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Rouge et Blanc, ou le Fil d'Ariane d'un voyageur naturaliste

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Général (2S) Henri ROURE: Quelques interrogations autour du G7 à Hiroshima

3 Juin 2023 , Rédigé par Rouge et Blanc Publié dans #Général (2S) Henri ROURE, #G7, #Géopolitique, #France, #OTAN, #Chine, #Japon, #Russie, #USA, #CNIP

Général (2S) Henri ROURE: Quelques interrogations autour du G7 à Hiroshima
Général (2S) Henri Roure. Issu des troupes de Marine et docteur d’État en sciences politiques. Secrétaire National à la Défense du CNIP

Général (2S) Henri Roure. Issu des troupes de Marine et docteur d’État en sciences politiques. Secrétaire National à la Défense du CNIP

BREIZH-INFO

31 mai 2023

Quelques interrogations autour du G7 à Hiroshima

La réunion annuelle du G7 se sera donc tenue en Asie, au Japon, à proximité de la Chine. Regroupement orgueilleux de 7 pays riches, mais en terrible perte de dimension, il aura affiché, bien plus que les années précédentes, l’entêtement des États-Unis et de la plupart de leurs commensaux, à vouloir démontrer au monde entier leur supériorité et une vision du monde qui se voudrait humaniste. Mais des failles risquent sous peu de s’élargir, rendant les relations internationales plus incertaines.
La guerre en Ukraine aura donné l’apparence d’une relative unité des pays européens derrière les États-Unis. Mais elle a surtout mis en évidence les limites de la puissance militaire états-unienne et une fois encore la prétention de Washington à diriger sans partage les affaires du monde.
Les mensonges des États-Unis et leur faiblesse dévoilés, vont les obliger à rassembler, au delà de leurs alliés otaniens, dans un nouvel affrontement, cette fois avec la Chine et ses amis. Le G7 de ce mois de mai 2023, avait donc surtout pour but de tester la fiabilité des partenaires possibles des États-Unis. Pour cette raison ce G7 aura été centré sur les sanctions contre la Russie et la coercition économique de la Chine.
Pour enrober ce double objectif il aura appelé accessoirement, le monde à des principes qualifiés d’humanistes et de démocratiques. Mais ces références dévoyées heurtent parfois les fondements d’autres civilisations et s’avèrent alors comme de forts motifs de rejet. Le G7 ne s’en soucie guère, demeurant dans la logique prétentieuse, pourtant de plus en plus contestée, de l’ambition universaliste de son modèle social et économique, considéré comme supérieur à tout autre.
D’ailleurs les mouvements altermondialistes accusent le G7 de vouloir « diriger le monde » en unissant des pays parmi les principales grandes puissances économiques, afin d’augmenter leur pouvoir commun sur les marchés mondiaux. Soulignons cependant que les pays d’Asie, hors Japon, représentent maintenant 75 % de la population mondiale, alors que l’Occident n’en représente plus que 12 %. Ajoutons qu’en 2022, la Chine produisait 22% du PIB mondial, alors que les États-Unis avaient chuté à 15% et que l’Inde avait progressé à 7%…
De fait, ledit Occident n’est plus vraiment maître du jeu. Pourtant…
Les questions à la mode auront été abordées à Hiroshima; du réchauffement climatique à l’Intelligence artificielle, ou de la lutte contre les pandémies aux droits de l’homme et notamment ceux des LGBT, ou encore aux migrations. En réalité, le véritable objectif de cette réunion a bien été d’exprimer une opposition à la Russie et aux ambitions croissantes de Pékin.
Les pays membres du G7 sont en fait, intimes, interdépendants, impliqués dans des relations tacites et souvent troubles remontant du passé, tous à une exception près: la France. Il n’est donc pas surprenant que le G7, un moment devenu G8 en incluant la Russie pour des raisons d’approches politiques, ait finalement saisi le prétexte de la récupération, par Moscou, de la Crimée, pour rejeter ce partenaire gênant par son indépendance. Quant à la France, il est plus aisé de la malmener de l’intérieur des cénacles dirigés par les États-Unis, en laminant, avec l’aide de quelques-uns de ses principaux dirigeants, son souhait naturel à promouvoir son particularisme et le désir de souveraineté de son peuple.
En premier lieu, je voudrais faire quelques remarques sur le pays d’accueil.
Les Japonais, peuple de très haute civilisation, ont précisément adressé aux participants un message fort – mais probablement sans suite – en organisant cette rencontre à Hiroshima et en amenant le président Joe Biden à s’incliner devant la stèle commémorative de l’anéantissement de la ville, le 6 août 1945, par la bombe atomique états-unienne. Cette action fit entre 140 000 et 250 000 morts civils tués instantanément, auxquels allaient s’ajouter les décès par suite d’irradiation.
Crime contre l’humanité? Bien sûr que non! Les juges, ceux qui décident de cette qualification, étant aussi les acteurs. Il n’y a pas eu davantage de crime contre l’humanité dans les bombardements de la Serbie, de l’Irak ou de la Syrie. Le général Mac Arthur, le proconsul états-unien, fit tout, dès le japon occupé, pour absoudre l’empereur des crimes de guerre dans lesquels il avait été impliqué, notamment en Mandchourie, en Corée, en Birmanie ou en Indochine. Ce fut un échange de bons procédés.
Certains, soumis depuis des décennies à l’endoctrinement washingtonien, pourraient s’élever contre cette seule interrogation arguant de l’idée qu’un tel bombardement avait abrégé la guerre et évité bien plus de morts qu’il n’en avait causé. Vraiment?
Toujours un peu d’histoire. Elle est nécessaire pour comprendre le présent et préparer le futur. En juillet 1945 l’empereur du Japon, Hiro Hito, avait mandaté son fils pour offrir une reddition totale, avec comme seules réserves le maintien des structures traditionnelles du pays. Les États-uniens, surpris, firent traîner les discussions. Un tel achèvement du conflit n’entrait pas dans leurs vues. Les quelques et modestes demandes japonaises furent considérées comme un rejet de l’ultimatum lancé par les alliés lors de la conférence de Postdam.
L’état-major états-unien savait que l’armée ennemie était épuisée. 90% de la flotte et 90% de l’aviation étaient détruits. L’industrie de guerre était totalement anéantie. De plus l’URSS s’était engagée à Yalta, à entrer en guerre contre le Japon trois mois après la capitulation de l’Allemagne. Effectivement l’Armée Rouge bascula du front européen et, dès le 8 août envahit la Mandchourie occupée par les forces japonaises.
Mais pour le président Truman et son administration il fallait, d’une part, une victoire rapide pour éviter de la partager avec quiconque et, d’autre part, il fallait surtout faire usage de l’arme atomique, préparée en grand secret avec l’aide déterminante de scientifiques allemands réfugiés. L’emploi du feu nucléaire devait aux yeux du monde, et notamment de l’URSS, assurer de manière incontestable la prééminence absolue des États-Unis au plan militaire.
Bien évidemment ces arguments, bien réels, ne pouvaient être avancés, aussi les États-uniens développèrent-ils l’idée que les bombardements d’Hiroshima et de Nagasaki des 6 et 9 aoûts 1945, avaient permis d’épargner la vie de plusieurs centaines de milliers de soldats. Argument grandement fallacieux, quand on sait que dans la situation d’effondrement du Japon, les pertes, selon les analystes militaires objectifs, se seraient situées dans une fourchette de 20 000 à 30 000 hommes et, qu’en tout état de cause, le Japon aurait très vite capitulé. Peu importait ce qu’allait être le bilan du feu nucléaire!
Le Japon se souvient et ayant été absout, occulte ses propres crimes, mais rappelle ceux de l’ancien ennemi. Dans le futur affrontement entre les États-Unis et la Chine, que fera le Japon, membre du G7 et courtisé par Washington dans le cadre des QUAD1 et des accords de coopération? La subtilité asiatique l’emportera peut-être sur le mensonge anglo-saxon. Il faut en effet se souvenir que l’île d’Okinawa, au sud du Japon, est occupée par les forces états-uniennes, mais que l’archipel Sakishima, composé de quatre îles et trois rochers inhabités, est revendiqué aussi bien par Pékin que par Taipeh. Les Chinois ont en mémoire les humiliantes guerres sino-nippones et la participation du Japon aux guerres sino-occidentales ayant abouti aux « traités inégaux ».
Il faut noter un autre contentieux, cette fois avec la Russie, au nord, concernant les îles Kouriles, annexées par les forces soviétiques lors de leur invasion de la Mandchourie. S’ajoute pour Moscou, le souvenir de la désastreuse guerre russo-japonaise de 1904-1905, qui aboutit à l’attribution de la moitié Sud de l’île de Sakhaline au Japon.
Le Japon qui réarme, a t-il intérêt à continuer à se montrer l’allié fidèle des États-Unis, alors que tout autour de lui, les pays d’Asie se rallient progressivement à l’OCS et que cette participation à un conflit contre les deux grandes puissances qui ont en mémoire les méfaits passés du Japon, s’érigent en adversaires déterminés de Washington? Le Japon aurait beaucoup à perdre au cas où selon leur habitude, à un moment du conflit, les États-Unis s’en retireraient. Pourtant je doute que le Japon, malgré son réarmement, s’éloigne de la protection étatsunienne. Ses intérêts complices sont à l’ouest. La question, malgré tout peut se poser.
L’Allemagne autre participant à ce G7 et ancien allié du Japon dans la seconde guerre mondiale, risque sans doute moins que le Japon dans un éventuel conflit avec la Chine; mais elle ambitionne d’être affermie en tant que pilier otanien en Europe, second des États-Unis et maître de l’UE. Cette ligne de conduite, l’amène à se plier aux souhaits de Washington d’autant plus servilement qu’elle subit, dans l’allégeance, la concurrence de la Pologne. Elle plaide avec les Pays-Bas, pour une présence affirmée de l’OTAN en Indo-Pacifique. Ces deux pays souhaitent « œuvrer dans l’OTAN pour développer des relations avec des « partenaires à travers le monde » dont l’Australie, le Japon, la Nouvelle-Zélande et la Corée du Sud, ces quatre pays étant déjà engagés avec l’OTAN dans le cadre d’un Programme Personnalisé de Partenariat de de Coopération (IPCP).
L’Allemagne, sans aucun doute sensible à l’ascendant états-unien dans le cadre otanien et décelant dans cet alignement une possibilité d’accroître son rôle géopolitique, continue à se montrer très allante en ce sens. Cependant elle semble savoir avancer seule. Ainsi ses banques sont-elles connectées au système SPSF sino-russe, concurrent du système d’échange interbancaire SWIFT. Le fait-elle sans arrière-pensée et sans l’aval des États-Unis?
L’histoire de l’Italie d’après-guerre, en tant qu’alliée, est profondément entrelacée avec le rôle international des États-Unis. Elle se sent redevable envers les États-Unis de sa libération et de son retour à la démocratie, oubliant quelque peu, d’ailleurs, le rôle majeur de l’Armée française dans la prise du mont Cassin et l’ouverture de la route de Rome aux forces alliées. Elle abrite sous couvert de l’OTAN, le commandement de la Sixième Flotte à Naples et le commandement des forces alliées, la base aérienne d’Aviano dans le nord du pays, ainsi que les bases navales de la Maddalena et de la Sigonella. Les États-Unis disposent aussi de sites de stockage de munitions nucléaires. Il n’est pas envisageable que l’Italie s’éloigne des États-Unis. Rappelons que 15,2% de la population états-unienne revendique des origines allemandes et 6% une origine italienne. Nous avons donc autour de 21 % des états-uniens qui sont liés aux anciens pays de l’Axe.
Le Royaume-Uni, quant à lui est intime avec les États-Unis, c’est une évidence, et la France a pu le constater, une fois encore à ses dépends, lors de la rupture de son accord avec l’Australie portant sur la construction de sous-marins et la création simultanée de l’alliance anglo-saxonne AUKUS. Il en est de même avec le Canada, trop proche géographiquement et culturellement des États-Unis pour pouvoir s’en démarquer.
De ces simples constats, il ressort que la France, sans aucune raison, contrairement à ses intérêts, s’aligne sur les positions dangereuses des États-Unis. Ce pays ne recherche que le maintien de sa domination et utilise ses obligés ou alliés comme des supplétifs. Il est intéressant de relever que le premier ministre indien, Narendra Modi, invité à Hiroshima, a refusé devant Volodymyr Zelinski, un inévitable autre hôte extérieur, de condamner la Russie dans son « opération spéciale » en Ukraine. Il s’est contenté d’inviter à la paix.
L’Inde, en effet, refuse toute subordination et prône ce qu’elle nomme le « multi-alignement ». Cette politique est parente de celle que la France menait jadis… Il est étonnant que la France ne suive pas une option voisine d’autant plus qu’en Indo-pacifique, elle est territorialement impliquée, ce qui n’est absolument pas le cas dans le conflit ukrainien.

Rappelons que la France avec 7 millions de km2 de ZEE sur les 11 qu’elle possède, est grandement présente dans la zone indo-pacifique. Signalons que cette Immense ZEE fait de notre pays, depuis les derniers réajustements, la première puissance maritime au monde devant les États-Unis. Entre 1,5 et 2 millions de nos compatriotes y vivent. Cet ensemble, par ses énormes ressources, fait de la France potentiellement une très grande puissance. Il est regrettable que seuls les Chinois et les Anglo-saxons, derrière les États-Unis, le sachent et fassent tout pour nous évincer de la France archipélagique. Seules ses orientations politiques et économiques actuelles, empêchent le réveil de cette puissance.
Au delà de ce G7, je pourrais aussi formuler quelques interrogations sur les démarches outrancières de certains politiques actuels, pour une intégration de la France, grande puissance, dans un dispositif européen supranational, mais dirigé par Berlin et Washington. Il est désolant de les voir poursuivre les honteux souhaits de personnages comme Monnet et Schuman, d’abolition des frontières et des nations. Ils refusent d’admettre que l’UE d’aujourd’hui, agit au détriment de la France et que l’Allemagne se pose en adversaire davantage qu’en partenaire.
De même que fait-elle dans l’OTAN, cette machine de guerre, au service des dangereuses ambitions de Washington, hypothéquant de ce fait son indépendance stratégique et géopolitique? Elle ne relève même pas l’attitude paradoxale des États-Unis qui abaissent leurs alliés européens du G7 grâce au conflit ukrainien et s’apprêtent à faire appel à eux dans la zone indo-pacifique.
Que fait la France dans ce G7 si elle se refuse à imprimer sa marque?
En fait, en politique intérieure comme en politique étrangère, il y a un abysse entre le potentiel de la France et l’aptitude à l’assumer de ceux qui dirigent notre pays! L’absence de projet national et de vision stratégique autonome largement partagée, rendent la France silencieuse.

Général (2S) Henri ROURE


1 Accord quadripartite États-Unis, Australie, Inde, Japon


Crédit photo : https://www.g7hiroshima.go.jp/en/


[cc] Breizh-info.com, 2023, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine

SOURCE: https://www.breizh-info.com/2023/05/31/220791/quelques-interrogations-autour-du-g7-a-hiroshima/

NDLR: Pourquoi le G7 a-t-il choisi la ville d'Hiroshima, malheureusement célèbre pour avoir été la cible du premier bombardement atomique de l'Histoire le 6 août 1945, par les Etats-Unis d'Amérique, suivi par celui de Nagasaki le 9 août ? ces deux villes étaient les deux villes chrétiennes du Japon. Une façon de rappeler aux Japonais ce qui peut leur arriver en cas de défaillance ?

Carte de la ZEE française. Source: Louhansk https://fr.wikipedia.org/wiki/Domaine_public_maritime_fran%C3%A7ais#/media/Fichier:Zee_de_la_france.jpg

Carte de la ZEE française. Source: Louhansk https://fr.wikipedia.org/wiki/Domaine_public_maritime_fran%C3%A7ais#/media/Fichier:Zee_de_la_france.jpg

Qui est l’ennemi ? Réflexions de science politique par le Général Henri Roure

 

https://stratpol.com/qui-est-lennemi-reflexions-de-science-politique-par-le-general-henri-roure/

"Une nation c’est avant tout une souveraineté revendiquée et défendue par un peuple. L’Histoire – toujours elle – nous rapporte la lutte des Français pour, tout à la fois, assurer leur unité, leur indépendance, leur dignité et faire prévaloir les principes dont ils se sentaient légitimement fiers et porteurs. Cette assurance reposait sur une étroite conjugaison entre gouvernement et peuple dans la certitude d’un destin. Elle impliquait la nature des politiques intérieure et étrangère. Les assauts partisans, souvent sévères, ne remettaient jamais en cause cette « certaine idée de la France » à laquelle se référa le général de Gaulle."

Aux ordres de la bannière étoilée, par le Général Henri Roure

https://lecourrierdesstrateges.fr/2023/02/01/aux-ordres-de-la-banniere-etoilee-par-le-general-2s-henri-roure/

Général (2s) Henri Roure : «l’emmerdeur se plantera»

https://www.billetdefrance.fr/opinions/general-2s-henri-roure-lemmerdeur-se-plantera/06/01/2022/

Le Général Roure est Secrétaire National à la Défense du CNIP (Centre National des Indépendants et des Paysans, fondé en 1949)

https://www.cnip.fr/

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Mike Whitney: Sauver de la matrice Une critique du nouveau livre de Paul Craig Roberts, "Empire of Lies" (L'empire du mensonge)

3 Juin 2023 , Rédigé par Rouge et Blanc Publié dans #Allemagne, #France, #Guerre, #Paul Craig Roberts, #Philosophie, #Politique, #Histoire, #Russie, #USA, #Mike Whitney, #Ukraine, #Seconde Guerre Mondiale

La vie d'un écrivain est une activité extrêmement vulnérable, presque nue. ... Vous êtes seul, en marge de la société. Vous ne trouvez aucun abri, aucune protection - à moins de mentir...

Je crois qu'en dépit des énormes difficultés qui existent, la détermination intellectuelle inébranlable et féroce, en tant que citoyens, de définir la vérité réelle de nos vies et de nos sociétés est une obligation cruciale qui nous incombe à tous. Elle est en fait obligatoire.

Si cette détermination ne s'incarne pas dans notre vision politique, nous n'avons aucun espoir de restaurer ce que nous sommes si près de perdre : la dignité de l'homme.

Harold Pinter, conférence Nobel, 2005

Mike Whitney: Sauver de la matrice Une critique du nouveau livre de Paul Craig Roberts, "Empire of Lies" (L'empire du mensonge)

Sauver de la matrice
Une critique du nouveau livre de Paul Craig Roberts, "Empire of Lies" (L'Empire du mensonge)
Mike Whitney - 23 mai 2023

Ce qui rend les écrits de Paul Craig Roberts si percutants, c'est sa capacité à démêler les faux récits et à identifier les agendas des élites qui façonnent les événements. Il s'agit là du travail d'un diseur de vérité, qui est l'appellation généralement appliquée à Roberts. Ce terme désigne une personne aux convictions morales profondes qui consacre sa vie à dénoncer les mensonges et les fabrications de l'État et de ses alliés corrompus. C'est ce que Roberts fait depuis plus de 40 ans, et c'est la raison pour laquelle des milliers de personnes dans le monde entier se rendent chaque jour sur son site web. Ils savent que ses articles sont percutants, bien documentés et captivants. Plus important encore, ils savent qu'il mettra tout en œuvre pour leur apporter la vérité sans fard, comme il le fait depuis plus de quarante ans.

Le dernier recueil d'essais de M. Roberts, intitulé Empire of Lies, est un assortiment d'articles qui témoignent de l'étendue et de la profondeur remarquables des connaissances de l'auteur. Les visiteurs assidus de son site web remarqueront certains thèmes familiers, tandis que d'autres sujets n'ont peut-être pas été explorés de manière aussi approfondie. Par exemple, il y a de nombreux essais sur la fragilité de l'économie américaine, le vaccin "expérimental" Covid-19, la guerre en Ukraine, l'élection présidentielle volée et la fraude du 6 janvier. Dans le même temps, il y a un certain nombre d'autres articles que l'on n'associe généralement pas à Roberts. Il s'agit notamment d'un billet court mais captivant sur le 11 septembre, de réflexions inquiétantes sur l'année 2022, de la manipulation des marchés des lingots et d'un article étonnant intitulé "L'Allemagne n'a pas déclenché la deuxième guerre mondiale". Voici un bref extrait de cet article :

"Les objectifs du Parti national-socialiste des travailleurs allemands... (étaient) de remédier au chômage causé par les réparations injustes imposées à l'Allemagne... à la suite de la Première Guerre mondiale et de remettre l'Allemagne... sur les rails....

    La deuxième guerre mondiale a commencé lorsque le gouvernement Churchill et les Français... ont déclaré la guerre à l'Allemagne.......

    Le dirigeant allemand, Adolf Hitler, avait récupéré les territoires allemands cédés au Danemark, à la France et à la Tchécoslovaquie par l'humiliant Traité de Versailles et s'était uni à l'Autriche allemande sans guerre.... La garantie britannique a enhardi la dictature militaire polonaise à refuser de négocier la restitution des territoires allemands.... Tout ce qu'Hitler a fait, c'est forcer les pays ayant reçu des territoires allemands en vertu du Traité de Versailles à libérer les terres et les Allemands, qui ont été lourdement persécutés en Tchécoslovaquie et en Pologne. La restauration par Hitler des frontières nationales de l'Allemagne a été présentée à tort par la presse britannique et américaine comme une "agression allemande". ....

    Cette fausse nouvelle d'agression allemande a été utilisée pour construire le dossier selon lequel l'Allemagne, qui ne faisait que récupérer son territoire national et sauver le peuple allemand de la persécution en Tchécoslovaquie et en Pologne, était un agresseur dont l'objectif était la conquête du monde...

    Hitler a déclaré à maintes reprises qu'il ne voulait pas, ou n'avait pas l'intention de faire la guerre à la Grande-Bretagne et à la France et qu'il avait seulement l'intention de récupérer les populations allemandes perdues, volées à l'Allemagne par l'injuste traité de Versailles". (Empire Of Lies, Paul Craig Roberts, Korsgaard Publishing, page 280, 2023.)

Dans ces quelques paragraphes, Roberts anéantit les fondements sur lesquels repose notre compréhension de la Seconde Guerre mondiale. L'auteur remet en question les idées suivantes

    - qu'Hitler a déclenché la guerre
   - Et que la Pologne représentait la première étape du plan plus vaste d'Hitler pour conquérir le monde.

Si aucune de ces idées n'est vraie, nous devons nous demander pourquoi l'invasion de la Pologne par Hitler a servi de prétexte à une véritable guerre mondiale au lieu d'être traitée comme un "conflit frontalier" régional, comme on aurait pu s'y attendre. Il est clair que la France et l'Angleterre n'avaient pas besoin de déclarer la guerre à l'Allemagne alors que celle-ci ne faisait que récupérer les territoires qu'elle avait perdus après Versailles. Si le sang-froid avait prévalu, la deuxième guerre mondiale aurait pu être évitée. Voici d'autres extraits du texte :

"Au cours de son ascension politique, Hitler n'avait guère caché sa volonté de déloger la minuscule population juive d'Allemagne de la mainmise qu'elle avait acquise sur les médias et les finances allemandes, et de diriger le pays dans l'intérêt de la majorité allemande (99 %), une proposition qui a suscité l'hostilité amère des Juifs partout dans le monde. En effet, immédiatement après son entrée en fonction, un grand journal londonien avait publié en 1933 un titre mémorable annonçant que les Juifs du monde entier avaient déclaré la guerre à l'Allemagne et organisaient un boycott international pour affamer les Allemands et les obliger à se soumettre". (Empire Of Lies, Paul Craig Roberts, Korsgaard Publishing, page 286, 2023)

Il s'agit là d'un autre extrait étonnant qui va à l'encontre des récits historiques propagés en Occident. Aux États-Unis, on dit aux étudiants que le traitement des Juifs par Hitler était alimenté par son antisémitisme insatiable, mais ici l'auteur suggère qu'il y avait aussi des raisons sociales et économiques à sa politique. Cela ne diminue en rien la gravité des déprédations commises par Hitler, mais cela permet d'expliquer de manière plus plausible pourquoi les événements se sont déroulés comme ils l'ont fait. À tout le moins, Roberts fournit une analyse qui suscite la réflexion et s'écarte de l'idée simpliste selon laquelle "Hitler était un maniaque homicide", qui est utilisée pour répondre à toutes les questions et pour étouffer la pensée critique. En revanche, le traitement du sujet par Roberts suscite la curiosité, ce qui incite le lecteur à approfondir ses recherches, ce qui est l'intention de l'auteur.

Le traitement de la guerre civile par Roberts est tout aussi provocateur. Dans un chapitre intitulé "Comment nous savons que la soi-disant "guerre civile" n'était pas liée à l'esclavage", Roberts conteste l'idée largement répandue selon laquelle la guerre entre les États a été déclenchée pour libérer les esclaves. Voici un extrait de l'article qui l'explique :

"Deux jours avant l'investiture de Lincoln en tant que 16e président, le Congrès, composé uniquement des États du Nord, a adopté à une écrasante majorité, le 2 mars 1861, l'amendement Corwin qui confère une protection constitutionnelle à l'esclavage. Lincoln a approuvé l'amendement dans son discours d'investiture en déclarant : "Je n'ai aucune objection à ce qu'il soit rendu explicite et irrévocable".

    Il est clair que le Nord n'était pas prêt à entrer en guerre pour mettre fin à l'esclavage alors qu'à la veille même de la guerre, le Congrès américain et le président entrant étaient en train de rendre inconstitutionnelle l'abolition de l'esclavage".

    Nous avons ici la preuve absolue que le Nord voulait que le Sud reste dans l'Union bien plus que le Nord ne voulait abolir l'esclavage."....

    Le véritable problème entre le Nord et le Sud ne pouvait pas être réconcilié sur la base d'un accommodement avec l'esclavage. Le véritable problème était d'ordre économique, comme l'ont démontré DiLorenzo, Charles Beard et d'autres historiens. Le Nord a proposé de préserver l'esclavage de manière irrévocable, mais il n'a pas proposé de renoncer aux tarifs douaniers élevés et aux politiques économiques que le Sud considérait comme contraires à ses intérêts". (Empire Of Lies, page 221)

Plus loin dans le texte, Roberts reprend une citation du discours d'investiture de Lincoln qui vient étayer son point de vue. Lincoln dit :

"Je n'ai pas l'intention, directement ou indirectement, d'interférer avec l'institution de l'esclavage dans les États où elle existe. Je crois que je n'ai aucun droit légal de le faire et je n'ai aucune envie de le faire".

Roberts présente son cas de manière rationnelle et convaincante, mais Lincoln a fait d'autres commentaires qui semblent être en contradiction avec ceux mentionnés ci-dessus. Il a également déclaré que "le gouvernement ne peut supporter en permanence une moitié d'esclaves, une moitié de personnes libres" et que l'opinion publique doit se reposer sur la conviction que l'esclavage est en voie d'extinction. Malgré cela, l'adoption de l'amendement Corwin en 1861 suggère fortement que le Congrès n'avait pas l'intention d'entrer en guerre pour mettre fin à l'esclavage, sinon il n'aurait pas soutenu le projet de loi. Alors, comment se fait-il que tant d'Américains s'accrochent à l'idée que la guerre civile était une lutte pour mettre fin à l'esclavage ?

Tout comme les historiens ont tenté de décrire la Seconde Guerre mondiale comme une intervention "sans ambiguïté morale", ils ont transformé la guerre de Sécession, qui n'était qu'un conflit sanglant sur les tarifs douaniers, en une lutte juste contre l'esclavage humain. Malheureusement, la propagande ne s'aligne pas sur les faits, qui suggèrent que des facteurs plus terre-à-terre ont été impliqués. Les actions de Lincoln n'étaient pas guidées par un principe supérieur, pas plus que les efforts de FDR pour entraîner le pays dans la Seconde Guerre mondiale ne visaient à "vaincre le fascisme". Dans les deux cas, les présidents ont mené des politiques visant à écraser leurs ennemis tout en renforçant le pouvoir de l'État. C'est le travail de l'historien de cour de faire passer ces bains de sang récurrents pour de nobles croisades morales, mais il n'en est rien, et c'est pourquoi nous avons la chance d'avoir des chercheurs comme Roberts pour démasquer les faux-semblants et exposer les machinations intéressées de l'ambition politique brute.

Dans un autre chapitre intitulé The Proof is In : L'élection a été volée, M. Roberts conteste le résultat de l'élection présidentielle de 2020, sans se fonder sur les problèmes liés aux machines à voter, sur le fiasco des bulletins de vote par correspondance ou sur tout autre problème technique qui a entaché l'élection. Au lieu de cela, il présente un certain nombre d'observations de "bon sens" qui révèlent l'invraisemblance totale d'une victoire de Biden. Jetez-y un coup d'œil :

Le compte Twitter de Joe Biden compte 20 millions d'abonnés.
    Le compte Twitter de Trump compte 88,8 millions d'abonnés.
    Considérons que le compte Facebook de Joe Biden compte 7,8 millions d'adeptes
    Le compte Facebook de Trump compte 34,72 millions d'abonnés.

    Quelle est la probabilité qu'une personne ayant 4 ou 5 fois plus d'adeptes que son rival ait perdu l'élection ?
    Considérons que les apparitions de Trump lors de la campagne ont été très suivies mais que celles de Biden ont été évitées.....
    Considérez que malgré l'échec total de Biden à animer les électeurs pendant la campagne présidentielle, il a obtenu 15 millions de voix de plus que Barack Obama lors de sa réélection en 2012.
    Considérez que Biden a gagné malgré une performance inférieure à celle d'Hillary Clinton en 2016 dans tous les pays urbains des États-Unis, mais qu'il a surpassé Clinton à Détroit, Milwaukee, Atlanta et Philadelphie, villes contrôlées par les démocrates et où les fraudes électorales les plus évidentes et les plus flagrantes ont été commises.
    Biden a gagné malgré le fait que Trump ait dépassé de dix millions de voix son score de 2016 et qu'il ait bénéficié d'un soutien record de la part des électeurs issus des minorités.
    Biden a gagné bien qu'il ait perdu les comtés qui ont toujours prédit le résultat de l'élection et les États de l'Ohio et de la Floride.
    Biden a gagné en Géorgie, un État complètement rouge avec un gouverneur rouge et une assemblée législative rouge, tant à la Chambre qu'au Sénat. D'une manière ou d'une autre, un État rouge a voté pour un président bleu.
    Considérons que Biden a gagné malgré la perte de représentation des démocrates à la Chambre des représentants". (Empire Of Lies, Paul Craig Roberts, Korsgaard Publishing, page 324, 2023)

Le livre contient de nombreuses autres observations révélatrices, mais elles soulignent toutes le même fait désolant : l'élection a été volée et c'est le mauvais homme qui siège aujourd'hui à la Maison Blanche. Roberts a eu l'intelligence d'éviter les questions techniques absconses et de fonder son argumentation sur des incohérences flagrantes que le commun des mortels peut comprendre. L'idée que Joe Biden, qui n'a pas réussi à attirer suffisamment de partisans pour remplir un petit gymnase, ait obtenu 15 millions de voix de plus que Barack Obama est extrêmement risible. Il convient d'applaudir Roberts pour avoir pris le temps de créer cette compilation convaincante qui renforce considérablement sa thèse selon laquelle l'élection a été truquée.

C'est ce que nous attendons de Roberts, qui va toujours plus loin pour apporter la vérité à ses lecteurs. Sa dernière contribution, Empire Of Lies, s'inscrit dans cette même tradition. Ce livre est un condensé varié des travaux récents de l'auteur, couvrant un large éventail de sujets allant des néonazis en Ukraine à la manipulation des prix de l'or. Il s'agit d'une lecture fascinante qui progresse rapidement en raison du caractère unique du sujet traité et du style d'écriture franc mais explosif de Roberts. En un mot, il y en a pour tous les goûts. Je terminerai par une citation du discours d'acceptation du prix Nobel de Harold Pinter qui, à bien des égards, aurait pu être une description de Paul Craig Roberts :

"La vie d'un écrivain est une activité extrêmement vulnérable, presque nue. ... Vous êtes seul, en marge de la société. Vous ne trouvez aucun abri, aucune protection - à moins de mentir...

    Je crois qu'en dépit des énormes difficultés qui existent, la détermination intellectuelle inébranlable et féroce, en tant que citoyens, de définir la vérité réelle de nos vies et de nos sociétés est une obligation cruciale qui nous incombe à tous. Elle est en fait obligatoire.

    Si cette détermination ne s'incarne pas dans notre vision politique, nous n'avons aucun espoir de restaurer ce que nous sommes si près de perdre : la dignité de l'homme". Harold Pinter, conférence Nobel, 2005

Je répète : "...une détermination intellectuelle inébranlable et féroce."

En effet, c'est Roberts en quelques mots.

Mike Whitney

 

Traduit de l'américain par Rouge et Blanc avec DeepL

Source: https://www.unz.com/mwhitney/rescue-from-the-matrix/

Mike Whitney: Sauver de la matrice Une critique du nouveau livre de Paul Craig Roberts, "Empire of Lies" (L'empire du mensonge)
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Général Leonid Ivashov: Hooray for the Global Crisis!

27 Mai 2023 , Rédigé par Rouge et Blanc Publié dans #Général Leonid Ivashov, #Russie, #Politique

Ce ne sont pas les philosophes, les poètes, les musiciens ou les explorateurs de mondes lointains qui donnent le ton de la vie des gens aujourd'hui, mais plutôt les financiers et les hommes d'affaires. Le gain matériel, l'argent, le luxe et le pouvoir sont devenus les codes fondamentaux de la grande masse des gens.
Le dualisme physique-spirituel de l'être humain est de plus en plus réduit à sa seule composante "corps". Or, un tel être humain n'est ni utile à la Nature, ni acceptable par Dieu. Il est donc voué à disparaître. En effet, l'homme a été créé à l'image et à la ressemblance de Dieu, et son existence physique est soutenue par son lien avec le monde végétal et animal, ainsi qu'avec la nature non vivante.
Le modèle contemporain de l'être, basé sur l'idéologie du monétarisme, doit être remplacé par l'être cognitif et spirituel. C'est là que réside le salut de la civilisation humaine. Cela ne peut se faire qu'en passant par la fournaise d'une crise du système financier et économique mondial, où la crise est un moyen de priver l'oligarchie mondiale de son pouvoir réel.

Général Leonid Ivashov

Général Leonid Ivashov: Hooray for the Global Crisis!

This article appears in the February 8, 2008 issue of Executive Intelligence Review.http://www.larouchepub.com/other/2008/3506ivashov_article.html


Hooray for the Global Crisis!
by Leonid Ivashov


This article by Mr. Ivashov, General-Colonel, and President of the Academy of Geopolitical Problems, was published in Russian, on the website of the Strategic Culture Foundation (fondsk.ru), on Jan. 26, 2008. The translation into English for EIR is by Rachel Douglas. Subheads have been added. See also Lyndon LaRouche's reply.


Mankind is watching with alarm, as crisis hits the American and world economies.
The G. Bush Administration is seeking a way out of the crisis through war. The President of the U.S.A. has just visited the Mideast, where he attempted to put together an anti-Iran alliance. According to reports received Jan. 25, the members of the UN Security Council have prepared a new draft resolution on Iran. The new version essentially unties the hands of the U.S. President and the Israel lobby in the American Congress for war against the Islamic Republic of Iran.
But, will a new war save the world economy and the world's reserve currency?
The present model of the world financial and economic system is unipolar, with the ruling pole being the country that controls the world currency. And that nation, in turn, is controlled by the owners of major private monetary fortunes.
That is the U.S.A., which functions merely as the instrument of global power and money. The Bilderberger Society's formula says that power is merely a commodity, although it is the most valuable one. Therefore, the wealthiest people should have power.
The United States, despite the seeming democracy of its Presidential elections, is under the power of finance capital. Mao Zedong's aphorism, "Power grows out of the barrel of a gun," sounds different today: "Power grows out of the dollar." If the dollar collapses, however, the financier international and the U.S.A. will be compelled to give up their dream of world rule. And without that dream, America will hardly even be able to survive as a unified nation, because the Americans have no worldview, other than the utopia of world rule.
Patrick J. Buchanan, former advisor to Presidents Nixon and Reagan, and candidate for the Republican Party Presidential nomination in 1992 and 1996, forecast in his book The Death of the West (Russian edition, 2003) that the U.S.A. would split into three independent nations by the year 2025: one African-American, one Hispanic, and one Anglo-Saxon.
Anticipation of a global catastrophe can also be found in the works of F. Fukuyama, E. Wallerstein, S. Huntington, and other well-known researchers.
Of course, such a course of events will be a catastrophe for current generations of Americans, just as the disintegration of the U.S.S.R. was a catastrophe for the majority of its inhabitants. What about the rest of the world?
The collapse of the U.S.A. and the dollar will cause suffering for all countries that are linked to the world currency and integrated into the global market system. But, aren't those peoples suffering from American effrontery already? Aren't nations losing their sovereignty, while the power elites in most of them serve the interests of global capital, rather than the needs of their own population?
Moreover, the very survival of modern civilization is becoming Problem #1 for mankind. Economists, ecologists, demographers, physicists, medical professionals, and anti-globalists warn of this.
Thus, perhaps, we ought not to be sorry about the current crisis of the world economy, but rather welcome its collapse and take the necessary preemptive measures?


The Meaning of Life
 

But, first we must understand the essence of today's world order. We must think again about the meaning of life, the place of Earth's civilization in the Universe, and our relationship to God. We must remember Plato's conclusion, that the civilization of Atlantis perished precisely because it stopped communicating with Heaven, and sank into a life of luxury and pleasure.
Russian Academicians G.I. Shipov and A.Ye. Akimov have scientifically proven not only the existence of a physical vacuum and of torsion fields, but also the dependency of natural and cosmic phenomena (including catastrophic ones) on the thoughts and worldview principles of mankind, and the state of consciousness of masses of people. A. Einstein also approached an understanding of how the state of affairs on the planet depends on human consciousness.
The world system that was constructed after the disintegration of the U.S.S.R. is a hierarchy that presumes one financially powerful country at its head, while the philosophy of life it imposes is strictly tied to the cult of money and pleasure. It is the first time in the history of mankind, that the economy has become so immoral.
The philosophy of monetarism is based, as the Russian scholar V.G. Sokolenko put it, on "the idea of a union of money and law, or the so-called capitalist absolute ... against which all the great ideas of the epoch of historical Romanticism, and the social revolutions aimed at improving the organization of society, ran aground. By the 20th Century, rationalistic philosophy and liberalism had brought capital to the point of absolute power over the world." (V.G. Sokolenko, Capitalism's Global Rule, Moscow, 2005).
Philosophers, poets, musicians, or explorers of distant worlds are not the ones who set the pitch for people's lives today, but rather financiers and businessmen. Material gain, money, luxury, and power have become the fundamental codes for the great mass of people.
The physical-spiritual dualism of the human being is reduced, more and more, to its "body" component alone. Such a human being, however, is neither of use to Nature, nor acceptable to God. Therefore, he is fated to disappear. For man was created in the image and likeness of God, while his physical existence is sustained by his connection with the plant and animal world, and non-living nature.
The contemporary model of being, based on the ideology of monetarism, ought to be replaced by cognitive, spiritual being. Therein lies the salvation of human civilization. This can be done, only by passing through the furnace of a crisis of the world financial and economic system, wherein the crisis is a means to deprive the global oligarchy of its real power.

Lyndon LaRouche, who has warned repeatedly about the coming collapse, has issued this call: "Rather than continuing the foolish attempts to stimulate the corpse, the United States Government must use its sovereign powers to put its own financial system through bankruptcy proceedings, setting a precedent and providing the context in which other nations can act."
Unfortunately, there are no sovereign governments in the U.S.A., Russia, or Europe. To a limited extent, they exist in China, India, Iran, Japan, and other Eastern countries, and in several Latin American nations. The rest are controlled by the world financial oligarchy.

 

Monstrous Inequality
 

Three hundred and fifty-eight family clans of billionaires have a combined income that exceeds the combined income of 45% of the Earth's population, in dollar terms. The quintessence of this monstrous inequality is the mafia-style oligarchical syndicate, presided over by the wealthiest people on the planet. They determine how processes unfold in the world, while they themselves remain in the shadows, out of the public eye. They also control the bulk of the planet's resources, finance huge illegal armies and NGOs, and have developed networks of influence within the governments and parliaments of most of the countries in the world.
That is the pinnacle of the unipolar world. This financial oligarchy is incapable, however, of directing world development. It knows how to make money, seize power, and hold that power for the sake of generating additional profit. Nothing short of the collapse of the dollar pyramid will shake that power.
What may be the consequences of a dollar catastrophe?

Negative scenario:


•   Around $500 billion in cash will be taken out of circulation, while tens of trillions of virtual (electronic) dollars are wiped out. This will be a blow against the economies of all nations and transnational corporations, as well as millions of people. Belarus, Cuba, North Korea, and other "non-dollar" countries will fare better.
•   The Americans will implement "forgiveness" of their debts to everybody, to the tune of almost $27 trillion (including vaporizing the dollar component of the Russian Stabilization Fund and international reserves).
•  The parity and exchange rates of remaining convertible currencies will be deformed.
• Chaos will arise in the world economy, as governments and transnational corporations attempt to cobble together new economic models on an emergency basis, creating some kind of defense system for their national economies; some will shift to a closed economy (autarky).

 

Positive scenario:


• The role of the institution of the state in the world economy and international relations will be revived.
 •  In the majority of countries (including Russia), governments in the national interest will be formed, and national revival programs adopted.
 • Consolidation processes will be activated among non-Western civilizations (Russian, Chinese, Indian, Islamic, Buddhist, Latin American [sic]), while a dialogue of civilizations develops.
 •  The role of the UN and other international organizations will increase.
 • Western (Euro-American) civilization will weaken and move into decline, though continuing to exist for many decades in the status of a secondary pole of the world.
 • A new pole of the world will arise, based on the Shanghai Cooperation Organization.
  •  Peoples will again turn to God, rejecting the dollar as their idol; culture, science, education, and health care will develop, while moral values and national traditions are experience a renaissance.
  •  Man will return to harmony with the Earth and the Cosmos.

 

Thus, mankind will gain a chance to survive. Thus, hooray for the global, merciless, purgative economic and financial crisis!

Leonid Ivashov

 

Déjà publié sur ce blog en 2008 et plus actuel que jamais:

https://pocombelles.over-blog.com/article-24851924.html

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Nicolas Berdyaeff: Culture et civilisation (1922)

24 Mai 2023 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles Publié dans #Nicolas Berdiaeff, #Europe, #Histoire, #Philosophie, #Russie, #Religion, #Gandhi, #Shamil Sultanov, #Civilisation, #Jean Rostand

Nicolas Berdiaeff (1874-1948)

Nicolas Berdiaeff (1874-1948)

Article écrit en 1922, in: "Le sens de l'histoire", Aubier-Montaigne, 1948.

Article écrit en 1922, in: "Le sens de l'histoire", Aubier-Montaigne, 1948.

L'analyse des différences et même de l'antagonisme entre "culture" et "civilisation" par Nicolas Berdiaeff nous paraît indispensable pour prendre nos distances avec ce mot, ce concept de "Civilisation" brandi et revendiqué sans cesse par toutes sortes de politiciens liés aux milieux de pouvoir occidentaux, ceux de l'argent, de l'usure, de la technocratie, de l'industrie militaire et pharmaceutique, des grands médias, etc., ennemis du divin, de l'humanité et de la nature. L'idée artificielle de "Civilisation", au singulier, implique la destruction des cultures (appelées "Barbarie"). Car il n'existe pas une culture, mais des cultures. Tout comme la conception abstraite et artificielle de l'Homme par les Lumières et la Révolution française est la négation des hommes en tant qu'individus -et surtout en tant que personnes- appartenant à des peuples et à des cultures différentes et multiples. Qui dit Civilisation dit nationalisme: comme la "Civilisation" nie toutes les autres cultures, le nationalisme nie toute existence politique aux peuples ou ethnies présents sur un même territoire afin de les fondre dans le même moule et les soumettre aux mêmes lois. Civilisation et nationalisme sont deux termes et concepts abstraits, théoriques. Deux concepts darwinistes aussi, dans le sens perverti du darwinisme culturel; car ils impliquent une supériorité inconditionnelle d'une partie de la population du territoire sur les autres (Barbarie), ce qui conduit parfois à une manipulation de l'histoire pour justifier ce pouvoir.

Bien entendu, et pour relativiser ce qu'écrit Berdyaeff, la Russie n'a pas été le seul pays dont la culture était assise sur une base religieuse, car c'est le cas de l'Inde, des pays musulmans, bouddhistes, etc. Bien au contraire, la Russie tsariste a cherché à détruire les montagnards musulmans du Caucase (voir Les Cosaques et surtout Hadji Mourad de Tolstoï) et, par l'intermédiaire des popes, des marchands de vodka*  et de fourrures, à éradiquer les peuples nomades animistes de Sibérie (voir l’œuvre du linguiste finlandais Kai Donner chez les Samoyèdes).

P.-O.C.

* L'alcool étant un moyen rapide de fabriquer beaucoup d'argent avec les céréales normalement destinées à l'alimentation, mais en détruisant la santé physique et morale des gens.

Sur le même sujet:

Shamil Sultanov: La civilisation moderne capitaliste (extrait d'un entretien avec Business-Gazeta, 10 janvier 2021)

https://pocombelles.over-blog.com/2023/04/shamil-sultanov-la-civilisation-moderne.html

M. K. Gandhi: HIND SWARAJ OU L’INDÉPENDANCE DE L’INDE (1833)

https://pocombelles.over-blog.com/2023/02/m.k.gandhi-hind-swaraj-ou-l-independance-de-l-inde-1833.html

Gandhi a dit, après la Première Guerre mondiale: "L'Occident est satanique." (in: Romain Rolland: "Mahatma Gandhi")

La haine des Russes chez les indigènes de Sibérie (Kai Donner)

https://pocombelles.over-blog.com/2015/10/la-haine-des-russes-chez-les-indigenes-de-siberie-kai-donner.html

Jean Rostand: La civilisation

 

"Outre que la civilisation ne constitue point par elle-même un facteur de progrès biologique, elle peut, indirectement, devenir un facteur de régression. Nous avons dit maintes fois que les éléments héréditaires, ou gènes, des individus humains sont de qualité fort inégale, pour les caractères intellectuels comme pour les caractères physiques. Partant, le niveau moyen de l’espèce, à tout moment, dépend de la proportion existant entre les bons et les mauvais gènes. D’une part, le nombre des mauvais gènes tend à s’accroître sans cesse par le seul effet de la mutation, qui se fait beaucoup plus souvent vers le pire que vers le meilleur ; d’autre part la sélection naturelle tend à éliminer les mauvais gènes, lesquels, d’ordinaire, réduisent plus ou moins la capacité reproductrice des individus qui les portent, soit en restreignant leur fécondité, soit en diminuant leur vigueur globale ou leur faculté d’adaptation. Au début de l’histoire humaine, dans les conditions de la vie sauvage, la sélection naturelle jouait avec assez peu de rigueur pour que, malgré l’abondance des mutations délétères, l’espèce maintint son niveau, ou même peut-être marquât quelque amélioration génétique. Les individus chétifs, mal venus, n’arrivaient pas à l’âge reproducteur, et leurs mauvais gènes s’éteignaient avec eux. Henri Vallois a constaté que, parmi les squelettes préhistoriques, on n’en trouve presque pas de vieillards. Si les conditions de l’existence étaient jadis trop rudes pour la vieillesse, à plus forte raison l’étaient-elles sans doute pour la débilité. Le débile, comme le vieillard, est un produit de la civilisation.

De surcroît, la sélection s’exerçait non seulement à l’intérieur de chaque groupe humain, mais aussi de groupe à groupe ; et, dans ce cas, elle favorisait souvent le progrès des caractères intellectuels et sociaux : les tribus courageuses, animées de sentiments collectifs, commandées par des chefs héroïques et astucieux, l’emportaient sur les autres.

La situation changea du tout au tout à mesure que se formèrent les vastes collectivités organisées qui caractérisent la civilisation moderne.

D’abord, la sélection de groupe à groupe se fit inopérante, les guerres entre nations n’ayant d’autre résultat que d’évincer, de part et d’autre, les plus braves et les plus robustes. Et, surtout, la médecine, la chirurgie, l’hygiène, l’assistance, le développement des idées philanthropiques devaient concourir à gêner toujours davantage la fonction épuratrice de la sélection naturelle.

Nos sociétés actuelles donnent la possibilité de survivre et de reproduire à des milliers d’êtres qui eussent été autrefois implacablement éliminés dès le jeune âge. La diminution de la mortalité infantile, les vaccinations généralisées entraînent un affaiblissement de la résistance moyenne de l’espèce. Grâce à l’obstétrique, des femmes deviennent mères en dépit d’un bassin trop étroit, et, grâce au lait stérilisé, nourrices, en dépit de glandes mammaires insuffisantes. Il n’y a plus de sanction naturelle pour les petites tares physiologiques, comme la mauvaise denture ou la myopie.

Il n’est pas jusqu’à la sélection sexuelle, fondée sur le choix réciproque des procréateurs, qui n’ait perdu de son efficace dans nos sociétés inégalitaires. Les avantages sociaux ou financiers priment les naturels, et la situation ou les « espérances » font plus pour unir les humains que la beauté des corps ou que la finesse des esprits.

En bref, défaut général de sélection, et même, en certain cas, contre-sélection ou sélection à rebours : voilà le lot de nos sociétés actuelles. Aucun frein n’y contrariant la multiplication des mauvais gènes qui se produisent constamment par mutation, il s’ensuit un avilissement progressif de l’espèce.

Cet avilissement doit dater de loin ; il ne fera que s’accentuer toujours davantage". (…)

 

Jean Rostand, L’Homme (Gallimard, 1940/1961)

 

https://pocombelles.over-blog.com/2016/08/l-homme-et-la-civilisation-jean-rostand.html

Norberto Ceresole

Norberto Ceresole

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Shamil Sultanov: entretien avec Business-gazeta.ru (10 janvier 2021)

29 Avril 2023 , Rédigé par Sudarshan Publié dans #Asie, #Islam, #Economie, #Politique, #Russie, #Monde, #Shamil Sultanov, #Club d'Izborsk (Russie), #Opération Coronavirus, #Environnement, #Philosophie, #Turquie, #Chine, #USA

Shamil Sultanov (1953-2022)

Shamil Sultanov (1953-2022)

Shamil Sultanov : "Poutine doit comprendre qu'il n'y aura pas de pitié. Nous devons nous préparer au combat".

10 janvier 2021.

Le célèbre philosophe explique comment le coronavirus a empêché une guerre majeure et pourquoi les Américains ne parient pas sur Navalny mais sur Koudrine.
"La destruction de Trump, l'objectif principal pour 2020, est faite. Et ensuite, le principal objectif de l'État profond américain sera la destruction de Poutine et du régime de Poutine", a déclaré Shamil Sultanov, directeur du groupe de réflexion Russie-Monde islamique. Dans une interview accordée à Business Online, M. Sultanov explique pourquoi les gens acceptent d'être "apprivoisés" à l'ère du coronavirus, si la Russie peut être considérée comme un pays féodal et comment Erdogan a été le premier dirigeant mondial à comprendre que des temps nouveaux s’annonçaient.

Shamil Zagitovich, dans vos discours, vous caractérisez l'année écoulée comme le début d'une "ère de grande incertitude". En effet, l'année 2020 ressemble à ces rares dates dans l'histoire de l'humanité, à partir desquelles, dans les temps anciens, les gens commençaient le compte à rebours vers une nouvelle ère. Mais de quelle ère s'agit-il ? L'humanité est aujourd'hui comme un hérisson dans le brouillard : tout est bancal et brumeux, l'avenir est à peine visible, mais il y a beaucoup d'inquiétude dans ce brouillard…

De nombreux indicateurs suggèrent que nous sommes effectivement entrés dans une nouvelle ère d'incertitude globale, ou si vous préférez, d'incertitude stratégique et même civilisationnelle. De quels indicateurs s'agit-il ? Regardons : par exemple, pour la première fois en 70-80 ans, la dette extérieure des États-Unis a dépassé le PIB américain (selon des données de l'automne dernier, la dette fédérale américaine s'élevait à 21 000 milliards de dollars et continuait à croître régulièrement en raison de la situation de pandémie - ndlr). Cela ne s'est jamais produit auparavant, pas même pendant la Grande Dépression. Autre exemple : la civilisation humaine est en train de changer les règles du jeu sous nos yeux, rejetant l'ancien ordre établi par les Américains après l'effondrement de l'Union soviétique. Et maintenant, ces vieilles règles du jeu, adoptées par les apologistes de la "marche triomphale du capitalisme", ne fonctionnent plus non plus ! Et l'administration de Donald Trump l'a vraiment prouvé - parfois de manière amusante, si l'on prend la tentative de relation entre Trump et Kim Jong-un, et parfois de manière dramatique, comme entre les États-Unis et la Russie ou l'Amérique et la Chine. Mais ce ne sont pas seulement les stratégies politiques qui échouent ; les mécanismes économiques construits au cours des 30 à 40 dernières années, pendant la période la plus intense de la mondialisation, sont en train d'échouer. Les anciennes chaînes économiques s'effilochent comme des fils et, dans le même temps, on assiste à une réévaluation de l'efficacité économique : que signifiera l'efficacité proverbiale de demain ?
Ou pour se tourner vers la sphère idéologique : il y a trois ans, en décembre 2017, le Club de Rome publiait son rapport clé intitulé " Allez ! Capitalisme, myopie, population et destruction de la planète". L'idée principale de ce rapport était précisément que l'ancien monde se terminait et qu'une nouvelle période de l'histoire commençait (les idéologues du Club de Rome partaient du principe que la civilisation humaine s'était auparavant formée dans un "monde vide", avec des territoires inexplorés, des terres non découvertes et des ressources non exploitées. Or, selon les enseignements de l'écologiste et économiste américain Herman Daly, l'humanité est entrée dans une ère de "paix totale", où presque tout a été exploré et maîtrisé, l'écosystème est plein à craquer, mais dans ce monde, les gens vivent avec de vieilles habitudes qui pourraient provoquer un désastre inévitable - ndlr). Et alors ? Trois ans seulement se sont écoulés depuis que le Club de Rome a mis en garde contre la possibilité de l'avènement d'une nouvelle ère, et aujourd'hui, en regardant autour de nous, nous voyons de plus en plus de signes de ce "renouveau". En Occident, on parle de plus en plus de "croissance économique zéro". Mais honnêtement, je n'arrive pas à comprendre ce qu'est la "croissance économique zéro" dans le cadre du capitalisme. C'est en principe impossible ! Quelles sont alors les incitations à développer les sphères de la production et du commerce ? Si la croissance elle-même et, avec elle, les profits sont réduits à zéro ? D'une part. Ensuite, quoi qu'on en dise, la population mondiale ne cesse de croître, ce qui signifie qu'avec une "croissance économique zéro", nous serons très vite confrontés (et nous le sommes déjà) à une forte augmentation de la pauvreté et de l'indigence. La population mondiale dépasse aujourd'hui les 7 milliards et 700 millions d'habitants et la barre des 8 milliards n'est pas loin. À cet égard, certains affirment que la destruction actuelle de la biocénose, dont la pandémie actuelle de coronavirus (en tant que réponse de la biosphère à la "paix totale") fera probablement partie, est directement causée par l'activité humaine. En clair, l'homme est devenu une sorte de cancer de l'organisme vivant de la Terre. Ou, pour le dire plus simplement, non pas l'homme lui-même, mais la civilisation actuelle, qui détruit la composante biologique de la planète, et avec elle les autres composantes les plus importantes - l'hydrosphère et l'atmosphère. La phase de civilisation, dont le slogan principal est devenu la production et la consommation de masse, a notamment pour conséquence que, depuis 2011, les océans du monde ne sont plus en mesure de recycler les déchets humains qui y sont déposés. Ainsi, les océans ont cessé de se nettoyer, et ce depuis près de 10 ans !

Qu'est-ce que la pollution des océans ?

Il existe une liste de substances qui se retrouvent chaque année dans les océans en raison des activités humaines, qu'elles soient apportées par les rivières, qu'elles proviennent de l'atmosphère polluée ou qu'elles soient produites par toutes sortes de "décharges", de sites d'enfouissement et autres. La façon dont ces déchets se dissolvent ou non, ou coulent au fond en formant de tristes cimetières de déchets, tout cela a été suivi par des experts au cours des 30 dernières années. Par exemple, alors qu'auparavant les plastiques étaient au moins partiellement recyclés, on trouve aujourd'hui des îles entières de plastique en pleine mer, dans les eaux intérieures. La Chine, les Philippines, l'Indonésie, la Thaïlande et le Viêt Nam sont les principaux pays où l'on jette de manière incontrôlée des bouteilles, des récipients, des emballages, etc. Les conséquences sont évidentes. Le plastique est comprimé en de gigantesques îles de déchets de - parfois ! - de milliers de kilomètres carrés, ne se déplacent nulle part et pourrissent au soleil et dans l'eau. La "Grande plaque de déchets du Pacifique", par exemple, pèse plus de 3,5 millions de tonnes et couvre une superficie de plus d'un million de kilomètres carrés. Il existe au total cinq "plaques de déchets" de ce type, celle du Pacifique étant la plus grande. La chose la plus importante, la plus paradoxale et peut-être la plus tragique qui accompagne notre transition vers une nouvelle civilisation est que le développement technologique se poursuit malgré tout. Nous entrons de force dans la sixième phase technologique.

Mais cette étape nous sauvera-t-elle de la négligence des quatrième et cinquième étapes technologiques ? Le gaspillage est en effet une conséquence de ces périodes.

Je n'exclus pas que la sixième ère technologique soit encore plus effrayante. Il s'agit d'une sorte de percée vers des technologies entièrement nouvelles - nanotechnologies, biotechnologies, technologies génétiques, etc. Mais en même temps, en créant une production entièrement robotisée et en formant des matériaux dont la durabilité et la qualité sont absolument incomparables avec ce qui était produit il y a 20-30 ans, les nouvelles technologies projettent une masse énorme et croissante de contradictions et de problèmes - dans la sphère sociale, la culture, l'idéologie, et ainsi de suite.
L'exemple le plus clair à mes yeux est celui des États-Unis, qui sont le pays le plus performant sur la voie du sixième paradigme technologique. Selon certaines estimations, 16 à 18 % de la production américaine actuelle est déjà liée d'une manière ou d'une autre au sixième paradigme. Mais dans ce contexte, nous pouvons constater qu'un grand nombre de nouveaux problèmes systémiques insolubles sont apparus et s'aggravent rapidement en Amérique, ce qui, en 2020, rapprochera le pays de la guerre civile. Il s'est passé quelque chose de similaire aux États-Unis en 2000, lorsque George W. Bush a remporté les élections et qu'une grande partie des Américains lui ont refusé la reconnaissance. Et cela a duré 9 à 10 mois : le pays était en fait divisé en deux parties. Cette répétition suggère que même l'élite supérieure, le malheureux État profond américain, n'arrive pas à trouver les moyens de prévenir une rechute. Elle n'arrive pas à trouver un concept, un modèle et une technologie appropriés. C'est pourquoi nous avons vu plus d'une fois, non seulement aux États-Unis, mais aussi en France et en Allemagne, différentes foules de personnes - souvent diplômées, pas des prolétaires ordinaires - descendre dans la rue, prêtes à s'entre-déchirer. On a vu un correspondant d'une chaîne américaine demander à un certain passant : "Que se passe-t-il si les grands électeurs ne reconnaissent pas Donald Trump comme président des États-Unis ?" Et l'homme de répondre calmement, comme s'il s'agissait d'une évidence : "Mais nous avons des fusils ! ».

Et pourtant, ce n'est ni Trump, ni Biden, ni même l'empoisonné Navalny, qui est devenu actif fin décembre, mais Sa Majesté le coronavirus. Ce n'est pas pour rien qu'il a été "couronné" avant d'être présenté au monde - il est une sorte de virus dans le halo de la couronne. Et du haut de son trône, d'où il règne sur le monde, COVID-19 n'est pas encore descendu, il reste le "personnage" le plus médiatique.

Pour moi, le coronavirus est avant tout une composante de la nouvelle gouvernance mondiale et totale de l'humanité qui est en train de se mettre en place sous nos yeux. Je vous donne un exemple : en 2008-2009, lors de l'analyse de la sortie de la récession économique de l'époque, on prévoyait qu'en 2013-2014, il y aurait une nouvelle poussée de la crise. Mais les années 2019-2020 seront le point culminant de la crise, qui peut conduire à de puissants affrontements sociaux, à une déstabilisation imprévisible de diverses nations, etc. dans le monde. Pour éviter cette déstabilisation sociale mondiale, la descente dans la rue de dizaines de millions de personnes, il a fallu les "assigner à résidence", les obliger à ne pas quitter le seuil de leur maison. Le coronavirus était-il à la hauteur ? Absolument.
Et maintenant, un autre point important. Je suis certain que si le monde n'avait pas connu de pandémie de coronavirus, Donald Trump aurait gagné l'élection présidentielle. Car quelles que soient les saloperies déversées sur lui, le 45e président des États-Unis était plutôt actif et aurait traversé le creuset de la campagne électorale. Et avec le coronavirus et les anti-records que le système de santé américain était en train d'établir, ses adversaires s'attendaient à ce que Trump se fasse cracher dessus de la tête aux pieds à la fin du mois d'octobre et qu'il soit contraint de s'en aller comme un chien pleurnichard, en pleurant et en s'excusant auprès du grand peuple américain. Mais la situation est tout autre : le dirigeant américain a tenu bon jusqu'au bout et a même promis de revenir à la Maison Blanche en 2024. Son comportement - en violation de toutes les règles du jeu politique américain - nous rappelle une fois de plus que Trump est une figure farouchement non systémique, qu'il n'appartient pas au plus haut establishment des États-Unis et qu'il n'y a jamais été invité. En outre, il a fait l'expérience directe de la collision avec la machine de pouvoir américaine - n'oubliez pas qu'il a fait faillite à cinq reprises. On ne peut pas parler de lui comme d'un homme d'affaires prospère et d'un génie commercial exceptionnel. Il est tombé à plusieurs reprises, mais a été relancé par la suite grâce à l'argent de sa famille. Donald Trump a acquis sa popularité pré-présidentielle principalement grâce à son implication dans le show-business, et non dans l'industrie de la construction. En ce sens, il représentait le pire scénario pour l'État profond américain : un populiste hypocrite qui lance des défis sans consulter personne, qui fait appel à la foule et à ses bas instincts, qui critique le gouvernement fédéral, etc. En ce sens, Trump a eu des partisans après 2016 - nous les voyons en Espagne, en Italie, en Grèce et en Allemagne également. Une vague populiste a déferlé sur le monde dit civilisé.
Mais ce populisme, contrairement au populisme des années 1920 par exemple, n'a pas encore de base théorique. Alors que le socialisme prenait de l'ampleur en tant que mouvement institutionnel il y a 100 ans, le fascisme est apparu et le mouvement nazi est né. Un grand nombre de sociétés mystiques ont vu le jour dans le monde entier. Aujourd'hui, rien de tout cela n'existe encore - la théorie, précisément en tant que réflexion anticipatrice, ne joue aucun rôle. D'autre part, en ce qui concerne l'État profond, il y a des populistes qui sont prêts à tout détruire pour simplement satisfaire leur propre ego - une forme spécifique de masturbation politique. Bien sûr, pour cette raison, 2020 était censé être un slogan tacite de destruction de Trump - en tant que populiste majeur et flagrant. Eh bien, Trump a été éliminé, et le coronavirus a joué son rôle.
Un troisième exemple. Quel est le principal problème auquel est confrontée la communauté mondiale depuis 2004-2005 jusqu'à aujourd'hui ? Ce sont les frictions croissantes entre les États-Unis et la Chine et, plus largement, entre l'Occident et la RPC. Permettez-moi d'établir un parallèle : les événements des 10 à 12 prochaines années ressembleront dans une certaine mesure à ceux des années 1900 à 1912. Et surtout sur le plan géopolitique. Rappelez-vous : à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, deux centres de pouvoir mondiaux avaient émergé dans le monde (ils étaient entièrement européens à l'époque) : L'empire traditionnel britannique, d'une part, et l'empire allemand, agressif et effronté, d'autre part. Et aujourd'hui ? Il y a l'Amérique et la Chine. Autour d'eux, des coalitions se forment. Comme il y a plus de 100 ans, l'Empire russe ou l'ancien Empire austro-hongrois des Habsbourg ont été contraints de conclure des alliances - l'Entente ou la Triple Alliance, respectivement. Cela a conduit à la Première Guerre mondiale. Puis les deux coalitions se sont affaiblies et une troisième force est apparue : l'Amérique. Qui peut aujourd'hui prétendre être cette troisième force ?
C'est le coronavirus, qui vient d'affaiblir la possibilité d'une guerre hybride totale. Bien que les Chinois n'aient pas été très pacifiques ces derniers temps, menaçant les Américains, criant qu'ils sont prêts à envoyer leurs navires à Taïwan, et en décembre, ils ont organisé des exercices dans le détroit au large de l'île, de sorte que la marine et l'armée de l'air taïwanaises ont été mises en état d'alerte maximale. Mais tout cela n'était qu'un jeu, et la réalité est qu'une guerre mondiale entre la Chine et les États-Unis est désormais impossible. Il convient de noter qu'une nouvelle guerre mondiale ne peut avoir lieu qu'entre la RPC et les États-Unis, ou plutôt entre leurs deux coalitions mondiales. En outre, la coalition américaine potentielle compte jusqu'à 80-90 pays, tandis que la coalition chinoise en compte environ 50-60.

Il est évident que si nous prenons la coalition chinoise, la Russie est l'un des principaux pays.

Oui, l'un des premiers, même si la Fédération de Russie a beaucoup de mal à soutenir la Chine. En effet, une partie importante de l'élite russe est opposée à une telle orientation vers Pékin. L'année dernière, avant même la pandémie, j'ai eu l'occasion de discuter, par exemple, avec certains membres de l'élite de Saint-Pétersbourg - j'ai rarement vu quelqu'un adopter une position anti-chinoise aussi tranchée. Et ces personnes - bien sûr, dans les limites du politiquement correct - ont confronté leurs points de vue à la position de Poutine.
Dans l'ensemble, la composition des alliés de la Chine semble jusqu'à présent beaucoup plus faible que celle des Américains. Les Chinois sont bien conscients qu'ils ne sont pas encore prêts pour une grande guerre "chaude". Le XIXe congrès du PCC (Parti communiste chinois), comme nous le savons, a admis qu'un équilibre avec les États-Unis ne pourrait être atteint qu'en 2035. Mais nous savons que le problème de la guerre peut surgir spontanément, en dépit du bon sens, comme en 1914, alors que personne ne semblait vouloir la guerre. Ne serait-ce que parce que tous les rois et tsars d'Europe étaient liés les uns aux autres. La guerre s'est déclenchée d'elle-même. Et je vois l'effet positif du coronavirus dans la réduction de la menace d'une telle guerre spontanée.

Mais le COVID-19 est-il lui-même spontané ? Est-il le résultat d'une dégradation naturelle de la biocénose ou s'agit-il d'une arme biologique calculée lancée dans le monde ?

Je pars du principe que la pandémie actuelle a tout pour elle : la spontanéité, la prévoyance et la conspiration. Si nous avions une biosphère parfaite, avec ou sans armes biologiques, la pandémie se serait limitée à un foyer localisé. Et le coronavirus ne serait pas allé plus loin que Wuhan, peut-être n'aurait-il pas touché l'homme du tout, coincé dans le règne animal. Mais si la biosphère elle-même est déjà malade, la fuite américano-chinoise d'armes biologiques (rappelons que les spécialistes chinois ont largement coopéré avec les Américains à Wuhan) a dû être désastreuse. Il est fort possible que cette fuite ait été considérée comme faisant partie d'une vaste expérience. Nous ne saurons comment cela s'est passé que dans 20 ans au mieux, voire jamais. Pour l'instant, nous pouvons affirmer que les bonnes conditions (une biocénose malade) ont été créées pour que le COVID-19 se propage et qu'il est probable que la fuite ait été orchestrée avec de grands objectifs. Contenir la Chine, faire tomber Trump, établir un nouveau cycle de coopération mondiale entre les États-Unis et l'Europe, et coincer la Russie. Dans ce contexte, l'idée d'un nouveau modèle de gouvernance est dans la tête de quelqu'un. Et ce n'est même pas une question médicale - après tout, nous ne savons pas vraiment combien de personnes sont mortes du coronavirus et combien sont mortes de maladies connexes. J'ai lu que, disons, jusqu'à 17 millions de personnes meurent chaque année de toutes les formes de pneumonie. En 2020, moins de 2 millions de personnes sont mortes du COVID-19 dans le monde. Lorsque l'OMS parle de 17 millions de décès dus à la pneumonie, tout semble clair. En revanche, rien n'est clair et tout dépend des critères et des paramètres qui guident les systèmes de santé nationaux. Qui figure sur la liste des personnes tuées par le coronavirus ? Ce n'est même pas le virus qui affecte une très grande partie de la population, mais la peur qu'il suscite. Oui, l'année écoulée pourrait bien être appelée "l'année de la terreur". Toutes sortes de peurs ont précédé le coronavirus comme la cavalerie de l’apocalypse.

Et qui est concerné par ces peurs en premier lieu ? Quelle est la caractéristique sociobiologique de la peur dans le monde moderne ?

En règle générale, il s'agit d'une peur de masse qui touche de vastes segments  de la population. Et le caractère de masse lui-même est dû à quoi ? Je dirais que la civilisation actuelle, qui se dirige inévitablement vers sa fin, a créé une énorme strate d'"imitateurs". Il s'agit de personnes qui imitent totalement les stéréotypes, qui sont prêtes à être formées elles-mêmes. Ils sont formés par l'influence complexe des médias de masse, de la télévision, d'Internet, par l'éducation, la publicité, les rumeurs, l'appartenance à un certain clan, etc. On dit à l'homme moderne : "Tu dois suivre le style". Et cette année, la mode est à untel ou untel. Mais pourquoi ? Pourquoi un homme qui réussit devrait-il nécessairement porter telle marque de montre et pas une autre ? Pourquoi porterait-il un costume bleu et non le classique noir ? Après tout, personne ne se pose sérieusement ces questions. Cela signifie qu'il existe un puissant mécanisme d'imitation - et un mécanisme incontestable. Si l'on dit à une femme : "Suivez un certain style", toute femme normale devrait répondre : "Je suis une femme unique. Si je suis un style impersonnel, je me perdrai. Je dois trouver mon propre style". Mais peu de gens disent cela ! Et la proportion de personnes prêtes à imiter automatiquement et à accepter silencieusement les modèles de la société moderne atteint 70 à 80 % ! C'est le moins que l'on puisse dire ! Une masse critique a été atteinte. Grâce à la programmation neurolinguistique et aux techniques directes et indirectes de guerre psychologique, quelqu'un est en mesure d'influencer de grandes masses humaines. Il ne s'agit pas de personnes agissant rationnellement, mais de personnes prêtes à être formées. Ils sont formés - par rapport au style, à l'alimentation, aux valeurs de la vie, à la politique, aux autres personnes, aux groupes, aux sociétés, etc. Mais de la même manière, ils peuvent aussi être formés par rapport à la maladie. Comme l'a souligné l'un de nos universitaires, même avant l'apparition du coronavirus, les gens mouraient de diverses maladies infectieuses. Cela se passait en Russie et en Union soviétique, mais personne ne le soulignait. C'était peut-être une mauvaise chose, mais d'un autre côté, c'était une bonne chose, parce qu'il n'y avait pas d'agitation. Soudain, le monde entier a été saisi par une sorte d'hypocondrie généralisée. En l'espace de quelques mois, les gens ont accepté l'idée que certains groupes de pouvoir avaient le droit de les enfermer chez eux. Aujourd'hui sous la bannière du coronavirus, demain sous la bannière d'une autre « couronne".
Je tiens à souligner que ce n'est pas sans raison que la figure centrale de la culture de la civilisation moderne est l'acteur. Non pas un penseur, non pas un écrivain ou un scientifique capable d'une réflexion profonde, mais un acteur - une créature de manipulation et de contrôle, avec un psychisme mobile et imitatif. L'acteur idéal est une marionnette tirée par des ficelles dans le théâtre conditionnel de Karabas-Barabas. Si 70 à 80 % des gens d'aujourd'hui sont des imitateurs, leurs héros sont des acteurs, des comédiens, des humoristes, etc.
C’est l'une des grandes différences entre le modèle de civilisation actuel et d'autres civilisations. Par exemple, dans la civilisation romaine hellénistique de la Méditerranée, il y avait deux des professions les plus méprisées : le bourreau et l'acteur. Pourquoi un acteur ?  Il ne peut même pas s'exprimer, il ne peut que mal jouer les autres. "On ne te demandera pas pourquoi tu n'es pas devenu untel ou untel. On te demandera là-bas pourquoi tu n'es pas devenu toi-même. »
Dans la civilisation actuelle, au contraire, tout est à l'envers. Et c'est pour cela qu'un showman devient président des États-Unis. Et le président de l'Ukraine  est un comédien. L'un des principaux hommes politiques italiens est également comédien (Giuseppe Piero Grillo, fondateur du mouvement de protestation "Cinq Étoiles" - ndlr). Mais encore une fois, si nous regardons de près les hommes politiques contemporains, nous constatons qu'ils sont tous des acteurs ! Et très souvent, ce sont de mauvais acteurs. Et si nous regardons les années 1950 et 1960, pas si éloignées de nous, nous verrons Konrad Adenauer, Charles de Gaulle ou, disons, Nikita Khrouchtchev. Quoi qu'on en pense, il s'agissait de personnalités, pas d'acteurs. Et l'homme politique actuel n'a pas le droit d'être une personnalité. Il joue tout le temps, mais comme il ne s'est jamais spécialisé dans le jeu d'acteur (sauf les politiciens-acteurs professionnels), il est condamné à perdre. Ainsi, objectivement, les populistes d'un jour, tels que Donald Trump, occupent le devant de la scène. Et une ou deux ou même mille personnes honnêtes et sincères ne sauveront ni n'arrangeront rien ici. Espérer que Danko sorte son cœur de sa poitrine et dirige la nation est naïf. Le système d'imitation totale est en place depuis des décennies. Le même modèle de production et de consommation de masse a plus de 80 ans. Et l'élément clé de ce que j'appelle la "civilisation de l'imitation" est la publicité totale. Très souvent, nous ne sommes même pas conscients de ce qu'est réellement la publicité dans ses effets dramatiques. Par exemple, on parlait de l'effet 25th Frame, puis on se taisait et on déclarait que c'était une fiction. Mais en fait, le 25e cadre fonctionnait déjà dans les années 1960. Et il n'est pas difficile d'imaginer à quel point ces technologies noires se sont intensifiées depuis. J'ai moi-même travaillé à la télévision et je sais comment ce genre de choses se produit - même avec notre approche plutôt amateur.
Les résultats des élections aux États-Unis montrent que l'Amérique n'est pas divisée en deux, mais en trois parties. Il y a les partisans des démocrates - une foule très diverse, composée de minorités ethniques, de gays, de lesbiennes, de transgenres et de personnes qui les justifient, de partisans du socialiste Bernie Sanders, etc. Il y a les conservateurs traditionnels - des gens ordinaires qui, dans les années 90, pendant la campagne électorale, ont dit à Buchanan : "Pat, qu'est-ce qui se passe de toute façon ? Nous sommes devenus un pays complètement différent ces derniers temps ! Où sont nos traditions, où est notre culture ?" Mais il y a un troisième groupe qui s'oppose à la fois à Joe Biden et à Donald Trump. On les trouve au sein du Parti républicain - ils ont toujours détesté le showman Trump et ses mensonges permanents. En signe de protestation, ces personnes ont voté pour Biden. À l'inverse, certains membres du parti démocrate n'aimaient pas Biden, ses grimaces et son habileté à former un entourage exclusivement composé de pédérastes, de personnes de couleur et d'autres personnes du même acabit. Ils ont donc voté pour Trump. À mon avis, l'opposition de ces trois groupes est le problème le plus dangereux pour la société américaine. Et je ne suis pas sûr que Biden puisse gérer une telle situation.
Mais revenons au point clé que je voulais aborder : l'humanité a perdu le sens, l'image de l'avenir, elle ne sait pas où elle va. Le mouvement de la civilisation bâtarde d'aujourd'hui est devenu inertiel par nature - comme un train qui a perdu ses freins et qui déraille. Et l'abîme est devant nous. Je ne peux absolument pas accepter que l'homme soit le roi de la nature et qu'il décide de tout en sa faveur : il ne décidera plus de rien.

Vous renoncez donc à la vision anthropocentrique de l'univers dans laquelle les penseurs de la Renaissance plaçaient l'homme au centre ?

L'homme n'est qu'une composante très insignifiante du macrocosme et du microcosme : de systèmes plus généraux et plus vastes - planétaire, solaire, galactique, cellulaire, atomique, subatomique, etc. Même si nous considérons l'homme dans le cadre d'une seule Terre, nous constatons qu'il n'est qu'une sorte de néoplasme à la surface de la planète, et le temps montrera s'il est bénin ou malin. Jusqu'à présent, nous devons constater que l'humanité se comporte de plus en plus comme une tumeur maligne.

Depuis quand l'homme est-il apparu sur Terre et quand les civilisations ont-elles commencé à émerger ? Dans les études culturelles actuelles, on estime que la civilisation actuelle, vieille de 8 à 10 000 ans au maximum, n'est pas la seule à avoir existé sur notre planète. Il s'agit d'une civilisation, mais nous ne savons rien de nos prédécesseurs - nous ne connaissons même pas nos véritables ancêtres.

La civilisation moderne, c'est avant tout le capitalisme, ce que l'on appelle le Nouvel Âge, dont les racines remontent à la Renaissance. Cette civilisation a entre 500 et 600 ans, voire un peu plus. Qu'est-ce qui caractérise cette période en premier lieu ? C'est que la civilisation est profondément matérialiste et en même temps eurocentrique. Cela apparaît clairement si nous la comparons aux civilisations chinoise, indienne ou même romaine. Là, il n'y avait pas de domination matérielle aussi écrasante. Le matériel, le physique, occupait de 15 à 30 % de la vie des gens. Si nous regardons l'ancienne civilisation égyptienne, l'élément matériel dans cette civilisation était d'une importance mineure. Et aujourd'hui ? Je pense que nous pouvons parler d'une domination matérielle de 80 à 90 %. Ce que l'on appelle la culture de masse, ou ce que l'on appelle parfois la quasi-culture, n'a aucun rapport avec les principes spirituels. Elle ne fait qu'interpréter le matériel à sa manière et cherche à augmenter ses profits.
En même temps, il y a un paradoxe. Si l'on se souvient de l'État soviétique, qui proclamait officiellement son matérialisme et son athéisme, il était né d'un élan spirituel vers la justice mondiale et le paradis terrestre. Mais en quelques décennies (bien avant l'effondrement de l'URSS), il a abouti au matérialisme le plus primitif et le plus prosaïque : un appartement pour chaque famille soviétique, une datcha sur six hectares, une voiture, etc.
Aujourd'hui, l'humanité est confrontée à une période de transition difficile, qui sera liée à une recherche intensive de nouveaux modèles et de nouvelles stratégies - non seulement politiques, mais aussi sociales, économiques, culturelles, informationnelles et autres. Nous disposons de 20 à 25 ans pour cela, mais j'ai le sentiment que ce délai n'est pas suffisant pour résoudre l'ensemble des problèmes existants.

De quels problèmes parlez-vous, en dehors des défis environnementaux et économiques ?

Regardez : l'un des principaux piliers de la civilisation capitaliste - l'État, avec ses autorités et son appareil - s'effondre sous nos yeux. Le modèle étatique est fortement discrédité sur le plan idéologique et spirituel. C'est ce qui se passe aux États-Unis et en France, par exemple. Dans le même temps, la proportion d'États en déliquescence dans l'œcumène augmente. Rien qu'en Afrique, on compte plus d'une douzaine d'États de ce type. En Amérique latine, nous pouvons facilement trouver des exemples similaires. En Eurasie également : la Syrie, l'Irak, l'Afghanistan sont tous des États en déliquescence. Dans ce cas, au lieu de s'identifier comme citoyen d'un État (ce qui est caractéristique de la civilisation capitaliste urbaine), on revient à une auto-identification clanique ou même tribale. On pourrait également parler d'une auto-identification criminelle. Tout cela était caractéristique des périodes les plus difficiles du Moyen-Âge et apparaît soudain chez nous au XXIe siècle. C'est pourquoi certains penseurs, à commencer par Nikolai Berdyaev, ne cessent de nous parler d'un retour au Moyen-Âge.

Karl Marx nous avait promis le dépérissement des États, mais maintenant ce n'est plus du tout selon Marx…

Oui, c'est en train de se produire sous une forme légèrement différente.

En fait, la Russie présentait également de nombreux signes d'un État en déliquescence dans les années 1990.

L'État russe, si vous le regardez du point de vue du modèle, est féodal par essence. Je ne vous donnerai qu'un exemple. Nous avons un roi conventionnel, Poutine. Nous avons des ducs, des princes et des comtes conditionnels - Alexey Miller, Igor Sechin, les frères Rotenberg et d'autres. Et il y a le gouvernement. Dans n'importe quel autre pays, ses dirigeants sont des personnages clés, mais dans le nôtre, ils ne le sont pas. Pratiquement personne ne peut dire un mot contre Igor Sechin. Parce que Sechin est beaucoup plus proche du chef de l'État. C'est comme dans la hiérarchie féodale : plus on est proche du corps du roi, plus on est influent. Les titres et les postes ne sont souvent pas aussi importants que cette proximité proverbiale. Plus bas dans l'échelle hiérarchique, on trouve les barons, les chevaliers... Et tout en bas, les serfs. Et si nous examinons la structure sociale de la Russie moderne, nous constatons que cette couche de la population constituée de serfs subsiste, bien que sous une forme différente, plus complexe et plus sophistiquée.

Le servage a également existé dans la Russie stalinienne, en particulier après 1930, l'année dite de la grande rupture pour la paysannerie.

Mais à l'époque soviétique, il y avait au moins une justification idéologique - par exemple, pourquoi nous devions lutter contre les koulaks, pourquoi les jeunes paysans prometteurs devaient être attirés vers la ville. Et cela était ouvertement discuté comme un phénomène temporaire. Aujourd'hui, c'est le silence et l'hypocrisie. Bien que nous semblions vivre dans une sorte de démocratie et de liberté. Mais lorsque le salaire moyen dans une région d'Ivanovo, région indigène russe, se situe entre 12 et 16 000 roubles (selon les statistiques officielles pour 2020, 27 000, mais en réalité moins - ndlr), cela symbolise l'impasse sociale. Où que vous alliez travailler avec un certain niveau d'éducation, votre salaire sera le même. C'est bien pire que le servage classique, sous lequel le paysan était encore intéressé par la productivité de son travail, pour qu'il lui reste quelque chose dans sa réserve personnelle.

Le paysan travaillait sur les terres du barch et ensuite il travaillait pour lui-même.

Mais comme les familles avaient beaucoup d'enfants, certains travaillaient sur le fardeau du sacrifice et d'autres travaillaient pour leur famille. Après tout, d'où vient l'accumulation du capital initial en Russie ? Du moins en dehors de l'environnement des Vieux Croyants, car il n'était pas le seul à générer la classe marchande russe. Et cela a déjà été suivi par le développement industriel. Mais le servage en Russie se manifeste aujourd'hui à bien des égards de manière pire qu'au XVIIe siècle, par exemple. Je ne parle pas seulement de l'absence d'ascenseurs sociaux, même si c'est la nature fermée et rigide des structures sociales qui devient fatale pour la Russie d'aujourd'hui. Il ne s'agit pas seulement de la Russie, d'ailleurs. Mais la Russie est un pays très imposant dans ce sens - nous pouvons observer les vestiges de la puissance technologique, de la production moderne et en même temps des structures sociales complètement préservées. Et surtout, le manque d'intérêt de l'État et du mécanisme économique pour la promotion des personnes talentueuses. Dans le monde entier, l'alpha et l'oméga est le fait évident que le niveau créatif de la nation et la formation accélérée de nouveaux groupes, strates et couches créatives deviennent la principale force productive et l'ingrédient du pouvoir de l'État au XXIe siècle. En Russie, cependant, cela s'avère n'être qu'une sorte de danse chamanique - le concours "Leaders of Russia", par exemple. Il s'agit d'une sorte d'imitation farfelue, que l'on montre plus tard au dirigeant pour lui dire que nous avons sauté autour du feu de camp et que tout s'est bien passé.

L'écrivain soviétique de science-fiction Ivan Efremov avait un concept : la "flèche d'Ariman". Il s'agit d'un symbole de sélection négative, dans lequel les meilleurs membres de la société sont éliminés ou relégués dans l'ombre, et les pires sont mis en avant. C'est l'évolution à l’envers.

Ce que vous appelez, à la suite de Yefremov, "la flèche d'Ahriman" est une tendance à long terme. La tragédie actuelle en Russie porte déjà des fruits amers. Mais en Turquie, par exemple, ils ont soigneusement calculé le nombre de personnes talentueuses qu'ils ont dans le pays. Il y a 3 ou 4 ans, les Turcs déclaraient que la République turque comptait 642 000 talents. Cela signifie que ces données sont documentées, car les normes de documentation sont européennes. Cela dit, la Turquie a un environnement concurrentiel et les rivaux, si l'occasion se présente, sont prêts à s'affronter. Mais dans l'ensemble, les autorités turques, sous le joug desquelles vivent 83 millions de citoyens, sont beaucoup plus intéressées que les autorités russes par le développement d'une créativité nationale véritablement talentueuse et de ses vecteurs.
Permettez-moi d'ajouter une autre caractéristique de notre époque que j'ai personnellement constatée. L'homme moderne, me semble-t-il, n'a plus le choix entre la vérité et le mensonge. Il doit maintenant choisir entre plusieurs contre-vérités celle sur laquelle il est préférable et plus avantageux de s'appuyer. Il y a toutes sortes de contre-vérités qui opèrent dans le monde d'aujourd'hui au nom de la vérité : le libéralisme et le conservatisme, le postmodernisme et le réalisme, Trump et Biden, Trump et Poutine ou Poutine et Navalny, etc. Tous ont leurs résonances pour ressembler à quelque chose de réel et de vrai, mais tous sont, si l'on y regarde de plus près, le décor derrière lequel résonne le joueur de flûte. La vérité en tant que telle - sous la forme de justice sociale, de sentiment religieux sincère ou de quête morale (qui caractérisait les gens du 19e siècle) - n'existe plus dans notre réalité. Elle est, comme on dit, disparue du marché et n'est pas demandée.

Ce dont vous parlez n'est qu'un élément de cette nouvelle forme de gouvernance de masse et de manipulation. Mais peut-être que ce troisième groupe aux États-Unis dont vous parliez, qui n'est ni pour Trump ni pour Biden, est la force qui ne veut pas choisir entre des contre-vérités ?

Si nous supposons que 30 % des électeurs ont voté pour Trump et Biden et que les 40 % restants ont voté pour leur propre compte en signe de protestation, alors... D'où viennent ces 40 % ? Je n'arrive pas encore à le comprendre. Je sais qu'il existe un motif commun qui a toujours uni les démocrates et les républicains aux États-Unis : la haine de Washington en tant que centre sans âme. En fait, ce qui se passe actuellement est un phénomène politique et socioculturel très intéressant. La haine de Trump et de Biden, d'où la montée d'une méfiance totale, et ce à un moment où les États-Unis entrent, j'ose le dire, dans une période révolutionnaire. Car dans un avenir proche, les Américains doivent montrer comment ils peuvent combiner les défis de la sixième TPU avec les réformes révolutionnaires radicales qu'ils vont mener dans les domaines social, économique, politique et culturel.

Il existe en effet un autre phénomène : depuis quatre ans, toute la presse américaine - jusqu'à 80-90 % - est contre Trump. De plus, tout Hollywood était contre lui. Les plus grands acteurs se sont moqués de Trump tous les jours. Pourtant, je le répète : sans le coronavirus, Trump aurait gagné.

Cela montre que le pouvoir de la presse et des acteurs n'est pas négligeable.

Il s'agit aussi de choses plus profondes. La société traditionnelle qui était construite par l'État lui-même est en train de s'éroder. Et la dégradation de cette même société américaine nous montre qu'une sorte de dégradation implicite et encore inconnue de la société est en train de commencer. Je ne pense pas qu'à la suite de cette dégradation, les Américains atteindront un état atomique - pour l'instant, ils sont encore unis par leur histoire commune et leurs communautés internes qui se chevauchent. Mais la direction que prendra ce processus est très intéressante et vitale. En effet, ce qui se passe aux États-Unis se produira également dans d'autres pays.

Donald Trump ne reviendra certainement jamais. Et le fait qu'il adopte maintenant une ligne aussi dure en n'acceptant pas le résultat de l'élection montre que le président perdant est en fait très désireux de négocier avec les vainqueurs. C'est pourquoi il est désormais question qu'avant de quitter la Maison Blanche, Trump se gracie lui-même - un jour ou deux avant le 20 janvier 2021. En tant qu'homme d'affaires - et inefficace de surcroît - Trump sait très bien qu'il a beaucoup gâché. Mais ce qu'il a fait ne peut pas être rendu public aujourd'hui, même par ses détracteurs du FBI ou du ministère de la sécurité intérieure. Pourquoi ? Parce que discréditer Trump reviendrait à discréditer la fonction de président des États-Unis, qui est centrale et sacrée dans le système politique américain. Et ce discrédit servirait d'impulsion supplémentaire à la destruction de l'État américain, qui est déjà bien entamée. De plus, si Trump est démasqué aujourd'hui, ses partisans risquent de prétendre qu'il ne s'agit que de mensonges et de crier dans tout le pays : "Notre peuple est battu". Ainsi, la pression exercée sur Trump aura l'effet inverse : elle mobilisera les trumpistes et augmentera la sympathie pour lui de la part d'une "troisième force" qui déteste l'État profond et tous les "bâtards fédéraux", comme ils le disent.

Pourtant, la tentative de négociation de Trump n'a jusqu'à présent abouti à rien car, comme l'a dit un célèbre personnage littéraire, "la négociation n'est pas appropriée". Il est inapproprié précisément parce que Trump, selon ses ennemis, doit être détruit - non pas en tant que personne, mais en tant que personnage social, rôle social, tendance. De peur que ses clones ne relèvent la tête d'ici 2024. D'autant plus qu'un nouveau populiste - énergique, volontaire, plus jeune - pourrait remplacer le vieux Trump. L'État profond ne peut en aucun cas permettre que cela se produise. Et Trump, en tant qu'homme de spectacle, a senti tout cela - d'où la dureté et l'intransigeance de sa position. Il fait les déclarations les plus scandaleuses, jusqu'à ne pas vouloir quitter la Maison Blanche le 20 janvier, jour de l'investiture de Biden. Mais il le fait dans l'espoir d'obtenir au moins quelques garanties tacites. Mais à mon avis, il n'obtiendra aucune garantie. Et s'il se gracie lui-même, ce sera l'ultime erreur de toute sa carrière politique. Aucun président américain n'a jamais fait cela. Et même si Trump quitte ses fonctions un jour plus tôt, le 19 janvier, et que Mike Pence devient président des États-Unis pour un jour, et qu'il est censé appliquer la grâce de son protecteur, cela n'aura pas d'effet positif.

Il n'y aura donc pas de 2024 pour Trump, il sera tué à petit feu. D'abord par des moyens économiques, sans toucher à sa crédibilité politique pour l'instant. Ils montreront qu'il est un voleur, qu'il n'a pas payé d'impôts, et ils présenteront des preuves convaincantes. D'ores et déjà, une trentaine de procédures pénales ont été engagées contre l'actuel président américain, dont 22 au niveau de différents États. Si Trump se gracie lui-même, il ne se libérera que de 8 affaires fédérales. Et après sa démission, 50 autres les rejoindront. Et la tâche de ses puissants opposants consiste tout au plus à dépouiller complètement Trump sur le plan économique. Pour montrer à tous ses successeurs potentiels : "Les gars, ne pensez même pas à jouer avec le système !" Et ensuite, donner à Trump une sorte de coup pour le transformer en dégénéré et le montrer au monde entier.  Rappelez-vous : l'ancien président des États-Unis et ancien acteur Ronald Reagan était lui aussi devenu un dégénéré complet à la fin de sa vie. Mais personne ne l'a montré parce que Reagan était une figure respectée de l'establishment et que le système avait besoin de lui. Mais Trump, lui, s'il est réduit à la pauvreté et à la démence, sera certainement montré et reproduit partout comme un avertissement : "Les gars, ne devenez pas des Trump ! ».

Vladimir Poutine a félicité Joe Biden pour sa victoire dès l'annonce de la décision des grands électeurs américains. Cela signifie-t-il que le parti habituellement associé au bloc libéral-financier du gouvernement s'est finalement imposé au sein de l'élite russe ?

Je ne le crois pas. L'ennemi numéro un de l'État américain est Donald Trump. La destruction de Trump - l'objectif principal pour 2020 - a pratiquement été accomplie. Et ensuite, l'objectif principal de l'État profond américain sera la destruction de Vladimir Poutine et du régime poutinien. Mais que peuvent-ils faire ici ? Ils peuvent lancer un ultimatum, convoquer quelques personnalités russes dirigées par le "représentant spécial pour les organisations internationales" Anatoly Chubais à l'"obkom" de Washington. Et de leur dire : "Notre première condition est que Poutine et 20 à 30 personnes de son entourage (essentiellement des officiers de sécurité) doivent partir. Deuxième condition : vous devez vous joindre à notre coalition anti-chinoise aux cris de "Banzai !" et "Vive la Chine !

Compte tenu des sentiments anti-chinois qui prévalent au sein de l'élite russe (et pas seulement à Saint-Pétersbourg), cette condition sera assez facile à remplir.

La seconde est beaucoup plus facile à réaliser, en effet. Les enfants de l'élite russe n'étudient pas en Chine, pas plus qu'ils n'y détiennent de l'argent ou des biens immobiliers. Détruire Vladimir Poutine, en revanche, est beaucoup plus difficile. Car, quoi qu'on en pense, d'un point de vue politique, le régime de Poutine et la Russie moderne ne font qu'un. Il ne faut pas se faire d'illusions. En cas de coup d'État de palais, la situation sera similaire à celle de 1987-1988 en Union soviétique. Le pays commencera à s'effriter, à s'effondrer et le processus de dégradation systémique rapide sera enclenché. Rappelez-vous la loi sur la coopération en URSS adoptée en mai 1988. Après cette loi, la dégradation du système soviétique s'est rapidement accélérée et, en un peu plus de trois ans, l'État s'est effondré. C'est la même chose ici.
Joseph Biden ne cache d'ailleurs pas ses intentions : en octobre dernier, il a déclaré que la Russie était l'ennemi numéro un de l'Amérique (Moscou est "la principale menace pour notre sécurité et nos alliances" et Pékin est "notre principal concurrent", a déclaré le candidat à la présidence des États-Unis de l'époque - ndlr). La raison pour laquelle le dirigeant américain nouvellement élu pense ainsi est une autre question. Les libéraux de chez nous se rassemblent maintenant en cercle autour de Poutine et le convainquent que les relations avec Biden peuvent encore être améliorées - "nous allons y travailler et essayer". Non, ils ne le feront pas, parce qu'ils ne le peuvent pas. La raison essentielle qui détermine l'attitude de l'administration Biden à l'égard de Poutine est simple : Biden et le parti démocrate ont besoin d'un ennemi extérieur visible pour stabiliser la situation interne aux États-Unis et les relations au sein du parti démocrate.
Rappelons-le une fois de plus : lors de l'élection présidentielle américaine de 2000, la moitié du pays a refusé de reconnaître George W. Bush comme président pendant près d'un an. Quelle était la solution ? Le 11 septembre 2001 - un spectacle national grandiose avec des actes terroristes, la désignation d'Oussama Ben Laden comme ennemi majeur et une propagande totale... Vous souvenez-vous de la mise en scène démonstrative ? L'un des Boeing détournés aurait percuté l'aile gauche du Pentagone. Et comme si toute la direction du Pentagone, dirigée par le secrétaire américain à la défense de l'époque, Donald Rumsfeld, avait disciplinément nettoyé sa zone de débris, ramassé les poteaux tombés au sol, etc. Une chose m'a frappé à l'époque : Rumsfeld, sur les images diffusées par les médias, portait avec ses collègues quelque chose comme une bûche sur l'épaule. Exactement comme Lénine sur la célèbre photo de lui au subbotnik. S'il y avait eu une véritable attaque sur le Pentagone, les dirigeants du département de la défense n'auraient pas dû sortir pour un "subbotnik" - ils auraient dû, selon leurs propres instructions, se réfugier dans les bunkers. Après tout, ils ne pouvaient pas, n'avaient pas le droit d'exclure une seconde attaque ou même une attaque atomique. Mais ils ont agi selon le scénario : ignorant fièrement les "ennemis", ils ont ramassé les bûches préparées à l'avance et ont courageusement marché sur la scène préparée à l'avance avec une chanson.

Eh bien, les Américains aussi ont appris de nous certaines techniques de manipulation - nous ne sommes pas les seuls.

Et ça a marché à l'époque : l'Amérique s'est unie. En outre, en 2004, Bush Jr. a été réélu haut la main, alors que de nombreuses personnes aux États-Unis savaient qu'il était en fait alcoolique. Et c'est justement pour cette raison que Bush lui-même n'a pas été impliqué dans l'affaire du 11 septembre. Aujourd'hui, c'est presque le même spectacle qui se prépare et même les acteurs, si l'on regarde bien, sont presque les mêmes. C'est-à-dire les mauvais acteurs, comme nous l'avons dit plus haut. Mais la Russie n'est même pas une question de politique étrangère pour les États-Unis. C'est un facteur qui est censé contribuer à la stabilité intérieure. Ils doivent donc attiser les flammes de la haine contre le Kremlin, le dépeindre comme un monstre, un tueur d'enfants, un empoisonneur de Navalny, etc. Cette attaque psychologique - contre le Kremlin, contre Moscou, qui a commencé maintenant - ne fera qu'augmenter. Je pense que le thème de la Russie "pire qu'une invasion martienne" sera l'un des leitmotivs du discours de Biden le 20 janvier 2021, jour de son investiture.

Alexei Navalny, "empoisonné", qui a diffusé la veille du Nouvel An une nouvelle série de ses révélations sur ses "8 empoisonneurs du FSB", est-il encore capable de jouer un rôle majeur dans ce spectacle antirusse ?

À mon avis, Navalny n'est plus apte à jouer les premiers rôles. Il pourra toujours jouer ses rôles épisodiques de dénigrement et autres "sensationnalismes", mais ils ont besoin de quelqu'un d'autre pour jouer le rôle principal. Je pense que pour ce rôle, "Washington Obcom" envisage un autre Alexei - Kudrin, l'un des dirigeants de notre bloc libéral-financier.

Mais qui est Kudrin ? C'est un homme de Saint-Pétersbourg et un élève de Sobtchak, tout comme Poutine lui-même. Un peu plus jeune (60 ans).

Cela ne signifie pas que les Américains pointent directement du doigt Alexei Kudrin. Il est plus probable que Kudrin ne devienne jamais président de la Russie, ni même premier ministre, ce qui est son rêve. Il s'agit simplement d'une sorte de vœu adressé à l'élite russe de l'autre côté de l'océan : "Les gars, au lieu du "méchant" Poutine, concentrez-vous sur le "bon et intelligent" Koudrine". Et Alexei Leonidovich est heureux de jouer le jeu : en décembre, il a solennellement félicité Chubais pour son nouveau poste (littéralement : "Ce n'est pas la première fois en 30 ans qu'Anatoly Chubais prend le sujet de l'avenir et en fait le sujet du présent. Bonne chance, Anatoly Borisovich, et développement durable" - ndlr). Comme des enfants, honnêtement.

Croyez-moi, pour un ancien comptable de Saint-Pétersbourg, c'est un jeu très excitant que de se hisser sur un tel Olympe !

 Mais c'est un jeu dangereux ! Il faut travailler et avoir l'instinct de conservation ! On raconte que Gennady Burbulis, l'un des anciens hauts fonctionnaires de Boris Eltsine, a récemment déclaré dans un cercle proche : "Oui, nous avons pu nous en tirer à l'époque. Mais les gens d'aujourd'hui ne pourront pas s'en tirer aussi facilement.

Et quelle est la marge de sécurité de la Russie de Poutine ? Ou bien Kudrin est-il aussi inévitable dans un avenir proche que l'était Monsieur Poutine lui-même en 2000 ?

Je ne parle pas du tout de Kudrin. Je le considère comme un élément du jeu "Washington Obcom", mais seulement au stade actuel. Cependant, une chose me trouble : à une époque, Alexei Kudrin était en concurrence avec Dmitry Medvedev, et Poutine semblait même lui promettre qu'après l'alternance de 2012, c'est Alexei Leonidovich qui deviendrait premier ministre. Cependant, il a promis à beaucoup de gens à l'époque et a ruiné les relations avec certains d'entre eux. Alors pourquoi n'a-t-il pas nommé Kudrin en 2012 ? Après tout, selon de nombreux paramètres, Koudrine était un personnage bien plus acceptable que Medvedev ! En effet, lorsque Vladimir Vladimirovitch a annoncé pour la première fois la rotation prévue, Koudrine était à Washington. Il y a fait une déclaration plutôt inattendue : la Russie était presque condamnée si elle continuait à dépenser autant pour les questions militaires et sociales. À l'époque, nombre de mes connaissances ont déclaré : "Le texte adressé à Koudrine a probablement été préparé dans certains bureaux et il l'a simplement reproduit de mémoire ». Cet épisode nous éclaire d'ailleurs sur le caractère de Poutine. Après les déclarations de Koudrine, il ne pouvait tout simplement pas aller à l'encontre de son cercle de pouvoir et nommer son ancien collègue de Smolny au poste de premier ministre. Mais d'un autre côté, ayant compris le jeu américain, Poutine a laissé Koudrine à proximité, lui trouvant plus tard le poste de chef du Centre de recherche stratégique, puis de président de la Chambre des comptes. Ce n'était pas le cercle intérieur de Poutine, mais quelque part dans le deuxième ou troisième cercle, mais tout de même… Aujourd'hui, sous une pression accrue, Vladimir Poutine tente de manœuvrer, il a même renforcé l'aile libérale du gouvernement - au moins au niveau des mots et des promesses. Mais le président russe doit comprendre qu'il n'y aura pas de pitié. Il doit donc se préparer à un combat. C'est d'ailleurs ce que lui disent certains responsables de la sécurité. Et, à mon avis, la transition vers une forme de gouvernement de mobilisation est certaine, ou du moins ils essaieront. Autre question : la soi-disant élite russe fracturée est-elle prête pour cela ? Après tout, il est très difficile de se mobiliser du jour au lendemain. Un autre obstacle majeur est l'ampleur de la corruption russe. Avec une telle corruption, il est en principe impossible de mettre l'État sur la voie de la mobilisation. Dans le modèle de mobilisation - que cela vous plaise ou non - l'importance des gens ordinaires augmente. Et des déclarations telles que "Je ne permettrai pas que les prix des denrées alimentaires augmentent" ne suffiront pas ! Les gens ont besoin de voir des sacrifices de la part de l'État, sinon ils n'auront aucun intérêt à se battre pour lui. Il faut leur montrer qui est l'ennemi, qui est responsable et pourquoi nous sommes dans cette situation. Et s'ils se contentent de dire aux gens : "Ici, en Amérique, nos ennemis..." "Et alors ?", diront les gens, "ils ont toujours été considérés comme des ennemis". Lorsqu'il s'avère que de nombreux pays du monde s'unissent contre la Russie - pas seulement les États-Unis ou l'Europe, mais même la Chine, parce que pour elle, c'est vital - comment agir dans cette situation ? Existe-t-il des modèles créatifs pour la transition vers une mobilisation nationale en l'absence d'une idéologie nationale ? Il y a beaucoup de questions…

Un autre héros de cette année a été le président turc Erdogan avec son éphémère guerre du Karabagh, dans laquelle il s'est impliqué par l'intermédiaire de l’Azerbaïdjan.

Recep Erdoğan est unique en ce sens : il a été le premier dirigeant mondial à sentir que des temps complètement nouveaux s'annonçaient, alors que les anciennes structures, institutions et règles du jeu commençaient à s'essouffler de plus en plus, voire à ne plus fonctionner du tout. Il s'est donc permis de défier l'OTAN, les États-Unis, l'UE, la France, la Grèce et même l'infortunée Arménie. Il est allé jusqu'à perturber quelque peu les relations avec les États-Unis et à se rapprocher de la Russie. Mais en même temps, il a commencé à mettre en œuvre sa politique, à mettre sa stratégie en pratique. Et l'élément clé de la nouvelle stratégie d'Erdogan est le suivant. Le président turc est arrivé à la conclusion que dans la période de transition à venir (je ne parle pas du moment où tout va "se calmer" et où de nouveaux modèles et de nouvelles règles du jeu vont émerger), trois facteurs sont à prendre en compte. Premièrement : l'importance particulière de la volonté politique du dirigeant. Citez-moi au moins un dirigeant mondial actuel dont la volonté politique est comparable à celle d’Erdogan.

Permettez-moi de poser une contre-question : Erdogan n'était-il pas mêlé de la tête aux pieds aux agents de Fethullah Gulen ? Les "gardes" de Gulen représentaient environ 70 % du corps de l'armée turque avant la tentative de coup d'État militaire.

Mais cela appartient au passé. Mais au cours des 3 à 3,5 dernières années, je pense qu'il n'y a pas d'homme politique plus efficace au monde que Recep Erdogan. En Turquie, Erdogan est le numéro un absolu. Ahmet Davutoglu, Binali Yildirim sont tous des pions. Le président turc a réprimé ses opposants internes, supprimé le poste de Premier ministre, emprisonné les dirigeants du parti kurde... Nous voyons donc ici la volonté politique du dirigeant en premier lieu. Et je ne sais même pas avec qui l'on pourrait établir un parallèle. Peut-être avec Xi Jinping, mais c'est une autre histoire, car en Chine, ce n'est pas le dirigeant qui joue le rôle principal, mais l'État profond chinois lui-même. Toutefois, la Turquie possède également son propre État profond, mais il est clairement dominé par le dirigeant.
Le deuxième facteur est la puissance militaire directe. Non pas au niveau du nombre de chars, de missiles et d'autres choses que vous possédez, mais en termes d'armée qui se bat réellement. Les forces armées qui ne combattent pas, mais qui se contentent d'organiser des camps d'entraînement et des exercices, représentent 50 % de l'armée. Quant à l'armée turque, elle n'a cessé de se battre au cours des trois dernières années et demie : en Syrie (contre les Kurdes), en Libye, au Karabakh, etc. Cela signifie qu'elle apprend constamment les techniques de combat. Pour un officier, il vaut mieux participer à un combat réel pendant une seule journée que de consacrer trois mois à des exercices.
Troisième facteur : lorsque l'ancien monde s'effondre et que les règles habituelles cessent de fonctionner, votre potentiel de coalition se manifeste. Il ne s'agit pas seulement de vos amis au niveau officiel, mais aussi au niveau de l'État profond, des structures transnationales, des organisations légales et illégales, etc. Si nous considérons la Russie et la Turquie de ce point de vue, la supériorité des Turcs à cet égard est frappante. Alors que la presse occidentale tente périodiquement de présenter Erdogan comme un méchant, tous les dirigeants occidentaux s'intéressent d'une manière ou d'une autre au président de la république turque. Merkel, l'élite française, qui s'en prend aujourd'hui à Macron, sont tous intéressés. La stratégie américaine au Moyen-Orient sans la Turquie ferait immédiatement faillite. L'Iran s'intéresse à la Turquie. Moscou aussi.
Le troisième facteur, qui se joue maintenant dans le nouvel environnement, est donc activement exploité par Erdogan. Mais cela ne veut pas dire qu'il signe des accords officiels avec tout le monde, non. La Turquie peut établir des liens avec des mouvements clandestins, même avec des organisations d'étudiants dans le monde entier, mais elle ne signe aucun document. Rien qu'en Europe, Erdogan a réussi à faire entrer ses cadres dans diverses structures politiques des États membres de l'UE. De jure, Erdogan reste en dehors de l'Europe, mais de facto, il y est déjà. Il ne contrôle pas l'ensemble du Vieux Continent - il serait exagéré de le penser. Mais il est certain qu'il contrôle un certain nombre de points sensibles en Europe. En termes de contrôle des flux migratoires, surtout après l'enracinement de la présence turque en Libye, la Turquie devient un pays clé pour l'UE. Après la querelle d'Emmanuel Macron avec Recep Erdogan, je pense qu'il ne sera jamais réélu président de la France.

Pourtant, Erdogan n'a pas la seule chose, mais peut-être la plus importante : son propre arsenal nucléaire.

 La Turquie possède des armes nucléaires !

Mais pas autant que la Russie.

Les armes nucléaires sont une arme de dissuasion stratégique. Vous y réfléchirez à deux fois avant de les utiliser. Et vous n'avez pas besoin de vous demander si vous en avez 10 ou 100 fois moins que votre ennemi. Quelques missiles suffisent pour infliger des dommages irréparables à votre ennemi ! Disons que la capacité nucléaire de la Chine est 5 à 6 fois inférieure à celle des États-Unis et de la Russie. Cela signifie-t-il que la Chine est plus faible que la Russie et les États-Unis en matière d'armes nucléaires ? En termes de dissuasion stratégique, non. C'est peut-être le cas en ce qui concerne l'utilisation en premier de l'arme nucléaire. Cependant, tout le monde comprend très bien qu'une première frappe nucléaire est extrêmement dangereuse et serait pratiquement impensable dans la situation actuelle. En effet, cela signifierait une vague de mort incontrôlable.
Quant à la Turquie, elle possède, je le répète, des armes nucléaires. Jusqu'à 45 armes nucléaires américaines sont déployées sur la base aérienne d'Incirlik. Il existe un accord spécial entre les États-Unis et certains pays de l'OTAN, dont la Turquie, selon lequel cette capacité nucléaire est contrôlée par deux parties, en l'occurrence Washington et Ankara. Il existait un scénario sous l'Union soviétique : si l'URSS portait un coup aux États-Unis et que ces derniers n'étaient pas en mesure de riposter, les alliés de l'alliance intervenaient et les armes qu'ils hébergeaient passaient entièrement entre leurs mains. Par ailleurs, les Turcs possèdent des chasseurs F-16 qui peuvent transporter des charges nucléaires à bord. La Turquie ne peut donc pas être considérée comme un pays exempt d'armes nucléaires.

Pour conclure notre discussion sur le nouvel ordre mondial, qui est encore dans le brouillard, pouvons-nous au moins essayer de nous pencher sur ce "demain" ?

Il existe des dizaines de théories sur le sujet, mais elles sont toutes fantasmagoriques. Le plus important à mes yeux : qu'est-ce qui définira le concept de puissance dans 10 ans ? Quels seront les critères ? Que le potentiel économique ne vienne pas en premier ici est sans équivoque. Mais qu'est-ce que ce sera ? L'intelligence artificielle sous des formes particulières ?  Une nouvelle idéologie et une nouvelle stratégie ?  Après tout, on assiste à une dégradation de toutes les anciennes versions et doctrines idéologiques, du communisme au libéralisme. Et lentement mais sûrement, l'ordre du jour est rempli par le problème le plus important : le sens de la vie. Quel sera le sens de la vie d'un être humain individuel et d'un groupe politique, jusqu'à l'État, dans la nouvelle période ? Cette question du sens de la vie émerge comme une sorte de titan noir (ou, au contraire, lumineux) des abîmes des petits problèmes mondains dans lesquels nous vivons tous. Quel est le sens de la vie aujourd'hui ? Personne n'a de réponse claire - ni Poutine, ni Biden, ni Xi Jinping.

Permettez-moi de conclure en disant que, pour moi, les hommes de culture se sont toujours classés en deux catégories : les romantiques et les futuristes. Les romantiques se tournent vers le passé, ils idéalisent les ruines, tandis que les futuristes se projettent pleinement dans l'avenir. Mais j'ai toujours été plus proche des romantiques parce que plus on plonge dans le passé, plus on ressent la chaleur du paradis perdu, et plus on s'éloigne dans le temps, plus il fait froid. Comme l'a écrit le poète Alexander Blok : "Oh, si seulement vous, les enfants, connaissiez la froideur et la morosité des jours à paraître". On sent qu'il y a dans l'avenir un gouffre froid de catastrophe mondiale…

C'est vrai, même si je ne suis pas un romantique et que je ne juge pas l'avenir uniquement sous des couleurs sombres. Le paradis n'est pas seulement derrière nous, il est toujours devant nous. Pour nous, musulmans, il y a de la lumière dans l'avenir parce qu'il y a toujours Dieu. Vous parlez ici d'un gouffre froid de catastrophe mondiale. Eh bien, il est possible que la biomasse grandiose qui habite aujourd'hui la Terre y fusionne tout simplement et forme une couche fertile sur laquelle émergera une nouvelle civilisation. Comme cela s'est probablement déjà produit à maintes reprises. Mais pour toute personne croyante, l'avenir est toujours beau, parce qu'il est inévitable.

Il y a donc un point chaud dans l'avenir ? Pas seulement une des désespérantes ténèbres cosmiques ?

Qu'est-ce que l'obscurité cosmique ? Il s'agit simplement d'une métaphore de la transcendance. La transcendance (tout ce qui se trouve de l'autre côté du monde matériel - ndlr) est la Lueur avec une majuscule. Lorsque vous vous heurtez à ce mur derrière lequel commence l'obscurité, vous fuyez avec terreur dans le cercle familier, où la lampe de bureau vacille, où vos proches sont tous autour de vous, et vous pensez : voici le mien, mon cher. Mais en fait, ce que vous considérez comme votre terre natale est fait des éléments de l'obscurité, et votre patrie est au-delà du mur. Allez donc courageusement vers l'avenir - même si vous pensez un instant ou deux que vous allez disparaître, vous serez toujours dans votre patrie. "Nous, communistes, sommes des optimistes historiques", disait Lénine. Et nous, les musulmans, nous sommes des fatalistes optimistes.

Biographie

Shamil Zagitovich Sultanov (né en 1952 à Andijan, République socialiste soviétique d'Ouzbékistan) est un philosophe, historien, essayiste, homme public et homme politique russe. Président du Centre d'études stratégiques Russie-Monde islamique. Membre régulier du Club d'Izborsk.
Diplômé en 1976 de l'Institut d'État des relations internationales de Moscou. Doctorat en histoire. Maîtrise de trois langues (français, arabe et anglais).
Après avoir obtenu son diplôme en 1976, il a travaillé à l'Institut d'État des relations internationales de Moscou (MGIMO), où il a également obtenu un doctorat en prise de décision en matière de politique étrangère. Il a étudié la résolution des conflits, la sécurité régionale et mondiale, la théorie de la prise de décision ainsi que la méthodologie et la technologie de l'analyse politique. Il a publié plus de 80 articles de recherche sur l'étude des conflits, les problèmes de développement régional, l'analyse des systèmes et la théorie générale des systèmes.
1989-1990, chef adjoint d'un département de l'Institut des relations économiques extérieures.
1991-1993 - Membre du comité de rédaction et correspondant spécial du journal Day, puis rédacteur en chef adjoint de l'hebdomadaire d'opposition Zavtra, créé sur la base du journal Day. Jusqu'en 1997, il a dirigé la rubrique "tabloïds" de Zavtra.
Il a publié des articles dans Elements, l'organe du programme de la Nouvelle Droite, ainsi que dans le journal Al-Qods.
En tant que philosophe, Sultanov s'est penché sur la relation entre la pensée mythologique, magique et dialectique. En étudiant le mysticisme, la magie et les philosophes dialectiques, de Platon à Hegel, il est parvenu à la conclusion qu'à un certain stade, les trois types de pensée se rejoignent sur des principes communs.
En 1995, il est devenu membre du conseil national de l'Union des peuples de Russie. Il est également membre du parti de la Renaissance islamique et fait partie du comité de rédaction du journal de ce parti, Al-Wahdat ("Unité").
Jusqu'en 2003, il a été directeur adjoint du Centre d'étude des problèmes économiques interethniques et interrégionaux, Yury Skokov. En 2003, M. Sultanov est élu à la Douma d'État (sur la liste de Rodina) et travaille au sein de la commission des affaires internationales de la Douma d'État. Il est membre du groupe analytique de l'association de politique étrangère Alexander Bessmertnykh.
En 2004 (avril), M. Sultanov a créé une association parlementaire inter-factions appelée "Russie - monde islamique : dialogue stratégique". En 2005, il a dirigé le Centre de recherche stratégique du même nom. Les deux institutions ont été créées dans le but de rapprocher la Russie du monde islamique.

Source: https://www.business-gazeta.ru/article/495028

Traduit du russe par Rouge et Blanc avec DeepL.

NDLR: Shamil Zagitovich Sultanov (1952-2022), philosophe et géopoliticien russe musulman, directeur du Centre des Études stratégiques "La Russie et le monde islamique", avait été aussi député de la Douma de 2003 à 2007. Le philosophe français Pierre Dortiguier l'a évoqué à plusieurs reprises dans ses entretiens, mais seulement pour souligner son origine tatare, sans jamais expliquer qui il était ni ce qu'il faisait, ce qui est très regrettable. Vous trouverez sur ce blog plusieurs articles de ce remarquable penseur, trop tôt disparu, traduits en français par nos soins.

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Shamil Sultanov était membre du Club Izborsk.

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Shamil Sultanov: La civilisation moderne capitaliste (extrait d'un entretien avec Business-Gazeta, 10 janvier 2021)

28 Avril 2023 , Rédigé par Rouge et Blanc Publié dans #Club d'Izborsk, #Inde, #Islam, #Philosophie, #Politique, #Religion, #Shamil Sultanov, #Russie

Shamil Sultanov (1952-2022)

Shamil Sultanov (1952-2022)

(...)

Mais revenons au point clé que je voulais aborder : l'humanité a perdu le sens, l'image de l'avenir, elle ne sait pas où elle va. Le mouvement de la civilisation bâtarde d'aujourd'hui est devenu inertiel par nature - comme un train qui a perdu ses freins et qui déraille. Et l'abîme est devant nous. Je ne peux absolument pas accepter que l'homme soit le roi de la nature et qu'il décide de tout en sa faveur : il ne décidera plus de rien.
- Vous renoncez donc à la vision anthropocentrique de l'univers dans laquelle les penseurs de la Renaissance plaçaient l'homme au centre ?
- L'homme n'est qu'une composante très insignifiante du macrocosme et du microcosme : de systèmes plus généraux et plus vastes - planétaire, solaire, galactique, cellulaire, atomique, subatomique, etc. Même si nous considérons l'homme dans le cadre d'une seule Terre, nous constatons qu'il n'est qu'une sorte de néoplasme à la surface de la planète, et le temps montrera s'il est bénin ou malin. Jusqu'à présent, nous devons constater que l'humanité se comporte de plus en plus comme une tumeur maligne.
Depuis quand l'homme est-il apparu sur Terre et quand les civilisations ont-elles commencé à émerger ? Dans les études culturelles actuelles, on estime que la civilisation actuelle, vieille de 8 à 10 000 ans au maximum, n'est pas la seule à avoir existé sur notre planète. Il s'agit d'une civilisation, mais nous ne savons rien de nos prédécesseurs - nous ne connaissons même pas nos véritables ancêtres.
La civilisation moderne, c'est avant tout le capitalisme, ce que l'on appelle le Nouvel Âge, dont les racines remontent à la Renaissance. Cette civilisation a entre 500 et 600 ans, voire un peu plus. Qu'est-ce qui caractérise cette période en premier lieu ? C'est que la civilisation est profondément matérialiste et en même temps eurocentrique. Cela apparaît clairement si nous la comparons aux civilisations chinoise, indienne ou même romaine. Là, il n'y avait pas de domination matérielle aussi écrasante. Le matériel, le physique, occupait de 15 à 30 % de la vie des gens. Si nous regardons l'ancienne civilisation égyptienne, l'élément matériel dans cette civilisation était d'une importance mineure. Et aujourd'hui ? Je pense que nous pouvons parler d'une domination matérielle de 80 à 90 %. Ce que l'on appelle la culture de masse, ou ce que l'on appelle parfois la quasi-culture, n'a aucun rapport avec les principes spirituels. Elle ne fait qu'interpréter le matériel à sa manière et cherche à augmenter ses profits.
En même temps, il y a un paradoxe. Si l'on se souvient de l'État soviétique, qui proclamait officiellement son matérialisme et son athéisme, il était né d'un élan spirituel vers la justice mondiale et le paradis terrestre. Mais en quelques décennies (bien avant l'effondrement de l'URSS), il a abouti au matérialisme le plus primitif et le plus prosaïque : un appartement pour chaque famille soviétique, une datcha sur six hectares, une voiture, etc.
Aujourd'hui, l'humanité est confrontée à une période de transition difficile, qui sera liée à une recherche intensive de nouveaux modèles et de nouvelles stratégies - non seulement politiques, mais aussi sociales, économiques, culturelles, informationnelles et autres. Nous disposons de 20 à 25 ans pour cela, mais j'ai le sentiment que ce délai n'est pas suffisant pour résoudre l'ensemble des problèmes existants.
- De quels problèmes parlez-vous, en dehors des défis environnementaux et économiques ?
- Regardez : l'un des principaux piliers de la civilisation capitaliste - l'État, avec ses autorités et son appareil - s'effondre sous nos yeux. Le modèle étatique est fortement discrédité sur le plan idéologique et spirituel. C'est ce qui se passe aux États-Unis et en France, par exemple. Dans le même temps, la proportion d'États en déliquescence dans l'œcoumène* augmente. Rien qu'en Afrique, on compte plus d'une douzaine d'États de ce type. En Amérique latine, nous pouvons facilement trouver des exemples similaires. En Eurasie également : la Syrie, l'Irak, l'Afghanistan sont tous des États en déliquescence. Dans ce cas, au lieu de s'identifier comme citoyen d'un État (ce qui est caractéristique de la civilisation capitaliste urbaine), on revient à une auto-identification clanique ou même tribale. On pourrait également parler d'une auto-identification criminelle. Tout cela était caractéristique des périodes les plus difficiles du Moyen-Âge et apparaît soudain chez nous au XXIe siècle. C'est pourquoi certains penseurs, à commencer par Nikolai Berdyaev, ne cessent de nous parler d'un retour au Moyen-Âge.
- Karl Marx nous avait promis le dépérissement des États, mais maintenant ce n'est plus du tout selon Marx...
- Oui, c'est en train de se produire sous une forme légèrement différente.
- En fait, la Russie présentait également de nombreux signes d'un État en déliquescence dans les années 1990.
- L'État russe, si vous le regardez du point de vue du modèle, est féodal par essence. Je ne vous donnerai qu'un exemple. Nous avons un roi conventionnel, Poutine. Nous avons des ducs, des princes et des comtes conditionnels - Alexey Miller, Igor Sechin, les frères Rotenberg et d'autres. Et il y a le gouvernement. Dans n'importe quel autre pays, ses dirigeants sont des personnages clés, mais dans le nôtre, ils ne le sont pas. Pratiquement personne ne peut dire un mot contre Igor Sechin. Parce que Sechin est beaucoup plus proche du chef de l'État. C'est comme dans la hiérarchie féodale : plus on est proche du corps du roi, plus on est influent. Les titres et les postes ne sont souvent pas aussi importants que cette proximité proverbiale. Plus bas dans l'échelle hiérarchique, on trouve les barons, les chevaliers... Et tout en bas, les serfs. Et si nous examinons la structure sociale de la Russie moderne, nous constatons que cette couche de la population constituée de serfs subsiste, bien que sous une forme différente, plus complexe et plus sophistiquée.

(...)

Permettez-moi d'ajouter une autre caractéristique de notre époque que j'ai personnellement constatée. L'homme moderne, me semble-t-il, n'a plus le choix entre la vérité et le mensonge. Il doit maintenant choisir entre plusieurs contre-vérités celle sur laquelle il est préférable et plus avantageux de s'appuyer. Il y a toutes sortes de contre-vérités qui opèrent dans le monde d'aujourd'hui au nom de la vérité : le libéralisme et le conservatisme, le postmodernisme et le réalisme, Trump et Biden, Trump et Poutine ou Poutine et Navalny, etc. Tous ont leurs résonances pour ressembler à quelque chose de réel et de vrai, mais tous sont, si l'on y regarde de plus près, le décor derrière lequel résonne le joueur de flûte. La vérité en tant que telle - sous la forme de justice sociale, de sentiment religieux sincère ou de quête morale (qui caractérisait les gens du XIXe siècle) - n'existe plus dans notre réalité. Elle est, comme on dit, disparue du marché et n'est pas demandée.

(...)

Source: Entretien avec Shamil Sultanov. Business-Gazeta(Russie), 10 janvier 2021

https://www.business-gazeta.ru/article/495028

Traduit du russe par Rouge et Blanc avec DeepL.

* NDT: L'écoumène - ou œkoumène \e.ku.mɛn\ - (nom masculin, du grec ancien : οἰκουμένη, oikouménē, « habité » est une notion géographique qui désigne l'ensemble des terres anthropisées (habitées ou exploitées par l'être humain). Elle s'oppose en ce sens à l'érème qui représente dès lors le reste de l'espace inhabité et non exploité. L'acception moderne du mot concerne généralement l'humanité entière, mais le mot a eu des sens plus limités, notamment dans la Grèce antique, où il renvoyait à la Terra cognita, la terre connue. Le terme est à nouveau utilisé aujourd'hui, particulièrement par le géographe Augustin Berque qui l'utilisait pour désigner la relation de l'humain à son milieu (relation sensible et concrète, symbolique et technique). Serge Valdinoci l'utilisa à son tour dans son exploration d'une théorie de l'habitat immanent de l'humain dans son univers sémantique (voir l'article europanalyse). Dans l'Église catholique médiévale, le terme écoumène est utilisé pour désigner le monde dans sa totalité. (source: Wikipedia: https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89coum%C3%A8ne)

NDLR: Shamil Zagitovich Sultanov (1952-2022), philosophe et géopoliticien russe musulman, directeur du Centre des Études stratégiques "La Russie et le monde islamique", avait été aussi député de la Douma de 2003 à 2007. Le philosophe français Pierre Dortiguier l'a évoqué à plusieurs reprises dans ses entretiens, mais seulement pour souligner son origine tatare, sans jamais expliquer qui il était ni ce qu'il faisait, ce qui est très regrettable. Vous trouverez sur ce blog plusieurs articles de ce remarquable penseur, trop tôt disparu, traduits en français par nos soins.

Tags: Shamil Sultanov, Club d'Izborsk.

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Shamil Sultanov: Aujourd'hui, les hommes politiques sont tous des acteurs !

28 Avril 2023 , Rédigé par Rouge et Blanc Publié dans #Shamil Sultanov, #Philosophie, #Politique, #Russie, #Club d'Izborsk (Russie), #Ukraine

(...)

- Et le caractère de masse lui-même est dû à quoi ? Je dirais que la civilisation actuelle, qui se dirige inévitablement vers sa fin, a créé une énorme strate d'"imitateurs". Il s'agit de personnes qui imitent totalement les stéréotypes, qui sont prêtes à être formées elles-mêmes. Ils sont formés par l'influence complexe des médias de masse, de la télévision, d'Internet, par l'éducation, la publicité, les rumeurs, l'appartenance à un certain clan, etc. On dit à l'homme moderne : "Tu dois suivre le style". Et cette année, la mode est à untel ou untel. Mais pourquoi ? Pourquoi un homme qui réussit devrait-il nécessairement porter telle marque de montre et pas une autre ? Pourquoi porterait-il un costume bleu et non le classique noir ? Après tout, personne ne se pose sérieusement ces questions. Cela signifie qu'il existe un puissant mécanisme d'imitation - et un mécanisme incontestable. Si l'on dit à une femme : "Suivez un certain style", toute femme normale devrait répondre : "Je suis une femme unique. Si je suis un style impersonnel, je me perdrai. Je dois trouver mon propre style". Mais peu de gens disent cela ! Et la proportion de personnes prêtes à imiter automatiquement et à accepter silencieusement les modèles de la société moderne atteint 70 à 80 % ! C'est le moins que l'on puisse dire ! Une masse critique a été atteinte. Grâce à la programmation neurolinguistique et aux techniques directes et indirectes de guerre psychologique, quelqu'un est en mesure d'influencer de grandes masses humaines. Il ne s'agit pas de personnes agissant rationnellement, mais de personnes prêtes à être formées. Ils sont formés - par rapport au style, à l'alimentation, aux valeurs de la vie, à la politique, aux autres personnes, aux groupes, aux sociétés, etc. Mais de la même manière, ils peuvent aussi être formés par rapport à la maladie. Comme l'a souligné l'un de nos universitaires, même avant l'apparition du coronavirus, les gens mouraient de diverses maladies infectieuses. Cela se passait en Russie et en Union soviétique, mais personne ne le soulignait. C'était peut-être une mauvaise chose, mais d'un autre côté, c'était une bonne chose, parce qu'il n'y avait pas d'agitation. Soudain, le monde entier a été saisi par une sorte d'hypocondrie généralisée. En l'espace de quelques mois, les gens ont accepté l'idée que certains groupes de pouvoir avaient le droit de les enfermer chez eux. Aujourd'hui sous la bannière du coronavirus, demain sous la bannière d'une autre "couronne".

Je tiens à souligner que ce n'est pas sans raison que la figure centrale de la culture de la civilisation moderne est l'acteur. Non pas un penseur, non pas un écrivain ou un scientifique capable d'une réflexion profonde, mais un acteur - une créature de manipulation et de contrôle, avec un psychisme mobile et imitatif. L'acteur idéal est une marionnette tirée par des ficelles dans le théâtre conditionnel de Karabas-Barabas. Si 70 à 80 % des gens d'aujourd'hui sont des imitateurs, leurs héros sont des acteurs, des comédiens, des humoristes, etc.
C'est l'une des grandes différences entre le modèle de civilisation actuel et d'autres civilisations. Par exemple, dans la civilisation romaine hellénistique de la Méditerranée, il y avait deux des professions les plus méprisées : le bourreau et l'acteur. Pourquoi un acteur ?  Il ne peut même pas s'exprimer, il ne peut que mal jouer les autres. "On ne te demandera pas pourquoi tu n'es pas devenu untel ou untel. On te demandera là-bas pourquoi tu n'es pas devenu toi-même."
Dans la civilisation actuelle, au contraire, tout est à l'envers. Et c'est pour cela qu'un showman devient président des États-Unis. Et le président de l'Ukraine  est un comédien. L'un des principaux hommes politiques italiens est également comédien (Giuseppe Piero Grillo, fondateur du mouvement de protestation "Cinq Étoiles" - ndlr). Mais encore une fois, si nous regardons de près les hommes politiques contemporains, nous constatons qu'ils sont tous des acteurs ! Et très souvent, ce sont de mauvais acteurs. Et si nous regardons les années 1950 et 1960, pas si éloignées de nous, nous verrons Konrad Adenauer, Charles de Gaulle ou, disons, Nikita Khrouchtchev. Quoi qu'on en pense, il s'agissait de personnalités, pas d'acteurs. Et l'homme politique actuel n'a pas le droit d'être une personnalité. Il joue tout le temps, mais comme il ne s'est jamais spécialisé dans le jeu d'acteur (sauf les politiciens-acteurs professionnels), il est condamné à perdre. Ainsi, objectivement, les populistes d'un jour, tels que Donald Trump, occupent le devant de la scène. Et une ou deux ou même mille personnes honnêtes et sincères ne sauveront ni n'arrangeront rien ici. Espérer que Danko sorte son cœur de sa poitrine et dirige la nation est naïf. Le système d'imitation totale est en place depuis des décennies. Le même modèle de production et de consommation de masse a plus de 80 ans. Et l'élément clé de ce que j'appelle la "civilisation de l'imitation" est la publicité totale. Très souvent, nous ne sommes même pas conscients de ce qu'est réellement la publicité dans ses effets dramatiques. Par exemple, on parlait de l'effet 25th Frame, puis on se taisait et on déclarait que c'était une fiction. Mais en fait, le 25e cadre fonctionnait déjà dans les années 1960. Et il n'est pas difficile d'imaginer à quel point ces technologies noires se sont intensifiées depuis. J'ai moi-même travaillé à la télévision et je sais comment ce genre de choses se produit - même avec notre approche plutôt amateur.

Les résultats des élections aux États-Unis montrent que l'Amérique n'est pas divisée en deux, mais en trois parties. Il y a les partisans des démocrates - une foule très diverse, composée de minorités ethniques, de gays, de lesbiennes, de transgenres et de personnes qui les justifient, de partisans du socialiste Bernie Sanders, etc. Il y a les conservateurs traditionnels - des gens ordinaires qui, dans les années 90, pendant la campagne électorale, ont dit à Buchanan : "Pat, qu'est-ce qui se passe de toute façon ? Nous sommes devenus un pays complètement différent ces derniers temps ! Où sont nos traditions, où est notre culture ?" Mais il y a un troisième groupe qui s'oppose à la fois à Joe Biden et à Donald Trump. On les trouve au sein du Parti républicain - ils ont toujours détesté le showman Trump et ses mensonges permanents. En signe de protestation, ces personnes ont voté pour Biden. À l'inverse, certains membres du parti démocrate n'aimaient pas Biden, ses grimaces et son habileté à former un entourage exclusivement composé de pédérastes, de personnes de couleur et d'autres personnes du même acabit. Ils ont donc voté pour Trump. À mon avis, l'opposition de ces trois groupes est le problème le plus dangereux pour la société américaine. Et je ne suis pas sûr que Biden puisse gérer une telle situation.

(...)

Source: Entretien avec Shamil Sultanov. Business-Gazeta(Russie), 10 janvier 2021

https://www.business-gazeta.ru/article/495028

Traduit du russe par Rouge et Blanc avec DeepL.

Shamil Zagitovich Sultanov (1952-2022), philosophe et géopoliticien russe musulman, directeur du Centre des Études stratégiques "La Russie et le monde islamique", avait été aussi député de la Douma de 2003 à 2007. Le philosophe français Pierre Dortiguier l'a évoqué à plusieurs reprises dans ses entretiens, mais seulement pour souligner son origine tatare, sans jamais expliquer qui il était ni ce qu'il faisait, ce qui est très regrettable. Vous trouverez sur ce blog plusieurs articles de ce remarquable penseur, trop tôt disparu, traduits en français par nos soins.

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Shamil Sultanov : L’histoire d’un héros

24 Avril 2023 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles Publié dans #Palestine, #Politique, #Religion, #Islam, #Shamil Sultanov, #Russie, #Israël

Shamil Sultanov (1952-2022)

Shamil Sultanov (1952-2022)

Shamil Sultanov : L’histoire d’un héros


Vivez comme si vous alliez vivre éternellement, et préparez-vous à la mort comme si vous alliez mourir demain.

Maxime musulmane


Nous nous sommes rencontrés à Beyrouth, gelés, assoupis par la chaleur. Il avait passé dix-huit ans dans une prison israélienne, dont cinq à l'isolement. Lorsqu'il a été arrêté pour la première fois, il avait vingt-cinq ans. L'année dernière, à la veille de sa libération, un colonel du Shabak, le contre-espionnage israélien, lui a dit : "Tu n'es pas censé être en Cisjordanie. Si tu restes, nous t’enfermerons à nouveau... Absolument, de toute façon..."

     Il a aujourd'hui quarante-trois ans. Nous avons parlé longtemps. Il a plutôt parlé et a semblé fixer sans passion la mer, qui s'assoupissait dans l'attente du froid de la nuit. Au début, il m'a semblé très fatigué. On peut ressentir une telle fatigue lorsque le vide grondant de ses propres os et la mollesse de sa propre chair l'emportent sur tout le reste. Mais en même temps, il n'avait pas l'air faible ou dévasté. Il semblait que quelque part, dans la tranquillité profonde et ininterrompue, une puissance personnelle et féroce continuait à bouillonner sans relâche.

     - La vie est toujours une résistance. Une résistance à l'entropie. Partout et toujours. La deuxième loi de la thermodynamique n'est pas une platitude. Toute occupation, qu'elle soit hitlérienne, américaine ou sioniste, est une entropie. En un sens, l'histoire de l'humanité est une mer étrange où des vagues cycliques constantes d'occupation se heurtent à des vagues de résistance. Tant que vous êtes en vie, vous résistez. Si vous arrêtez de vous battre, c'est que vous êtes déjà mort, ils ont juste oublié de vous enterrer pour une raison ou une autre. Je ne me souviens pas exactement, mais je pense que Bachelard écrivait sur la forme la plus impitoyable d'occupation - la civilisation. Et c'est de Gaulle qui a parlé d'"impérialisme culturel"...

     Pourquoi les occupants - Israël et les États-Unis - ne peuvent-ils pas nous briser ? Probablement parce que nous, Palestiniens, aimons la vie d'une manière particulière. « Vivez comme si vous alliez vivre éternellement, et préparez-vous à la mort comme si vous alliez mourir demain ». C'est ce que l'islam nous enseigne. La douceur inimitable d'une vie libre ne se révèle qu'à travers un esprit de résistance. Même si vous êtes en prison, en isolement. Pendant soixante ans, ils ont essayé de nous briser et ils n'y sont pas parvenus... Et ils n'y parviendront pas.

     Savez-vous pourquoi ? Nous tous, prisonniers de guerre, prisonniers des prisons de l'occupant, avons notre foi - l'islam -, notre sens, notre expérience d'une connexion constante avec le Tout-Puissant. Qui peut nous enlever cela ?

     Nous avons confiance dans la justesse de notre cause, de notre combat. Et cette confiance est génétique, elle est dans nos gènes. Nous avons appris la leçon la plus importante : les occupants ne comprennent que le langage de la force. C'est un axiome. Il en a été ainsi, il en est ainsi et il en sera ainsi. C'est pourquoi il faut opposer la force à la force. Il n'y a pas d'autres alternatives.

     Les milliers de prisonniers de guerre qui ont été jetés dans les prisons israéliennes connaissent, sentent et ressentent le respect et l'amour du peuple palestinien. C'est très important. Dites-moi ce que le peuple pense de ses héros emprisonnés par l'ennemi et je vous parlerai du sort de ces personnes. Les Juifs nous appellent des terroristes prisonniers de guerre. Pour notre peuple, nous sommes des prisonniers de guerre.

     Ce ne sont pas que des mots. Nos familles, nos enfants, nos parents sont entourés de nos soins quotidiens. Nous savons que même si nous sommes tués, le Mouvement de résistance islamique (Hamas) ne laissera pas nos proches livrés à eux-mêmes. L'autorité morale des prisonniers de guerre dans la société palestinienne est inébranlable.

     Dans chaque prison d'occupation, il existe un système clair d'auto-organisation dans la vie des prisonniers. Il s'agit d'une composante très importante de la résistance. Financièrement, tous les prisonniers de guerre sont égaux, qu'il s'agisse d'un membre du parlement, d'un homme d'affaires ou d'un villageois. Tout l'argent que nous recevons du testament est versé dans une caisse commune. Il n'y a pas de distinction sociale ou professionnelle. Mais il existe des programmes quotidiens de développement et d'amélioration clairement conçus et mis en œuvre pour tous les prisonniers de guerre palestiniens.

     Peu avant son arrestation, il était diplômé en charia de l'université islamique d'Hébron. Il était marié. Lorsqu'il a été arrêté, les proches de sa femme ont commencé à la persuader de renoncer à son mari. "Ne gâche pas ta vie : les Israéliens ne le laisseront plus sortir". Les occupants le soupçonnaient d'organiser des cellules de résistance armée.

     Mais elle n'a pas renoncé à son mari et l'a attendu pendant dix-huit ans.

     - L'occupant cherche avant tout à détruire, piétiner, liquider l'élite nationale du peuple occupé. Pour moi, l'élite, c'est "les meilleurs" - les meilleurs en termes de responsabilité irréprochable à l'égard du passé, du présent et de l'avenir de leur terre, ceux qui font le lien entre le passé et l'avenir, qui servent d'exemple à l'immense majorité, qui créent des modèles d'émulation quotidienne pour leur peuple. Pour les autorités d'occupation, il est donc important non pas de détruire physiquement l'élite nationale, mais de la discréditer, de la déformer, de la recoder. Et pour cela, il faut détruire le système traditionnel de sa reproduction. Et ce système, c'est avant tout le système éducatif. Au sens le plus large du terme.

     Mais ils n'ont pas réussi en Palestine. Et ils n'y parviendront jamais. Malgré la terreur sioniste rampante, notre peuple est l'un des dix plus éduqués au monde. Par exemple, en ce qui concerne le nombre d'étudiants par millier d'habitants, nous sommes plus performants que les Israéliens.

     L'éducation permanente est une composante essentielle de la résistance. Y compris dans les prisons de l'occupation. Parmi les prisonniers de guerre palestiniens figurent des ministres, des parlementaires, des journalistes, des imams et des employés municipaux. Nous avons fait en sorte que l'écrasante majorité de ceux qui se retrouvent dans les prisons israéliennes en ressortent encore plus convaincus d'être des résistants.

     Les Juifs veulent nous priver de notre élite nationale, mais paradoxalement, pour eux, c'est dans les prisons israéliennes que se fabrique et se reproduit une grande partie de l'élite nationale de la résistance.

     Lorsqu'un prisonnier de guerre palestinien se retrouve dans une prison, il rencontre d'abord une sorte de comité spécial composé des frères les plus expérimentés. Il y a une sorte d'entretien : il parle de son niveau d'éducation, de l'étendue et de la qualité de ses connaissances, de ce qu'il aimerait étudier, des domaines dans lesquels il pourrait être utile à ses camarades. Avec les membres du comité, il décide d'un programme d'éducation et d'auto-éducation en prison.

     La journée des prisonniers de guerre palestiniens commence avant l'aube. Certains font le zikr*, d'autres lisent le Coran. Ensuite, nous faisons tous ensemble le namaz** du matin. Ensuite, certains vont se coucher, tandis que d'autres lisent des livres et récitent des sourates du Coran par cœur.

     Mais à huit heures, tout le monde doit être debout. Les geôliers font l'appel dans les cellules. Ensuite, il y a environ une heure et demie d'entraînement physique. Ensuite, il y a les ablutions et à dix heures, il y a le petit déjeuner de la prison. Les prisonniers palestiniens dans les prisons israéliennes n'ont droit qu'à deux repas par jour.

     Après le repas, nous nettoyons tous ensemble la cellule. Ensuite, jusqu'à la zuhrah*** - le namaz de midi - les activités sont différenciées. Dans un coin, par exemple, il peut y avoir ce que l'on appelle une séance coranique, où le groupe lit ensemble des passages du Coran et discute collectivement de certaines dispositions coraniques. Dans d'autres coins de la cellule, il y a des réunions de cercles de droit international, ou des conférences sur des questions médicales générales ou sur la théorie générale des champs. Tout dépend des spécialistes prisonniers de guerre qui se trouvent actuellement dans la cellule.

     Après le zuhr, certains se reposent, tandis que d'autres travaillent et lisent leur programme individuel. Chaque membre du Hamas, s'il est admis dans une prison d'occupation, doit, seul ou avec l'aide de ses frères plus instruits, établir son programme personnel d'auto-éducation pour la durée de son emprisonnement.

     Après les prières de l'après-midi (asr), il y a un temps d'éducation obligatoire pour tous les prisonniers de cette cellule particulière. Il peut s'agir d'une conférence sur la situation dans la région ou sur les principaux objectifs de notre mouvement de libération. Il peut également s'agir d'une discussion générale. Sur le thème de l'auto-organisation sociale de la société sous différentes formes d'occupation, par exemple. Au moins trois opposants lisent à haute voix leurs thèses préalablement préparées, qui sont ensuite discutées collectivement de manière intransigeante.

     Après le quatrième namaz obligatoire (maghrib), il y a un dîner en prison, après quoi certains retournent à l'entraînement physique, d'autres lisent des journaux et des livres et regardent la télévision.

     C'est la routine normale de la vie en prison.

     Ce que nous, prisonniers de guerre palestiniens, avons obtenu pour notre auto-organisation n'est pas un cadeau juif, mais le résultat d'une longue lutte dans des conditions de détention difficiles. Au début, les occupants, qui nous traitaient comme du bétail, ne nous laissaient pas lire de journaux ou de livres, écouter la radio ou regarder la télévision, et encore moins nous éduquer et nous instruire. Ils sont allés jusqu'à nous interdire de nous réunir à deux ou à trois.

     Mais la volonté de résister n'a pas été entamée. Il y a eu des grèves, des grèves de la faim massives. Il y a eu des confrontations physiques directes avec l'ennemi, la répression la plus brutale de la part des sionistes contre nos frères dans les prisons et les camps, beaucoup ont été tués et torturés.

     Mais en fin de compte, nous avons obtenu le droit d'être éduqués, de lire des livres, des journaux et des magazines, d'être informés par la radio et la télévision. L'ennemi a été contraint de reconnaître notre droit légitime à nous organiser à l'intérieur du pays.

     En 1991, après sa première arrestation, un tribunal militaire israélien l'a condamné à cinq ans de prison pour "organisation de la résistance armée" en Cisjordanie. Si les autorités d'occupation avaient réussi à prouver que mon interlocuteur était l'un des organisateurs des "Brigades Izzetdin Kassam", il aurait immédiatement écopé de vingt à vingt-cinq ans de prison. Mais les Israéliens n'ont pas réussi à le prouver. Pourtant...

     - Si un Palestinien est le moindrement suspecté par les autorités d'occupation, et qu'il n'y a pas de raison formelle de le garder en prison, la détention dite administrative entre en jeu. Ce type d'emprisonnement préventif et illégitime était activement utilisé par les nazis, et les occupants sionistes s'en inspirent.

     Lorsque le représentant militaire compétent des autorités d'occupation prend, sans aucune base juridique, la décision extrajudiciaire de prolonger la durée de l'emprisonnement de six mois, il s'agit d'une détention administrative. De plus, il ne peut même pas justifier publiquement sa décision. Ainsi, après avoir purgé ma peine officielle de cinq ans, j'ai vu ma détention administrative prolongée cinq fois de suite. Au total, sur mes dix-huit ans de prison, j'ai purgé six ans "grâce" à la détention administrative.

     Après les huit premières années, ils auraient dû me libérer. J'ai été libre moins de cent jours. Puis une nouvelle arrestation, quatre ans de prison, puis une nouvelle série de détentions administratives.

     Mon interlocuteur a pris cinq ans sous l'accusation non prouvée d'avoir mis en place des cellules de résistance armée en Cisjordanie. Pendant tout ce temps, il a été mis à l'isolement ! Parce qu'il était craint. Même prisonnier de guerre, il est resté un guide…


Source: http://Source: https://pub.wikireading.ru/144254

Traduit du russe par P.O.C. avec Deepl.

* NDT: dhikr, (arabe : "se rappeler" ou "mentionner") également orthographié zikr, prière rituelle ou litanie pratiquée par les mystiques musulmans (soufis) dans le but de glorifier Dieu et d'atteindre la perfection spirituelle. Basée sur les injonctions du Qurʾānic "Rappelle-toi [udhkur] ton Seigneur quand tu oublies" (18:24) et "Ô vous qui croyez ! Rappelez-vous [udhkurū] Dieu avec beaucoup de mémoire" (33:41), le dhikr est essentiellement un "rappel" de Dieu par la répétition fréquente de ses noms. À l'origine simple récitation du Qurʾān et de divers écrits religieux chez les ascètes et les mystiques, le dhikr est progressivement devenu une formule (ex, lā ilāha illa ʾllāh, "il n'y a de dieu que Dieu" ; Allāhu akbar, "Dieu est le plus grand" ; al-ḥamdu līʾllāh, "louange à Dieu" ; astaghfiru ʾllāh, "je demande pardon à Dieu"), répétée à voix haute ou à voix basse, accompagnée d'une posture et d'une respiration prescrites. Au fur et à mesure que les confréries soufies (tariqas) se sont constituées, chacune a adopté un dhikr particulier, à réciter dans la solitude (par exemple, après chacune des cinq prières quotidiennes obligatoires) ou en communauté. Le dhikr, tout comme le fikr (méditation), est une méthode que les soufis peuvent utiliser dans leurs efforts pour atteindre l'unité avec Dieu. (Encyclopedia Britannica, traduit de l’anglais).

** NDT: Prière rituelle quotidienne des Musulmans.
*** NDTQuatrième prière quotidienne des Musulmans.

Shamil Zagitovich Sultanov (1952-2022), géopoliticien russe musulman, directeur du Centre des Études stratégiques "La Russie et le monde islamique", avait été aussi député de la Douma de 2003 à 2007. Le philosophe français Pierre Dortiguier l'a évoqué à plusieurs reprises dans ses entretiens, mais seulement pour souligner son origine tatare, sans jamais expliquer qui il était ni ce qu'il faisait, ce qui est très regrettable. Shamil Sultanov était également membre du Club Izborsk. Vous trouverez sur ce blog plusieurs articles de ce remarquable penseur, trop tôt disparu, traduits en français par nos soins. Tags: Shamil Sultanov, Club d'Izborsk.

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P.O.C.

 

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Shamil Sultanov: Chaque instant est une opportunité - Les origines des super-pouvoirs soufis

24 Avril 2023 , Rédigé par Sudarshan Publié dans #Islam, #Russie, #Shamil Sultanov, #Soufisme, #Spiritualité, #Religion, #Sciences, #Philosophie, #Club d'Izborsk (Russie)

Shamil Sultanov (1952-2022)

Shamil Sultanov (1952-2022)

L'empereur moghol Akbar danse avec les derviches tourneurs le soir de son mariage avec une princesse hindouiste. Capture d'écran du film Jodha Akbar.

L'empereur moghol Akbar danse avec les derviches tourneurs le soir de son mariage avec une princesse hindouiste. Capture d'écran du film Jodha Akbar.

Chaque instant est une opportunité
Les origines des super-pouvoirs soufis

Shamil Sultanov


Un soufi est quelqu'un qui, mourant de faim à cause de sa pauvreté, loue sincèrement le Tout-Puissant à ce moment-là pour sa générosité.

Des centaines de cas de miracles accomplis par des maîtres soufis ont été rapportés dans diverses sources musulmanes et non musulmanes. Il s'agit notamment de visions d'événements futurs, de guérisons instantanées de malades, de déplacements ultrarapides sur de grandes distances, de marche sur l'eau, de la capacité d'un Wali (saint) soufi à se trouver à plusieurs endroits à la fois, de la capacité à combler le fossé entre la vie et la mort, de l'apparition inattendue de nourriture pour des dizaines de personnes "sorties de nulle part", et de bien d'autres choses encore.

Cependant, dans le soufisme classique lui-même, de tels miracles (karamat) ne sont pas les bienvenus et ne sont pas considérés comme quelque chose de substantiel et d'important, car ils peuvent conduire à une exaltation de l'orgueil individuel, à un arrêt de la perfection personnelle et, en fin de compte, à une distraction tragique du Grand Œuvre.

Pour éveiller et développer les super-pouvoirs, l'aspirant à la voie soufie doit tout d'abord changer fondamentalement la perception de la réalité et parvenir à l'expérience et à la conscience de la réalité en tant que processus unique, total et englobant.

Selon le Coran, la réalité se compose de sept niveaux fondamentaux. "C'est Allah qui a créé les sept cieux et autant de terres. 65:12.

Les sept niveaux cachés sont également présents dans le livre saint de l'islam lui-même. Le prophète Mahomet a déclaré : "Le Coran a un sens extérieur et un sens intérieur. À son tour, ce sens interne a son propre sens interne. Cette profondeur a sa propre profondeur, à la manière des sphères célestes qui se transforment l'une en l'autre, et qui descendent jusqu'aux sept significations intérieures - les sept profondeurs les plus profondes".

Enfin, l'homme lui-même possède également sept niveaux intérieurs.

Des capacités spéciales commencent à s'éveiller et à mûrir lorsque les sept niveaux de la Réalité, du Texte sacré et de l'homme entrent en contact, se connectent, entrent dans une résonance spéciale, s'harmonisent et commencent à interagir, formant une qualité et une unité fondamentalement nouvelles au niveau personnel (tauhid en tant que processus de perfection sans fin). C'est pourquoi les cheikhs disent que la principale méthode du soufisme n'est pas d'étudier, mais de fusionner sa conscience avec d'autres consciences. Ainsi, la réalité devient inextricablement liée à la conscience.

...Arthur Eddington, l'éminent astrophysicien du vingtième siècle, qui n'était pas un soufi, a écrit dans les derniers jours de sa vie : "Face aux mystères de la nature, j'ai commencé à réaliser que l'univers ressemble plus à une pensée qu'à une chose"...

Karamat n'est possible que lorsque le maître soufi lui-même devient progressivement une composante nécessaire et intégrale de la Conscience-Réalité.

Le premier niveau fondamental de la réalité - la conscience. Je, tu, nous sommes entourés de choses, de processus et de phénomènes connus. Tout ce connu est défini et constamment défini par moi (ou vous, ou nous) comme la partie la plus importante de mon histoire personnelle ou collective, de "notre" culture, de notre propre tradition dans laquelle je me situe et nous nous situons. Du moins, c'est ce qui nous semble, c'est ce à quoi je suis habitué, c'est ma conviction presque sincère. Moi et nous tous avons besoin d'un certain rythme de répétition : ma vie devient vraiment personnelle, elle n'est mienne que dans une réalité connue, prévisible. Le monde qui m'entoure est prévisible, précisément parce que je sens, j'expérimente sa répétitivité rythmique et cyclique. Même si je ne le ressens pas, j'en suis persuadé. Et je me considère (comme vous) comme faisant partie de cette prévisibilité. Et nous en sommes tellement convaincus que nous n'y pensons pas. J'ai longtemps été habitué à voir tout ce qui m'entoure, y compris toutes mes réactions émotionnelles à mon environnement, comme des composantes obligatoires et intégrales de cet environnement familier.

Dans le soufisme, ce monde répétitif et prévisible est appelé le connu. Ce connu, comme d'autres composantes de la réalité-conscience, possède une hiérarchie complexe, multicouche et multidimensionnelle. Par exemple, vous vous trouvez à un certain endroit. Si l'on vous demande de nommer rapidement les objets de cette pièce qui constituent le Connu, vous nommerez peut-être trois douzaines de choses à la fois. Si l'on vous donne plus de temps, vous vous souviendrez de quelques centaines d'objets qui ne sont pas immédiatement apparents. Si vous disposez d'un temps illimité, vous énumérerez probablement près d'un millier d'objets connus qui vous entourent invisiblement ici.

Au sens figuré, le monde du connu, pour plus de comparaison, peut être imaginé comme une balle, comme un ballon de football. La grande majorité des gens vivent leur vie dans ce ballon et sont totalement inconscients du fait que la réalité ne s'arrête pas là.

Le deuxième niveau fondamental de la réalité - la conscience. Cette "balle" est entourée et imprégnée de toutes parts, y compris à l'intérieur, par le monde de l'Inconnu... Combien de fois dis-je ou dis-tu, sans réfléchir du tout "ceci est connu et cela est inconnu". Mais en fait, il s'avère presque toujours que le connu comprend une part d'inconnu, et dans l'inconnu, on trouve souvent quelque chose de déjà connu, ou du moins qui semble l'être.
Chaque particule élémentaire, chaque cellule, chaque galaxie, chaque être humain est à la fois une partie nécessaire du connu et une composante indispensable de l'inconnu.

Chaque seconde, votre corps en tant que système biologique reçoit un total d'environ 400 milliards de bits d'information (de l'extérieur et de l'intérieur). Mais à chaque seconde, vous ne percevez (au sens commun) que deux mille bits de ce volume. Deux mille bits d'information sont le connu, et quatre cent milliards (sans ces deux mille bits) sont l'inconnu.

Votre corps est composé d'environ quatre-vingt-dix mille milliards de cellules. Chacune d'entre elles possède sa propre conscience individuelle. Votre corps, tel que vous le voyez dans le miroir, est le connu. La monstrueuse multitude de consciences en interaction avec les cellules de votre corps (dont vous ne connaîtrez jamais les détails) est l'Inconnu.
Votre corps est constitué de 84 000 canaux énergétiques. Et ceci est une partie légitime de l'Inconnu. Et ce sont eux, ces milliers de canaux énergétiques, qui vous permettent de vivre à chaque seconde dans le monde de l'Inconnu.

Chaque chose, chaque événement, chaque processus est avant tout le résultat d'une influence et d'une interaction avec l'Inconnu, une réalité dont je ou nous ne sommes pas conscients, mais dont je, vous, nous faisons partie intégrante.

Les mondes des particules élémentaires, des atomes, des cellules, tous les océans de la Terre, notre planète entière, notre galaxie d'origine, la Voie lactée, d'autres galaxies sans fin, les "trous noirs", l'Univers, nous pouvons, dans notre vanité sans fondement, nous référer à l'Inconnu. En fait, ils sont tous, avant tout, l'Inconnu.

Si l'Inconnu est à l'échelle d'un ballon de football, l'Inconnu est une immense sphère, comparable, par exemple, à la planète Terre !

Si l'on part du principe que l'humanité existera indéfiniment, par exemple pendant des milliards d'années (ce qui est très discutable, bien sûr), alors l'Inconnu augmenterait probablement de manière significative. Mais même dans ce cas, le phénomène de l'Inconnu resterait majestueux, gracieux, écrasant...

Il en découle une conséquence très concrète, pratique et extrêmement importante pour le soufi perfectionné, qui est obligé de tirer sa connaissance avant tout de son expérience personnelle. Les choses, les objets, les événements, les phénomènes, les processus et tout ce qu'il rencontre dans la réalité physique sont liés au monde du Connu. Mais ils ont toujours, en même temps, un deuxième sens caché (et pas seulement), beaucoup plus essentiel, puisque tous ces objets et processus apparemment familiers sont nécessairement une composante intégrale de l'Inconnu.

Dans le soufisme, on ne peut parler de véritable connaissance que lorsque l'on découvre et révèle continuellement l'unité du caché et du révélé. Et cette connaissance, ou plutôt cette co-connaissance, n'est pas discrète en principe : elle est quelque chose de continu, comme si elle se déversait dans le maître.

...Et c'est là que le Sheikh peut poser des questions stimulantes et en même temps éducatives. Êtes-vous capable de sentir, d'expérimenter l'Incertain, l'Inconnu, qui vous entoure continuellement, doucement, imperceptiblement, mais totalement ? Pouvez-vous respirer en pleine conscience l'Inconnu tout autour de vous, même en vous ? Tenez-vous l'Inconnu en respect ? Pouvez-vous vraiment aimer l'Inconnu ? Pouvez-vous sentir comment l'Inconnu vous parle ?

Le troisième niveau fondamental de la conscience de la réalité. Le monde du Connu et le monde de l'Inconnu sont à leur tour entourés, imprégnés, saturés par le monde du Mystère (Sirc).

...Mais pourquoi ne pas simplement appeler le monde du Mystère une extension du monde de l'Inconnu ?

Le monde de l'Inconnu, en principe, avec de nombreuses hypothèses, peut au moins d'une certaine manière être représenté par des modèles mathématiques sophistiqués et ultra-complexes ou même par les structures de langages tridimensionnels, même si c'est parfois avec une grande difficulté, avec un énorme étirement. Mais le monde du Mystère requiert quelque chose de fondamentalement différent pour sa compréhension - des types complètement différents de sensations, de sentiments, de perceptions, d'autres formes de confiance en soi, d'expérience, de conscience et, surtout, une "foi" sincère comme moyen clé de comprendre les segments multidimensionnels du Sirr.

En outre, le monde de l'Inconnu est encore, à un degré plus ou moins élevé, perçu comme une sorte de réalité reproductible. C'est pourquoi, sans même nous en rendre compte, nous avons tendance à insister pour insérer ou "glisser" l'Inconnu, ou une partie de celui-ci, dans nos tableaux, images et modèles familiers, supposés vérifiables. Dans le monde du Mystère, chaque instant est unique, chaque instant est unique : il vient et disparaît immédiatement. Pour toujours.

Enfin, il n'y a pas de frontière claire entre les mondes du Connu et de l'Inconnu, car le Connu n'est qu'une partie insignifiante de la réalité de l'Inconnu. Mais il existe un passage étrange entre les mondes du Secret et de l'Inconnu, une "zone frontière" spéciale.

L'approche du monde de l'Inconnu exige avant tout une rupture radicale avec les dichotomies rigides des mondes du Connu et de l'Inconnu : "est - n'est pas", "objectif - subjectif", "matière - conscience", "haut - bas", "savoir - ne pas savoir" et d'autres encore.

Ce type de pensée, basé sur les principes de savoir-non-savoir, est-non, n'est fonctionnel que dans le monde du connu, qui adapte l'individu extérieur à sa conditionnalité rigide. Mais déjà dans le monde de l'Inconnu (par exemple dans le paradigme quantique), un individu qui adhère à une telle attitude peut rapidement devenir fou. Et seul un aspect particulier de la conscience de "l'homme intérieur" peut interagir avec la réalité du monde du Mystère. Et c'est précisément parce qu'en tant qu'"homme intérieur", je suis avant tout le Mystère, que j'occupe légitimement ma place dans ce grand monde du Mystère. Je suis le Mystère dans lequel sont enfermés une myriade d'autres mystères, chacun d'entre eux ayant également son propre "moi".

Alors que le connu ressemble à un ballon de football ordinaire dans ses dimensions, et que l'inconnu est un énorme ballon de la taille de la planète Terre, le monde du mystère est, dans ses dimensions, un ballon majestueux qui englobe, inclut notre galaxie de la Voie lactée tout entière.

Néanmoins, malgré toutes les différences cardinales et énormes possibles, la réalité du Mystère ne peut être imaginée comme complètement "différente" par rapport aux mondes du Connu et de l'Inconnu. Le Mystère n'est pas quelque part là-bas, à l'extérieur. Le monde du Mystère est toujours "ici et maintenant". Il imprègne, embrasse, pénètre continuellement le Connu et l'Inconnu, et influence constamment ces mondes, parce qu'il embrasse à la fois le Connu et l'Inconnu comme ses propres composantes, petites mais inséparables.

Par conséquent, chaque phénomène, chaque objet, chaque événement que vous rencontrez dans votre vie terrestre porte nécessairement en lui, outre les significations liées aux mondes du Connu et de l'Inconnu, une image unique, un reflet de l'essence du Sire, du Mystère.

Le quatrième niveau fondamental de la Conscience-Réalité est le monde du Caché (Hafi). Il est complètement différent, même par rapport au monde du Secret. En ce qui concerne Hafi, l'individu extérieur "tridimensionnel" ne peut absolument pas savoir, dire, penser ou même supposer quoi que ce soit, car cela n'est révélé d'une certaine manière qu'à son "homme intérieur, parfait" et seulement lorsque certaines conditions sont remplies.

Si le monde du Connu est conventionnellement comparable à un ballon de football ordinaire, le monde de l'Inconnu est à l'échelle de la planète Terre, le monde du Mystère est comparable à notre galaxie de la Voie lactée, le monde de Hafi est une sphère immense qui englobe tous ces univers et espaces réels et possibles, imprégnant, reliant, équilibrant, harmonisant, rendant unis le Connu, l'Inconnu et le Mystère.

Les cinquième, sixième et septième niveaux fondamentaux de la conscience-réalité ne sont jamais évoqués à haute voix par les cheikhs soufis.

Ces sept niveaux de base consistent, pour ainsi dire, en une hiérarchie complexe de mondes subordonnés qui sont, d'une certaine manière, holomorphes les uns des autres. Par exemple, la structure de l'atome est holomorphe au système solaire. En outre, ces niveaux fondamentaux sont eux-mêmes liés les uns aux autres d'une manière holographique. De telles analogies de perception deviennent plus claires, par exemple, si l'on se souvient de la figurativité raffinée de la géométrie fractale.

***
"Le connu n'est qu'une indication de l'inconnu. L'inconnu n'est que l'ombre du secret. Le Mystère n'est qu'un pont vers l'Inconnu. L'intime est...".

Event Tags : soufisme islam philosophie métaphysique mystère Coran

Source: Zavrta: https://zavtra.ru/blogs/kazhdoe_mgnovenie_est_vozmozhnost_

Shamil Zagitovich Sultanov (1952-2022), géopoliticien russe musulman, directeur du Centre des Études stratégiques "La Russie et le monde islamique", avait été aussi député de la Douma de 2003 à 2007. Le philosophe français Pierre Dortiguier l'a évoqué à plusieurs reprises dans ses entretiens, mais seulement pour souligner son origine tatare, sans jamais expliquer qui il était ni ce qu'il faisait, ce qui est très regrettable. Vous trouverez sur ce blog plusieurs articles de ce remarquable penseur, trop tôt disparu, traduits en français par nos soins. Tags: Shamil Sultanov, Club d'Izborsk.

https://pocombelles.over-blog.com/tag/club%20d%27izborsk%20%28russie%29/

Shamil Sultanov était membre du Club Izborsk.

P.O.C.

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De qui Poutine est-il surtout le Président ? réponses implicites de Shamil Sultanov et de Leonid Ivashov

23 Avril 2023 , Rédigé par Pierre-Olivier Combelles Publié dans #Economie, #Général Leonid Ivashov, #Shamil Sultanov, #Russie, #Société, #Club d'Izborsk (Russie), #Club d'Izborsk, #Pierre Dortiguier

Shamil Zagitovich Sultanov (1922-2022)

Shamil Zagitovich Sultanov (1922-2022)

(Extrait)

 

Au cours des quatre dernières années, la Fédération de Russie est devenue un leader mondial en matière d'inégalité socio-économique ou d'injustice sociale, dépassant avec assurance l'Amérique, l'Allemagne et la Chine. La Russie, dont l'économie est engluée dans la stagnation depuis plusieurs années et dont le niveau de vie de la majorité de la population n'a cessé de baisser, compte nettement plus de milliardaires en dollars en 2019 qu'en 2018. Pendant ce temps, 10 % des Russes contrôlent 83 % de la richesse nationale, tandis que les 1 % de super-riches contrôlent près de 60 % de tous les actifs matériels et financiers. Cela n'existe dans aucune des grandes économies du monde. Aux États-Unis, par exemple, les 1% de super-riches ne possèdent que 35% de la richesse nationale.

 

Et cette inégalité socio-économique ne fait que s'accroître. Par exemple, après l'effondrement de l'URSS, la part des revenus des 1% les plus élevés de la société russe est passée de moins de 6% de tous les revenus en 1989 à 22% en 1995. En outre, la part de ce même 1% dans la richesse totale de tous les ménages russes est passée de 22% en 1995 à 43% en 2015. Ce chiffre est plus élevé qu'aux États-Unis, en Chine, en France et au Royaume-Uni.

 

Le nombre de citoyens russes possédant une fortune d'un milliard de dollars ou plus figurant dans le classement mondial en 2020 était de 103 personnes. La richesse combinée des milliardaires russes a fortement augmenté dans les années 2000, couvrant environ 30 à 35 % de la richesse nationale. C'est nettement plus que dans les pays occidentaux : aux États-Unis, en Allemagne, en France, entre 2005 et 2015, ce chiffre se situait entre 5 et 15 %.

 

Les oligarques russes et autres nouveaux riches conservent près de 1 500 milliards de dollars à l’étranger.

 

La croissance de la richesse des couches supérieures de la bourgeoisie russe, de la bureaucratie, des généraux et des colonels des structures de pouvoir se produit invariablement sur fond d'appauvrissement permanent de la majorité de la nation russe.

 

(...)

 

Shamil Sultanov

 

 

Lisez ici, sur ce blog, la suite de l'important article de Shamil Sultanov, très documenté, suivi d'un article du général-colonel Leonid Ivashov qui vous montreront la situation RÉELLE en Russie, dont vous n'entendrez parler ni dans les médias russophobes ni dans les médias russophiles. Vous comprendrez ensuite de qui Vladimir Poutine est surtout le Président.

 

https://pocombelles.over-blog.com/2021/04/shamil-sultanov-la-russie-est-en-avance-sur-l-amerique-et-la-chine-dans-le-domaine-des-inegalites-socio-economiques-zavtra-16-mars-2

 

Shamil Zagitovich Sultanov (1952-2022), géopoliticien russe musulman, directeur du Centre des Études stratégiques "La Russie et le monde islamique", avait été aussi député de la Douma de 2003 à 2007. Le philosophe français Pierre Dortiguier l'a évoqué à plusieurs reprises dans ses entretiens, mais seulement pour souligner son origine tatare, sans jamais expliquer qui il était ni ce qu'il faisait, ce qui est très regrettable. Vous trouverez sur ce blog plusieurs articles de ce remarquable penseur, trop tôt disparu, traduits en français par nos soins.

Tags: Shamil Sultanov, Club d'Izborsk.

https://pocombelles.over-blog.com/tag/club%20d%27izborsk%20%28russie%29/

Shamil Sultanov était membre du Club Izborsk.

P.O.C.

 

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