marine
R.I.P. HMNZS Manawanui
Le navire hydrographique Manawanui de la Marine de Guerre de Nouvelle-Zélande* a coulé pendant la nuit du 5 octobre 2024 après avoir heurté un récif de corail dans l'archipel des Samoa (Océan Pacifique). Le commandant est le (la) capitaine de frégate Yvonne Gray, une femme originaire d'Angleterre, ancienne enseignante et revendiquée LGBT. Les 75 membres de l'équipage, dont une partie ont été blessés, ont été sauvés. Le carburant des réservoirs et les produits chimiques se trouvant à bord menacent l'environnement**.
La marraine du Manawanui est Dame Jacinda Arden, Première Ministre travailliste de Nouvelle-Zélande de 2017 à 2023. La Ministre de la Défense actuelle est Madame Judith Collins.
"Le chef de la marine, le contre-amiral Garin Golding, a ordonné la constitution d'une commission d'enquête sur le naufrage du HMNZS Manawanui et a nommé la commodore Melissa Ross*** à la présidence de cette commission. La commission d'enquête se réunira vendredi."
Nous adressons nos condoléances à la Marine néo-zélandaise pour la perte de ce bâtiment, en espérant que les responsabilités seront déterminées impartialement et en dehors de toute idéologie.
* https://www.nzdf.mil.nz/navy/our-equipment/ships-and-watercraft/hmnzs-manawanui/
https://www.nzdf.mil.nz/media-centre/story-collections/hmnzs-manawanui-in-samoa/
*** "Commodore Melissa Ross (Ngāpuhi) joined the Royal New Zealand Navy (RNZN) in 1993 as a Marine Engineering Officer. She was one of the first women in the RNZN to go to sea on an operational warship. Commodore Ross has previously held the position of Deputy Chief of Navy and Commander Logistics. She is appointed to the COI as the President."
Pour en savoir plus:
https://www.yorkpress.co.uk/news/24643746.cdr-yvonne-gray-hailed-hero-ship-evacuation-near-samoa/
Source de l'illustration: https://www.nzherald.co.nz/nz/hmnzs-manawanui-what-we-know-about-the-navy-ships-sinking/JRZLWOTLFRAATIQRJM4JKMTVMI/
Source des illustrations ci-dessus et article complet: https://www.nzdf.mil.nz/media-centre/news/yorkshire-woman-takes-command-of-royal-new-zealand-navy-ship/
https://www.abc.net.au/news/2024-10-11/new-zealand-defence-minister-hits-out-sexist-trolling-of-navy/104459964
HMNZS Manawanui: Defence Minister Judith Collins slates ‘misogynistic’ criticism of Navy commander after ship sinking:
Le HMNZS Manawanui était un navire de soutien offshore multirôle de la Marine royale néo-zélandaise (RNZN). Il avait auparavant servi comme navire d'étude civil MV Edda Fonn dans l'industrie pétrolière et gazière norvégienne. Le navire a été acheté pour la RNZN en 2018 et mis en service le 7 juin 2019, remplaçant le navire hydrographique HMNZS Resolution et le navire de soutien à la plongée HMNZS Manawanui (A09).
Le Manawanui est entré en service opérationnel au début de 2020 et a entrepris de multiples déploiements dans le Pacifique au cours des années suivantes, participant à RIMPAC 2020 et soutenant les opérations à la suite du cyclone Gabrielle en 2023. Le Manawanui a coulé le 6 octobre 2024 après s'être échoué lors de la surveillance d'un récif au large des côtes des Samoa. Les 75 personnes à bord du Manawanui ont été sauvées.
(...)
Naufrage
Dans la soirée du 5 octobre 2024, le navire s'échoue à environ un mille nautique (1,9 km) au large de Siumu, sur la côte sud de l'île d'Upolu (Samoa), alors qu'il effectue des travaux de reconnaissance sur un récif dans une mer agitée et des vents violents. Le commandant Yvonne Gray a donné l'ordre à tout le monde d'abandonner le navire. Les 75 membres d'équipage à bord ont été évacués à l'aide de quatre radeaux de sauvetage et de deux canots pneumatiques à coque rigide le 6 octobre. Les opérations de sauvetage ont été gérées par le Centre de coordination des opérations de sauvetage de Nouvelle-Zélande et l'armée de l'air royale néo-zélandaise a déployé un avion P-8A Poseidon pour prêter main-forte. L'évacuation a commencé à 19 h 52 le 5 octobre. En raison des conditions météorologiques difficiles, il a fallu cinq heures aux canots de sauvetage pour atteindre le rivage. L'un des canots de sauvetage s'est retourné pendant le voyage et ses occupants ont marché jusqu'au rivage sur le récif. À 22h00, le navire de croisière britannique MS Queen Elizabeth et le câblier norvégien MS Lodbrog, qui avaient répondu à l'appel de détresse, sont arrivés sur les lieux pour apporter leur aide.
Le navire a pris feu à 6h40 le 6 octobre et a chaviré et coulé à 9h00. Au moins 17 personnes ont été blessées dans l'incident, dont beaucoup par des coupures et des abrasions dues à la marche sur le récif, et trois ont été soignées à l'hôpital, dont une pour une épaule disloquée. L'équipage et les passagers, dont sept scientifiques et quatre membres de l'armée étrangère, ont été hébergés à Samoa avant d'être transportés par avion en Nouvelle-Zélande. La RNZN a entrepris des travaux pour récupérer le navire et atténuer l'impact environnemental du naufrage. Le 7 octobre, des résidents locaux ont signalé avoir vu et senti du pétrole près de l'épave. Le Premier ministre samoan par intérim, Tuala Tevaga Iosefo Ponifasio, a déclaré dans un communiqué de presse : « Le HMNZS Manawanui n'est pas récupérable et a sombré dans l'océan ».
Le récif cartographié n'avait pas été étudié depuis 1987. Le naufrage fera l'objet d'une enquête par une cour d'enquête navale. Le navire est le premier navire de la marine néo-zélandaise à être coulé involontairement depuis la Seconde Guerre mondiale et le premier à être perdu en temps de paix.
Au moment du naufrage, le navire transportait 950 tonnes de diesel. Le 8 octobre, des habitants des Samoa ont signalé que le naufrage avait provoqué une marée noire qui menaçait le tourisme et la pêche dans la région. Le même jour, la RNZN a déclaré que si du pétrole s'était échappé du Manawanui lors de son naufrage, les plongeurs de la marine qui avaient inspecté l'épave n'avaient rien détecté qui s'en échappait. Le gouvernement samoan est d'accord avec cette évaluation. À ce moment-là, l'épave se trouvait à 30 mètres (98 pieds) sous la surface, le navire étant couché sur le côté. La RNZN envisageait de retirer les carburants et autres produits chimiques de l'épave.
Source: https://en.wikipedia.org/wiki/HMNZS_Manawanui_(2019)
Traduit de l'anglais par Rouge et Blanc
Le capitaine de frégate Yvonne Gray saluée comme une héroïne pour l'évacuation d'un navire près de Samoa
Pierre-Olivier Combelles: Travaux sur le Québec-Labrador (1988-2024)
PIERRE-OLIVIER COMBELLES
TRAVAUX SUR LE QUÉBEC-LABRADOR
(1988-2024)
Audubon, J.-J., 1988. La baie de Fundy. Traduit de l’américain par P.O. Combelles. In : Cols Bleus, revue de la Marine Nationale, Nº1978 du 27 février : 11-15. [Extrait du Journal du Labrador de J.-J. Audubon]
Audubon, J.-J., 1989. Le petit pingouin, Alca torda. Traduit de l’américain par P.O. Combelles. In : Cols Bleus, revue de la Marine Nationale, Nº2041 du 8 juillet : 10-15. [Extrait du Journal du Labrador de J.-J. Audubon]
Grandeur Nature. Film documentaire 26’ de Pierre-Olivier Combelles, réalisé par Y. Bourgeois. Production ATOM/FR3, 1989.
https://www.youtube.com/watch?v=EGlJRnL2SoQ
Dans le sillage d’Audubon. Géo Magazine N° 131, janvier 1990: 122-137.
Dans le sillage d’Audubon, à la découverte de la Basse Côte-Nord du Québec. Exposition itinérante créée par Pierre-Olivier Combelles au Carré des Arts du Parc floral de Vincennes, 1990. Présentée ensuite à Couëron (Hôtel de Ville), Saint-Malo (1er Festival du Livre d’Aventure et de Voyage), Cambrai (Hôtel de Ville), Saint-Etienne (Hôtel de Ville, Fête du Livre), Rueil-Malmaison (Maison de la Nature), Saint-Germain en Laye (Hôtel de Ville), Ville d’Avray (Maison de la Culture), Bourges (Muséum d’Histoire naturelle).
(Radio). Gens du Saint-Laurent (entretiens avec Roiand Jomphe, etc.). L’Échappée Belle, France-Culture, janvier 1991.
Expédition Basse Côte-Nord 1990 - appuyée par l’OFQJ. Tandem, février 1991.
Audubon’s wake. Equinox, Nº59, September/October 1991 : 48-57.
Le Labrador en pneumatique: croisière en éternité. Neptune-Yachting N° 84, juillet-août 1991: 84-91.
Ouapitagone, l’île des plongeons catmarins. Îles Magazine, Nº15, avril-mai 1991 : 24-29.
Photographies de la Basse Côte-Nord du Québec., in: Dictionnaire des noms de lieux du Québec, Commission de Toponymie du Québec, 1995.
Les fruits sauvages comestibles et l’alimentation sur la Basse-Côte-Nord du Québec. Le Naturaliste canadien, volume 120, N° 2 (été 1996): 8-19.
Le voyage de John James Audubon au Labrador (1833) et sa contribution à l’Histoire naturelle de la Côte-Nord du Québec. Mémoire de Diplôme d’Études Doctorales, Muséum National d’Histoire Naturelle, Paris, 1997, 225 p.
Le voyage de John James Audubon au Labrador (1833). Sa contribution à l’Histoire naturelle de la Côte-Nord du Québec. Le Naturaliste canadien, volume 123, N° 1 (Hiver 1999): 67-74.
Introduction à l’histoire naturelle de la Baie et du lac Coacoachou. Première partie. Le Naturaliste canadien, vol. 125, Nº 1 (hiver 2001) : 57-67.
Introduction à l’histoire naturelle de la Baie et du lac Coacoachou. Deuxième partie. Le Naturaliste canadien, vol. 125, Nº 2 (été 2001) : 75-83.
John James Audubon, l’amiral Henry Wolsey Bayfield et leur rencontre sur la Basse Côte-Nord du Québec durant l’été 1833. Textes de J.J. Audubon et de H.W. Bayfield traduits de l’américain par l’auteur. La Revue d’histoire de la Côte-Nord. Sept-Îles (Québec). N° 34 (juin 2002) : 16-24.
Le chemin de la forêt. Exposition créée à La Lanterne, Pôle culturel de la ville de Rambouillet (France, Yvelines), mai-juin 2019.
https://www.youtube.com/watch?v=mS_qO0HZyfg
Les plantes de la Basse Côte-Nord des planches des « Oiseaux d’Amérique » de John James Audubon. La Revue d’Histoire de la Côte Nord, N° 69-70 (mai 2020): 82-90.
Extraits du journal de bord du Lac Robertson (octobre 1992). La Revue d’Histoire de la Côte Nord, N° 71-72, juin 2021, pp. 64-72.
(Avec mise en contexte de Pierre Rouxel). Pierre-Olivier Combelles sur les traces de John James Audubon au Labrador, en Basse Côte-Nord, en 1833. Littoral N°16, Automne 2021: 6-53.
https://www.septentrion.qc.ca/catalogue/revue-littoral-no-16
Un regard depuis les Andes du Pérou sur les recherches sur la Basse Côte-Nord et au Labrador. La Revue d’Histoire de la Côte-Nord, N° 73-74, mai 2022, pp. 67-74.
À Natashquan, pendant l’été 1833, John James Audubon peignait un fou de Bassan pour Les Oiseaux d’Amérique. La Revue d’Histoire de la Côte Nord, N° 75-76, Avril 2023, pp. 63-68.
Trois poèmes et un portrait. Littoral N°17, 2023, pp. 190-196.
https://www.septentrion.qc.ca/catalogue/revue-littoral-no-17
Le Thé du Labrador, un emblème de la péninsule. Littoral N°18, 2024, pp. 118-122.
https://www.septentrion.qc.ca/catalogue/revue-littoral-no-18
L’île de la Demoiselle au cœur d’un récit de Marguerite de Navarre (1559). La Revue d’Histoire de la Côte Nord, N°77- Avril 2024: 71-76
Les fous de Bassan, compagnons des marins
L'Amiral Jean-Yves Le Dantec à Brest, parlant avec amour des fous de Bassan. Capture d'écran du film de Hervé Hamon "Au coeur des tempêtes", minute 41'55'.
Hervé Hamon): Quel est votre oiseau préféré ?
Amiral Jean-Yves Le Dantec: Ah, c'est le fou de Bassan, parce que c'est un oiseau qu'on ne voit qu'au large, un superbe voilier qui fait jusqu'à 1m 80 d'envergure, blanc avec le bout des ailes noir et le bec jaune (NDLR: erreur: le bec est gris verdâtre pâle), de merveilleux animaux. Si je croyais en la métempsychose, dans une vie future, j'aimerais bien être un fou de Bassan.
"Au coeur des tempêtes", un magnifique film de Hervé Hamon (2018 ?) sur l'Abeille Flandres, un remorqueur de haute mer qui était basé à Brest, en surveillance du rail d'Ouessant et de la mer d'Iroise. Désormais basé à Toulon, il a été remplacé depuis sur le secteur par l'Abeille Bourbon. Et surtout un hommage aux vrais marins, car le meilleur bateau n'est rien sans eux. C'est pourquoi la fraternité entre l'amiral Le Dantec, les marins de l'Abeille Flandres et les oiseaux de mer est si émouvante.
Notice de l'Abeille Flandre sur Wikipedia: https://fr.wikipedia.org/wiki/Abeille_Flandre
Compagnon des marins, le fou de Bassan (Sulidae) est le plus grand et les plus majestueux oiseau de mer de l'Atlantique nord. Blanc avec l'extrémité des ailes noires, d'une envergure de 165 à 180 cm, il vit toujours au large des côtes, plongeant sur les poissons dont il se nourrit. Son vol est onduleux sur de larges périodes, fait de quelques battements et de longs planés dans lesquels il descend presque au ras de l'eau et remonte en virant sur lui-même. Il se reproduit en vastes colonies sur des rochers en pleine mer comme Gannets Rocks, dans le golfe du Saint-Laurent, où le grand naturaliste et peintre animalier John James Audubon l'a observé et peint en 1833.
P.-O.C.
21'45": fous de Bassan en pêche à Blanc-Sablon, dans le détroit de Belle-Isle, entre le Labrador et Terre-Neuve (Canada). Grandeur nature, dans le sillage de John James Audubon, un film de Pierre-Olivier Combelles réalisé par Yves Bourgeois.
A propos de l'annexion peu glorieuse de l'archipel des Marquises en 1842 par la France (Herman Melville, "Taïpi").
Si le sentiment d'amour qui me lie à cet endroit, à ce peuple, à cet homme, à cette femme, etc., est sincère, j'ai pu faire aussi de la poésie. S'il n'est pas sincère, j'ai fait simplement de la littérature.
Pier Paolo Pasolini, à propos de Médée et des Mille et une Nuits (1969).
http://pocombelles.over-blog.com/2020/11/amour-sincerite-poesie-ou-litterature-pasolini.html
Les illustrations ci-dessus sont extraites du passionnant catalogue de l'exposition "Trésors des îles Marquises" réalisée en 1995 sous la direction de Michel Panoff par le Muséum national d'Histoire naturelle, l'ORSTOM (aujourd'hui IRD) et la Réunion des Musées nationaux au Musée de l'Homme du Trocadéro, à Paris.
Il est entièrement disponible en ligne ici:
http://horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-10/42889.pdf
Nuku Hiva sodalane Auteurs : Hermann Ludwig von Löwenstern ou Wilhelm Gottlieb Tilesius Date : 1803/1806. Cette aquarelle montre un guerrier tatoué de Nuku Hiva. Médiathèque historique de Polynésie. https://mediatheque-polynesie.org/nuku-hiva-sodalane-guerrier-de-nuku-hiva-18031806/
"Les Polynésiens étaient essentiellement guerriers. Ils avaient comme armes des frondes, des lances, des casse-têtes, des massues d'un bois très dur, des poignards en os et des haches faites d'une pierre attachée par des cordes à un manche en bois. La fabrication de ces haches devait leur demander beaucoup d'efforts, car ils ne disposaient pour les tailler et les polir que de coquillages et de cailloux. Les indigènes connaissaient aussi l'arc et les flèches, mais sauf aux Gambier et à Pâques, ils ne s'en servaient que pour s'amuser.
Les indigènes savaient élever des fortifications : celles-ci se composaient presque toujours de fossés et de palissades.
Il y en avait d'importantes dans l'île Nuka-Hiva de l'archipel des Marquises, mais les plus formidables se trouvaient dans l'île Rapa-iti dont les sommets étaient couronnés par des forts en pierres sèches à terrasses superposées dominées elles-mêmes par des tours. On en peut voir encore les ruines aujourd'hui.
Les peuplades se faisaient des guerres terribles mais ne se livraient de batailles rangées que pour s'emparer d'une baie : elles l'attaquaient alors par terre et par mer. Les combats d'embuscade, où la ruse jouait le principal rôle, étaient bien plus fréquents. Malheur aux prisonniers! Ils étaient impitoyablement immolés en l'honneur des dieux. Aux îles Marquises ainsi qu'aux Tuamotu, on les mangeait même.
Dans les îles-du-Vent et les îles-sous-le- Vent, le cannibalisme avait disparu au moment de la venue des Européens ; toutefois les captifs étaient égorgés. Lorsque la lutte aboutissait à l'envahissement d'un village, les vainqueurs massacraient les femmes et les enfants, pillaient et brûlaient les cases, abattaient jusqu'aux arbres et ravageaient les campagnes. C'est ainsi que les populations des îles Eiao et Hatutu des Marquises furent exterminées vers 1838 par la tribu des Taï-Pii de la côte nord de Nuka-Hiva. Ces anthropophages dévastèrent tellement ces îles qu'ils n'y laissèrent que des cochons sauvages 1. Maintenant encore, elles sont inhabitées.
Aux Marquises, d'ailleurs, la sauvagerie était devenue si implacable que plusieurs tribus ne pouvaient plus y vivre : ce n'était que guerres perpétuelles, suivies d'exécutions continuelles de prisonniers. Dans certaines vallées, par crainte d'une surprise des tribus ennemies, la moitié des indigènes passait les nuits à veiller pendant que l'autre dormait. On comprend facilement que, dans ces conditions, des tribus faibles aient accueilli avec bienveillance l'arrivée des Français."
Eugène Caillot: Histoire de la Polynésie orientale. Ernest Leroux, Paris, 1910
Keatonui, un chef de Nuku Hiva. Hermann Ludwig von Löwenstern ou Wilhelm Gottlieb Tilesius. https://mediatheque-polynesie.org/langue/russe/
Marquisien de Nuku Hiva se laissant tatouer (1814). Hermann Ludwig von Löwenstern ou Wilhelm Gottlieb Tilesius. Source: https://mediatheque-polynesie.org/langue/russe/
"L'expédition des Marquises avait appareillé de Brest au printemps de 1842, et le secret de sa destination n'était connu que de son seul commandant (NDLR: le vice-amiral Abel Aubert du Petit-Thouars, dont une rue de Lima porte le nom). On ne saurait s'étonner que ceux qui complotaient une si insigne violation des droits de l'humanité aient tenté d'en voiler l'énormité aux yeux du monde. Et pourtant, en dépit de leur conduite inique en cette matière comme en de bien d'autres, les Français se sont toujours targués d'être la plus humaine et la plus civilisée de toutes les nations. D'où l'on peut déduire qu'un haut degré de raffinement ne suffit pas après tout à maîtriser nos mauvais penchants; si on jugeait de la civilisation sur certains de ses résultats, il semblerait peut-être meilleur pour ce qu'il est convenu d'appeler le monde barbare de rester inchangé."
Herman Melville, Taïpi.
Source: Herman Melville: "Taïpi". Traduit de l'anglais par Théo Varlet et Francis Ledoux, Gallimard, collection Folio (1952).
Titre original de l'édition anglaise (1846): Typee - A peep of Polynesian life during a four month's residence in a valley of the Marquesa's with notices of the french occupation of Tahiti and the provisional cession of the Sandwich Islands to Lord Paulet.
Après avoir entendu parler de ce livre pendant de très longues années, j'ai enfin lu Taïpi de Melville. J'avoue qu'il m'a mis mal à l'aise. C'est le récit autobiographique d'un marin qui déserte avec un camarade lors d'une escale de leur baleinier dans l'île de Nuku Hiva aux Marquises et qui trouvent refuge, après maintes péripéties, auprès d'une tribu d'une vallée reculée. Cette tribu a la réputation d'être cannibale. Sauvés de la mort, ils sont séduits par l'hospitalité de ce peuple qui les soigne, les nourrit, les accueille et plus encore, leur propose de faire définitivement partie des leurs par le tatouage, ce que Melville refuse avec horreur. Son camarade s'enfuit et Melville fait de même quelque temps après, rejoignant un bâtiment sur la côte.
Un séjour de trois de trois semaines seulement, mais qui semble beaucoup plus long dans le livre.
La description de cette des Marquises et des mœurs remarquables de ses habitants présente un certain intérêt. On a cependant du mal à faire la part entre la part personnelle et les lectures de l'auteur, qui a certainement du se documenter beaucoup. Melville critique avec perspicacité l'hypocrisie et le caractère nuisible de la civilisation européenne, mais quand il s'agit de rester vivre dans ce Paradis avec ceux qui lui ont sauvé la vie, il refuse au nom de la "liberté", non sans s'être moqué de la coutume du tatouage qu'il juge répugnante et barbare, alors qu'elle symbolise le courage de la personne et son appartenance définitive au groupe.
Melville, sans aucun regret ni aucune reconnaissance, va s'enfuir lâchement et en blessant même gravement un des guerriers qui voulait l'intercepter à la nage dans la pirogue qui le conduit vers le baleinier australien.
Bref, d'admirateur de la culture polynésienne, Melville lui tourne le dos pour retourner vivre dans ce monde occidental qu'il critiquait au départ si vivement. Et pourquoi faire ? Pour aller écrire et vendre aux États-Unis des livres écrits à partir de son expérience, plus ou moins romancée. Bref un négoce, avec la gloire littéraire (et l'argent) à la clé. Taïpi est d'ailleurs dédié "à Lemuel Shaw, président de la Cour Suprême de l'Etat du Massachussets, dont Melville épousera la fille en 1847". https://fr.wikipedia.org/wiki/Taïpi
Personnellement, je trouve cette conduite égoïste et immorale. C'est un triste exemple qu'il donne aux lecteurs.
On trouve la clé de ce surprenant comportement dans l'essai de Roger Garaudy "Les mythes fondateurs de la politique américaine - Qu'est-ce que l'antiaméricanisme", au début duquel il cite cette phrase de Melville : "Nous les Américains, sommes un peuple particulier, un peuple élu, l'Israël de notre temps: nous portons l'arche des libertés." (America as a civilization, p. 893)*.
Melville ne pouvait pas aimer vraiment ni être fidèle à un peuple qu'il méprisait par principe, au fond de lui-même, tout en lui étant très inférieur, sur tous les plans (physiquement, moralement, culturellement).
Garaudy, lui, a vécu, pensé et écrit avec des principes totalement opposés.
Finalement, Taïpi de Melville est un livre de littérateur peu utile pour ceux qui s'intéressent vraiment aux mœurs anciennes des habitants du Pacifique, et qui laisse un goût amer quand on l'a refermé. Mieux vaut se documenter aux sources des vrais marins et explorateurs. Parmi eux, le Journal peu connu du voyage autour du monde de Camille de Roquefeuil à bord de La Bordelaise de 1816 à 1819, qui consacre de nombreuses pages de son livre aux Marquises (Tome I, chapitres VI et VII, décembre 1817). Il est presque certain pour moi que Melville l'a lu, sans le citer. Dans son ouvrage, Roquefeuil consacre un paragraphe très péjoratif aux déserteurs des bateaux occidentaux (extrait ci-dessus). Cela concerne Melville qui avait déserté.
En tous cas, je comprends pourquoi j'ai attendu si longtemps pour le lire.
Melville est un romancier qui fait figure de savant "illuminé" (Moby Dick), mais j'avoue que maintenant, j'éprouve de l'aversion pour lui.
Par ailleurs, je n'idolâtre pas les œuvres artistiques au point de les mettre au-dessus des personnes et des devoirs envers Dieu et la société, et d'une manière générale, au-dessus de la vérité et de la justice. Je n'ai aucun intérêt pour ce qu'on appelle "la littérature". J'aime la vraie beauté.
Pierre-Olivier Combelles
* http://rogergaraudy.blogspot.com/2010/08/les-mythes-fondateurs-de-la-politique.html
Je dédie cet article à mon arrière-grand-père maternel le chef d'escadron de Marine Théodore Louis Emile Steinmetz, fils de François, Louis Steinmetz et de Dame Claire Hunold (Nancy 12 septembre 1859 - Versailles 1940),
Chevalier (30 décembre 1898, à Saint Louis du Sénégal)) puis Officier de la Légion d'honneur (4 mai 1916)
qui servit la France dans les colonies françaises d'Afrique et de Nouvelle-Calédonie
https://www.lhistoire.fr/la-nouvelle-calédonie-«-une-colonisation-pas-comme-les-autres-»
(l'aigle pêcheur est le balbuzard pêcheur, Pandion haliaetus melvillensis, mwämarak en kanak: https://books.openedition.org/sdo/599?lang=fr )
https://www.letemps.ch/culture/laigle-pecheur-sanglote-liliade-peuple-kanak-rendue-aux-siens
https://www.youtube.com/watch?v=RYRTw52Jgm0
https://www.youtube.com/watch?v=q7skkXwuD-8
https://www.youtube.com/watch?v=4DJRcSEkftI
(bambous de voyage gravés kanak) https://journals.openedition.org/jso/6928
catholique pratiquant,
dont l'avancement fut bloqué dans l'Affaire des Fiches en 1905,
d'humeur taciturne semble t-il, et rentré malade des colonies,
excellent officier selon son ami et voisin à Versailles le général comte Colonna de Giovellina,
arrière-grand-père que je n'ai pas connu,
mort dans la demeure familiale du 46 rue Saint-Louis à Versailles où j'ai passé mon enfance et ma jeunesse, un vaste et haut "hôtel particulier" (comme on dit) du XVIIIe siècle, avec cour, jardin, potager, écuries ... totalement opposé aux cases kanak de Nouvelle Calédonie qu'il avait vues sans doute et que j'aime tant car elles ressemblent à la maison idéale que j'ai imaginée.
La maison familiale où je suis né, dans le Quartier Saint Louis à Versailles (en bas à droite de la photo).
Arrière-grand-père dont je ne sais presque rien de la vie outremer en dehors de quelques états de service et strictement rien de ses relations sur place avec les indigènes,
qui n'était certes pas encore né lors de l'expédition de du Petit-Thouars dans le Pacifique,
qui n'avait sans doute jamais lu Herman Melville, Joseph Conrad, Eugène Caillot ou Victor Segalen (auteur des Immémoriaux), la Bhagavad Gita
ni peut-être aucun ouvrage sur l'histoire des peuples du Pacifique (je n'en ai jamais vu le moindre dans les bibliothèques de ma famille),
mais qui avait rapporté de ses voyages des flèches et des armes en bois indigènes, sûrement kanak, qui dormaient oubliées dans le grenier de la maison familiale de Versailles et auxquelles j'allais régulièrement rendre visite lorsque j'étais enfant,
et dont j'ai hérité de l'épée, soigneusement entretenue,
des cantines militaires, dont je me sers toujours,
de l'excellent Dictionnaire de Marine de l'Amiral Willaumez (1831), qui m'a toujours été d'une grande utilité,
et d'une conque marine (triton) dont je vais faire un vrai pūtātara (shanka en Inde) pour converser avec les dieux et les esprits de mes autres ancêtres de part la nature,
et qui voyagea par le monde et vécut sur des terres lointaines avant moi, mais certainement pas comme moi.
R.I.P.
Pierre-Olivier Combelles
Eléments biographiques de Théodore Louis Emile Steinmetz sur la Base Léonore:
Le triton (Charonia tritonis) rapporté du Pacifique par mon arrière-grand-père Emile Steinmetz. Coll. et photo: Pierre-Olivier Combelles.
Le 31 octobre 2019, fête de la Toussaint
Cher arrière-grand-père,
Parmi les objets qui me viennent de vous et que je conserve pieusement, il y a un grand coquillage; une conque, triton ou trompe marine, que vous aviez certainement rapporté de Nouvelle-Calédonie. Il est nu, tel que sorti de la mer et ramassé sur la plage d'une île. Je le garde précieusement avec moi. J'ai scié la pointe pour en faire cet instrument de musique sacré appelé pūtātara dans le Pacifique, pu aux Marquises et pututo dans les Andes du Pérou et de la Bolivie. En Inde, la conque, shankha, est un attribut des dieux. Le son qu'il produit: OM, est le son primordial, originel. Un même objet, un même nom ou presque pour un usage identique, et décoré de la même manière traditionnelle d'un bout à l'autre du Pacifique. Voyez-vous, il symbolise pour moi la parenté des peuples d'Austronésie-Amérique. Il me manque de fabriquer l'embouchure en bois sculpté et de le décorer de pendentifs pour le faire résonner dans les Andes et sur les eaux du Pacifique afin de lui redonner vie en communiquant avec les esprits des ancêtres d'ici et d'ailleurs, avec l'âme du monde.
Pierre-Olivier Combelles
Ecoutez ici le pūtātara: https://www.rnz.co.nz/audio/player?audio_id=2508838
Affiche de ma conférence sur les Peuples du Pacifique au Muséum d'histoire naturelle de Lima (Université nationale majeure de San Marc) en 2012
"La mer, c'est l'espace immense, l'infini, la communion et la composition avec les Eléments: l'eau, le vent, le ciel, les astres et le cosmos la nuit, les phénomènes météorologiques, les innombrables créatures marines. C'est l'aventure et l'exploration, la rencontre avec d'autres navigateurs, d'autres navires, la découverte d'autres contrées, d'autres peuples, d'autres hommes, d'autres moeurs. C'est avant tout la curiosité, la hardiesse, l'amour de la liberté: "Homme libre, toujours tu chériras la mer ! (Baudelaire). Mais la mer, c'est aussi le parfum de la terre que l'on sent au large avant même de l'apercevoir; parfum chaud, épicé, envoûtant, parfum surtout des arbres et des forêts, comme je l'ai senti en Méditerranée au large de la Corse et une nuit de pleine lune orange, devant la côte obscure, sans une lumière de ville, de village ou de phare, du Labrador... La mer, d'une forêt à l'autre... "
PO Combelles.
http://pocombelles.over-blog.com/2017/01/un-parfum-de-foret.html
Je dédie aussi cet article à Dominique Kaiha, de l'île Ua Pou, dans les Marquises, que j'avais rencontré en 1994 au chantier archéologique préhistorique de Pincevent, près de la forêt de Fontainebleau, au bord de la Seine:
http://oceanien.over-blog.fr/tag/sculpture%20aux%20marquises/3
Mais pas au sophiste francophone Alain Finkielkraut qui a déclaré récemment: "on change l'enseignement de l'histoire de la colonisation et l'histoire de l'esclavage dans les écoles. Maintenant, l'enseignement de l'histoire coloniale est exclusivement négatif. Nous n'apprenons plus que le projet colonial a aussi apporté l'éducation, a apporté la civilisation aux sauvages".
https://www.nouvelobs.com/societe/20051123.OBS6303/finkielkraut-les-noirs-et-les-arabes.html
"Sauvages" ? "La civilisation", ah la bonne blague ! comme si la culture française ou occidentale était la seule au monde ! Et d'ailleurs, de quelle civilisation française parle-t-il ? Celle du XIIIe siècle, chansons de geste et amour courtois ? Celle du XVIIe siècle ? Cela m'étonnerait. Celle des "Lumières" et de la Révolution française alors ! quelle ignorance, quel aveuglement et quelle arrogance! Comment ce monsieur a-t-il pu devenir académicien ? Il fait honte à la France, la vraie France, celle de toujours, celle des fleurs de lis et de la droite, vaillante et généreuse noblesse.
ANNEXE
Un correspondant, M. René Doudard, qui a voyagé aux Marquises, m'envoie aimablement ses notes à propos de Taïpi de Melville:
En 1842, le futur auteur de Moby Dick, alors jeune marin en quête d’expériences, débarque aux îles Marquises. Sa rencontre avec une tribu indigène lui inspire son premier succès littéraire, Taïpi.
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Note critique :
Tant que le mythe durera…
A la même période 1844, en Angleterre, Wilkie Collins âgé de 20 ans écrit le manuscrit de « Iolani ou les maléfices de Tahiti » sans avoir jamais mis les pieds en Océanie.
Tant de journaux de bord américains, tant de descriptions et de récits parus aux Etats-Unis bien avant 1840, et longtemps après, tous ces textes ou extraits très probablement publiés dans les journaux du pays car ces récits offraient aux lecteurs une vision quasi de l’au-delà et possiblement ou nécessairement tronquée sur les continents lointains dits exotiques. Il y avait ainsi une source documentaire suffisante pour ceux ou celles qui avaient la faculté ou le talent d’écrire des romans exotiques, ou d’aventure ou de voyage selon la demande des éditeurs.
Toutefois, une bloggeuse passionnée de littérature écrit à propos de « Oomo » un autre livre de Melville :
« Ne se contentant pas de relater les faits dont il se souvient (n’ayant pas pris de notes) et de commenter ses observations, l’auteur remanie et réimagine en effet son expérience dans un récit très documenté mêlant la réalité à la fiction. Il n’hésite pas ainsi à inventer – avec un talent manifeste – des détails, des événements ou des personnages pour corser son récit, et il ne se prive pas, surtout, d’emprunter aux auteurs contemporains de récits de voyages – et dans une moindre mesure aux auteurs de romans d’aventures – pour étoffer son récit et le nourrir de nombreuses digressions informatives lui conférant plus de véracité. Avec aplomb, il présente même souvent ces informations comme résultant de sa propre observation ou provenant de proches sources indigènes ! Mais Herman Melville s’approprie tous ces emprunts avec génie, les transformant de manière très personnelle en une littérature de qualité. La littérature n’est-elle pas en partie l’art du plagiat, un art auquel on reconnaît les grands ? »
Cf. http://l-or-des-livres-
On peut penser que Melville a procédé de la même manière… pour écrire Typee.
Peut-être existe-t-il quelque part une analyse critique de Typee qui ferait l’inventaire de ses emprunts.
Car en effet, Typee n’est « en fait, ni une autobiographie littérale ni une pure fiction ». Melville « s’est inspiré de ses expériences, de son imagination et de nombreux livres de voyage pour faire valoir son savoir-faire lorsque le souvenir de ses expériences était insuffisant ». Il s’est écarté de ce qui s’est réellement passé de plusieurs manières, parfois en prolongeant des incidents factuels, parfois en les fabriquant, et parfois par ce qu’on peut appeler «des mensonges purs».
Le séjour réel d’un mois sur lequel Typee est basé est présenté comme étant quatre mois dans le récit ; Il n’y a pas de lac sur l’île sur laquelle Melville aurait pu faire du canoë avec la belle Fayaway, et la crête que Melville décrit grimper après avoir quitté le navire qu’il a peut-être vu sur une gravure. Il s’est largement inspiré des récits contemporains des explorateurs du Pacifique pour ajouter à ce qui aurait autrement été une simple histoire d’évasion, de capture et de ré-évasion. La plupart des critiques américains ont accepté l’histoire comme authentique, bien qu’elle ait provoqué l’incrédulité chez certains lecteurs britanniques.
En 1939, le professeur d’anglais de l’Université Columbia, Charles Robert Anderson, publia Melville dans les mers du Sud, dans lequel il expliqua que Melville n’avait passé qu’un mois (au lieu des quatre mois déclarés par Melville) et qu’il avait commis de nombreux emprunts à de nombreux récits de voyage.
Si le sentiment d'amour qui me lie à cet endroit, à ce peuple, à cet homme, à cette femme, etc., est sincère, j'ai pu faire aussi de la poésie. S'il n'est pas sincère, j'ai fait simplement de la littérature.Pier Paolo Pasolini, à propos de Médée et des Mille et une Nuits (1969).
Menteur, affabulateur, littérateur immoral en quête de renommée imméritée et d'argent, voilà ce qu'est Hermann Melville.
P.O.C.
Et avant l'annexion peu glorieuse des Marquises par la France, voici l'origine de sa découverte par les Espagnols, plus précisément par un vice-roi du Pérou, dont elles portent le titre. Ceci est raconté par le grand marin français méconnu Eric de Bisschop, dont la valeur est trop grande pour être comprise par mes contemporains et célébrée par la France. C'est la fameuse parabole asiatique de la grenouille de puits et la grenouille de mer.
Parti de Tahiti le 8 novembre 1956 à bord de son radeau Tahiti Nui pour rejoindre les côtes d'Amérique du sud, Bisschop gagna le Chili, puis à bord de Tahiti Nui II, navigua jusqu'au Pérou et au port du Callao, d'où était parti Mendana cinq siècles plus tôt, il prit le cap le 13 avril 1958 vers la Polynésie où il arriva sur les récifs de Rakahanga dans les îles Cook et mourut le 30 août 1958.
Tabou, par Alain Gerbault
Film Tabou cité par Alain Gerbault:
"Le port du pagne devrait être obligatoire pour les indigènes, car il est plus décent, plus esthétique et plus hygiénique que le pantalon. Je ne serai certes pas contredit par ceux qui ont vu comme moi l'extraordinaire beauté des indigènes dans la première partie du remarquable film Tabou (film trop vrai pour avoir le succès qu'il méritait), en contraste avec leur grotesque apparence sous des accoutrements européens."
Alain Gerbault, L'évangile du Soleil (Fasquelle, 1932), p. 172. Grasset/Aventures, 1980.
"Je préfère parcourir les mers et voir ce qui est beau sur la terre, car c'est la vie elle-même que je préfère." (p. 141).
"Je suis épris de justice et de vérité et je voudrais voir mon pays à la tête de tous les mouvements d'idéal humanitaire." (p. 167).
Alain Gerbault, L'évangile du Soleil (Fasquelle, 1932). Grasset/Aventures, 1980.
Et quelque part au monde où le silence éclaire un songe de mélèze ...
"Confortablement allongés au soleil sur la toundra parsemée de conifères prostrés, les Montagnais savourent la viande noire et parfumée, enveloppée de graisse fondante, des jeunes shikaunish*. Tout en mangeant, ils contemplent le spectacle magnifique des îles et de la côte, couleur vert-de-gris, qui s'étend autour d'eux entre le ciel bleu et la mer irisée par une brise légère. Le silence est seulement troublé par les cris des sternes et des goélands et par le bruit lointain du ressac sur des récifs, au large. L'un d'entre eux se lèvera peut-être pour aller ramasser quelques poignées de chicoutés (Rubus chamaemorus L.), juteuses et sucrées à souhait, qu'il partagera avec ses compagnons en guise de dessert. Leur repas terminé, les Montagnais vont allumer une bonne pipe et la fumer béatement tout en discutant et en plaisantant. Puis ils plieront bagage et remonteront dans leur chaloupe, pour continuer la chasse et établir leur campement pour la nuit dans une anse retirée de la côte."
* Guillemot à miroir (Cepphus grylle), un Alcidé.
Pierre-Olivier Combelles. Le voyage de John James Audubon au Labrador (1833) et sa contribution à l'histoire naturelle de la Côte-Nord du Québec. Mémoire de Diplôme d'Etudes Doctorales. Muséum national d'Histoire Naturelle, Laboratoire d'Ethnobiologie-Biogéographie, Paris, 1997.
Rédigé à partir du journal de bord de Pierre-Olivier Combelles (environs de La Romaine, en compagnie du Montagnais Etienne Mollen, sur la Basse Côte-Nord du Québec, le 4 août 1993).