflexion profonde, mais un acteur - une créature de manipulation et de contrôle, avec un psychisme mobile et imitatif. L'acteur idéal est une marionnette tirée par des ficelles dans le théâtre conditionnel de Karabas-Barabas. Si 70 à 80 % des gens d'aujourd'hui sont des imitateurs, leurs héros sont des acteurs, des comédiens, des humoristes, etc.
C’est l'une des grandes différences entre le modèle de civilisation actuel et d'autres civilisations. Par exemple, dans la civilisation romaine hellénistique de la Méditerranée, il y avait deux des professions les plus méprisées : le bourreau et l'acteur. Pourquoi un acteur ?  Il ne peut même pas s'exprimer, il ne peut que mal jouer les autres. "On ne te demandera pas pourquoi tu n'es pas devenu untel ou untel. On te demandera là-bas pourquoi tu n'es pas devenu toi-même. »
Dans la civilisation actuelle, au contraire, tout est à l'envers. Et c'est pour cela qu'un showman devient président des États-Unis. Et le président de l'Ukraine  est un comédien. L'un des principaux hommes politiques italiens est également comédien (Giuseppe Piero Grillo, fondateur du mouvement de protestation "Cinq Étoiles" - ndlr). Mais encore une fois, si nous regardons de près les hommes politiques contemporains, nous constatons qu'ils sont tous des acteurs ! Et très souvent, ce sont de mauvais acteurs. Et si nous regardons les années 1950 et 1960, pas si éloignées de nous, nous verrons Konrad Adenauer, Charles de Gaulle ou, disons, Nikita Khrouchtchev. Quoi qu'on en pense, il s'agissait de personnalités, pas d'acteurs. Et l'homme politique actuel n'a pas le droit d'être une personnalité. Il joue tout le temps, mais comme il ne s'est jamais spécialisé dans le jeu d'acteur (sauf les politiciens-acteurs professionnels), il est condamné à perdre. Ainsi, objectivement, les populistes d'un jour, tels que Donald Trump, occupent le devant de la scène. Et une ou deux ou même mille personnes honnêtes et sincères ne sauveront ni n'arrangeront rien ici. Espérer que Danko sorte son cœur de sa poitrine et dirige la nation est naïf. Le système d'imitation totale est en place depuis des décennies. Le même modèle de production et de consommation de masse a plus de 80 ans. Et l'élément clé de ce que j'appelle la "civilisation de l'imitation" est la publicité totale. Très souvent, nous ne sommes même pas conscients de ce qu'est réellement la publicité dans ses effets dramatiques. Par exemple, on parlait de l'effet 25th Frame, puis on se taisait et on déclarait que c'était une fiction. Mais en fait, le 25e cadre fonctionnait déjà dans les années 1960. Et il n'est pas difficile d'imaginer à quel point ces technologies noires se sont intensifiées depuis. J'ai moi-même travaillé à la télévision et je sais comment ce genre de choses se produit - même avec notre approche plutôt amateur.
Les résultats des élections aux États-Unis montrent que l'Amérique n'est pas divisée en deux, mais en trois parties. Il y a les partisans des démocrates - une foule très diverse, composée de minorités ethniques, de gays, de lesbiennes, de transgenres et de personnes qui les justifient, de partisans du socialiste Bernie Sanders, etc. Il y a les conservateurs traditionnels - des gens ordinaires qui, dans les années 90, pendant la campagne électorale, ont dit à Buchanan : "Pat, qu'est-ce qui se passe de toute façon ? Nous sommes devenus un pays complètement différent ces derniers temps ! Où sont nos traditions, où est notre culture ?" Mais il y a un troisième groupe qui s'oppose à la fois à Joe Biden et à Donald Trump. On les trouve au sein du Parti républicain - ils ont toujours détesté le showman Trump et ses mensonges permanents. En signe de protestation, ces personnes ont voté pour Biden. À l'inverse, certains membres du parti démocrate n'aimaient pas Biden, ses grimaces et son habileté à former un entourage exclusivement composé de pédérastes, de personnes de couleur et d'autres personnes du même acabit. Ils ont donc voté pour Trump. À mon avis, l'opposition de ces trois groupes est le problème le plus dangereux pour la société américaine. Et je ne suis pas sûr que Biden puisse gérer une telle situation.
Mais revenons au point clé que je voulais aborder : l'humanité a perdu le sens, l'image de l'avenir, elle ne sait pas où elle va. Le mouvement de la civilisation bâtarde d'aujourd'hui est devenu inertiel par nature - comme un train qui a perdu ses freins et qui déraille. Et l'abîme est devant nous. Je ne peux absolument pas accepter que l'homme soit le roi de la nature et qu'il décide de tout en sa faveur : il ne décidera plus de rien.

Vous renoncez donc à la vision anthropocentrique de l'univers dans laquelle les penseurs de la Renaissance plaçaient l'homme au centre ?

L'homme n'est qu'une composante très insignifiante du macrocosme et du microcosme : de systèmes plus généraux et plus vastes - planétaire, solaire, galactique, cellulaire, atomique, subatomique, etc. Même si nous considérons l'homme dans le cadre d'une seule Terre, nous constatons qu'il n'est qu'une sorte de néoplasme à la surface de la planète, et le temps montrera s'il est bénin ou malin. Jusqu'à présent, nous devons constater que l'humanité se comporte de plus en plus comme une tumeur maligne.

Depuis quand l'homme est-il apparu sur Terre et quand les civilisations ont-elles commencé à émerger ? Dans les études culturelles actuelles, on estime que la civilisation actuelle, vieille de 8 à 10 000 ans au maximum, n'est pas la seule à avoir existé sur notre planète. Il s'agit d'une civilisation, mais nous ne savons rien de nos prédécesseurs - nous ne connaissons même pas nos véritables ancêtres.

La civilisation moderne, c'est avant tout le capitalisme, ce que l'on appelle le Nouvel Âge, dont les racines remontent à la Renaissance. Cette civilisation a entre 500 et 600 ans, voire un peu plus. Qu'est-ce qui caractérise cette période en premier lieu ? C'est que la civilisation est profondément matérialiste et en même temps eurocentrique. Cela apparaît clairement si nous la comparons aux civilisations chinoise, indienne ou même romaine. Là, il n'y avait pas de domination matérielle aussi écrasante. Le matériel, le physique, occupait de 15 à 30 % de la vie des gens. Si nous regardons l'ancienne civilisation égyptienne, l'élément matériel dans cette civilisation était d'une importance mineure. Et aujourd'hui ? Je pense que nous pouvons parler d'une domination matérielle de 80 à 90 %. Ce que l'on appelle la culture de masse, ou ce que l'on appelle parfois la quasi-culture, n'a aucun rapport avec les principes spirituels. Elle ne fait qu'interpréter le matériel à sa manière et cherche à augmenter ses profits.
En même temps, il y a un paradoxe. Si l'on se souvient de l'État soviétique, qui proclamait officiellement son matérialisme et son athéisme, il était né d'un élan spirituel vers la justice mondiale et le paradis terrestre. Mais en quelques décennies (bien avant l'effondrement de l'URSS), il a abouti au matérialisme le plus primitif et le plus prosaïque : un appartement pour chaque famille soviétique, une datcha sur six hectares, une voiture, etc.
Aujourd'hui, l'humanité est confrontée à une période de transition difficile, qui sera liée à une recherche intensive de nouveaux modèles et de nouvelles stratégies - non seulement politiques, mais aussi sociales, économiques, culturelles, informationnelles et autres. Nous disposons de 20 à 25 ans pour cela, mais j'ai le sentiment que ce délai n'est pas suffisant pour résoudre l'ensemble des problèmes existants.

De quels problèmes parlez-vous, en dehors des défis environnementaux et économiques ?

Regardez : l'un des principaux piliers de la civilisation capitaliste - l'État, avec ses autorités et son appareil - s'effondre sous nos yeux. Le modèle étatique est fortement discrédité sur le plan idéologique et spirituel. C'est ce qui se passe aux États-Unis et en France, par exemple. Dans le même temps, la proportion d'États en déliquescence dans l'œcumène augmente. Rien qu'en Afrique, on compte plus d'une douzaine d'États de ce type. En Amérique latine, nous pouvons facilement trouver des exemples similaires. En Eurasie également : la Syrie, l'Irak, l'Afghanistan sont tous des États en déliquescence. Dans ce cas, au lieu de s'identifier comme citoyen d'un État (ce qui est caractéristique de la civilisation capitaliste urbaine), on revient à une auto-identification clanique ou même tribale. On pourrait également parler d'une auto-identification criminelle. Tout cela était caractéristique des périodes les plus difficiles du Moyen-Âge et apparaît soudain chez nous au XXIe siècle. C'est pourquoi certains penseurs, à commencer par Nikolai Berdyaev, ne cessent de nous parler d'un retour au Moyen-Âge.

Karl Marx nous avait promis le dépérissement des États, mais maintenant ce n'est plus du tout selon Marx…

Oui, c'est en train de se produire sous une forme légèrement différente.

En fait, la Russie présentait également de nombreux signes d'un État en déliquescence dans les années 1990.

L'État russe, si vous le regardez du point de vue du modèle, est féodal par essence. Je ne vous donnerai qu'un exemple. Nous avons un roi conventionnel, Poutine. Nous avons des ducs, des princes et des comtes conditionnels - Alexey Miller, Igor Sechin, les frères Rotenberg et d'autres. Et il y a le gouvernement. Dans n'importe quel autre pays, ses dirigeants sont des personnages clés, mais dans le nôtre, ils ne le sont pas. Pratiquement personne ne peut dire un mot contre Igor Sechin. Parce que Sechin est beaucoup plus proche du chef de l'État. C'est comme dans la hiérarchie féodale : plus on est proche du corps du roi, plus on est influent. Les titres et les postes ne sont souvent pas aussi importants que cette proximité proverbiale. Plus bas dans l'échelle hiérarchique, on trouve les barons, les chevaliers... Et tout en bas, les serfs. Et si nous examinons la structure sociale de la Russie moderne, nous constatons que cette couche de la population constituée de serfs subsiste, bien que sous une forme différente, plus complexe et plus sophistiquée.

Le servage a également existé dans la Russie stalinienne, en particulier après 1930, l'année dite de la grande rupture pour la paysannerie.

Mais à l'époque soviétique, il y avait au moins une justification idéologique - par exemple, pourquoi nous devions lutter contre les koulaks, pourquoi les jeunes paysans prometteurs devaient être attirés vers la ville. Et cela était ouvertement discuté comme un phénomène temporaire. Aujourd'hui, c'est le silence et l'hypocrisie. Bien que nous semblions vivre dans une sorte de démocratie et de liberté. Mais lorsque le salaire moyen dans une région d'Ivanovo, région indigène russe, se situe entre 12 et 16 000 roubles (selon les statistiques officielles pour 2020, 27 000, mais en réalité moins - ndlr), cela symbolise l'impasse sociale. Où que vous alliez travailler avec un certain niveau d'éducation, votre salaire sera le même. C'est bien pire que le servage classique, sous lequel le paysan était encore intéressé par la productivité de son travail, pour qu'il lui reste quelque chose dans sa réserve personnelle.

Le paysan travaillait sur les terres du barch et ensuite il travaillait pour lui-même.

Mais comme les familles avaient beaucoup d'enfants, certains travaillaient sur le fardeau du sacrifice et d'autres travaillaient pour leur famille. Après tout, d'où vient l'accumulation du capital initial en Russie ? Du moins en dehors de l'environnement des Vieux Croyants, car il n'était pas le seul à générer la classe marchande russe. Et cela a déjà été suivi par le développement industriel. Mais le servage en Russie se manifeste aujourd'hui à bien des égards de manière pire qu'au XVIIe siècle, par exemple. Je ne parle pas seulement de l'absence d'ascenseurs sociaux, même si c'est la nature fermée et rigide des structures sociales qui devient fatale pour la Russie d'aujourd'hui. Il ne s'agit pas seulement de la Russie, d'ailleurs. Mais la Russie est un pays très imposant dans ce sens - nous pouvons observer les vestiges de la puissance technologique, de la production moderne et en même temps des structures sociales complètement préservées. Et surtout, le manque d'intérêt de l'État et du mécanisme économique pour la promotion des personnes talentueuses. Dans le monde entier, l'alpha et l'oméga est le fait évident que le niveau créatif de la nation et la formation accélérée de nouveaux groupes, strates et couches créatives deviennent la principale force productive et l'ingrédient du pouvoir de l'État au XXIe siècle. En Russie, cependant, cela s'avère n'être qu'une sorte de danse chamanique - le concours "Leaders of Russia", par exemple. Il s'agit d'une sorte d'imitation farfelue, que l'on montre plus tard au dirigeant pour lui dire que nous avons sauté autour du feu de camp et que tout s'est bien passé.

L'écrivain soviétique de science-fiction Ivan Efremov avait un concept : la "flèche d'Ariman". Il s'agit d'un symbole de sélection négative, dans lequel les meilleurs membres de la société sont éliminés ou relégués dans l'ombre, et les pires sont mis en avant. C'est l'évolution à l’envers.

Ce que vous appelez, à la suite de Yefremov, "la flèche d'Ahriman" est une tendance à long terme. La tragédie actuelle en Russie porte déjà des fruits amers. Mais en Turquie, par exemple, ils ont soigneusement calculé le nombre de personnes talentueuses qu'ils ont dans le pays. Il y a 3 ou 4 ans, les Turcs déclaraient que la République turque comptait 642 000 talents. Cela signifie que ces données sont documentées, car les normes de documentation sont européennes. Cela dit, la Turquie a un environnement concurrentiel et les rivaux, si l'occasion se présente, sont prêts à s'affronter. Mais dans l'ensemble, les autorités turques, sous le joug desquelles vivent 83 millions de citoyens, sont beaucoup plus intéressées que les autorités russes par le développement d'une créativité nationale véritablement talentueuse et de ses vecteurs.
Permettez-moi d'ajouter une autre caractéristique de notre époque que j'ai personnellement constatée. L'homme moderne, me semble-t-il, n'a plus le choix entre la vérité et le mensonge. Il doit maintenant choisir entre plusieurs contre-vérités celle sur laquelle il est préférable et plus avantageux de s'appuyer. Il y a toutes sortes de contre-vérités qui opèrent dans le monde d'aujourd'hui au nom de la vérité : le libéralisme et le conservatisme, le postmodernisme et le réalisme, Trump et Biden, Trump et Poutine ou Poutine et Navalny, etc. Tous ont leurs résonances pour ressembler à quelque chose de réel et de vrai, mais tous sont, si l'on y regarde de plus près, le décor derrière lequel résonne le joueur de flûte. La vérité en tant que telle - sous la forme de justice sociale, de sentiment religieux sincère ou de quête morale (qui caractérisait les gens du 19e siècle) - n'existe plus dans notre réalité. Elle est, comme on dit, disparue du marché et n'est pas demandée.

Ce dont vous parlez n'est qu'un élément de cette nouvelle forme de gouvernance de masse et de manipulation. Mais peut-être que ce troisième groupe aux États-Unis dont vous parliez, qui n'est ni pour Trump ni pour Biden, est la force qui ne veut pas choisir entre des contre-vérités ?

Si nous supposons que 30 % des électeurs ont voté pour Trump et Biden et que les 40 % restants ont voté pour leur propre compte en signe de protestation, alors... D'où viennent ces 40 % ? Je n'arrive pas encore à le comprendre. Je sais qu'il existe un motif commun qui a toujours uni les démocrates et les républicains aux États-Unis : la haine de Washington en tant que centre sans âme. En fait, ce qui se passe actuellement est un phénomène politique et socioculturel très intéressant. La haine de Trump et de Biden, d'où la montée d'une méfiance totale, et ce à un moment où les États-Unis entrent, j'ose le dire, dans une période révolutionnaire. Car dans un avenir proche, les Américains doivent montrer comment ils peuvent combiner les défis de la sixième TPU avec les réformes révolutionnaires radicales qu'ils vont mener dans les domaines social, économique, politique et culturel.

Il existe en effet un autre phénomène : depuis quatre ans, toute la presse américaine - jusqu'à 80-90 % - est contre Trump. De plus, tout Hollywood était contre lui. Les plus grands acteurs se sont moqués de Trump tous les jours. Pourtant, je le répète : sans le coronavirus, Trump aurait gagné.

Cela montre que le pouvoir de la presse et des acteurs n'est pas négligeable.

Il s'agit aussi de choses plus profondes. La société traditionnelle qui était construite par l'État lui-même est en train de s'éroder. Et la dégradation de cette même société américaine nous montre qu'une sorte de dégradation implicite et encore inconnue de la société est en train de commencer. Je ne pense pas qu'à la suite de cette dégradation, les Américains atteindront un état atomique - pour l'instant, ils sont encore unis par leur histoire commune et leurs communautés internes qui se chevauchent. Mais la direction que prendra ce processus est très intéressante et vitale. En effet, ce qui se passe aux États-Unis se produira également dans d'autres pays.

Donald Trump ne reviendra certainement jamais. Et le fait qu'il adopte maintenant une ligne aussi dure en n'acceptant pas le résultat de l'élection montre que le président perdant est en fait très désireux de négocier avec les vainqueurs. C'est pourquoi il est désormais question qu'avant de quitter la Maison Blanche, Trump se gracie lui-même - un jour ou deux avant le 20 janvier 2021. En tant qu'homme d'affaires - et inefficace de surcroît - Trump sait très bien qu'il a beaucoup gâché. Mais ce qu'il a fait ne peut pas être rendu public aujourd'hui, même par ses détracteurs du FBI ou du ministère de la sécurité intérieure. Pourquoi ? Parce que discréditer Trump reviendrait à discréditer la fonction de président des États-Unis, qui est centrale et sacrée dans le système politique américain. Et ce discrédit servirait d'impulsion supplémentaire à la destruction de l'État américain, qui est déjà bien entamée. De plus, si Trump est démasqué aujourd'hui, ses partisans risquent de prétendre qu'il ne s'agit que de mensonges et de crier dans tout le pays : "Notre peuple est battu". Ainsi, la pression exercée sur Trump aura l'effet inverse : elle mobilisera les trumpistes et augmentera la sympathie pour lui de la part d'une "troisième force" qui déteste l'État profond et tous les "bâtards fédéraux", comme ils le disent.

Pourtant, la tentative de négociation de Trump n'a jusqu'à présent abouti à rien car, comme l'a dit un célèbre personnage littéraire, "la négociation n'est pas appropriée". Il est inapproprié précisément parce que Trump, selon ses ennemis, doit être détruit - non pas en tant que personne, mais en tant que personnage social, rôle social, tendance. De peur que ses clones ne relèvent la tête d'ici 2024. D'autant plus qu'un nouveau populiste - énergique, volontaire, plus jeune - pourrait remplacer le vieux Trump. L'État profond ne peut en aucun cas permettre que cela se produise. Et Trump, en tant qu'homme de spectacle, a senti tout cela - d'où la dureté et l'intransigeance de sa position. Il fait les déclarations les plus scandaleuses, jusqu'à ne pas vouloir quitter la Maison Blanche le 20 janvier, jour de l'investiture de Biden. Mais il le fait dans l'espoir d'obtenir au moins quelques garanties tacites. Mais à mon avis, il n'obtiendra aucune garantie. Et s'il se gracie lui-même, ce sera l'ultime erreur de toute sa carrière politique. Aucun président américain n'a jamais fait cela. Et même si Trump quitte ses fonctions un jour plus tôt, le 19 janvier, et que Mike Pence devient président des États-Unis pour un jour, et qu'il est censé appliquer la grâce de son protecteur, cela n'aura pas d'effet positif.

Il n'y aura donc pas de 2024 pour Trump, il sera tué à petit feu. D'abord par des moyens économiques, sans toucher à sa crédibilité politique pour l'instant. Ils montreront qu'il est un voleur, qu'il n'a pas payé d'impôts, et ils présenteront des preuves convaincantes. D'ores et déjà, une trentaine de procédures pénales ont été engagées contre l'actuel président américain, dont 22 au niveau de différents États. Si Trump se gracie lui-même, il ne se libérera que de 8 affaires fédérales. Et après sa démission, 50 autres les rejoindront. Et la tâche de ses puissants opposants consiste tout au plus à dépouiller complètement Trump sur le plan économique. Pour montrer à tous ses successeurs potentiels : "Les gars, ne pensez même pas à jouer avec le système !" Et ensuite, donner à Trump une sorte de coup pour le transformer en dégénéré et le montrer au monde entier.  Rappelez-vous : l'ancien président des États-Unis et ancien acteur Ronald Reagan était lui aussi devenu un dégénéré complet à la fin de sa vie. Mais personne ne l'a montré parce que Reagan était une figure respectée de l'establishment et que le système avait besoin de lui. Mais Trump, lui, s'il est réduit à la pauvreté et à la démence, sera certainement montré et reproduit partout comme un avertissement : "Les gars, ne devenez pas des Trump ! ».

Vladimir Poutine a félicité Joe Biden pour sa victoire dès l'annonce de la décision des grands électeurs américains. Cela signifie-t-il que le parti habituellement associé au bloc libéral-financier du gouvernement s'est finalement imposé au sein de l'élite russe ?

Je ne le crois pas. L'ennemi numéro un de l'État américain est Donald Trump. La destruction de Trump - l'objectif principal pour 2020 - a pratiquement été accomplie. Et ensuite, l'objectif principal de l'État profond américain sera la destruction de Vladimir Poutine et du régime poutinien. Mais que peuvent-ils faire ici ? Ils peuvent lancer un ultimatum, convoquer quelques personnalités russes dirigées par le "représentant spécial pour les organisations internationales" Anatoly Chubais à l'"obkom" de Washington. Et de leur dire : "Notre première condition est que Poutine et 20 à 30 personnes de son entourage (essentiellement des officiers de sécurité) doivent partir. Deuxième condition : vous devez vous joindre à notre coalition anti-chinoise aux cris de "Banzai !" et "Vive la Chine !

Compte tenu des sentiments anti-chinois qui prévalent au sein de l'élite russe (et pas seulement à Saint-Pétersbourg), cette condition sera assez facile à remplir.

La seconde est beaucoup plus facile à réaliser, en effet. Les enfants de l'élite russe n'étudient pas en Chine, pas plus qu'ils n'y détiennent de l'argent ou des biens immobiliers. Détruire Vladimir Poutine, en revanche, est beaucoup plus difficile. Car, quoi qu'on en pense, d'un point de vue politique, le régime de Poutine et la Russie moderne ne font qu'un. Il ne faut pas se faire d'illusions. En cas de coup d'État de palais, la situation sera similaire à celle de 1987-1988 en Union soviétique. Le pays commencera à s'effriter, à s'effondrer et le processus de dégradation systémique rapide sera enclenché. Rappelez-vous la loi sur la coopération en URSS adoptée en mai 1988. Après cette loi, la dégradation du système soviétique s'est rapidement accélérée et, en un peu plus de trois ans, l'État s'est effondré. C'est la même chose ici.
Joseph Biden ne cache d'ailleurs pas ses intentions : en octobre dernier, il a déclaré que la Russie était l'ennemi numéro un de l'Amérique (Moscou est "la principale menace pour notre sécurité et nos alliances" et Pékin est "notre principal concurrent", a déclaré le candidat à la présidence des États-Unis de l'époque - ndlr). La raison pour laquelle le dirigeant américain nouvellement élu pense ainsi est une autre question. Les libéraux de chez nous se rassemblent maintenant en cercle autour de Poutine et le convainquent que les relations avec Biden peuvent encore être améliorées - "nous allons y travailler et essayer". Non, ils ne le feront pas, parce qu'ils ne le peuvent pas. La raison essentielle qui détermine l'attitude de l'administration Biden à l'égard de Poutine est simple : Biden et le parti démocrate ont besoin d'un ennemi extérieur visible pour stabiliser la situation interne aux États-Unis et les relations au sein du parti démocrate.
Rappelons-le une fois de plus : lors de l'élection présidentielle américaine de 2000, la moitié du pays a refusé de reconnaître George W. Bush comme président pendant près d'un an. Quelle était la solution ? Le 11 septembre 2001 - un spectacle national grandiose avec des actes terroristes, la désignation d'Oussama Ben Laden comme ennemi majeur et une propagande totale... Vous souvenez-vous de la mise en scène démonstrative ? L'un des Boeing détournés aurait percuté l'aile gauche du Pentagone. Et comme si toute la direction du Pentagone, dirigée par le secrétaire américain à la défense de l'époque, Donald Rumsfeld, avait disciplinément nettoyé sa zone de débris, ramassé les poteaux tombés au sol, etc. Une chose m'a frappé à l'époque : Rumsfeld, sur les images diffusées par les médias, portait avec ses collègues quelque chose comme une bûche sur l'épaule. Exactement comme Lénine sur la célèbre photo de lui au subbotnik. S'il y avait eu une véritable attaque sur le Pentagone, les dirigeants du département de la défense n'auraient pas dû sortir pour un "subbotnik" - ils auraient dû, selon leurs propres instructions, se réfugier dans les bunkers. Après tout, ils ne pouvaient pas, n'avaient pas le droit d'exclure une seconde attaque ou même une attaque atomique. Mais ils ont agi selon le scénario : ignorant fièrement les "ennemis", ils ont ramassé les bûches préparées à l'avance et ont courageusement marché sur la scène préparée à l'avance avec une chanson.

Eh bien, les Américains aussi ont appris de nous certaines techniques de manipulation - nous ne sommes pas les seuls.

Et ça a marché à l'époque : l'Amérique s'est unie. En outre, en 2004, Bush Jr. a été réélu haut la main, alors que de nombreuses personnes aux États-Unis savaient qu'il était en fait alcoolique. Et c'est justement pour cette raison que Bush lui-même n'a pas été impliqué dans l'affaire du 11 septembre. Aujourd'hui, c'est presque le même spectacle qui se prépare et même les acteurs, si l'on regarde bien, sont presque les mêmes. C'est-à-dire les mauvais acteurs, comme nous l'avons dit plus haut. Mais la Russie n'est même pas une question de politique étrangère pour les États-Unis. C'est un facteur qui est censé contribuer à la stabilité intérieure. Ils doivent donc attiser les flammes de la haine contre le Kremlin, le dépeindre comme un monstre, un tueur d'enfants, un empoisonneur de Navalny, etc. Cette attaque psychologique - contre le Kremlin, contre Moscou, qui a commencé maintenant - ne fera qu'augmenter. Je pense que le thème de la Russie "pire qu'une invasion martienne" sera l'un des leitmotivs du discours de Biden le 20 janvier 2021, jour de son investiture.

Alexei Navalny, "empoisonné", qui a diffusé la veille du Nouvel An une nouvelle série de ses révélations sur ses "8 empoisonneurs du FSB", est-il encore capable de jouer un rôle majeur dans ce spectacle antirusse ?

À mon avis, Navalny n'est plus apte à jouer les premiers rôles. Il pourra toujours jouer ses rôles épisodiques de dénigrement et autres "sensationnalismes", mais ils ont besoin de quelqu'un d'autre pour jouer le rôle principal. Je pense que pour ce rôle, "Washington Obcom" envisage un autre Alexei - Kudrin, l'un des dirigeants de notre bloc libéral-financier.

Mais qui est Kudrin ? C'est un homme de Saint-Pétersbourg et un élève de Sobtchak, tout comme Poutine lui-même. Un peu plus jeune (60 ans).

Cela ne signifie pas que les Américains pointent directement du doigt Alexei Kudrin. Il est plus probable que Kudrin ne devienne jamais président de la Russie, ni même premier ministre, ce qui est son rêve. Il s'agit simplement d'une sorte de vœu adressé à l'élite russe de l'autre côté de l'océan : "Les gars, au lieu du "méchant" Poutine, concentrez-vous sur le "bon et intelligent" Koudrine". Et Alexei Leonidovich est heureux de jouer le jeu : en décembre, il a solennellement félicité Chubais pour son nouveau poste (littéralement : "Ce n'est pas la première fois en 30 ans qu'Anatoly Chubais prend le sujet de l'avenir et en fait le sujet du présent. Bonne chance, Anatoly Borisovich, et développement durable" - ndlr). Comme des enfants, honnêtement.

Croyez-moi, pour un ancien comptable de Saint-Pétersbourg, c'est un jeu très excitant que de se hisser sur un tel Olympe !

 Mais c'est un jeu dangereux ! Il faut travailler et avoir l'instinct de conservation ! On raconte que Gennady Burbulis, l'un des anciens hauts fonctionnaires de Boris Eltsine, a récemment déclaré dans un cercle proche : "Oui, nous avons pu nous en tirer à l'époque. Mais les gens d'aujourd'hui ne pourront pas s'en tirer aussi facilement.

Et quelle est la marge de sécurité de la Russie de Poutine ? Ou bien Kudrin est-il aussi inévitable dans un avenir proche que l'était Monsieur Poutine lui-même en 2000 ?

Je ne parle pas du tout de Kudrin. Je le considère comme un élément du jeu "Washington Obcom", mais seulement au stade actuel. Cependant, une chose me trouble : à une époque, Alexei Kudrin était en concurrence avec Dmitry Medvedev, et Poutine semblait même lui promettre qu'après l'alternance de 2012, c'est Alexei Leonidovich qui deviendrait premier ministre. Cependant, il a promis à beaucoup de gens à l'époque et a ruiné les relations avec certains d'entre eux. Alors pourquoi n'a-t-il pas nommé Kudrin en 2012 ? Après tout, selon de nombreux paramètres, Koudrine était un personnage bien plus acceptable que Medvedev ! En effet, lorsque Vladimir Vladimirovitch a annoncé pour la première fois la rotation prévue, Koudrine était à Washington. Il y a fait une déclaration plutôt inattendue : la Russie était presque condamnée si elle continuait à dépenser autant pour les questions militaires et sociales. À l'époque, nombre de mes connaissances ont déclaré : "Le texte adressé à Koudrine a probablement été préparé dans certains bureaux et il l'a simplement reproduit de mémoire ». Cet épisode nous éclaire d'ailleurs sur le caractère de Poutine. Après les déclarations de Koudrine, il ne pouvait tout simplement pas aller à l'encontre de son cercle de pouvoir et nommer son ancien collègue de Smolny au poste de premier ministre. Mais d'un autre côté, ayant compris le jeu américain, Poutine a laissé Koudrine à proximité, lui trouvant plus tard le poste de chef du Centre de recherche stratégique, puis de président de la Chambre des comptes. Ce n'était pas le cercle intérieur de Poutine, mais quelque part dans le deuxième ou troisième cercle, mais tout de même… Aujourd'hui, sous une pression accrue, Vladimir Poutine tente de manœuvrer, il a même renforcé l'aile libérale du gouvernement - au moins au niveau des mots et des promesses. Mais le président russe doit comprendre qu'il n'y aura pas de pitié. Il doit donc se préparer à un combat. C'est d'ailleurs ce que lui disent certains responsables de la sécurité. Et, à mon avis, la transition vers une forme de gouvernement de mobilisation est certaine, ou du moins ils essaieront. Autre question : la soi-disant élite russe fracturée est-elle prête pour cela ? Après tout, il est très difficile de se mobiliser du jour au lendemain. Un autre obstacle majeur est l'ampleur de la corruption russe. Avec une telle corruption, il est en principe impossible de mettre l'État sur la voie de la mobilisation. Dans le modèle de mobilisation - que cela vous plaise ou non - l'importance des gens ordinaires augmente. Et des déclarations telles que "Je ne permettrai pas que les prix des denrées alimentaires augmentent" ne suffiront pas ! Les gens ont besoin de voir des sacrifices de la part de l'État, sinon ils n'auront aucun intérêt à se battre pour lui. Il faut leur montrer qui est l'ennemi, qui est responsable et pourquoi nous sommes dans cette situation. Et s'ils se contentent de dire aux gens : "Ici, en Amérique, nos ennemis..." "Et alors ?", diront les gens, "ils ont toujours été considérés comme des ennemis". Lorsqu'il s'avère que de nombreux pays du monde s'unissent contre la Russie - pas seulement les États-Unis ou l'Europe, mais même la Chine, parce que pour elle, c'est vital - comment agir dans cette situation ? Existe-t-il des modèles créatifs pour la transition vers une mobilisation nationale en l'absence d'une idéologie nationale ? Il y a beaucoup de questions…

Un autre héros de cette année a été le président turc Erdogan avec son éphémère guerre du Karabagh, dans laquelle il s'est impliqué par l'intermédiaire de l’Azerbaïdjan.

Recep Erdoğan est unique en ce sens : il a été le premier dirigeant mondial à sentir que des temps complètement nouveaux s'annonçaient, alors que les anciennes structures, institutions et règles du jeu commençaient à s'essouffler de plus en plus, voire à ne plus fonctionner du tout. Il s'est donc permis de défier l'OTAN, les États-Unis, l'UE, la France, la Grèce et même l'infortunée Arménie. Il est allé jusqu'à perturber quelque peu les relations avec les États-Unis et à se rapprocher de la Russie. Mais en même temps, il a commencé à mettre en œuvre sa politique, à mettre sa stratégie en pratique. Et l'élément clé de la nouvelle stratégie d'Erdogan est le suivant. Le président turc est arrivé à la conclusion que dans la période de transition à venir (je ne parle pas du moment où tout va "se calmer" et où de nouveaux modèles et de nouvelles règles du jeu vont émerger), trois facteurs sont à prendre en compte. Premièrement : l'importance particulière de la volonté politique du dirigeant. Citez-moi au moins un dirigeant mondial actuel dont la volonté politique est comparable à celle d’Erdogan.

Permettez-moi de poser une contre-question : Erdogan n'était-il pas mêlé de la tête aux pieds aux agents de Fethullah Gulen ? Les "gardes" de Gulen représentaient environ 70 % du corps de l'armée turque avant la tentative de coup d'État militaire.

Mais cela appartient au passé. Mais au cours des 3 à 3,5 dernières années, je pense qu'il n'y a pas d'homme politique plus efficace au monde que Recep Erdogan. En Turquie, Erdogan est le numéro un absolu. Ahmet Davutoglu, Binali Yildirim sont tous des pions. Le président turc a réprimé ses opposants internes, supprimé le poste de Premier ministre, emprisonné les dirigeants du parti kurde... Nous voyons donc ici la volonté politique du dirigeant en premier lieu. Et je ne sais même pas avec qui l'on pourrait établir un parallèle. Peut-être avec Xi Jinping, mais c'est une autre histoire, car en Chine, ce n'est pas le dirigeant qui joue le rôle principal, mais l'État profond chinois lui-même. Toutefois, la Turquie possède également son propre État profond, mais il est clairement dominé par le dirigeant.
Le deuxième facteur est la puissance militaire directe. Non pas au niveau du nombre de chars, de missiles et d'autres choses que vous possédez, mais en termes d'armée qui se bat réellement. Les forces armées qui ne combattent pas, mais qui se contentent d'organiser des camps d'entraînement et des exercices, représentent 50 % de l'armée. Quant à l'armée turque, elle n'a cessé de se battre au cours des trois dernières années et demie : en Syrie (contre les Kurdes), en Libye, au Karabakh, etc. Cela signifie qu'elle apprend constamment les techniques de combat. Pour un officier, il vaut mieux participer à un combat réel pendant une seule journée que de consacrer trois mois à des exercices.
Troisième facteur : lorsque l'ancien monde s'effondre et que les règles habituelles cessent de fonctionner, votre potentiel de coalition se manifeste. Il ne s'agit pas seulement de vos amis au niveau officiel, mais aussi au niveau de l'État profond, des structures transnationales, des organisations légales et illégales, etc. Si nous considérons la Russie et la Turquie de ce point de vue, la supériorité des Turcs à cet égard est frappante. Alors que la presse occidentale tente périodiquement de présenter Erdogan comme un méchant, tous les dirigeants occidentaux s'intéressent d'une manière ou d'une autre au président de la république turque. Merkel, l'élite française, qui s'en prend aujourd'hui à Macron, sont tous intéressés. La stratégie américaine au Moyen-Orient sans la Turquie ferait immédiatement faillite. L'Iran s'intéresse à la Turquie. Moscou aussi.
Le troisième facteur, qui se joue maintenant dans le nouvel environnement, est donc activement exploité par Erdogan. Mais cela ne veut pas dire qu'il signe des accords officiels avec tout le monde, non. La Turquie peut établir des liens avec des mouvements clandestins, même avec des organisations d'étudiants dans le monde entier, mais elle ne signe aucun document. Rien qu'en Europe, Erdogan a réussi à faire entrer ses cadres dans diverses structures politiques des États membres de l'UE. De jure, Erdogan reste en dehors de l'Europe, mais de facto, il y est déjà. Il ne contrôle pas l'ensemble du Vieux Continent - il serait exagéré de le penser. Mais il est certain qu'il contrôle un certain nombre de points sensibles en Europe. En termes de contrôle des flux migratoires, surtout après l'enracinement de la présence turque en Libye, la Turquie devient un pays clé pour l'UE. Après la querelle d'Emmanuel Macron avec Recep Erdogan, je pense qu'il ne sera jamais réélu président de la France.

Pourtant, Erdogan n'a pas la seule chose, mais peut-être la plus importante : son propre arsenal nucléaire.

 La Turquie possède des armes nucléaires !

Mais pas autant que la Russie.

Les armes nucléaires sont une arme de dissuasion stratégique. Vous y réfléchirez à deux fois avant de les utiliser. Et vous n'avez pas besoin de vous demander si vous en avez 10 ou 100 fois moins que votre ennemi. Quelques missiles suffisent pour infliger des dommages irréparables à votre ennemi ! Disons que la capacité nucléaire de la Chine est 5 à 6 fois inférieure à celle des États-Unis et de la Russie. Cela signifie-t-il que la Chine est plus faible que la Russie et les États-Unis en matière d'armes nucléaires ? En termes de dissuasion stratégique, non. C'est peut-être le cas en ce qui concerne l'utilisation en premier de l'arme nucléaire. Cependant, tout le monde comprend très bien qu'une première frappe nucléaire est extrêmement dangereuse et serait pratiquement impensable dans la situation actuelle. En effet, cela signifierait une vague de mort incontrôlable.
Quant à la Turquie, elle possède, je le répète, des armes nucléaires. Jusqu'à 45 armes nucléaires américaines sont déployées sur la base aérienne d'Incirlik. Il existe un accord spécial entre les États-Unis et certains pays de l'OTAN, dont la Turquie, selon lequel cette capacité nucléaire est contrôlée par deux parties, en l'occurrence Washington et Ankara. Il existait un scénario sous l'Union soviétique : si l'URSS portait un coup aux États-Unis et que ces derniers n'étaient pas en mesure de riposter, les alliés de l'alliance intervenaient et les armes qu'ils hébergeaient passaient entièrement entre leurs mains. Par ailleurs, les Turcs possèdent des chasseurs F-16 qui peuvent transporter des charges nucléaires à bord. La Turquie ne peut donc pas être considérée comme un pays exempt d'armes nucléaires.

Pour conclure notre discussion sur le nouvel ordre mondial, qui est encore dans le brouillard, pouvons-nous au moins essayer de nous pencher sur ce "demain" ?

Il existe des dizaines de théories sur le sujet, mais elles sont toutes fantasmagoriques. Le plus important à mes yeux : qu'est-ce qui définira le concept de puissance dans 10 ans ? Quels seront les critères ? Que le potentiel économique ne vienne pas en premier ici est sans équivoque. Mais qu'est-ce que ce sera ? L'intelligence artificielle sous des formes particulières ?  Une nouvelle idéologie et une nouvelle stratégie ?  Après tout, on assiste à une dégradation de toutes les anciennes versions et doctrines idéologiques, du communisme au libéralisme. Et lentement mais sûrement, l'ordre du jour est rempli par le problème le plus important : le sens de la vie. Quel sera le sens de la vie d'un être humain individuel et d'un groupe politique, jusqu'à l'État, dans la nouvelle période ? Cette question du sens de la vie émerge comme une sorte de titan noir (ou, au contraire, lumineux) des abîmes des petits problèmes mondains dans lesquels nous vivons tous. Quel est le sens de la vie aujourd'hui ? Personne n'a de réponse claire - ni Poutine, ni Biden, ni Xi Jinping.

Permettez-moi de conclure en disant que, pour moi, les hommes de culture se sont toujours classés en deux catégories : les romantiques et les futuristes. Les romantiques se tournent vers le passé, ils idéalisent les ruines, tandis que les futuristes se projettent pleinement dans l'avenir. Mais j'ai toujours été plus proche des romantiques parce que plus on plonge dans le passé, plus on ressent la chaleur du paradis perdu, et plus on s'éloigne dans le temps, plus il fait froid. Comme l'a écrit le poète Alexander Blok : "Oh, si seulement vous, les enfants, connaissiez la froideur et la morosité des jours à paraître". On sent qu'il y a dans l'avenir un gouffre froid de catastrophe mondiale…

C'est vrai, même si je ne suis pas un romantique et que je ne juge pas l'avenir uniquement sous des couleurs sombres. Le paradis n'est pas seulement derrière nous, il est toujours devant nous. Pour nous, musulmans, il y a de la lumière dans l'avenir parce qu'il y a toujours Dieu. Vous parlez ici d'un gouffre froid de catastrophe mondiale. Eh bien, il est possible que la biomasse grandiose qui habite aujourd'hui la Terre y fusionne tout simplement et forme une couche fertile sur laquelle émergera une nouvelle civilisation. Comme cela s'est probablement déjà produit à maintes reprises. Mais pour toute personne croyante, l'avenir est toujours beau, parce qu'il est inévitable.

Il y a donc un point chaud dans l'avenir ? Pas seulement une des désespérantes ténèbres cosmiques ?

Qu'est-ce que l'obscurité cosmique ? Il s'agit simplement d'une métaphore de la transcendance. La transcendance (tout ce qui se trouve de l'autre côté du monde matériel - ndlr) est la Lueur avec une majuscule. Lorsque vous vous heurtez à ce mur derrière lequel commence l'obscurité, vous fuyez avec terreur dans le cercle familier, où la lampe de bureau vacille, où vos proches sont tous autour de vous, et vous pensez : voici le mien, mon cher. Mais en fait, ce que vous considérez comme votre terre natale est fait des éléments de l'obscurité, et votre patrie est au-delà du mur. Allez donc courageusement vers l'avenir - même si vous pensez un instant ou deux que vous allez disparaître, vous serez toujours dans votre patrie. "Nous, communistes, sommes des optimistes historiques", disait Lénine. Et nous, les musulmans, nous sommes des fatalistes optimistes.

Biographie

Shamil Zagitovich Sultanov (né en 1952 à Andijan, République socialiste soviétique d'Ouzbékistan) est un philosophe, historien, essayiste, homme public et homme politique russe. Président du Centre d'études stratégiques Russie-Monde islamique. Membre régulier du Club d'Izborsk.
Diplômé en 1976 de l'Institut d'État des relations internationales de Moscou. Doctorat en histoire. Maîtrise de trois langues (français, arabe et anglais).
Après avoir obtenu son diplôme en 1976, il a travaillé à l'Institut d'État des relations internationales de Moscou (MGIMO), où il a également obtenu un doctorat en prise de décision en matière de politique étrangère. Il a étudié la résolution des conflits, la sécurité régionale et mondiale, la théorie de la prise de décision ainsi que la méthodologie et la technologie de l'analyse politique. Il a publié plus de 80 articles de recherche sur l'étude des conflits, les problèmes de développement régional, l'analyse des systèmes et la théorie générale des systèmes.
1989-1990, chef adjoint d'un département de l'Institut des relations économiques extérieures.
1991-1993 - Membre du comité de rédaction et correspondant spécial du journal Day, puis rédacteur en chef adjoint de l'hebdomadaire d'opposition Zavtra, créé sur la base du journal Day. Jusqu'en 1997, il a dirigé la rubrique "tabloïds" de Zavtra.
Il a publié des articles dans Elements, l'organe du programme de la Nouvelle Droite, ainsi que dans le journal Al-Qods.
En tant que philosophe, Sultanov s'est penché sur la relation entre la pensée mythologique, magique et dialectique. En étudiant le mysticisme, la magie et les philosophes dialectiques, de Platon à Hegel, il est parvenu à la conclusion qu'à un certain stade, les trois types de pensée se rejoignent sur des principes communs.
En 1995, il est devenu membre du conseil national de l'Union des peuples de Russie. Il est également membre du parti de la Renaissance islamique et fait partie du comité de rédaction du journal de ce parti, Al-Wahdat ("Unité").
Jusqu'en 2003, il a été directeur adjoint du Centre d'étude des problèmes économiques interethniques et interrégionaux, Yury Skokov. En 2003, M. Sultanov est élu à la Douma d'État (sur la liste de Rodina) et travaille au sein de la commission des affaires internationales de la Douma d'État. Il est membre du groupe analytique de l'association de politique étrangère Alexander Bessmertnykh.
En 2004 (avril), M. Sultanov a créé une association parlementaire inter-factions appelée "Russie - monde islamique : dialogue stratégique". En 2005, il a dirigé le Centre de recherche stratégique du même nom. Les deux institutions ont été créées dans le but de rapprocher la Russie du monde islamique.

Source: https://www.business-gazeta.ru/article/495028

Traduit du russe par Rouge et Blanc avec DeepL.

NDLR: Shamil Zagitovich Sultanov (1952-2022), philosophe et géopoliticien russe musulman, directeur du Centre des Études stratégiques "La Russie et le monde islamique", avait été aussi député de la Douma de 2003 à 2007. Le philosophe français Pierre Dortiguier l'a évoqué à plusieurs reprises dans ses entretiens, mais seulement pour souligner son origine tatare, sans jamais expliquer qui il était ni ce qu'il faisait, ce qui est très regrettable. Vous trouverez sur ce blog plusieurs articles de ce remarquable penseur, trop tôt disparu, traduits en français par nos soins.

Tags: Shamil Sultanov, Club d'Izborsk.

https://pocombelles.over-blog.com/tag/club%20d%27izborsk%20%28russie%29/

Shamil Sultanov était membre du Club Izborsk.

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Discours du Président Bashar Al Assad sur le néolibéralisme

28 Avril 2023 , Rédigé par Sudarshan Publié dans #Néolibéralisme, #Président Bachar Al-Assad, #Syrie, #Religion, #Transgenre

Président Bachar al-Assad sur le néolibéralisme

Transcription

Discours en arabe devant une assemblée de religieux musulmans

 

Sous-titres de la vidéo en anglais:

Neoliberalism is based on promoting a total moral degeneracy and separating individuals from any principles or values and affiliations and beliefs to reach this moral degeneracy. Neoliberalism promoted gay marriage. They started in the 1970's and now gay marriage is legal, and now they have children but it's different from adoption cause how can they have children ? Neoliberalism promoted that a child does not choose his own religion and this is against the child's freedom of expression. A child is born without any religion and later choose his own religion when he's a grown up. This is against human nature. Ever since human made their own idols and Gods , a child would instinctively belong to the his family's religion. They contradict humanity itself . It has recently promoted that marijuana is not harmful and now it's sold in shops legally. They start claiming that drugs are not harmful and later they will find something more harmful. Now in some places you can buy marijuana flavoured bread. This is neoliberalism. It (neoliberalism) now claims that a child is born and does not have a gender; the child choose later to be a male or a female . Very strong indeed !. So what do we understand from this ?. Neoliberalism targets our humanity.

 

Traduction en français avec DeepL:

Le néolibéralisme est fondé sur la promotion d'une dégénérescence morale totale et sur la séparation des individus de tous les principes, valeurs, affiliations et croyances pour atteindre cette dégénérescence morale. Le néolibéralisme a encouragé le mariage homosexuel. Ils ont commencé dans les années 1970 et maintenant le mariage gay est légal, et maintenant ils ont des enfants mais c'est différent de l'adoption car comment peuvent-ils avoir des enfants ? Le néolibéralisme a promu le fait qu'un enfant ne puisse pas choisir sa propre religion, ce qui va à l'encontre de la liberté d'expression de l'enfant. Un enfant naît sans religion et choisit plus tard sa propre religion lorsqu'il est adulte. Cela va à l'encontre de la nature humaine. Depuis que l'homme a créé ses propres idoles et dieux, un enfant appartient instinctivement à la religion de sa famille. Ils sont en contradiction avec l'humanité elle-même. Il a récemment été promu que la marijuana n'était pas nocive et elle est maintenant vendue légalement dans les magasins. Ils commencent à prétendre que les drogues ne sont pas nocives et plus tard ils trouveront quelque chose de plus nocif. Dans certains endroits, on peut désormais acheter du pain aromatisé à la marijuana. C'est du néolibéralisme. Il (le néolibéralisme) prétend maintenant qu'un enfant naît et n'a pas de sexe ; l'enfant choisit plus tard d'être un homme ou une femme. C'est très fort ! Qu'est-ce que nous comprenons de tout cela ? Le néolibéralisme s'attaque à notre humanité.

Source de la vidéo: https://www.youtube.com/watch?v=vl3xsQ6MsZQ

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Souvenir d'un printemps passé, qui reviendra

28 Avril 2023 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles Publié dans #Environnement, #Forêt, #France, #Lettres, #Poésie, #Pierre-Olivier Combelles, #Nature, #Mono no Aware

Platanthera chlorantha (Orchidaceae), entre St Benoît et la D 906. Photo: Pierre-Olivier Combelles, mai 2016.

Platanthera chlorantha (Orchidaceae), entre St Benoît et la D 906. Photo: Pierre-Olivier Combelles, mai 2016.

Qui la connait assez, cette Belle de Mai à la peau nacrée qui attend toute nue sur les talus au bord des routes forestières, vêtue seulement de son merveilleux parfum de vanille ? Il n'y a que les naturalistes au cœur tendre et à l’œil exercé pour le savoir et l'aimer avec passion, quand chaque année l'été revient...
 
Quelques jours après avoir pris cette photo, tous les talus entre Auffargis, Le Perray-en-Yvelines, Vieille-Église et Saint-Benoît étaient brutalement fauchés à blanc par le tracteur.
 
Disparue, envolée, ma Platanthère, comme toutes les autres belles  qui se cachent ou se montrent, discrètes ou coquettes, parmi les herbes du printemps...

Comme Linné l'avait compris et démontré*, la botanique est une science amoureuse. À un certain degré, elle devient poésie.


Pierre-Olivier Combelles

* Carl von Linné: Voyage en Laponie https://www.ladifference.fr/media/feuilleteuse/extrait-978-2-7291-1412-1.pdf

Cet article est une republication. Source: http://pocombelles.over-blog.com/2016/06/les-belles-de-mai-la-platanthere-platanthera-chlorantha-orchidaceae.html

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Shamil Sultanov: La civilisation moderne capitaliste (extrait d'un entretien avec Business-Gazeta, 10 janvier 2021)

28 Avril 2023 , Rédigé par Rouge et Blanc Publié dans #Club d'Izborsk, #Inde, #Islam, #Philosophie, #Politique, #Religion, #Shamil Sultanov, #Russie

Shamil Sultanov (1952-2022)

Shamil Sultanov (1952-2022)

(...)

Mais revenons au point clé que je voulais aborder : l'humanité a perdu le sens, l'image de l'avenir, elle ne sait pas où elle va. Le mouvement de la civilisation bâtarde d'aujourd'hui est devenu inertiel par nature - comme un train qui a perdu ses freins et qui déraille. Et l'abîme est devant nous. Je ne peux absolument pas accepter que l'homme soit le roi de la nature et qu'il décide de tout en sa faveur : il ne décidera plus de rien.
- Vous renoncez donc à la vision anthropocentrique de l'univers dans laquelle les penseurs de la Renaissance plaçaient l'homme au centre ?
- L'homme n'est qu'une composante très insignifiante du macrocosme et du microcosme : de systèmes plus généraux et plus vastes - planétaire, solaire, galactique, cellulaire, atomique, subatomique, etc. Même si nous considérons l'homme dans le cadre d'une seule Terre, nous constatons qu'il n'est qu'une sorte de néoplasme à la surface de la planète, et le temps montrera s'il est bénin ou malin. Jusqu'à présent, nous devons constater que l'humanité se comporte de plus en plus comme une tumeur maligne.
Depuis quand l'homme est-il apparu sur Terre et quand les civilisations ont-elles commencé à émerger ? Dans les études culturelles actuelles, on estime que la civilisation actuelle, vieille de 8 à 10 000 ans au maximum, n'est pas la seule à avoir existé sur notre planète. Il s'agit d'une civilisation, mais nous ne savons rien de nos prédécesseurs - nous ne connaissons même pas nos véritables ancêtres.
La civilisation moderne, c'est avant tout le capitalisme, ce que l'on appelle le Nouvel Âge, dont les racines remontent à la Renaissance. Cette civilisation a entre 500 et 600 ans, voire un peu plus. Qu'est-ce qui caractérise cette période en premier lieu ? C'est que la civilisation est profondément matérialiste et en même temps eurocentrique. Cela apparaît clairement si nous la comparons aux civilisations chinoise, indienne ou même romaine. Là, il n'y avait pas de domination matérielle aussi écrasante. Le matériel, le physique, occupait de 15 à 30 % de la vie des gens. Si nous regardons l'ancienne civilisation égyptienne, l'élément matériel dans cette civilisation était d'une importance mineure. Et aujourd'hui ? Je pense que nous pouvons parler d'une domination matérielle de 80 à 90 %. Ce que l'on appelle la culture de masse, ou ce que l'on appelle parfois la quasi-culture, n'a aucun rapport avec les principes spirituels. Elle ne fait qu'interpréter le matériel à sa manière et cherche à augmenter ses profits.
En même temps, il y a un paradoxe. Si l'on se souvient de l'État soviétique, qui proclamait officiellement son matérialisme et son athéisme, il était né d'un élan spirituel vers la justice mondiale et le paradis terrestre. Mais en quelques décennies (bien avant l'effondrement de l'URSS), il a abouti au matérialisme le plus primitif et le plus prosaïque : un appartement pour chaque famille soviétique, une datcha sur six hectares, une voiture, etc.
Aujourd'hui, l'humanité est confrontée à une période de transition difficile, qui sera liée à une recherche intensive de nouveaux modèles et de nouvelles stratégies - non seulement politiques, mais aussi sociales, économiques, culturelles, informationnelles et autres. Nous disposons de 20 à 25 ans pour cela, mais j'ai le sentiment que ce délai n'est pas suffisant pour résoudre l'ensemble des problèmes existants.
- De quels problèmes parlez-vous, en dehors des défis environnementaux et économiques ?
- Regardez : l'un des principaux piliers de la civilisation capitaliste - l'État, avec ses autorités et son appareil - s'effondre sous nos yeux. Le modèle étatique est fortement discrédité sur le plan idéologique et spirituel. C'est ce qui se passe aux États-Unis et en France, par exemple. Dans le même temps, la proportion d'États en déliquescence dans l'œcoumène* augmente. Rien qu'en Afrique, on compte plus d'une douzaine d'États de ce type. En Amérique latine, nous pouvons facilement trouver des exemples similaires. En Eurasie également : la Syrie, l'Irak, l'Afghanistan sont tous des États en déliquescence. Dans ce cas, au lieu de s'identifier comme citoyen d'un État (ce qui est caractéristique de la civilisation capitaliste urbaine), on revient à une auto-identification clanique ou même tribale. On pourrait également parler d'une auto-identification criminelle. Tout cela était caractéristique des périodes les plus difficiles du Moyen-Âge et apparaît soudain chez nous au XXIe siècle. C'est pourquoi certains penseurs, à commencer par Nikolai Berdyaev, ne cessent de nous parler d'un retour au Moyen-Âge.
- Karl Marx nous avait promis le dépérissement des États, mais maintenant ce n'est plus du tout selon Marx...
- Oui, c'est en train de se produire sous une forme légèrement différente.
- En fait, la Russie présentait également de nombreux signes d'un État en déliquescence dans les années 1990.
- L'État russe, si vous le regardez du point de vue du modèle, est féodal par essence. Je ne vous donnerai qu'un exemple. Nous avons un roi conventionnel, Poutine. Nous avons des ducs, des princes et des comtes conditionnels - Alexey Miller, Igor Sechin, les frères Rotenberg et d'autres. Et il y a le gouvernement. Dans n'importe quel autre pays, ses dirigeants sont des personnages clés, mais dans le nôtre, ils ne le sont pas. Pratiquement personne ne peut dire un mot contre Igor Sechin. Parce que Sechin est beaucoup plus proche du chef de l'État. C'est comme dans la hiérarchie féodale : plus on est proche du corps du roi, plus on est influent. Les titres et les postes ne sont souvent pas aussi importants que cette proximité proverbiale. Plus bas dans l'échelle hiérarchique, on trouve les barons, les chevaliers... Et tout en bas, les serfs. Et si nous examinons la structure sociale de la Russie moderne, nous constatons que cette couche de la population constituée de serfs subsiste, bien que sous une forme différente, plus complexe et plus sophistiquée.

(...)

Permettez-moi d'ajouter une autre caractéristique de notre époque que j'ai personnellement constatée. L'homme moderne, me semble-t-il, n'a plus le choix entre la vérité et le mensonge. Il doit maintenant choisir entre plusieurs contre-vérités celle sur laquelle il est préférable et plus avantageux de s'appuyer. Il y a toutes sortes de contre-vérités qui opèrent dans le monde d'aujourd'hui au nom de la vérité : le libéralisme et le conservatisme, le postmodernisme et le réalisme, Trump et Biden, Trump et Poutine ou Poutine et Navalny, etc. Tous ont leurs résonances pour ressembler à quelque chose de réel et de vrai, mais tous sont, si l'on y regarde de plus près, le décor derrière lequel résonne le joueur de flûte. La vérité en tant que telle - sous la forme de justice sociale, de sentiment religieux sincère ou de quête morale (qui caractérisait les gens du XIXe siècle) - n'existe plus dans notre réalité. Elle est, comme on dit, disparue du marché et n'est pas demandée.

(...)

Source: Entretien avec Shamil Sultanov. Business-Gazeta(Russie), 10 janvier 2021

https://www.business-gazeta.ru/article/495028

Traduit du russe par Rouge et Blanc avec DeepL.

* NDT: L'écoumène - ou œkoumène \e.ku.mɛn\ - (nom masculin, du grec ancien : οἰκουμένη, oikouménē, « habité » est une notion géographique qui désigne l'ensemble des terres anthropisées (habitées ou exploitées par l'être humain). Elle s'oppose en ce sens à l'érème qui représente dès lors le reste de l'espace inhabité et non exploité. L'acception moderne du mot concerne généralement l'humanité entière, mais le mot a eu des sens plus limités, notamment dans la Grèce antique, où il renvoyait à la Terra cognita, la terre connue. Le terme est à nouveau utilisé aujourd'hui, particulièrement par le géographe Augustin Berque qui l'utilisait pour désigner la relation de l'humain à son milieu (relation sensible et concrète, symbolique et technique). Serge Valdinoci l'utilisa à son tour dans son exploration d'une théorie de l'habitat immanent de l'humain dans son univers sémantique (voir l'article europanalyse). Dans l'Église catholique médiévale, le terme écoumène est utilisé pour désigner le monde dans sa totalité. (source: Wikipedia: https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89coum%C3%A8ne)

NDLR: Shamil Zagitovich Sultanov (1952-2022), philosophe et géopoliticien russe musulman, directeur du Centre des Études stratégiques "La Russie et le monde islamique", avait été aussi député de la Douma de 2003 à 2007. Le philosophe français Pierre Dortiguier l'a évoqué à plusieurs reprises dans ses entretiens, mais seulement pour souligner son origine tatare, sans jamais expliquer qui il était ni ce qu'il faisait, ce qui est très regrettable. Vous trouverez sur ce blog plusieurs articles de ce remarquable penseur, trop tôt disparu, traduits en français par nos soins.

Tags: Shamil Sultanov, Club d'Izborsk.

https://pocombelles.over-blog.com/tag/club%20d%27izborsk%20%28russie%29/

Shamil Sultanov était membre du Club Izborsk.

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Shamil Sultanov: Aujourd'hui, les hommes politiques sont tous des acteurs !

28 Avril 2023 , Rédigé par Rouge et Blanc Publié dans #Shamil Sultanov, #Philosophie, #Politique, #Russie, #Club d'Izborsk (Russie), #Ukraine

(...)

- Et le caractère de masse lui-même est dû à quoi ? Je dirais que la civilisation actuelle, qui se dirige inévitablement vers sa fin, a créé une énorme strate d'"imitateurs". Il s'agit de personnes qui imitent totalement les stéréotypes, qui sont prêtes à être formées elles-mêmes. Ils sont formés par l'influence complexe des médias de masse, de la télévision, d'Internet, par l'éducation, la publicité, les rumeurs, l'appartenance à un certain clan, etc. On dit à l'homme moderne : "Tu dois suivre le style". Et cette année, la mode est à untel ou untel. Mais pourquoi ? Pourquoi un homme qui réussit devrait-il nécessairement porter telle marque de montre et pas une autre ? Pourquoi porterait-il un costume bleu et non le classique noir ? Après tout, personne ne se pose sérieusement ces questions. Cela signifie qu'il existe un puissant mécanisme d'imitation - et un mécanisme incontestable. Si l'on dit à une femme : "Suivez un certain style", toute femme normale devrait répondre : "Je suis une femme unique. Si je suis un style impersonnel, je me perdrai. Je dois trouver mon propre style". Mais peu de gens disent cela ! Et la proportion de personnes prêtes à imiter automatiquement et à accepter silencieusement les modèles de la société moderne atteint 70 à 80 % ! C'est le moins que l'on puisse dire ! Une masse critique a été atteinte. Grâce à la programmation neurolinguistique et aux techniques directes et indirectes de guerre psychologique, quelqu'un est en mesure d'influencer de grandes masses humaines. Il ne s'agit pas de personnes agissant rationnellement, mais de personnes prêtes à être formées. Ils sont formés - par rapport au style, à l'alimentation, aux valeurs de la vie, à la politique, aux autres personnes, aux groupes, aux sociétés, etc. Mais de la même manière, ils peuvent aussi être formés par rapport à la maladie. Comme l'a souligné l'un de nos universitaires, même avant l'apparition du coronavirus, les gens mouraient de diverses maladies infectieuses. Cela se passait en Russie et en Union soviétique, mais personne ne le soulignait. C'était peut-être une mauvaise chose, mais d'un autre côté, c'était une bonne chose, parce qu'il n'y avait pas d'agitation. Soudain, le monde entier a été saisi par une sorte d'hypocondrie généralisée. En l'espace de quelques mois, les gens ont accepté l'idée que certains groupes de pouvoir avaient le droit de les enfermer chez eux. Aujourd'hui sous la bannière du coronavirus, demain sous la bannière d'une autre "couronne".

Je tiens à souligner que ce n'est pas sans raison que la figure centrale de la culture de la civilisation moderne est l'acteur. Non pas un penseur, non pas un écrivain ou un scientifique capable d'une réflexion profonde, mais un acteur - une créature de manipulation et de contrôle, avec un psychisme mobile et imitatif. L'acteur idéal est une marionnette tirée par des ficelles dans le théâtre conditionnel de Karabas-Barabas. Si 70 à 80 % des gens d'aujourd'hui sont des imitateurs, leurs héros sont des acteurs, des comédiens, des humoristes, etc.
C'est l'une des grandes différences entre le modèle de civilisation actuel et d'autres civilisations. Par exemple, dans la civilisation romaine hellénistique de la Méditerranée, il y avait deux des professions les plus méprisées : le bourreau et l'acteur. Pourquoi un acteur ?  Il ne peut même pas s'exprimer, il ne peut que mal jouer les autres. "On ne te demandera pas pourquoi tu n'es pas devenu untel ou untel. On te demandera là-bas pourquoi tu n'es pas devenu toi-même."
Dans la civilisation actuelle, au contraire, tout est à l'envers. Et c'est pour cela qu'un showman devient président des États-Unis. Et le président de l'Ukraine  est un comédien. L'un des principaux hommes politiques italiens est également comédien (Giuseppe Piero Grillo, fondateur du mouvement de protestation "Cinq Étoiles" - ndlr). Mais encore une fois, si nous regardons de près les hommes politiques contemporains, nous constatons qu'ils sont tous des acteurs ! Et très souvent, ce sont de mauvais acteurs. Et si nous regardons les années 1950 et 1960, pas si éloignées de nous, nous verrons Konrad Adenauer, Charles de Gaulle ou, disons, Nikita Khrouchtchev. Quoi qu'on en pense, il s'agissait de personnalités, pas d'acteurs. Et l'homme politique actuel n'a pas le droit d'être une personnalité. Il joue tout le temps, mais comme il ne s'est jamais spécialisé dans le jeu d'acteur (sauf les politiciens-acteurs professionnels), il est condamné à perdre. Ainsi, objectivement, les populistes d'un jour, tels que Donald Trump, occupent le devant de la scène. Et une ou deux ou même mille personnes honnêtes et sincères ne sauveront ni n'arrangeront rien ici. Espérer que Danko sorte son cœur de sa poitrine et dirige la nation est naïf. Le système d'imitation totale est en place depuis des décennies. Le même modèle de production et de consommation de masse a plus de 80 ans. Et l'élément clé de ce que j'appelle la "civilisation de l'imitation" est la publicité totale. Très souvent, nous ne sommes même pas conscients de ce qu'est réellement la publicité dans ses effets dramatiques. Par exemple, on parlait de l'effet 25th Frame, puis on se taisait et on déclarait que c'était une fiction. Mais en fait, le 25e cadre fonctionnait déjà dans les années 1960. Et il n'est pas difficile d'imaginer à quel point ces technologies noires se sont intensifiées depuis. J'ai moi-même travaillé à la télévision et je sais comment ce genre de choses se produit - même avec notre approche plutôt amateur.

Les résultats des élections aux États-Unis montrent que l'Amérique n'est pas divisée en deux, mais en trois parties. Il y a les partisans des démocrates - une foule très diverse, composée de minorités ethniques, de gays, de lesbiennes, de transgenres et de personnes qui les justifient, de partisans du socialiste Bernie Sanders, etc. Il y a les conservateurs traditionnels - des gens ordinaires qui, dans les années 90, pendant la campagne électorale, ont dit à Buchanan : "Pat, qu'est-ce qui se passe de toute façon ? Nous sommes devenus un pays complètement différent ces derniers temps ! Où sont nos traditions, où est notre culture ?" Mais il y a un troisième groupe qui s'oppose à la fois à Joe Biden et à Donald Trump. On les trouve au sein du Parti républicain - ils ont toujours détesté le showman Trump et ses mensonges permanents. En signe de protestation, ces personnes ont voté pour Biden. À l'inverse, certains membres du parti démocrate n'aimaient pas Biden, ses grimaces et son habileté à former un entourage exclusivement composé de pédérastes, de personnes de couleur et d'autres personnes du même acabit. Ils ont donc voté pour Trump. À mon avis, l'opposition de ces trois groupes est le problème le plus dangereux pour la société américaine. Et je ne suis pas sûr que Biden puisse gérer une telle situation.

(...)

Source: Entretien avec Shamil Sultanov. Business-Gazeta(Russie), 10 janvier 2021

https://www.business-gazeta.ru/article/495028

Traduit du russe par Rouge et Blanc avec DeepL.

Shamil Zagitovich Sultanov (1952-2022), philosophe et géopoliticien russe musulman, directeur du Centre des Études stratégiques "La Russie et le monde islamique", avait été aussi député de la Douma de 2003 à 2007. Le philosophe français Pierre Dortiguier l'a évoqué à plusieurs reprises dans ses entretiens, mais seulement pour souligner son origine tatare, sans jamais expliquer qui il était ni ce qu'il faisait, ce qui est très regrettable. Vous trouverez sur ce blog plusieurs articles de ce remarquable penseur, trop tôt disparu, traduits en français par nos soins.

Tags: Shamil Sultanov, Club d'Izborsk.

https://pocombelles.over-blog.com/tag/club%20d%27izborsk%20%28russie%29/

Shamil Sultanov était membre du Club Izborsk.

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Jacques Lacroix: Les mots gaulois du Français

27 Avril 2023 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles Publié dans #Pierre-Olivier Combelles, #Langue, #Forêt, #France, #Indo-Européens, #Gaulois, #Jacques Lacroix, #Défense de la langue française

Jacques Lacroix (capture d'écran)

Jacques Lacroix (capture d'écran)

Sur le site de l'organisation Défense de la langue française

http://www.langue-francaise.org/

découvrez la passionnante exploration de Jacques Lacroix à la découverte des mots gaulois de la langue française:

http://www.langue-francaise.org/mots_gaulois_jacques_lacroix.mp4

Mots de la forêt et de la terre, mots du travail du fer et du bois, d'origine indo-européenne encore plus ancienne, ils nous relient à nos ancêtres et à notre lointain passé.

Mon nom de famille paternel, originaire du Tarn (région de Réalmont), Combelles, est purement gaulois, composé de deux mots: combe, qui signifie vallon, val, petite vallée, et belles, le féminin pluriel de beau, brillant, resplendissant d'où vient aussi le nom du dieu du soleil Bélénos, bel étant lui-même d'origine indo-européenne.

Pierre-Olivier Combelles

Jacques Lacroix: Les mots gaulois du Français
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Robert F. Kennedy Jr. sur les super-profits de l'industrie pharmaceutique

27 Avril 2023 , Rédigé par Rouge et Blanc Publié dans #Children's Health Defense, #Economie, #Santé, #Robert F. Kennedy Jr.

Robert F. Kennedy Jr. sur les super-profits de l'industrie pharmaceutique

Robert F. Kennedy Jr et Mike Tyson sur le modèle économique des vaccins:  « Ils gagnent 60 milliards de dollars par an en nous vendant des vaccins, mais ils gagnent 500 milliards de dollars par an en vendant des remèdes pour les blessures causées par les vaccins »

Source et extrait de l'interview avec sous-titres en français:

https://twitter.com/AlienorAubigne/status/1651455093126885388?t=acYP3hN5oHLJ3VDNIPs6fg&s=03

Children's Health Defense: https://childrenshealthdefense.org/

CHD sur ce blog:

https://pocombelles.over-blog.com/tag/children%27s%20health%20defense/

Robert F. Kennedy Jr. sur les super-profits de l'industrie pharmaceutique
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